Bonjour tout le monde !
14 novembre 2024Bienvenue dans WordPress. Ceci est votre premier article. Modifiez-le ou effacez-le, puis lancez-vous !
Bienvenue dans WordPress. Ceci est votre premier article. Modifiez-le ou effacez-le, puis lancez-vous !
Chapitre 11 par Lybertys
Shanenja aboya bruyamment lorsqu’il rencontra Cobalt, courant joyeusement vers lui. Cependant, je l’occultais de mon monde, toute mon attention étant prise par l’homme qui était en train de regarder Gabriel trahissant une familiarité déconcertante, comme s’il le connaissait parfaitement.
- Bonjour petit prince, ajouta le jeune homme avec un sourire.
C’est à ces derniers mots que Gabriel changea du tout au tout. Comme figé, il le regardait alors que celui-ci se contentait de l’admirer avec cette lueur dans le regard qui me déplaisait. Il connaissait Gabriel, et j’avais peur de comprendre de qui il s’agissait. Amusé par la réaction de Gabriel que je ne pouvais percevoir étant dos à moi, l’homme finit par dire à Gabriel :
- Et bien, tu ne dis plus bonjour ?
Alors que Gabriel portait toute son attention sur lui, un large sourire vint se dépeindre sur le visage de son vis-à-vis alors qu’il le regardait avec tendresse et amusement. Mon cœur s’emballa, créant une douleur plus sensible dans ma poitrine, j’avais compris… Si l’homme que j’avais aimé était mort, ce n’était pas le cas de l’ami d’enfance de Gabriel qui avait fini par le retrouver. Gabriel accourut vers lui pour se jeter dans ses bras tendus vers lui, en sanglotant bruyamment :
- Oh mon Dieu… C’est toi… C’est bien toi, sanglota-t-il sans parvenir à se contrôler. Tu m’as tellement manqué.
Le jeune homme se pencha vers l’oreille de Gabriel et lui murmura des paroles similaires. J’assistais impuissant à leur retrouvailles, coupant de ce que nous étions en train de vivre avec Gabriel. De plus, voir ainsi Gabriel dans les bras d’un autre était plus dur que je ne l’aurais cru. Ce Kay arrivait au mauvais moment, l’éloignant de moi plus qu’il n’était déjà le cas ; le pire étant que j’étais impuissant face à ma propre défaite. Je réalisais trop tard l’ampleur de mon geste et la portée de ce que je n’avais pas fait hier soir. J’aurais du le prendre dans mes bras, réagir…
Au lieu de cela, j’avais laissé Gabriel s’éloigner de moi comme je l’avais fait ces derniers jours, et il semblait que j’allais à mon tour en payer le prix. La main de Kay frottait le dos de Gabriel avec une familiarité déconcertante. Son regard croisa le mien un court instant, je ne pus que le fixer avec un air glacial.
Il lui murmura de nouveau quelque chose à l’oreille et Gabriel s’empressa de lui répondre entre deux sanglots.
Leur échange de murmures non audible dura un moment que je jugeais trop long, mais je n’avais pas mon mot à dire, surtout maintenant, après ce qui venait de se passer. Ce fut certainement le baiser dans les cheveux de Gabriel de la part de Kay qui me parut de trop et qui me fit craquer, déjà honteux de la réaction que je pourrais avoir lors de notre échange.
- Gabriel ? Tu ne nous présentes pas ? Demandais-je, sans parvenir à faire taire la pointe de reproche au milieu de laquelle ma jalousie transparaissait.
C’est à contrecœur que Gabriel sembla s’arracher à l’étreinte de Kay, et n’osant croiser mon regard, il entreprit de nous présenter bien que nous sachions tous deux parfaitement à qui j’avais affaire :
- Juha, je te présente Kay, mon ami d’enfance dont je t’ai déjà parlé… Kay, voici Juha, mon… Mon.. ?
- Son amant, répondis-je froidement à sa place sans parvenir à me contrôler.
La tension monta lourdement lorsque nous échangeâmes une poignée de main courtoise mais extrêmement froide. Mais cela ne m’empêcha pas de ressentir ce que j’avais trop peur de m’imaginer quelques instants auparavant. Kay débordait d’amour pour Gabriel. Un amour si pur qu’il me désarçonnait, m’envoyant en plein visage ce que Gabriel recherchait désespérément de ma part.
Même la jalousie qu’il éprouvait pour moi était masquée par ce sentiment. Les larmes faillirent me monter aux yeux, mais furent chassées par une colère froide envers ma personne, chose dans laquelle j’avais toujours excellé. Je ne pouvais pas rester, ou j’allais déraper pour de vrai, ou me mettre à pleurer bêtement pour montrer une fois de plus mon mauvais côté à Gabriel. J’étais déjà assez faible à ses yeux pour en rajouter.
- J’vous laisse, j’ai du travail. Ravi d’avoir fait ta connaissance, Kay…
- Moi de même, répondis-Kay, en saisissant la main que je lui tendais, alors que j’avais déjà redressé mes barrières mentales, loin de vouloir retenter l’expérience.
Leur tournant rapidement le dos, je pris le chemin de l’écurie, j’avais du travail en retard, et ce ne serait que dans l’activité physique que je ne penserais pas à tout cela. Cela n’empêcha pas à mes larmes de commencer à rouler sur mes joues, ayant l’impression de le perdre pour de bon en le laissant à cet homme qui l’aimait à ce point. Jamais je n’aurais cru qu’un tel sentiment soit possible.
J’avais retrouvé le même que Killian éprouvait pour moi. Je n’avais jamais cherché à sonder Gabriel à ce sujet, m’obligeant à dresser une barrière descente pour ne pas empiéter sur son âme, et c’était peut être pour cela que j’avais été sourd à sa détresse lorsqu’il m’avait déclaré ses sentiments. Trop concentré sur moi, je m’étais éloigné de lui à l’instant le plus important, oubliant que c’était une étape cruciale pour lui, et l’abandonnant au pire moment. Cela ne faisait que prouver une fois de plus ma faiblesse…
Entrant dans l’un des box qui méritait le plus d’être nettoyé après avoir pris le nécessaire pour le faire, j’entamais mon travail, ravalant mes larmes, me refusant à pleurer pour de bon. Royale for You était une jument assez calme, qui s’écarta pour me laisser la place. Refermant consciencieusement la porte derrière moi, je profitais du silence qui régnait dans l’écurie, les autres devant être devant être occupés ailleurs. Les mains tremblantes, je saisis la fourche et entamais mon travail.
Seulement, mon répits fut de courte durée, deux voix dont une que je ne connaissais que trop bien, me prévenait que Kay et Gabriel n’allaient pas tarder à arriver. Curieux malgré moi, continuant tout de même mon travail, je tendis l’oreille.
- Lorsque j’ai quitté l’orphelinat, le jour de mes dix-huit ans… Ou plutôt, devrais-je dire, quand ils m’ont mi à la porte, j’ai tenté désespérément de savoir où tu étais, mais… Tu semblais avoir… Disparu… Comme si tu n’avais jamais existé que dans mon imagination.
Gabriel fit une pause. J’étais en train d’assister aux retrouvailles de deux hommes qui s’étaient aimés par le passé. Assistant en retrait à cette scène, j’avais l’impression de perdre ma place. J’entendais la voix tremblante de Gabriel et la douleur qui émanait de lui. Mais j’y restais sourd. Depuis que j’avais touché la main de Kay, j’avais eu bien trop peur de sonder à mon tour Gabriel pour découvrir le même genre de sentiments. La voix brisée par l’émotion, Gabriel poursuivit :
- Je t’ai cherché pendant des jours entiers… Où étais-tu ? Pourquoi ne m’as-tu pas attendu ? Après ça, j’en suis arrivé à te haïr pendant un temps. Je pensais que tu m’avais abandonné toi aussi, que ce que nous avions vécu ensemble tout au long de ses années n’était rien pour toi… Et… Du jour au lendemain, tu réapparais dans ma vie sans que je ne sache ni pourquoi ni comment… Poursuivit-il alors que sa voix se brisait en un sanglot incontrôlable.
Je ne les voyais pas, mais j’étais presque sur que Kay était en train de le prendre dans ses bras en ce moment. D’une voix douce, il commença à parler, me donnant cette désagréable impression d’être maintenant l’ombre noire du tableau :
- J’ai pensé t’attendre, Petit Prince… Je ne vivais que pour le jour où l’on se retrouverait enfin… Mais, plus le temps passait plus je me disais que si nous en étions arrivé là, c’était par ma faute, que tu avais suffisamment souffert à cause de moi… Je voulais que tu puisses avoir une vie normale pour un enfant de ton âge, que tu sois heureux…
- Comment peux-tu dire cela ? Demanda alors Gabriel indigné. Je n’ai jamais été aussi heureux que lorsque tu étais près de moi… Tu étais mon seul ami, Kay… Le seul à avoir prit soin de moi et à m’avoir apporté l’amour que tout le monde me refusait…
- Arrêtes de m’idéaliser, Gabriel ! S’exclama-t-il à son tour. Aurais-tu oublié ce qu’ils t’ont fait subir ? Trois jours… Trois putains de jour ils t’ont laissé enfermer dans cette cave…
Mon cœur se serra, sa douleur et sa souffrance passée, je ne la connaissais que trop bien. C’était celle-là même qui m’avait cruellement déstabilisé et bouleversé lors de notre première rencontre.
En les écoutant, j’en apprenais d’avantage sur le passé de Gabriel, passé qu’aucun homme n’aurait du vivre…
- Comment veux-tu que je l’oubli ? S’emporta Gabriel, blessé. J’en fais constamment des cauchemars… Tu ignores tout de cet enfer que j’ai vécu après ton départ, ajouta-t-il bien plus bas.
- Tu n’avais pas à subir les conséquences de mes actes, reprit Kay, lui aussi, plus calmement.
- J’étais tout aussi coupable que toi, répondit Gabriel.
- Pardonne-moi, souffla alors Kay.
J’avais l’impression d’être le spectateur d’un film qui n’acceptait pas ma présence en tant qu’acteur. J’avais même cessé totalement mon travail pour écouter. Après un silence, Kay ajouta sur un ton plus léger :
- A peine nous nous retrouvons que déjà nous nous crions dessus.
- Comme au bon vieux temps, répondit Gabriel.
Comment aurait réagit Gabriel si Kilian était encore vivant et m’avait retrouvé après toute ses années. Aurait-il sentit cette jalousie le ronger à chaque parole échangé ? Mais surtout, comment aurais-je réagis à sa place… Après un instant de silence, Gabriel repris la parole, me coupant dans mes réflexions :
- Mais ça ne répond pas à ma question.
- Je t’ai vu par hasard à la télévision…Finit par répondre Kay. Je ne savais pas que tu aimais les chevaux.
Ils étaient maintenant assez proches de mon box, mais s’arrêtèrent devant celui d’Orphée.
- Alors c’est lui le fameux Orphée ? Demanda Kay.
Rongeant mon mal en patience, je restais parfaitement immobile, comme si je ne voulais pas trahir ma présence. Après un temps qui me parut interminable, j’entendis Kay :
- Tout à l’heure, tu disais que ce n’étais pas à l’orphelinat qu’ils t’avaient nommé ainsi…
Kay ne termina pas sa phrase. Il en savait plus sur Gabriel et celui-ci se dévoilait à lui comme dans un livre ouvert, rien qui n’arrangeait ma jalousie et ma peine.
- Tu sais mieux que quiconque la manière dont ils m’appelaient là-bas, me hélant ou m’appelant d’une façon dont je n’oserais même pas appeler mon chien… Ca a empiré après que tu sois parti et pas seulement de la part des adultes… Lorsque je suis arrivé ici, naturellement, Philippe m’a demandé mon prénom. Evidement, je suis resté muet, n’en ayant jamais reçu ou si c’est le cas, ne l’ayant jamais entendu… Je te laisse imaginer l’humiliation que j’ai pu ressentir à ce moment… Mais Philippe est vraiment quelqu’un d’extraordinaire… Après m’avoir longuement détaillé, il a décrété qu’il m’appellerait Gabriel parce qu’il trouvait, je cite, “que je ressemblais à un ange avec mes longs cheveux blond platine et mes yeux bleus”…
Après une pause il poursuivit :
- Sans même me connaître, il m’a tout donné… Il m’a offert un nom, ainsi qu’un endroit ou vivre et un travail, le tout en moins d’une heure… Je ne le remercierais jamais assez pour tout ce qu’il a fait pour moi… Je lui dois ce que je suis…
- Tu as l’air de beaucoup tenir à lui, fit remarqué Kay. Et vue la façon dont il parle de toi, c’est réciproque…
- C’est vrai que je tiens à lui, c’est l’un des êtres le plus cher à mon cœur… D’une certaine manière, je vois en lui l’image paternelle que je n’ai jamais eu…
- Oui, je comprends, murmura Kay.
Un nouveau silence s’installa et un profond malaise me prit. Si je connaissais la douleur de Gabriel, si je la ressentais comme si elle était mienne, la partageant à son insu, je n’avais aucune idée précise de tout ce qui l’avait causée.
Pire encore, je m’étais coupé de lui ces derniers jours, me concentrant sur moi, et ignorant ce qu’il avait finit par me dévoiler hier soir en pleine détresse. J’avais eus tellement peur d’aimer quelqu’un à nouveau, et de le clamer haut et fort que j’étais resté sourd et aveugle, me cachant la vérité, et laissant Gabriel à ses tourments.
- Tu veux boire ou manger quelque chose ?
- Je veux bien un verre d’eau, s’il te plait, Gabriel, répondit-il en insistant sur son prénom.
C’est en sortant de l’écurie qu’il m’aperçut, réalisant alors que j’avais été témoin d’une scène qu’il n’aurait souhaité me faire voir. Nos regards se croisèrent un bref instant, avant que Gabriel baisse les yeux honteux. Je venais d’en apprendre sur lui plus qu’il n’avait jamais voulu me réveiller. Le regrettait-il ? Les yeux rivés sur le sol, il finit par poursuivre sa route, suivit de près par Kay qui me toisa d’un regard qui me déplaisait. Ils quittèrent l’écurie sans un bruit, me laissant seul. Déjà maintenant, je me sentais mis à l’écart, alors que je savais en être pour une grande partie responsable…
Mes jambes devinrent soudain très faibles. Sentant que je ne tiendrais plus très longtemps debout affaibli par ses derniers jours, je sortis du box avec les outils, et les laissaient devant, après avoir refermé la porte. Sans faire un pas de plus, je m’adossais contre le mur et m’assis sur la botte de paille. J’étais en train de le perdre… J’étais en train de perdre le seul homme qui comptait pour moi… Fermant les yeux et callant la tête contre le mur, je pris une profonde inspiration pour tenter de me calmer et surtout de ne pas me mettre à pleurer.
- Juha? Qu’est ce qui t’arrive ?
Je sursautais violemment, n’ayant pas du tout entendu Dorian m’approcher et encore moins s’arrêter à quelques mètres de moi. Ouvrant les yeux, je tombais nez à nez sur son visage emplie d’inquiétude réelle à mon égard, le même visage qu’il avait eut lors de notre première rencontre.
- Rien… répondis-je simplement las et fatigué.
S’agenouillant pour être à ma hauteur, il posa ses deux mains sur ses genoux pour se maintenir avant de me dire :
- Je ne t’ai pas vu ces derniers jours, tu étais malade ?
Troublé par ce soudain regain d’intérêt à mon égard, je lui demandais suspicieux :
- Depuis quand tu t’inquiètes pour moi Dorian ?
Baissant les yeux, Dorian répondit après un temps :
- Je tiens à m’excuser pour ce qui j’ai fait ces derniers mois Juha. Je n’ai jamais porté Gabriel dans mon cœur, et quand je t’ai vu aller vers lui, j’ai été… J’ai bêtement été…
- Jaloux ? Poursuivis-je à sa place, comprenant son sentiment plus que tout maintenant.
- Oui… Me confessa Dorian. Aujourd’hui je le regrette sincèrement. Nous aurions pu devenir de bons amis.
Ayant plus que toute peur de la solitude qui allait me peser un peu plus que d’habitude et surtout en ces circonstances, je répliquais :
- Il n’est peut être pas trop tard…
Dorian redressa le visage, m’offrant un sourire qui m’apaisa. J’y répondis faiblement, mais le cœur n’y était pas. Nous nous fixâmes un moment, je pouvais ressentir les sentiments de Dorian et ils attestaient la vérité de ses propos. Puis, semblant se rappeler que nous avions du travail, je me redressais alors que Dorian me demandait :
- Tu as beaucoup de box à faire, et je n’ai rien à faire pour le moment, que dis-tu d’un coup de main ?
- Ce n’est pas de refus, répondis-je en le remerciant.
C’est ainsi que nous abattîmes tous deux une quantité monstre de travail. Ayant retrouvé un peu de force à son contact, je concentrais mon énergie dans le travail, ne voulant penser à ce que m’avait dit Gabriel ce matin, à ce que j’avais appris et surtout à Kay qui était avec lui.
Nous trouvâmes largement de quoi nous occuper ensuite dans le manège couvert, devant remettre en état une partie du bois abimé et qui laissait passer le vent glacé. Le manque de nourriture de ces derniers jours se fit sentir, et je luttais contre la fatigue. Lorsque vers midi et demi passé Dorian me vit vaciller en descendant de l’échelle, Dorian déclara :
- Que dis-tu d’aller manger un bout avec moi, tu sembles en avoir vraiment besoin.
- Oui… Ca ne serait pas refus soufflais-je. Je vais voir si Shanenja va bien et je te rejoins.
- D’accord Juha ! Répondit Dorian. Je suis content de travailler de nouveau avec toi, avoua-t-il avant de me tourner le dos et d’aller au réfectoire.
Une fois dans la cour, Shanenja se jeta sur moi, me poussant déjà avec la force de sa vitalité. Lui offrant de nombreuses caresses et jouant un moment avec lui, je finis par le laisser et pris la direction du réfectoire. Après un détour pour aller me laver les mains, je me rendis dans le réfectoire déjà plein de monde. Je vis aussitôt Gabriel, qui m’invita à aller les rejoindre. Ayant peur de ma réaction face à Kay, mais ne voulant surtout pas le montrer, je me contentais de ne pas y répondre, et j’allais m’asseoir seul à une table. Dorian n’était pas encore là, mais il n’allait pas tarder à me rejoindre. S’il n’avait pas été là, j’aurais de toute façon préféré manger seul. Je préférais éviter de rendre leur repas désagréable, et les laisser à leurs retrouvailles où je n’avais plus ma place.
Dorian ne tarda pas à venir s’asseoir en face de moi avec un sourire. S’il vit ma jalousie, il ne fit aucun commentaire, n’observant que d’un bref regard Kay et Gabriel, comprenant peut être un peu mieux mon malaise. Ce fut certainement pour cela qu’il tenta de me faire rire par tous les moyens, et il y parvint je ne savais trop comment. J’étais à dix-mille lieux de penser pouvoir rire aujourd’hui. Rien de mauvais n’émanait de lui, et loin de mes problèmes, je prenais un bol d’air frais afin d’acquérir une certaine distance face à ces évènements.
Je ne pus pas manquer Gabriel qui sortait précipitamment du réfectoire et je savais que j’étais responsable.
- Il y a de l’eau dans le gaz ? Me demanda soudain Dorian.
Face à la mine fermée laissant transparaître uniquement un voile de tristesse sur mon regard, il n’attendit pas de réponse de ma part. Qu’étions-nous en train de faire ? Croyait-il vraiment que j’aurais pu être capable de m’asseoir à leur côté et de manger comme si de rien était. Après la dispute que nous avions eue ce matin, il était nécessaire que nous nous retrouvions uniquement tous les deux pour parler, mais cela était impossible pour le moment et je me demandais quand ce Kay partirait enfin. Dans d’autres circonstances, j’aurais adoré le rencontrer, mais maintenant j’avais trop honte de ma réaction. J’avais peur que Gabriel ne m’échappe, peur qu’il réalise que l’amour de Kay était là et qu’il le compare au mien, me trouvant des épaules trop peu fortes pour l’accompagner tout au long de notre vie.
Kay partit le rejoindre après avoir rangé leur deux plateaux, j’en était pour ma part totalement incapable. Plongé dans mon mutisme, Dorian tenta de me faire réagir :
- Hé, Juha, qu’est ce qui se passe ?
Les larmes commençaient à me brûler les yeux et pourtant je le contenais. Je ne méritais pas de pleurer, j’étais loin d’en avoir le droit… Tout était en train de filer entre mes doigts comme un liquide insaisissable.
- Juha ! Déclara un peu plus fort Dorian.
Je sursautais presque, revenant à moi. Mal à l’aise face à mon état, Dorian déclara :
- Dépêche-toi de finir de manger.
Je jetais un coup d’œil sur son assiette, si la sienne était vide, la mienne ne l’était qu’à moitié.
- Nous avons encore pas mal de chose à faire. La carrière à gelée, tu m’aideras à casser un peu la glace et à enlever le plus gros de la neige afin que son état ne s’empire pas. Heureusement que nous avons un manège. Ensuite tu donneras du foin aux chevaux et tu iras graisser les selles pendant que j’irais acheter ce que Philippe m’a demandé.
J’acquiesçais simplement, n’ayant pas la tête à refuser des ordres qu’il n’avait pas à me donner. Je n’étais de toute façon pas en état de prendre des initiatives et ce long programme qui allait me prendre jusqu’à tard était finalement loin de me déranger. Cela m’occuperait l’esprit et m’éviterait de ressasser ce qui c’était passé ces derniers jours. Je sentis la main de Dorian poser sur mon épaule. Il était inquiet pour moi, même s’il ne le montrait pas. Sa jalousie vis-à-vis de Gabriel restait tel un vestige, mais était masqué par le remord de ses derniers agissements.
- A tout de suite dans la carrière, finit par dire Dorian.
Je répondis par un faible hochement de la tête et un sourire. Ayant perdu tout appétit, je mis tout de même du temps à venir à bout de la fin de mon assiette. Une fois celle-ci terminée, je me levais et après avoir enfilé mon manteau, je partis en direction de la carrière.
Mon cœur se serra vivement à la vue de Gabriel et de Kay marchant côte à côte en direction de la forêt. La force qui habitait normalement Gabriel et qui l’illuminait semblait s’être brutalement flétrie. Il était dans un état pire que le premier jour où je l’avais vu. Jamais je n’aurais dû me laisser aller à tenter de l’aider. Je n’avais finalement fait que l’enfoncer d’avantage, le rendant encore plus vulnérable et abimé qu’il ne l’était avant ma rencontre.
Etait-ce cela mon destin, blesser ceux qui devenait trop proche de moi. Mon don d’empathie prenait ce goût amer de malédiction, de barrage vers les autres. Finalement, trop en savoir sur leurs pensées les plus profondes m’éloignait d’eux. La mort de Killian avaient était la seule relation exclusive ou je m’étais laissé aller, et qui l’avait mené irrémédiablement vers la plus terrible des fins. Ne fallait-il pas que je m’éloigne de Gabriel et que je le laisse avec ce Kay qui saurait lui offrir bien plus que moi et surtout bien plus rapidement que j’en étais capable…
J’avais sondé son amour et j’avais était effrayé par cette pureté. Sans ma venue ici, un couple heureux aurait pu naître. Je n’étais plus qu’une ombre au tableau, un empêcheur de tourner en rond… Il fallait un homme plus sain d’esprit pour Gabriel, une épaule plus forte, quelqu’un capable d’aller de l’avant, et c’est en Kay qu’il pourrait trouver cela…Cependant, l’unique idée de renoncer à Gabriel, de retrouver ma vie solitaire et de me refuser notre amour m’était insurmontable. J’avais goûté à quelque chose de nouveau avec Gabriel, une chose si précieuse que c’était elle qui me poussait à poursuivre mon chemin chaque jour. J’étais très loin d’être prêt à l’abandonner.
Ce fut Shanenja me mordillant les doigts qui me sorti de mes sombres pensées. Je me rendis compte que j’étais là, immobile, planté au milieu de la cours à fixer la forêt où Kay et Gabriel avaient disparut depuis longtemps. Je m’abaissais vers cet animal plein de vie qui déjà attendait sur le dos des caresses sur son ventre. Je lui en fit sans hésiter, avant de me mettre en marche, suivant Shanenja qui s’était déjà élancé devant moi en courant. Ses gestes étaient beaucoup moins pataud, il grandissait à vue d’œil.
Shanenja resta avec Dorian et moi, s’amusant avec tout ce qui pouvait faire office de jouet, puis finissant par se coucher sous le petit abri en bois qui servait à regarder les reprises. Nous finîmes assez tard, la nuit commençait à tomber. La glace était profonde, et il nous fallut un temps interminable. Je ne sentais presque plus mes bras, et Dorian ne semblait pas dans un meilleur état que moi. Il me laissa ranger les outils pendant qu’il allait faire ses courses avant que tout ne ferme. Une fois cela fait, accompagné de Shanenja qui alla se coucher dans un tas de paille dans la sellerie, je distribuais le foin aux pensionnaires, profitant de mes muscles encore chauds, avant que les courbatures ne les saisissent, le froid n’aidant pas. Ce fut évidement à ce moment là que Kay et Gabriel entrèrent dans l’écurie. Gabriel passa devant moi sans un regard, comme je m’y attendais. Malgré moi, je fus obligé de suivre leur conversation.
- Tu as quelques par où dormir, demanda soudain Gabriel.
- Je prendrais une chambre d’hôtel près d’ici.
Je me tendis, à peu près sûr de la proposition de Gabriel qui suivrait cette réponse. Si une chose était sur, c’était que je n’avais aucune envie que nous nous retrouvions tous les trois dans ce petit appartement. Evidement, Gabriel ne perdit pas de temps pour s’exclamer :
- Ca va pas non ! Viens à la maison. Ce n’est pas grand mais ce sera sûrement mieux que l’hôtel. Et puis c’est hors de question que tu payes la peau du cul une chambre d’hôtel miteuse.
Kay croisa mon regard qui en disait long sur ce que je pensais de cette invitation et que je ne parvenais pas à cacher.
- Je ne voudrais pas causer de problème entre vous…
- Il n’y a aucun problème, répondit Gabriel, un peu trop hâtivement pour être crédible.
Le fait même qu’il ne me demande pas mon avis me mis hors de moi. Certes je n’aurais pas refusé et cet appartement était aussi bien à Gabriel qu’à moi. Mais justement, j’avais le droit d’être concerté. Surtout après ce qu’il se passait entre nous, le fait que Kay vienne chez nous ne ferait qu’envenimer la situation. Evitant mon regard, Gabriel reprit calmement après un temps :
- Je vais voir Philippe, j’ai deux trois choses à régler avec lui, je reviens vite…
- D’accord je t’attends.
Gabriel adressa un sourire de remerciement à Kay qui me hérissa les poils et nous quitta. Il ne m’en fallut pas plus pour me débarrasser des deux fourches qui restaient à donner et sans un mot pour Kay qui resta planté dans l’écurie, je me rendis dans la sellerie pour finir ce qui me restait à faire. Je pris rageusement tous les filets en cuir et les posais sur la table avant d’attraper une selle. Il fallait que je me calme, c’était de la jalousie qui était en train de ronger.
Après avoir pris le gros pot de graisse, je m’assis sur le banc et entamais mon travail. Shanenja ne tarda pas à venir se coucher à mes pieds, s’allongeant sans aucun gène sur ceux-ci. Même nerveux, je m’appliquais à réaliser ma tache. J’avais encore à faire toute les selles et à ce rythme là j’en avais pour toute la nuit. C’est à ce moment là que Gabriel entra dans l’écurie, s’approchant de moi, je l’avais sentit avant qu’il n’arrive. Je me contins, attendant qu’il parle de lui-même, peu près à coopérer.
- Je… Nous n’allons pas tarder à rentrer… Tu viens ?
Je ne pus me retenir de répondre sèchement, sans le moindre regard pour lui, contenant tout de même ma colère :
- Je suis occupé, tu ne vois pas ? J’ai du travail, alors rentre avec ton Kay, je rentrerais à pied avec Shanenja lorsque j’aurais terminé.
Je vis tout de même Gabriel serrer les poings avant de murmurer un « va te faire foutre » rageur. Me laissant seul, je jetais mon pinceau dans le pot, mes mains tremblaient de ce mélange de sentiments que je ne parvenais à dissocier. Je n’étais plus très loin des larmes, mais j’entendis une voix me souffler :
- Et si tu me racontais Juha ce qui est en train de se passer, même si je commence à comprendre.
Je redressais la tête pour croiser le regard de Dorian, certainement entré par l’autre porte. Il ne faisait aucun doute sur le fait qu’il ait assisté à notre court échange. Il tenait deux tasses de café brulants.
- Laisse-ça pour le moment. Tu mérites une pause. A deux on finira plus vite. Bois déjà ça.
Il me tendit une des deux tasses, puis poussant tout le matériel à graisser, il s’assit en face de moi.
- Je ne sais pas ce qui est en train de se passer entre vous deux, mais ça m’a tout l’air d’un beau paquet de nœuds. J’ai aussi l’impression que Kay n’y est finalement pas pour grand-chose, mais qu’il n’est qu’une couche de plus à vos problèmes…
Je bus une gorgée de café, profitant de sa chaleur se répandant en moi.
- Peut être que je ne suis pas fait pour les relations durables, soupirais-je amèrement.
- Tu es donné pour bien d’autres choses me fit Dorian avec un petit sourire pervers en coin.
Je ne pus m’empêcher de sourire légèrement face à son sous entendu douteux, sachant qu’il ne cherchait qu’à dédramatiser la situation. Inspirant légèrement, je décidais de me confier un peu à lui, ayant besoin de me soulager.
- Je ne peux pas lui donner ce qu’il attend de moi, et je ne sais même pas recevoir ce qu’il me donne …
Perplexe, Dorian me demanda :
- Tu peux m’expliquer un peu plus en détail ?
- Je… Tentais-je, lamentablement.
Mais une boule à la gorge monta en moi, et je fus incapable de lui expliquer.
- Juha ? S’inquiéta Dorian.
- Je suis complètement perdu, lâchais-je, commençant à trembler.
J’étais dans un tel état, que même les larmes ne semblaient pas appropriées à la situation. Se rendant compte de ma détresse, Dorian se leva presque aussitôt, et venant à côté de moi, il me hissa pour me prendre simplement dans ses bras. Dans cette simple étreinte, un flot de réconfort sincère m’envahie. J’en avais réellement besoin, le serrant simplement en répondant à son étreinte. Pas de larmes, juste un moment dans ses bras pour profiter un instant de l’épaule qu’il m’offrait. J’avais l’impression de puiser mes forces en lui, de me sentir un peu mieux, alors que je n’y croyais plus.
Dorian ne s’éloigna de moi que lorsqu’il m’en sentait capable. Un bref regard fut échangé et il me sourit tendrement. M’asseyant de nouveau, je reposais mes mains sur le cuir pour poursuivre mon travail, honteux de m’être montrer ainsi face à lui. Une main ferme se posa sur mon épaule et Dorian déclara :
- On fera tout ça demain Juha, ça pourra bien attendre un jour de plus.
Sans me laissait le temps de répondre, il entreprit de tout ranger. Une fois cela fait, Dorian se tourna vers moi et me demanda :
- Si j’ai bien compris Gabriel habite chez toi maintenant ?
- Il habite avec moi, rectifiais-je en me levant. Jusqu’à ce matin nous étions ce qui se rapproche le plus d’un couple.
Dorian ne dit rien, semblant réaliser combien notre relation avait évoluée, bien plus qu’il ne le soupçonnait.
- Et il vient d’inviter Kay chez t… Chez vous se reprit-il.
Un silence pesant suivit ses quelques mots. Dorian soupira avant de demander plus clairement :
- Juha, qu’est-ce qui se passe réellement entre toi et Gabriel ?
Une colère monta subitement en moi. Elle n’était pas tournée contre Dorian, mais contre moi-même et vers le chemin que nous étions en train de prendre avec Gabriel.
- Il m’a simplement dit qu’il m’aimait hier et je n’ai rien su lui répondre. Il a très mal pris la chose et je ne lui reproche pas. Seulement il a du mal à comprendre que ce n’est pas si facile que cela pour moi. Déclarais-je sèchement. Je passe pour un monstre et c’est comme cela que je me vois. Je lui demande tant et je suis incapable de lui en donner ne serais-ce que la moitié. Et maintenant il y a ce Kay si parfait… Si tu savais comme il l’aime Dorian…
Baissant les yeux, un voile de tristesse me masqua la vue, et j’ajoutais plus bas :
- Ce n’est pas moi dont Gabriel a besoin, c’est de Kay… Mais bon Dieu que ça fait mal…
- Alors tu vas baisser les bras si j’ai bien compris ? S’exclama Dorian. Si tu abandonnes, alors tu donneras une valeur de vérité à ce que tu viens de dire. Tu es mieux que tu ne le penses Juha, ne te laisse pas souffler à la moindre difficulté. Prouve lui autrement que par des mots, prouve-lui que tu mérites son amour ! Crois-moi, je sais ce que cela fait d’aimer quelqu’un à sens unique. Mais Gabriel n’est pas dans ce cas n’est-ce pas !? Car si ce n’est pas le cas, va lui dire dès ce soir !
- Si je ne ressentais rien pour lui, crois-tu vraiment que nous en serions là ! Il me faut juste du temps, et pouvoir parler seul avec lui. J’ai voulu le faire toute la journée, comptant sur ce soir, mais Kay est chez nous…
- Alors rentre, et comporte toi en adulte. Ravale ta jalousie et patiente encore. Vous trouverez bien un moment pour vous expliquer, même si ce n’est pas ce soir.
J’acquiesçais simplement, la gorge serrée.
- Aller je te ramène chez toi, comme avant ! S’exclama-t-il avec un petit sourire plein de sous entendu.
Shanenja se redressa subitement, comprenant que nous allions rentrer. Alors que je partais à la suite de Dorian, celui-ci se tourna brusquement vers moi :
- Juha, si jamais ça se passait mal, si jamais tu as besoin de parler ou quoi que ce soit, sache que ma porte t’est toujours ouverte, et je parle sérieusement. J’ai merdé par le passé, mais c’était parce que…
Son regard se fit fuyant puis en reprenant la route à mes côtés pendant qu’une petite boule de poil partait en éclaireuse, il ajouta plus bas :
- J’ai changé maintenant.
Une meurtrissure liée à ma propre personne m’apparut alors que sa main effleura la mienne. Un sentiment qu’il s’était efforcé d’enfouir à mon égard, un sentiment que j’ignorais ce soir là, ayant déjà mon lot de problèmes…
Nous montâmes en voiture et Dorian me ramena chez moi. Shanenja était assis à mes pieds, de mieux en mieux habitué à la voiture. Lorsque Dorian me déposa devant chez moi, je ne pus que le remercier et lui souhaiter une meilleure soirée que la mienne. Constatant que la pâtisserie à l’autre bout de la rue était encore ouverte, je décidais d’aller acheter un gâteau pour faire un pas en avant et tenter d’excuser mon attitude.
Lorsque je rentrais, Shanenja alla directement s’allonger, fatigué par sa journée mouvementée de chiot. J’allais dans la cuisine et en y découvrant Kay je compris que Gabriel devait être dans la salle de bain entendant l’eau couler.
- Tu as pu finir ton travail ? Me demanda poliment Kay.
- Oui… Me contentais-je de répondre.
Je posais le gâteau sur le plan de travail, avant d’aller me servir un verre d’eau et de m’asseoir à la table de la cuisine, pendant que Kay continuait assez mal à l’aise sa préparation du repas.
- Vos casseroles sont rangées où ? Me demanda-t-il alors que je me perdais dans l’observation de la nuit par la fenêtre.
Pour toute réponse, je me levais et lui tendis la casserole qui me semblait appropriée après l’avoir prise dans le placard. Restant à côté de lui, las de ce silence gêné, je me décidais à entamer la conversation.
- Nous… Nous avons mal commencé les présentations.
Kay s’arrêta et me lança un petit sourire. La jalousie de le voir ainsi aussi charmeur me vrillait les tempes pourtant je me forçais à lui rendre son sourire. Je lui tendis la main, et il fit de même. Ce fut après un bref échange que je lui proposais mon aide, qu’il accepta avec joie.
Alors que je mettais la table pour trois, il m’interrogea :
- Tu travailles ici depuis quelques mois, qu’est ce que tu faisais avant ?
- Rien de bien intéressant. J’ai voulu changer d’air et j’ai trouvé une place ici. Répondis-je évasif.
Je détestais ce regard posé sur moi. J’avais l’impression qu’il me jugeait. De plus il était indéniable qu’il ne m’appréciait de son côté pas plus que cela, je n’avais pas besoin de le toucher pour le savoir, je le sentais de là où j’étais.
Pourtant il poursuivit la conversation, me posant plusieurs questions de manière détournée sur moi et ma relation avec Gabriel, sans jamais me le demander franchement. Je dus faire appel à tout mon sang froid pour rester courtois et polis. A vrai dire, je n’avais qu’une seule envie, me retrouver seul à seul avec Gabriel pour parler sérieusement. Ce ne serait certainement pas possible ce soir.
Ce fut à ce moment là que Gabriel entra dans la cuisine. Je n’avais pas besoin de faire appel à mon don pour savoir qu’il était au plus mal. Ses yeux rouges et ses traits tirés parlaient pour lui. Non sans un certain effort, il finit par me demander :
- Tu… Tu es arrivé il y a longtemps ?
- Près d’une demi-heure, répondis-je ne pouvant m’empêcher de le dévisager longuement.
Honteux, Gabriel détourna le regard et pris place en bout de table entre Kay et moi. Tout comme moi, il n’avait pas particulièrement faim. Si je me forçais, il ne faisait que grignoter. Un silence monastique et désagréable régnait dans la pièce. Kay ne cessait de lancer des regards à Gabriel et croiser le mien avec froideur. Il était jaloux, tout comme je l’étais de lui, mais l’amour qu’il ressentait pour Gabriel m’oppressait et me donnait encore plus de raison de l’être. Lui aurait eut la réponse que je n’avais pu lui donner hier soir… Une petite voix ne cessait de dire dans ma tête : c’est avec Kay que Gabriel serait réellement heureux.
Plusieurs minutes s’écoulèrent ainsi dans un silence qui pesait sur chacun de nous. N’en pouvant plus, et voulant abréger l’angoisse qui pointait vivement chez Gabriel, je me forçais à prendre la parole :
- Sinon, tu fais quoi dans la vie ?
Kay me répondis d’un ton détaché, après un regard dans la direction de Gabriel :
- Je suis ostéopathe, et peintre amateur à mes heures perdues.
- Peintre ? Répéta Gabriel surpris. Aurais-tu une quelconque notion de ce que le mot « art » signifie ? Demanda-t-il en se moquant gentiment de lui. Car si mes souvenirs sont bons, on ne peut pas vraiment dire que tu étais un fervent admirateur des tableaux accrochés aux murs de l’église… Ajouta-t-il.
Un sourire narquois étira ses lèvres, qui disparut bien vite lorsque Kay rétorqua :
- Et qu’est devenu ton don pour le théâtre ?
Gabriel ouvris de grands yeux à cette question.
- Je… Je ne vois pas du tout de quoi tu parles… Tenta-t-il de nier.
En un rien de temps, je me sentais exclu de la conversation. Je n’avais plus ma place dans leur passé commun. Je n’écoutais plus. Je n’avais de toute façon pas la tête à cela ce soir. Je regardais simplement Gabriel, heureux de retrouver des souvenirs avec un homme qu’il croyait avoir perdu. Mon cœur battait douloureusement en comprenant qu’il l’aimait encore plus que je ne l’aurais cru. Je me refusais à sonder ses sentiments à mon égard. Kay éclata soudain de rire, et n’en connaissant pas le sujet, je me contentais de sourire pour masquer mes tourment. Gabriel avait cette chance que je n’aurais jamais avec Killian. Une question de plus en plus vive commençait à naître en moi : devrais-je finir par m’effacer de sa vie et laisser ma place pour son bonheur ?
La conversation animée qui se déroulait sous mes yeux entre ces deux hommes faisait pourtant bouillir la jalousie en moi, mais derrière se cachait une certaine forme de résignation.
Jamais je n’aurais pensé que l’éclat de rire de Gabriel me serait un jour à ce point insupportable. Combien de fois avions nous partagé un simple fou rire tous les deux ? Las, je finis par me lever et apportais le gâteau sur la table. Je servis Kay, puis Gabriel qui commença par refuser et céda au regard empli de reproche de Kay qui ne me passa pas inaperçu. J’en pris une part à mon tour, n’y touchant même pas, ce qui ne fut remarqué ni par l’un ni par l’autre.
Après quoi, Gabriel servit un café à Kay avant de passer au salon. Kay prit place à côté de moi dans le canapé alors que Gabriel déplaça le fauteuil pour se mettre en face de nous.
Leur conversation reprit de plus belle, Gabriel ne posant à aucun instant les yeux sur moi, enfermé dans sa bulle avec Kay. Il faut dire aussi que je ne faisais rien pour m’intégrer. Jugeant avoir suffisamment fait office de présence, ne supportant plus leurs éclats de rire et leur complicité, et encore moins leurs sentiments réciproques qui débordaient, je décidais d’aller me coucher.
Après une douche plus que succincte, j’allais dans la chambre, tentant de rester sourd à la suite de leur discussion. Je m’installais d’abord sur le milieu du lit, ne pouvant m’empêcher de respirer à plein poumons l’odeur si particulière de Gabriel, seule chose que j’aurais aujourd’hui. Puis épuisé de cette journée qui avait plus l’apparence d’un cauchemar, voulant fuir un court instant la réalité, j’allais me coller contre le mur inconsciemment, fuyant le vide laissé par Gabriel qui n’était cette nuit pas à côté de moi. Ce ne fut qu’après un temps qui me parut interminable que je finis par m’endormir, replié sur moi-même et indéniablement seul.
Je me réveillais assez tôt le matin et à la fatigue qui se lisait sur les traits de Gabriel encore endormis, je sus qu’il s’était couché peut de temps avant le lever du soleil. Ne désirant plus être dans ce lit, je choisis de me lever. Attrapant mes vêtements, j’allais dans la salle de bain. Après m’être rasé et débarbouillé, je m’habillais assez rapidement. Entrant dans la cuisine, Shanenja déboula dans mes jambes attendant son repas avec une envie non dissimulée. Après quelques caresses, j’accédais à sa demande. N’ayant pas faim, je me fis un simple café, et me décidais à ranger et à nettoyer notre repas de la veille.
Lorsque j’eus finis, Kay et Gabriel dormaient encore profondément. Avant de partir, je tentais de réveiller Gabriel, mais ce fut sans succès, me heurtant à quelques grognements avant qu’il ne me tourne carrément le dos. Peu enclin à insister, je choisis de partir seul. Il était encore tôt, mais une bonne promenade avec Shanenja avant d’aller travailler me ferait le plus grand bien. J’avais besoin de solitude.
Et je l’obtins toute la journée. Gabriel ne vint pas travailler, et Dorian était trop occupé pour avoir le temps de discuter avec moi. J’abattis de mon côté une quantité monstre de travail, m’octroyant quelques pauses pour jouer avec mon jeune chiot. En fin de journée, n’ayant plus grand chose à faire, je choisis de rentrer. Je fis cependant un détour par la forêt, profitant de cette fin de journée ensoleillée. Shanenja alla directement se coucher lorsque nous rentrâmes, épuisé de sa journée remplie. Kay et Gabriel n’étaient pas là. Évitant soigneusement de me poser trop de questions sur leur journée, j’allais me prendre un bain bien mérité.
Une fois finis, j’allais m’installer dans le canapé devant la télévision, réfléchissant à un moment ou je pourrais être seul à seul avec Gabriel pour parler sérieusement. J’ignorais mon mal-être, comme je l’avais fait toute la journée, et me concentrais sur ce téléfilm inintéressant. Ce ne fut qu’une fois l’heure du repas bien dépassée que je commençais à m’inquiéter et à me poser des questions. A quelle heure comptait-il rentrer ?
La moindre des choses aurait été de me laisser un mot ou de me passer un coup de téléphone. Mais peut être était-il trop occupé avec Kay pour y penser. La colère monta d’un cran. M’exclure pour une soirée de retrouvailles soit, mais il ne fallait pas que cela dure indéfiniment. Les minutes continuèrent à défiler, puis une heure et une deuxième. Je n’avais pas bougé de ma place, il faisait maintenant nuit et je n’avais allumé aucune lumière. J’avais même éteint la télévision n’en supportant plus les images et le son. Plus le temps passait, plus la colère mêlée d’inquiétude grandissait en moi. Lui était-il arrivé quelque chose ? Le doute ne me permettait pas de m’abandonner à la fureur. Un simple coup de téléphone aurait pourtant réduit mon état au calme.
L’angoisse était de plus en plus oppressante, m’imaginant mille et une possibilités d’ennui ou d’accident pour Gabriel. Une pression monstre que je ne parvenais pas à calmer.
C’est alors que j’entendis leur voix dans le couloir. Ils semblaient aller bien. Entrant dans l’appartement, j’allumais la lumière alors qu’ils pénétraient dans le salon. Me redressant et constatant qu’ils allaient parfaitement bien tout les deux, je ne pus m’empêcher de lui demander furieux :
- Tu étais où ?
Malheureusement, ce ton ne plut pas du tout à Gabriel, qui répondit avec colère et sarcasmes :
- Je suis allé m’envoyer en l’air ! Je n’existe pas à tes yeux alors je suis allé chercher un peu de réconfort ailleurs…
A peine eut-il terminé sa phrase que ma main s’abattit sur sa joue avec une telle violence qu’il chancelait sur le coup. Je n’avais pas pu me retenir. J’avais flanché sous la colère nourrie depuis des heures d’attente et d’angoisse. Je regrettais ce geste à l’instant même ou j’avais élevé ma main, mais je ne pouvais revenir en arrière. Le voir la main sur sa joue meurtrie et surtout son regard blessé et emplie de larmes par ma faute fut une des pires choses qui m’est été donné de vivre, surtout en repensant au passé de Gabriel. Sans me laisser le temps de réagir, de m’excuser lamentablement ou de faire quoi que ce soir, Kay s’interposa entre nous et d’une voix froide, il déclara :
- Ne relève plus jamais la main sur lui…
Gabriel posa sa main sur le bras de Kay, alors que je contemplais dès lors le fossé qui nous séparait et que j’avais moi-même creusé.
- Laisse, c’est rien ! T’es vraiment trop con, ajouta-t-il en se tournant vers moi, avec un regard qui me fit froid dans le dos. Et puis même si c’était le cas, je ne te dois rien ! Nous ne sommes pas mariés, ça ne te regarde pas ce que je fais de mon cul !
J’accusais le coup sans broncher, je l’avais bien mérité après tout. La jalousie me rongeait de l’intérieur plus que je ne me l’étais imaginé. Je n’étais pas uniquement jaloux de leurs sentiments partagés, j’étais jaloux qu’il me donne cette impression de souffrir moins que moi, et qu’il est retrouvé l’homme qu’il avait aimé par le passé. Et moi qui restais toujours accroché à mon amant décédé, laissant fuir Gabriel.
Je restais planté dans le salon alors que Kay me lançait un regard dédaigneux. Alors qu’il allait m’adresser la parole, je lui tournais le dos et allais m’enfermer dans la chambre, suivit de près par Shanenja qui se coucha au pied du lit. Broyant du noir, je restais debout, ne parvenant pas à me calmer. Qu’avais-je fait ? Qu’étions-nous en train de devenir ? Les réponses me prenaient à la gorge de manière douloureuse. Ce fut un couinement du jeune chiot qui me fit revenir sur terre. M’asseyant sur le sol à ses côtés, Shanenja vint s’allonger sur mes jambes, tandis que les premières larmes se mettaient à couler.
Malheureusement, les murs n’étaient pas assez épais pour me cacher la conversation de Gabriel et de Kay lorsque celui-ci sortit de la salle de bain.
- J’ai tellement honte Kay… Je… Même les coups de ceinture étaient moins humiliants que cette gifle qu’il m’a donnée…
J’étais au pied du mur, j’avais l’impression d’avoir fait quelque chose d’irréparable, les rapprochant encore un peu plus et m’excluant d’une possible vie à deux avec Gabriel. Me bouchant les oreilles, je fuis le reste de la conversation, priant pour qu’ils se taisent le plus vite possible. Mais je ne pouvais me couper à la détresse de Gabriel qui était si vive qu’une migraine ne tarda pas à s’y ajouter.
Ce ne fut qu’après un long moment que je compris que Gabriel s’était endormi et qu’il ne me rejoindrait pas. Ne pouvant me résoudre à sortir, j’allais m’étendre dans le lit, emprunt d’une douloureuse tristesse.
Je ne fermais l’œil que quelques heures cette nuit-là, la culpabilité et la douleur me tiraillant sans me laisser de répit.
Le lendemain matin, je me levais avec l’impression qu’un tank était passé sur mon corps. L’esprit dans le même état, il me fallut faire preuve d’énormément de courage pour oser sortir de la chambre, habillé de propre. Gabriel dormait sur le canapé avec Kay, et je détournais les yeux de cette vision qui se révélait surement être leur avenir. Surmontant la boule qui se formait dans ma gorge, j’allais dans la cuisine pour préparer à chacun un petit déjeuner. Kay ne tarda pas à me rejoindre, me renvoyant toujours ce regard maintenant presque haineux que je ne pus soutenir. Pas un mot ne fut échangé tandis que je nourrissais Shanenja. Lorsque le café fut prêt, ce fut au tour de Gabriel de nous rejoindre. Le silence était de plus en plus oppressants, sans compter les regards évités et ceux qu’ils ressentaient tous deux à mon égard : du mépris et de la rancœur.
Une fois le petit déjeuner terminé, nous nous préparâmes pour nous rendre au ranch. La journée et la semaine se déroulèrent ainsi, dans un silence monastique alors que notre relation se dégradait de jour en jour. Pas un instant je ne pus me retrouver seul avec Gabriel qui fuyait une confrontation. Pas un seul moment, je ne pus m’expliquer ou tout simplement m’excuser, me refermant chaque jour un peu plus.
Nous étions maintenant mercredi soir et Dorian était venu me prévenir que le directeur voulait s’entretenir avec moi. Intrigué, je choisis de finir ma tache avant d’aller à son bureau. Lorsque j’arrivais la porte était ouverte, et en tournant le dos, je pus voir la voiture de Kay partir en direction de notre studio.
- Te voilà Juha, dit Philippe dans mon dos, d’une voix qui me fit sursauter.
- Je… Oui…Répondis-je en lui faisant face. Vous vouliez me voir ?
- Viens dans mon bureau. J’ai quelques papiers à te faire signer et deux trois choses plus personnelles dont j’aimerais que nous parlions.
Docile, je le suivis, prenant place en face lui. Il commença par me faire signer quelques papiers concernant la prison et ma réinsertion dans la vie professionnelle. Mon contrat fut lui aussi remis à jour, me prenant définitivement comme palefrenier, satisfait de mon travail. Une fois que tout le côté administratif fut terminé, Philippe s’enfonça dans son fauteuil voulant maintenant abordé les choses « personnelles ».
- Qu’est ce qu’il se passe entre vous deux en ce moment Juha ? Me demanda-t-il de façon très directe.
- Il n’y a pas besoin d’être devin pour voir que nous sommes en froid en ce moment, répliquais-je.
- C’est à cause de la présence de Kay ? Ajouta-t-il.
- Pas vraiment, tentais-je d’élucider, disons que sa présence n’améliore pas la situation, dis-je en détournant le regard.
- Juha, tu sais très bien que c’est son ami d’enfance, c’est normal que tu sois jaloux. Mais mets-toi sa place, il le croyait mort.
Alors que j’allais répondre, Philippe ajouta :
- Attention, ce n’est pas pour autant que je donne raison à Gabriel, je ne suis du côté ni de l’un, ni de l’autre. Mais je ne supporte pas de vous voir ainsi. Tu es quelqu’un de bien Juha, et c’est tout à fait normal que tu sois jaloux. Laisse-lui un peu de temps… Mais bon Dieu, réagissez avant qu’il ne soit trop tard, vous êtes en train de vous détruire.
Philippe soupira avant de se lever et de déclarer, marquant la fin de la conversation :
- Bon, rentrons Juha, je te ramène.
- Vous n’êtes pas obliger…
- J’y tiens, je t’ai fait rester plus tard.
C’est ainsi que nous montâmes dans la voiture et qu’il me ramena, me donnant encore quelques conseils, et me priant d’arranger la situation au plus vite lorsqu’il me déposa devant chez moi. N’ayant pas la moindre envie de retourner chez moi pour retrouver cette ambiance lourde qui régnait depuis une bonne semaine, ayant un seul but en tête, me retrouver seul à seul avec Gabriel ne serais-ce qu’une petite heure pour enfin pouvoir parler.
Shanenja venu avec nous alla comme à son habitude se lover avec un jouet sur sa petite couverture, tandis que j’allais dans le salon. La lumière était allumée, mais il n’y avait personne. C’est alors que j’entendis une discussion étouffée dans la salle de bain. Curieux, j’allais y jeter un œil et la vision qui s’offrit à moi me glaça d’effroi. Kay était agenouillé aux pieds de Gabriel, qui, le pantalon légèrement baissé, le laissait toucher sans rien faire. Le soupire de bien-être que Gabriel lâcha fut de trop, et d’une voix froide, je laissais échapper :
- On s’amuse bien à s’que j’vois !
Gabriel ouvrit les yeux, s’apercevant de ma présence dans l’encadrement de la porte. Je ne savais plus que penser, incapable de cacher ma fureur d’avoir vu de mes propres yeux ce que j’avais toujours craint. Etant incapable de soutenir cette vision, Gabriel le torse nu, le pantalon à moitié déboutonné comme offert à Kay, je fis demi-tour, me retenant pour ne pas casser la première chose qui me tombait sous la main. Gabriel se précipita à ma suite, m’attrapant par le bras alors que je traversais le salon. Me forçant à me retourner, il m’adressa un regard meurtrier. Sans comprendre sa colère, je restais figé, sans pouvoir faire un seul geste.
Rageusement, il s’exclama :
- Non mais tu m’fais quoi là ? Ta pseudo crise de jalousie tu peux te la foutre au cul, Juha !
Priant pour que je me sois trompé, mais ne voyant pas ce qui pourrait expliquer une telle pose, je scrutais attentivement son torse à la recherche d’une quelconque trace de suçon ou de trahison de sa part. Était-ce seulement la première fois ? Je ne trouvais rien, descendant mon regard plus bas. Lorsque mes yeux se posèrent sur son bas ventre, je sursautais violemment alors que je vis un tatouage assez récent en train de cicatriser.
Rassuré, ma colère ne me quitta pas pour autant. Ma réaction avait été absurde, mais j’avais cru voir se dérouler devant mes yeux ce que je craignais le plus. Est-ce que tout cela n’était finalement pas qu’une question de temps ? Comment cela aurait-il progressé si je n’étais pas arrivé ? La distance imposée entre nous me semblait éternelle. Depuis combien de temps ne nous étions pas pris dans les bras. Je n’étais même pas au courant de ce nouveau tatouage à la différence de Kay. Je n’en pouvais plus de ressentir son mépris à mon égard et sa jalousie faisant échos à la mienne. J’étouffais, et n’osais même plus toucher Gabriel par peur d’y découvrir un amour plus fort pour son ami d’enfance. Celui-ci enfonça le couteau dans la plaie, en colère mais satisfait :
- Je ne suis pas une pute, Juha. Je ne déclare pas mon amour à un homme pour aller voir ailleurs à la première dispute entre nous ! Si tu n’as pas confiance en moi, c’est qu’on n’a rien à faire ensemble.
Sur ces mots, il me tourna le dos et retourna dans la salle de bain. Ne pouvant en supporter d’avantage, je pris la direction de la sortie, claquant violemment la porte, en colère contre notre relation qui semblait ne plus pouvoir se raccrocher à quoi que ce soit. Alors que j’arrivais dehors, je fus saisi par le froid, étant sortit sans manteau. Je décidais de marcher, allant droit devant moi sans choisir ma direction. Les larmes ruisselaient de nouveau, sans pouvoir les retenir, je trébuchais et manquaient de tomber, mais cela n’arrêta pas ma course. Une voiture s’arrêta soudain à ma hauteur. La vitre se baissa et je vis Dorian les traits tirés pas l’inquiétude.
- Juha ? Mais qu’est ce que tu fais dehors à cette heure là ? Sans une veste en plus ?
- J’avais besoin de prendre l’air, répondis-je en essuyant mes larmes d’un geste bref.
Les traits tirés, je sentis soudain une grande fatigue et une grande lassitude concernant le chemin que prenait ma vie. Étais-je uniquement fait pour vivre seul ?
- Attends-moi ici, je vais me garer. Tu vas boire truc chaud chez moi, tu ne peux pas rester dehors avec si peu sur le dos.
Je restais là, sans bouger tandis qu’il avançait pour trouver une place pas très loin d’ici. Je savais très bien de quel mauvais œil Gabriel verrait ce que j’étais en train de faire, mais j’avais besoin de quelqu’un sur qui me reposer un peu ce soir. Gabriel avait toujours eu Kay avec lui, contrairement à moi qui n’avait personne. Je n’enviais cependant pas sa place non plus.
Dorian me rejoignis au pas de course. Une fois arrivé à ma hauteur, il me jeta son manteau sur le dos avant de m’attirer jusque chez lui. Posant ses affaires une fois chez lui, il m’invita à prendre place dans le salon, tandis qu’il allait faire chauffer l’eau pour un thé. De légères rougeurs vinrent tinter mes joues en repensant à ce que nous avions fait tous les deux ici, mais ce souvenir fut bien vite inondé par mon accablement et mon désespoir.
Il rangea quelques affaires dans la cuisine et revint avec une tasse de thé fumante. S’asseyant près de moi, il me dévisagea quelques secondes lorsqu’il croisa mon regard : mon mal-être se voyait-il à ce point sur mon visage ?
- Ca ne s’est toujours pas arrangé ? Me demanda-t-il le regard peiné.
Portant la tasse à mes lèvres, j’avalais avec difficulté une maigre gorgée de thé brûlante.
- Je suis fatigué Dorian… Fatigué de cette jalousie qui me rend un peu plus fou chaque jour. J’ai… J’ai l’impression de ne plus avoir ma place près de lui. On ne se parle plus, on ne s’approche plus à part pour nous disputer. On étouffe depuis plus d’une semaine et je ne peux plus voir en peinture ce Kay. Gabriel m’évite, et je ne peux jamais avoir un moment seul à seul avec lui. Kay est toujours à ses côtés.
Je fis une pause, avalant une deuxième gorgée semblable à la première avant de poursuivre :
- Le pire Dorian, c’est que si j’avais maintenant l’occasion de lui parler, je ne saurais même pas quoi lui dire… Au fur et à mesure du temps, les raisons qui le pousseraient à aller vers Kay au lieu d’aller vers moi se multiplient. Seulement, je ne peux pas me résigner à baisser les bras. Je… je tiens trop à lui…
Je finis par craquer littéralement, m’effondrant en larmes après avoir dit :
- Je sais pourtant que ce serait la meilleure des choses à faire pour lui, je n’ai fait que l’enfoncer avec moi.
Dorian ne résista pas et me pris dans ses bras, tandis que je posais ma tête sur son épaule pleurant silencieusement, le corps secoué de léger spasmes. D’une petite voix, il me demanda alors :
-Tu l’aimes… ?
Restant contre lui, manquant cruellement d’un peu de chaleur, je mis beaucoup de temps avant de répondre entre deux sanglots minable :
- Je ne sais pas…
Dorian soupira avant de répondre, d’une voix sérieuse :
- J’ai franchement du mal à croire que ce n’est pas le cas Juha. Tu as décidément beaucoup de mal à faire confiance aux autres et à te faire confiance. Mais une chose et sûre, si vous ne faites rien, vous allez droit dans le mur. Vous vous détruisez l’un l’autre.
Me repoussant afin de me regarder droit dans les yeux, il ajouta le plus sérieusement du monde :
- Promets-moi que tu va faire quelque chose dans les jours qui viennent !
Me tenant par les deux épaules, il me serra de nouveau contre lui une fois que j’eus acquiescé faiblement. Je restais ainsi, contre lui un long moment, et il respecta mon besoin de silence et de soutient. Ce ne fut que lorsque que je sentis capable de me retenir de pleurer que je m’écartais de lui. Il était temps que je rentre et Dorian le comprit. Les deux tasses de thé étaient trop froides pour être bues et ce fut après une dernière étreinte et des remerciements que je le laissais dans le but de rentrer chez moi.
Tout était éteint, les deux hommes semblant dormir. N’ayant plus qu’à faire de même, remettant au lendemain ma résolution de parler, je me rendis silencieusement dans la chambre. Refermant délicatement la porte derrière moi, je me mis en pyjama sans faire de bruit. Gabriel semblait dormir. Mon regard se posa sur lui. Combien de temps pourrais-je encore tenir avec cette distance ? Combien de temps devrais-je encore tenir avant de pouvoir le prendre dans mes bras tout contre moi, et inspirer son odeur tout en profitant de sa présence qui m’était devenue nécessaire ? Question bien plus cruelle qui me saisit alors : combien de temps aurais-je encore pour avoir le privilège de le regarder dormir ?
Emprunt d’une grande lassitude et d’une douleur profonde, je finis par aller m’allonger à côté de lui, résistant à l’envie plus forte que jamais de le prendre dans mes bras, tout contre moi : une simple étreinte qui me faisais cruellement défaut à chaque seconde de plus passée loin de lui.
Je mis un temps infini à seulement réussir à fermer les yeux, mais le sommeil se refusa à moi cette nuit là. Je sentais Gabriel remuer dans tout les sens, et lorsqu’il se leva alors que la nuit était loin d’être fini, je ne sus ce qui me retint de prononcer son nom. Depuis combien de temps n’osais-je même plus lui adresser la parole, à simplement lui effleurer la main ? J’avais cette cruelle impression de m’être coupé de lui, ne parvenant même plus à saisir de ce qu’il ressentait vraiment. Peut-être étais-ce pour me protéger, par peur et crainte de ce que je pourrais y découvrir. N’étais-ce finalement pas moi qui m’étais coupé de Killian ?
Une boule dans la gorge me saisit, la culpabilité de son assassinat me prenait en traitre à un moment de faiblesse. Si je perdais Gabriel, j’aurais définitivement tout perdu. Il m’avait beaucoup plus aidé que ce dont j’avais désiré faire pour lui. En fixant le lit vide à côté de moi, la simple idée que Gabriel n’occuperait plus cette place m’était insoutenable. Me redressant, je tirais légèrement le rideau pour regarder la nuit étoilée. Perdu dans ma contemplation, je ne cessais de réfléchir à la situation, tentant d’y trouver une issue. Il fallait à tout prix que je trouve l’occasion de lui parler dans la journée. Comme le disait Dorian et Philippe, nous ne pouvions continuer très longtemps comme cela.
Gabriel n’était toujours pas rentré lorsque je sortais de la chambre, me décidant à me lever bien déterminé à entamer cette discussion. Allant me préparer un petit déjeuner sans oublier Shanenja, Kay ne tarda pas à me rejoindre, sans un mot, toujours avec ce regard méprisant et dédaigneux. Je ne savais même plus comment je pouvais supporter sa présence, et ce matin là je ne pus que l’ignorer, m’abstenant tout comme lui des salutations matinales de politesses.
Ce fut non sans un certain soulagement que j’entendis Gabriel rentrer, et celui ne tarda pas à arriver dans la cuisine. Il ne s’aperçut pas de ma présence, saluant simplement Kay avant de se préparer une tasse de chocolat chaud. Il semblait si faible moralement, que je me demandais comment il trouvait encore la volonté de tenir sur ces deux jambes. Frigorifié, je savais que cela était loin d’être uniquement du au temps extérieur. Mon envie de faire un premier geste me prit à la gorge, mais alors que j’allais me lever, Kay demanda :
- Où tu étais ?
- Je suis allé prendre l’air, répondit-il. Je… J’avais besoin de réfléchir… J’en peux plus, j’ai l’impression d’étouffer ici…
Se retournant après avoir mis sa tasse au micro-onde, il sursauta en s’apercevant enfin de ma présence. Fuyant automatiquement mon regard, je fis de même, définitivement coupé dans mon élan.
Lorsqu’il revint à table avec de quoi déjeuner, ses mains bleues ne l’aidèrent pas à faire ses tartines. Nous déjeunâmes en silence, mangeant plus par automatisme que par appétit. Finissant ensuite de nous préparer, nous sortîmes, Gabriel suivit de près par Shanenja, trop heureux qu’il lui prête un peu d’attention. Gabriel s’assit devant avec Shanenja à ses pieds, Kay conduisant, tandis que je montais à l’arrière.
Une fois arrivé, je sortis de la voiture, laissant Kay et Gabriel passer leur journée ensemble, et partant de mon côté. J’avais toute la journée pour trouver un moment à discuter seul à seul avec lui, mais je ne comptais pas le faire ce matin.
Je n’eus même pas besoin de rentrer dans l’écurie pour comprendre que quelque chose n’allait pas, et ce pressentiment s’accentua lorsque je vis tous les regards posés sur moi alors que j’allais chercher mon matériel dans la sellerie. Peur, moquerie, écœurement, dégout, dédain : c’était ce que tous ressentais pour moi. C’était tellement puissant que je dus sortir m’adosser quelques minutes contre le mur de la sellerie, pièce heureusement déserte.
Prenant sur moi, j’inspirais un bon coup, tentant de me dire que cela était plus du à la fatigue qu’autre chose, me rendant malgré moi plus sensible, comme je l’avais vécu dans ma jeunesse. Renforçant comme je le pouvais mes barrières mentales, je m’éloignais du mur et allait prendre ce dont j’avais besoin pour travailler.
Hésitant, je sortis de la sellerie pour me diriger dans le box le plus proche qui était heureusement un de ceux que j’avais à faire ce matin. Cela n’empêcha cependant pas de me faire envahir de nouveau par tous leur ressentis et il était indéniable qu’ils le vivaient par rapport à moi. J’avais beau réfléchir, je ne trouvais pas de raison à tous leurs regards et à leur haine mêlée de peur à mon égard. Fébrile, je saisis la fourche en tentant de les ignorer, me fermant comme une huitre, sans cesse tiraillé.
Jamais je ne mis autant de temps à remplir une simple brouette, et je remerciais l’habitant de ce box pour son calme. Posé, l’animal ne bronchait pas, les yeux à demi-clos, trop vieux pour se soucier des humains et de leurs problèmes. Je devais maintenant aller vider la brouette à l’extérieur, ce qui impliquait de repasser devant eux. Ce fut donc ce que je dus faire, à contrecœur et angoissé. Sortant du box, en prenant soin de bien refermer la porte derrière moi bien que le cheval ne semblait avoir aucune envie de sortir, je redressais la tête vers le couloir qui m’apparaissait interminable. Je sursautais presque en m’apercevant que tous ceux présents ici me fixaient avec un air malsain. Déglutissant, je fis un premier pas et à cet instant seulement que j’entendis un mot chuchoté brièvement : « prison ». Perdant pied, mes murailles s’effondrèrent, et leurs émotions me parurent soudain plus violentes et brutales.
Dévasté, je laissais la brouette avant de marcher d’un pas rapide vers la sortie la plus proche. La tête basse, je devais me faire violence pour ne pas me mettre à courir, et c’est pourtant ce que je fis une fois sorti de leur champ de vision. Me précipitant vers la vielle carrière, j’allais encore plus loin et du m’arrêter chancelant les premiers arbres de la forêt passée.
M’appuyant à un arbre, je ne pus retenir le haut le coeur qui me saisit et me penchant brusquement en avant je rendis le peu que j’avais avalé à mon petit déjeuner, le corps parcourut de violents spasmes de rejet : rejet éprouvé par les autres qui connaissaient maintenant mon passé. C’était une chose que deux personnes le sache ici, s’en était une autre qu’une découverte brutale par tout ceux qui venaient ici, les seules personnes qui faisait partit de mon monde, de ma nouvelle vie…
Alors que je me forçais à oublier mon passé et aller de l’avant, celui-ci revenait me heurter de plein fouet, ravivant ma culpabilité et ma plus grande honte. Qui aurait pu me faire cela, à part le seul qui m’en voulait de ne pas oublier Killian. Une colère irraisonnée coula brusquement dans mes veines, m’aveuglant et m’offrant de nouvelles forces.
Me redressant vivement, j’allais vers l’homme qui m’avait trahi. N’était-ce pas finalement une forme de punition méritée selon lui. Furieux, je pris le chemin de la carrière où je savais qu’il donnait un cours à l’heure actuelle. Les tremblements qui jusqu’alors me parcouraient violemment furent non plus guidés par ma peur, mais par ma colère contre Gabriel. Sans réfléchir une seule seconde et méditer sur la possible vérité de cette idée, j’arrivais bientôt près de lui. Il était en train de parler avec Kay, ce qui redoubla ma colère, m’empêchant de maîtriser cette jalousie. Tel un animal blessé livrant son dernier combat, je puisais dans mes dernières forces et m’exclamais une fois arrivé à sa hauteur :
- Tu étais le seul à savoir… Comment as tu pu me trahir ainsi, Gabriel ?
Gabriel resta sans réaction, et je n’eus pas besoin de m’approcher plus de lui pour comprendre mon erreur. Ce n’était pas lui, il venait d’apprendre la nouvelle en même temps que moi. Incapable de m’excuser, encore sous l’effet de la haine, je préférais m’éloigner d’eux sans un regard. Comment avais-je pu croire un seul instant que c’était lui. Maintenant c’était certain, je ne le méritais pas, je venais de briser la dernière chose qui nous liait encore, je venais de perdre Gabriel…
Cette révélation manqua de me faire chuter, mais je sentis une main se poser sur mon épaule. Me retournant violemment, je m’exclamais la défensive en rompant ce contact qui me vidait de mes dernière forces :
- Ne me touche pas !
Kay me regardait droit dans les yeux, l’air mauvais. Ce qui était le plus douloureux, c’est que j’abandonnais Gabriel à cet homme que je n’avais jamais appris à ne serait-ce qu’apprécier.
- Je savais que quelque chose n’était pas normal chez toi. Tu es différent des autres, et la prison l’explique ! Et ce que tu viens de faire subir à Gabriel, je ne peux pas le laisser passer !
Mon silence et mon absence de réponse, le rendis fou de colère et il ajouta :
- Tu crois que tu ne l’as pas assez fait souffrir pour en plus l’accuser d’une chose qu’il n’a pas faite ? Si tu connaissais un peu plus Gabriel tu n’ignorerais pas que trahir un secret c’est quelque chose qu’il est incapable de faire.
J’attendais qu’il finisse sans broncher, n’ayant tout de façon pas la force ni le courage de répliquer quoi ce soit, le laissant enfoncer le couteau dans la plaie comme je le méritais.
- Si tu n’as pas confiance en lui, comment peux-tu espérer garder son amour ? Tu ne le mérites pas !!
Nous allions y arriver, il allait enfin me dire ce qu’il avait sur le cœur depuis la première fois que nous avions échangé un regard :
- Ne joue pas au con Juha, parce que quand Gabriel décidera de te quitter, moi je serais là pour lui et n’oublie pas qu’on a beaucoup de choses en commun ! Déclama-t-il en insistant sur le « beaucoup » de manière volontaire. Je sais qu’il éprouve des sentiments à mon égard…
C’était maintenant clair, il sous-entendait qu’il pouvait avoir Gabriel quand il le voulait, et qu’il ne me laissait que par soi-disant clémence. Je n’aimais pas la manière dont il parlait de Gabriel, comme un simple objet qu’il consentait à me laisser en attendant que je le casse pour venir le réparer et me le reprendre. Je n’hésitais pas à lui en faire par, ce qui le fit craquer. Il éleva sa main sur moi : grossière erreur. L’attrapant au vol, changeant du tout au tout, je retrouvais le masque d’autorité et de puissance que j’avais acquis pendant ces dix dernières années et déclarais d’une voix glaciale :
- J’ai fait dix ans de prison Kay, ne crois pas que je ne sais pas me défendre. Il vaudrait mieux pour toi ne pas entamer de bagarre.
Kay me lança un dernier regard avant de me tourner le dos et de rejoindre son cher Gabriel. Savait-il seulement que j’étais en train de baisser les bras, et qu’il était maintenant bien plus proche de lui que je ne l’étais ? Je l’avais perdu, et Kay était bien plus proche de la vérité que ce qu’il ne pensait. Pourrais-je seulement supporter de voir Gabriel dans ses bras ? La réponse négative me serre douloureusement le cœur. Si Gabriel n’était plus avec moi, je n’avais plus rien qui me retenait ici. Je le savais depuis mon arrivée ici, je ne sortirais pas indemne de cette relation avec Gabriel. J’espérais l’avoir aider un peu à surmonter la souffrance passée, et ce serait avec Kay qu’il pourrait réellement se reconstruire. J’étais trop instable et nocif pour celui qui s’approchait trop près de moi. Cela avait coûté la vie de Killian et jamais je ne permettrais que cela arrive à Gabriel.
Redressant la tête, je n’avais pas remarqué que j’avais avancé. Près de la vielle carrière, je m’assis sur le tronc d’arbre posé sur le bord, sans me rendre compte de la présence de Dorian qui approchait de moi à grand pas.
Je ne m’aperçus de sa présence que lorsqu’il s’assit à côté de moi. Il gardait une certaine distance qu’il n’avait jamais instaurée entre nous. Ses sentiments étaient confus, et tout comme lui, je ne parvenais pas bien à les discerner. A vrai dire, je ne cherchais pas à le faire.
Ce fut seulement après un soupire qu’il se mit à parler :
- Je pense que tu es au courant de la nouvelle de ce matin à ton sujet…
Il fit une pause, cherchant apparemment ses mots avant de reprendre :
- J’aurais préféré l’apprendre de ta bouche que de celle des autres…
Je lui lançais un simple regard. J’étais fatigué, en deuil de cette vie qui n’avait finalement été que le mirage d’un possible bonheur. Mon visage cerné trahissait ma douleur, et Dorian semblait plus peiné que je ne l’aurais imaginé à mon égard.
- Est-ce que Gabriel était au courant ? Se risqua-t-il à me demander.
- Oui, il savait…
- Je… J’ai croisé Gabriel, il était avec Kay… Il pleurait. Est ce que je peux connaître la rai…
- C’est de ma faute, le coupais-je. Je l’ai accusé à tord.
Un silence s’instaura entre nous, mais ce n’était heureusement pas un silence lourd et pesant. Dorian respectait à sa façon mon besoin de solitude, bien qu’il reste à mes côtés. Il ne me jugeait pas comme tous les autres. Cela cachait bien évidemment une raison plus profonde, mais je m’en moquais pour le moment. A vrai dire, j’étais finalement légèrement soulagé qu’il soit une fois de plus à mes côtés lorsque j’en avais besoin. Dorian aussi me manquerait lorsque je partirais d’ici, mais pas autant que Gabriel. A cette pensée, ma poitrine se comprima si fort que j’eus du mal à respirer.
Dorian s’en apercevant m’appela par mon prénom avant de poser sa main sur moi, hésitant, ne sachant plus trop comment se comporter. Ce contact, je ne le supportais pas, m’écartant de lui le moins brusquement possible, je m’excusais et mon regard suffit à lui faire comprendre. Je n’avais pas besoin qu’il me touche pour savoir qu’il me craignait et ne savait plus trop comment faire avec moi. Je sortais de prison après tout… Évitant son regard peiné, je décidais de me confier un peu, voulant à tout pris alléger en surface le poids qui m’opprimait. Et Dorian m’y aida en me demandant :
- Ca va aller… Laisse-leur le temps de se faire à l’idée que tu sors de prison. Rassure-moi, tu ne vas pas partir d’ici parce qu’ils savent tous ?
- Qui vous a mis au courant ? Demandais-je en évitant sa question.
- Je ne sais pas… Quand je suis arrivé ce matin, la nouvelle circulait déjà entre eux… Qu’est ce que tu vas faire Juha ? Insista Dorian.
- Je n’en peux plus…Je suis en train de le détruire. Je fais tous de travers… Je… Je crois que je l’ai définitivement perdu. Kay est mieux pour lui. Mais je ne pourrais supporter de les voir ensemble.
- Alors tu baisses tout simplement les bras ?
- Oui, répondis-je catégorique. Pour le bien de Gabriel, c’est ce que j’aurais du faire depuis le début. C’est fini de toute façon, ce n’est plus qu’une question de temps…
- Je ne te savais pas si lâche Juha ! Qui te dis qu’il sera plus heureux avec Kay ?!!
- Kay l’aime et ne traine pas un meurtre derrière lui, dis-je en me redressant. Leur relation sera plus saine !
- Le coup du sacrifice ne marchera pas avec moi Juha. Enfin tu l’aimes ça crève les yeux !
Perdu, je ne répondis pas tout de suite, je ne savais plus que penser. Qu’en savait-il ? Je tenais énormément à Gabriel, mais j’avais peur. Peur de tout perdre et surtout de le perdre. Peur d’accorder une confiance irraisonnée en quelqu’un, comme je l’avais fait avec Killian qui avait fini par me trahir en m’imposant de le tuer. Car finalement c’était sur cela que reposait pour moi une relation amoureuse : la confiance en l’autre. Je n’avais déjà pas confiance en moi…
- Je ne sais pas, dis-je dans un souffle.
Dorian n’en supporta pas plu. Se levant, il se planta devant moi et me dit, le ton légèrement plus haut qu’à son habitude :
- C’est sur que c’est tellement plus simple que de chercher la réponse au fond de toi ! Tu l’aimes, et il n’y a pas que moi qui le pense. Quand vas-tu te l’avouer ! Ça ne se commande pas Juha, crois-moi…
Un silence s’instaura une fois de plus entre nous, jusqu’à ce que Dorian me dise :
- Tu devrais aller manger un peu Juha, tu es pâle à faire peur. Allez viens…
Docile, je le suivis, bien que l’idée de retrouver tout le monde réunis dans cet espace clos ne m’enchantait guère.
Je marchais quelques pas derrière lui, remarquant qu’effectivement, il valait mieux que j’avale quelque chose si je ne voulais pas tomber dans les pommes. Le fait que Dorian m’accompagne me rassurait un peu, mais ce ne fut malheureusement pas le cas. Un collège l’appela à l’aide et il me dit de partir devant et qu’il me rejoindrait après. N’ayant pas d’autre choix que d’y aller, je me rendis donc au réfectoire. Celui-ci était plein, et autant dire que tous les regards furent rivés sur moi lorsque j’attrapais un plateau. Déglutissant, et me coupant d’eux, je commençais à me servir raisonnablement en nourriture, seulement ce que je me sentais capable d’avaler.
C’est alors que je me sentis poussé de manière brusque. Ce n’était autre que Marion qui trouvait que je n’allais pas assez vite.
Ce simple contact la trahis. C’était elle qui était à la source de cette révélation. D’où elle tirait ses informations ? Je n’en avais pas la moindre idée. Elle me lança un regard narquois alors que je lui tournais le dos et finissais de me servir. Je réglerais mes comptes avec elle plus tard.
Choisissant la table la plus éloignée et la plus calme possible, j’allais m’installer seul, soupirant face à la lourdeur de la tension qui régnait dans cette pièce. Les regards furtifs et les messes basses commentant chacun de mes faits et gestes étaient déjà difficiles à supporter, mais ce n’était rien à côté de ce qu’ils ressentaient à mon égard.
Gabriel et Kay n’étaient pas encore là. Baissant les yeux et m’enfermant dans ma bulle pour être capable d’avaler ne serait-ce qu’une bouchée, je ne les vis pas arriver. Ce fut seulement au moment où tout le monde se tut que je redressais la tête, voyant Marion s’approcher de Gabriel, un sourire malsain dépeint sur le visage, Kay étant un peu plus loin.
- Alors Gabriel, ça t’excite les taulards ?
Gabriel sursauta violemment, tout autant surpris que moi par ses propos et sa question. Déjà blême, il devint livide. Satisfaite d’elle et de la réaction de Gabriel, elle se tourna vers l’assemblée et s’exclama :
- Faits une ovation au nouveau couple de l’année.
Un brouhaha inintelligible se fit entendre, tandis que je serrais les poings sous la colère. C’était une chose qu’elle s’en prenne à moi et à ma vie privée, s’en était une autre qu’elle s’en prenne à Gabriel. Lorsque le silence revint, Marion reporta son attention sur Gabriel et reprit :
- Quelle tragique histoire que celle du misérable petit orphelin entiché d’un assassin qui ne veut pas de lui… Et oui je sais tout de toi… Quel effet ça fait de se faire baiser et jeter par la suite ? Regarde dans quel état lamentable tu es… Mon pauvre garçon, tu es pitoyable, tu ne vaux vraiment rien… Tu ne t’es jamais demandé pourquoi ton père et ta mère n’ont jamais voulu de toi…
Ce fut plus que je ne pouvais en supporter. Les larmes de Gabriel inondaient ses joues, et Kay le regardait trop ahurie pour faire quoi que ce soit. Me levant, je me précipitais sur Gabriel qui vacillait. Je l’attrapais au dernier moment, juste avant qu’il ne tombe dans l’inconscience. M’assurant qu’il était bien tout contre moi protégé, ignorant pour l’instant le bien que cela faisait de l’avoir de nouveau dans mes bras, je fis face à Marion, la toisant de toute ma hauteur.
Malheureusement pour elle, elle était allé trop loin. J’aurais pu supporter bien plus à mon égard, mais la colère qu’elle avait déclenché chez moi en s’en prenant à Gabriel en faisait frémir plus d’un dans la salle.
D’une voix glaciale, rentrant parfaitement dans la peau du personnage que tout le monde semblait s’imaginer : le dangereux criminel, je déclarais en la regardant droit dans les yeux :
- Que tu t’en prennes à moi c’est une chose Marion, mais Gabriel n’a rien à voir là dedans.
- Oh comme c’est touchant ! S’exclama-t-elle en se moquant ouvertement de moi. C’est pour ça qu’il t’a choisit ? Pour que tu le protège comme il savait que tu ne reculais même pas devant le meurtre ? Non mais regarde le, endormi dans tes bras, si beau… On pourrait croire à un ange. Mais toi ! Tu t’es regardé, tu ne fais que le salir rien qu’en l’ayant trainé dans ton lit.
- Dis-moi Marion, répliquais-je, tu aurais un problème avec l’homosexualité ?
- Non ! S’emporta-t-elle. Mais avec les meurtriers oui ! Qu’est-ce que tu croyais ? Nous le cacher éternellement ! Il est important que tout le monde sache, dit-elle en se tournant vers les autres. J’estime que nous devons être au courant du risque que nous courrons à te côtoyer.
- Tu t’imagines les risques que tu prends à me provoquer ainsi ?
- Je n’ai fait que dévoiler la vérité ! Se défendit-elle en faisant un pas en arrière.
- Et t’en prendre à Gabriel ! Il n’a rien à voir là dedans. Pourquoi est-ce que tu t’acharnes ainsi sur lui ? Par jalousie ? Tu n’as pas su le garder… C’est plausible !
- Mais je n’en ai rien à foutre de lui, au contraire, au moins je n’ai plus à le supporter. Un gamin pleurnicheur arrogant et bourré de défaut.
Marion avait vraiment beaucoup de chance que Gabriel soit dans mes bras. Il m’empêchait de déverser réellement ma colère sur elle physiquement.
- Dis-moi Juha, dit-elle en reprenant de l’assurance, est-ce qu’au moins tu as pris ton pied avec lui ? J’espère pour toi qu’il est plus doué avec les hommes… Remarque, se faire baiser, ça doit être plus facile pour lui. Honnêtement, de toi à moi, qu’est-ce que tu lui trouve pour avoir ne serait-ce que l’envie de te le faire ?
- Tu te rends compte à quel point tu es pathétique ! Attaquer aussi bassement, devant tout le monde. Gabriel vaut mille fois mieux que vous tous réunis dans cette salle. Dis-je en les toisant sévèrement. S’il n’était pas là, rien ne m’aurait poussé à rester parmi vous. Vous êtes tous à le jalouser alors que vous n’avez pas vécu ni fait la moitié de ce qu’il a enduré pour parvenir jusqu’ici. Vous devriez le respecter au lieu de le dénigrer. Et n’allez pas en plus lui rajouter mes problèmes sur le dos.
Prenant une courte pause, je toisais Marion de toute ma hauteur et mon mépris, sans cacher la rage qui faisait vibrer mon âme :
- Ta vie ne doit pas vraiment être passionnante si tu prends autant de temps à pourrir celle des autres. Notre vie privée n’est pas une pièce de théâtre ! Ne t’avise plus jamais de t’en prendre à Gabriel… La menaçais-je. Ou je te promets que tu le regretteras.
- Tu crois vraiment que tu me fais peur ! Je…
Marion fut soudain arrêtée, la main de son père atterrissant violemment sur sa joue. Depuis combien de temps était-il ici ? Je n’en avais pas la moindre idée. Kay vint se placer à côté de moi, fixant Gabriel anxieux.
- Disparais de ma vue ! Je ne veux plus te voir jusqu’à nouvel ordre. Tu me fais honte Marion. Tu n’es qu’une salle petite garce égoïste et cruelle.
L’attrapant d’une poigne ferme par le bras, il l’entraîna hors d’ici loin de nous. C’est à ce moment là seulement que je réalisais mon état. Fébrile, je tremblais encore sous la colère, presque trop faible pour maintenir Gabriel. Kay sembla s’en apercevoir car il le prit de mes bras, pour le porter tout contre lui, m’arrachant à ce que je savais être notre dernière étreinte.
- Je vais l’emmener dans sa chambre, m’expliqua-t-il, sans me laisser vraiment le temps de réagir.
Je ne dis rien, je ne fis rien, simple spectateur de la fin de notre couple. Gabriel, emporté par celui qu’il lui fallait. Je m’étais déjà mille fois imaginé cette scène, mais la vivre réellement était autre chose. Marion avait malheureusement dit vrai : j’étais dangereux, dangereux pour quiconque s’approchait trop de moi.
Cette fois-ci, je me serais au moins arrêté à temps. Tournant les yeux vers la salle qui me fixait encore, muette, je jetais un dernier regard avant de sortir. J’avais pris ma décision, dès que tout serait fini avec Gabriel, je partirais d’ici. Je ne survivrais pas à le voir dans les bras d’un autre, incertain de savoir comment ma vie serait sans lui. A cette question, je préférais ne même pas penser à la réponse. Comprendrait-il seulement un jour mon choix ? N’en avait-il tout simplement pas assez ? Tiraillé entre deux hommes, je l’aidais à faire le meilleur choix possible…
- Juha ? M’interpella Philippe alors que je sortais du bâtiment. Je suis vraiment désolé pour ce qui vient de se passer. Je… Je te donne ton après-midi, repose-toi et nous parlerons de tout cela demain.
Je ne répondis même pas, lui offrant simplement un léger acquiescement de la tête. Me détournant de lui, j’allais droit devant moi. J’avais tellement mal au cœur que pleurer me semblait impossible. Me répéter sans cesse que c’était la bonne décision me faisait pourtant tenir encore debout.
Sans trop m’en rendre compte, je me retrouvais assis sur le banc de la vielle carrière, regardant un poulain et sa mère se dégourdir les pattes dans la neige.
Inspirant profondément, je me sentais vide. La colère me quittait peu à peu. Je repensais à la chaleur de Gabriel collé tout contre moi, inconscient et au bien que cela m’avait fait. C’était en lui que j’avais puisé mes forces et pour lui que j’avais tenu tête à Marion. Fermant les yeux un court instant, je me perdis dans les souvenirs heureux que nous avions pu partager, me remémorant nos étreintes, notre première fois… Le souvenir de notre première rencontre m’aurait presque fait sourire si mon cœur n’était pas aussi meurtri.
Perdu dans toutes ses pensées pendant je ne sais combien de temps, je ne m’aperçus de la présence de Gabriel que lorsqu’il s’assit près de moi. Il gardait une distance respectueuse, étant bien loin du temps où l’on aurait pu se qualifier d’intimes. Il n’avait même pas besoin de commencer à parler, je savais et sentais pourquoi il était ici. Mon cœur tonnait dans ma poitrine, et je tentais laborieusement de me dire qu’il faisait le bon choix.
- Il est beau notre couple, tiens… Souffla-t-il avec amertume et une pointe de faux amusement dans la voix après un cours silence gêné.
Ne pouvant me retenir, je lâchais dans un murmure qui m’était plutôt adressé mais que Gabriel pris pour lui :
- Comment en est-on arrivés là ?
Choqué par ma question, il se tourna face à moi en s’exclamant :
- C’est à moi que tu demande ça ?!
Je ne répondis rien, un silence pesant et angoissant nous enveloppa. Une question finit par me brûler les lèvres, au souvenir de ce qui avait tout déclenché. Jamais je ne l’avais sondé à ce sujet, désirant au moins le savoir avant de définitivement le quitter pour le laisser se reconstruire avec un homme plus sain que moi.
- Pensais-tu réellement ce que tu as dit ?
Gabriel savait pertinemment ce à quoi je faisais allusion. S’il avait connu mon secret, il aurait trouvé ma question ridicule. Je n’avais qu’à le sond Que sa simple amitié ne me suffirait jamais, qu’il comptait pour moi plus que tout. J’aurais pu le prendre dans mes bras, démentir ses propos, lui demander de me laisser du temps. Mais n’aurais-je pas été égoïste ? Serais-je seulement un jour capable de dire à nouveau « Je t’aime » ? Je devais lui rendre sa liberté, et rester dans la prison que je m’étais forgée et dont je ne parvenais pas à sortir. J’aurais pu me battre, ne pas accepter avec autant de résignation cette séparation. Je ne sus grâce à quelle force je restais immobile et silencieux.
Gabriel finit par se lever, et commença à partir, tandis que je redoublais d’effort pour lutter contre mon envie de l’attraper par le bras et de le retenir… Mais le retenir pour quoi ? Pour le détruire d’avantage ?
Gabriel s’arrêta au bout de quelques pas, et sans pour autant se retourner, il déclara :
- Je passerais ce soir chercher quelques affaires pour la semaine…
Sans attendre de réponse, il reprit sa route, s’éloignant définitivement de moi. S’il avait tourné la tête à ce moment là, il aurait vu alors mon visage inondé de larmes…
Je ne fis rien pour les retenir, j’en aurais été de toute façon incapable. Je restais là, le regard dans le vide, pleurant silencieusement, passif quant à ma douleur, aveugle du monde extérieur.
- Je me doutais que tu serais là… Me dit Dorian, en s’asseyant près de moi. J’ai vu Gabriel…
Je ne lui lançais même pas un regard, ni la moindre attention, murmurant plus pour moi que pour lui, formalisant à voix haute ce qui venait de nous arriver :
- C’est fini…
Les larmes redoublèrent, tandis que la main de Dorian se posa sur mon épaule. Un regard vers lui, sa compassion, ce silence, la douleur poignante me firent craquer pour de bon. La main de Dorian serra plus fort mon épaule, alors qu’il prononçait mon nom avec une voix emprunte de tristesse, avant de me demander :
- Tu lui as parlé ? Dis ce que tu avais sur le coeur ?
Je fis « non » de la tête, et Dorian répliqua aussitôt :
- Mais enfin ? Pourquoi ? Tu m’as dit hier que tu tenterais de lui parler ! Qu’est-ce qui te prend Juha ?
- Si j’avais parlé, cela aurait été trop dur pour Gabriel. Je préfère qu’il m’en veuille… C’est la meilleure solution. Je ne suis pas fait pour lui, ce qui s’est passé avec Marion en est la preuve.
Dorian ne répondit rien, me fixant en attendant que je poursuive :
- Je savais que ça devait arriver Dorian, mais je ne m’attendais pas à ce que ça fasse aussi mal…
Dorian ne résista plus. En un rien de temps, je me retrouvais dans ses bras. Ma tête se posa naturellement sur son épaule, tandis que je pleurais une fois de plus dans ses bras, sans savoir si je parviendrais un jour à m’arrêter.
Dorian me murmura quelques mots de réconfort, mais j’y restais sourd, ne tentant même pas de les entendre. Jamais je ne saurais le remercier assez pour tout ce qu’il faisait pour moi, et pour le soutient qu’il m’avait apporté pendant ces deux semaines. Lui rendant son étreinte, je le serrais contre moi, redressant légèrement la tête. Je croisais le regard du directeur qui passa de la colère à de la peine à mon égard. Il ne vint pas vers nous, poursuivant son chemin vers le parking avant de disparaître de ma vue.
Je ne sus combien de temps je restais dans les bras de Dorian avant de le quitter ayant besoin d’être seul. Dorian me proposa de me ramener chez moi, mais je lui expliquais que je préférais marcher. Il me fit promettre de l’appeler ce soir si jamais j’en avais besoin. C’est ainsi que je rentrais seul, quittant ce centre peut-être pour la dernière fois. Shanenja me suivit, docile et peu joueur, et sans un regard en arrière je rentrais chez moi… Sans Gabriel et avec ce rejet collectif quand à mon passé, je n’avais plus ma place ici.
Assis sur le canapé face à l’entrée depuis que j’étais arrivé ici, je n’avais pas fait un seul geste, me replongeant dans tout mes souvenirs : ceux avec Killian, mais surtout ceux avec Gabriel. Immobile, j’étais maintenant plongé dans le noir, sans trop en avoir conscience. Gabriel n’allait pas tarder à venir chercher ses affaires, et je savais pertinemment que ce serait véritablement la dernière fois que nous nous verrions. M’en voudrait-il d’être partit ainsi ? Certainement énormément, mais j’espérais qu’avec le temps il comprendrait. Je préférais une rupture nette et franche, que de le voir chaque jour un peu plus proche de Kay jusqu’à la concrétisation de leur couple et de leur union. Je préférais me l’imaginer simplement que de le voir de mes propres yeux. De même plus pour Gabriel, mieux valait qu’il m’oublie vite pour se reconstruire avec Kay, que je reste ainsi sous ses yeux.
La porte s’ouvrit, Shanenja se ruant vers Gabriel pour l’accueillir comme il se devait. Allumant la lumière de l’entrée, sans se douter que je le regardais, il s’agenouilla auprès de l’animal avant de le caresser longuement, me laissant imprimer en mon esprit les dernières images de lui que je pourrais emporter.
Après quoi, il se redressa et alluma la lumière. Il ne cacha pas sa surprise de me voir seul dans le salon, dans le noir. Ne supportant pas mon regard, il détourna les yeux en murmurant :
- Je… Je reste pas longtemps…
Sans un mot de plus, il se dirigea dans la chambre. Même vivre dans cet appartement sans lui me serait impossible. Peut-être partirais-je juste après lui, incapable de dormir, mieux valait que je commence à m’éloigner dès maintenant.
Une fois qu’il eut récupéré tout ce dont il avait besoin dans la chambre, il prit la direction de la salle de bain avec son sac. J’avais l’impression que cet instant n’allait jamais prendre fin. De plus, quelque chose tiraillait en moi, comme une envie de sonder Gabriel en profondeur pour vérifier la véracité de ses propos. Pourtant, je m’y refusais depuis qu’il m’avait dit m’aimer. Je m’étais coupé de lui, plus que je ne l’aurais cru, ne sachant plus comment m’y prendre. Seule la peur m’en empêchait… Saurais-je seulement m’en tenir à ce que j’avais décidé si ses sentiments correspondaient et que je me laissais envahir par eux ?
Gabriel arriva dans le salon, ravivant cette tentation à laquelle je résistais sans trop savoir comment. Plus il s’approchait de moi, et plus je sentais ma volonté s’effriter.
- Bon ben… Je… On se voit demain…
Gabriel resta un instant immobile, attendant une quelconque réponse ou réaction de ma part. Ce fut seulement au moment ou il me tourna le dos, prenant la direction de la sortie, lassé de mon comportement, que je ne pus tenir. Je ne pouvais pas partir sans savoir, et c’était maintenant ou jamais. Libérant mon don, celui-ci se déversa aussi vivement que l’eau s’échappant d’un barrage pour aller sonder Gabriel. Pas besoin de contact pour l’atteindre aussi intimement, j’avais été si proche de lui par le passé que nous étions liés.
Passant outre sa douleur actuelle, fuyant son amour pour Kay, évitant ses peurs profondes, je fis le tri à une vitesse que je n’avais jamais expérimentée. Et je parvins enfin à la dénicher, cet amour sincère et si pur. Il n’était pas caché, il était juste là sous mes yeux. Aveuglé par ma peur et ma douleur, je réalisais seulement maintenant l’ampleur du désastre qu’une séparation lui causait. Il m’aimait si profondément, que j’en fus déboussolé mais ravivé de nouvelles forces. Mes résolutions s’effondrèrent tel un château de carte. Impossible de le laisser, impossible de continuer à me taire, impossible de le laisser à un autre.
- Gabriel ! Dis-je alors qu’il venait juste de disparaître du salon.
Marchant vers lui, je me retrouvais debout devant lui, alors qu’il se retournait pour me faire face. Gabriel m’envoya simplement un regard interrogateur. J’avais l’impression d’entendre les battements frénétiques de son cœur, de sentir l’espoir et la peur qu’il ressentait. Me retirant de lui, ayant ce que je voulais, je chutais brusquement dans mon corps, déstabilisé. Si je m’étais écouté après une telle expérience qui avait ruiné toute mon énergie, je me serais effondré. Mais je ne pouvais pas, j’avais entre mes doigts une dernière chance de le récupérer, un dernier espoir, aussi faible qu’une flamme éprouvée par le vent.
Je mis apparemment trop longtemps avant de parler, ne sachant par ou commencer, car il soupira, horriblement déçu, me cachant au mieux son envie de pleurer.
- Ouais… Allez… Salut…
Son sac sur l’épaule, il esquissa un pas vers la porte. Il ne m’en fallut pas plus. Je l’attrapais par le poignet, l’empêchant de fuir.
- Gabriel… Je t’en prie…
Me cédant, Gabriel consenti à se tourner une dernière fois vers moi, m’offrant cette unique chance. Cherchant mes mots, Gabriel attendait patiemment que me lance enfin. Après une longue inspiration, je me décidais enfin à lui dévoiler ce que j’avais sur le cœur. Sans trop savoir ou j’allais, je repris d’une petite voix :
- Jusqu’à maintenant j’ai toujours fait passer Killian avant toi… Je… Je me suis enfermé dans ma douleur et la prison ne m’a certainement pas aidé à oublier et à dépasser ce cap…
- C’est l’impression que j’ai eu aussi, répliqua-t-il.
Ignorant son sarcasme, je poursuivis, laissant les mots traverser mes lèvres sans les retenir :
- Je sais que je suis bourré de défauts, que je t’ai ignoré au moment ou tu avais le plus besoin de moi… J’ai agis comme un égoïste et que toute la douleur que je ressens ne me pardonne pas de mes actes… A présent, je sais ce que ça fait de vivre loin de toi, et je peux désormais affirmer qu’il est certain que je ne peux plus vivre sans toi parce que je ne conçois pas la vie sans toi à mes côtés…
Des larmes coulèrent alors sur les joues de Gabriel. Ne cherchant pas à les interpréter, je fis une courte pause avant de reprendre ma confession :
- Plongé dans ma propre douleur, j’en ai ignoré la tienne, je n’ai pas su écouter ta détresse quand tu as avoué m’aimer… J’ai été trop orgueilleux pour avouer mes fautes tout de suite… Mais je compte bien faire un effort et aller de l’avant, mais pour cela, j’aurais besoin de ton aide car ne j’y arriverais pas tout seul, Gabriel…
Après une seconde durant laquelle il resta silencieux, certainement trop ému pour rajouter quoi que ce soit, j’ajoutais :
- J’espère sincèrement qu’un jour je n’aurais plus besoin de m’appuyer sur toi, et ce jour là seulement, je pourrais être honnête avec moi, mais surtout envers toi…
Voilà pourquoi je ne pouvais pas lui dire « Je t’aime »… Enhardi par une envie que je ne pus retenir, je m’approchais de lui, et m’emparais de ses lèvres pour un baiser violent. Pris d’une pulsion incontrôlable, comme un drogué cédant à sa dose, je forçais le barrage de ses lèvres alors qu’il restait immobile et stupéfié. Insinuant ma langue dans sa bouche, ce ne fut qu’au contact de ma langue contre la sienne que Gabriel répondit enfin au baiser à mon plus grand plaisir.
L’ardeur qu’il y mettait déchaîna un désir insoupçonné dans tout mon être. Nous étions restés tous deux bien trop longtemps loin de l’autre, pour être capable de nous retenir. Si l’empressement que Gabriel mettait dans ce baiser m’étonnait tout autant que cela me ravissait, je ne fis aucun commentaire.
Lorsque je mis fin au baiser, loin d’être rassasié, je déclarai d’une voix étrangement rauque :
- En attendant, je peux déjà te prouver d’une autre façon ce que je ne peux exprimer par des mots…
Sans pour autant lui dévoiler que je comptais m’offrir à lui, je déboutonnais sa chemise avec empressement avant de la laisser tomber sur le sol, incapable de réprimer mes envies. Ma bouche explorait déjà son cou, mordillant sa peau avant de la lécher longuement comme pour effacer la douleur causée par mes dents. Je n’aurais su décrire le plaisir que j’éprouvais à me délecter à nouveau de la saveur si particulière et légèrement sucrée de sa peau.
- Non… Juha… A… Arrête… Tenta-t-il vainement de me repousser, sachant tout comme moi qu’il ne résisterait pas longtemps.
Ne prenant pas attention à ses faibles protestations, je posais délicatement mes mains sur son torse dénudé, galvanisé par ce contact qui m’avait cruellement fait défaut, avide de faire frémir à nouveau sa peau sous mes attentions. Titillant ses tétons qui durcissaient au contact de mes doigts, Gabriel lâcha un soupir de contentement. Prenant cela comme une invitation à aller plus loin, je ne pus que descendre mes mains. Ma virilité commençait déjà à pulser contre sa cuisse, réclamant ce qui lui avait été interdit pendant ces deux semaines. Déboutonnant son jean, passant une main à l’intérieur, Gabriel sembla reprendre ses esprits, car il sursauta violemment en me repoussant. Baissant les yeux, comme honteux, il murmura :
- Je… Nous ne pouvons pas… Ce n’est pas raisonnable… Tout… Tout n’est pas encore pardonné…
- Arrête de réfléchir, Gabriel, murmurais-je d’une voix rauque qui ne cachait pas mon désir. Laisse-toi vivre… Tu n’as qu’une vie, profites-en…
Nous en avions besoin, tous les deux, et pas pour un simple besoin purement physique. J’avais besoin de sentir son corps contre le mien, tout comme c’était nécessaire pour lui. Sans lui laisser le temps de répondre, je l’embrassais de nouveau avec passion et avidité dans le but de le débrider. Réagissant à mon plus grand plaisir à mon injonction, il répondit vivement à mon baiser, glissant une main sur ma nuque et une autre dans mes cheveux afin d’approfondir notre échange.
Un frisson me parcourut l’échine, telle une décharge électrique. N’étant plus maître de moi-même, je mordis sa lèvre inférieure alors que mes mains se posaient sur ses fesses, l’attirant vivement à moi, ne supportant plus cette distance. Nos bassins se rencontrèrent alors que nos lèvres étaient toujours soudées. Soudain, Gabriel poussa un gémissement de douleur et de plaisir mêlés qui mourut dans ma bouche.
Ne lui laissant pas le temps de réfléchir aux raisons qui le pousseraient à refuser, j’investissais son corps, laissant ses résolutions fondre comme la neige au soleil. Il m’avait manqué, terriblement manqué. Aucun de mes gestes n’était dénué de tendresse ou de délicatesse, désirant seulement le retrouver, agissant comme je l’avais toujours fait avec lui dans ce genre de moment. J’avais trop besoin de lui, et je me demandais maintenant comment j’avais fait pour me résoudre à l’abandonner. Aurais-je seulement survécu à une journée sans le voir, en sachant qu’il ne serait plus jamais mien ? Comment avais-je supporté cet éloignement de deux semaines ? J’avais l’impression que cela avait duré une éternité, les secondes se comptant en années.
Gabriel semblait être dans le même état que moi, et il sursauta violemment lorsque je mordillais délicatement le lobe de son oreille, un bras passé avec possessivité autour de sa taille. A ce contact, Gabriel se cambra violemment, nous arrachant à tous deux un gémissement de plaisir lorsque nos virilités entrèrent en contact.
Galvanisé par mon désir plus qu’évident qui battait contre sa cuisse, Gabriel se mit à onduler du bassin, attisant son propre désir tout autant que le mien. A mon plus grand plaisir, il se désinhiba à son tour, me montrant le Gabriel que moi seul connaissait. Entreprenant de me toucher, il mit fin au baiser, explorant de ses lèvres mon visage avant de descendre jusqu’à mon cou, tandis que ses mains se frayaient un chemin sous sa chemise.
Un frisson bien plus violent que le précédent parcourut à nouveau mon échine à cet effleurement, et la seconde qui suivie, Gabriel se retrouvait vivement plaqué contre le mur de l’entrée, alors que je maintenais fermement ses mains au dessus de sa tête, le mettant à ma merci.
Un sourire amusé étira ses lèvres face à la réaction que je venais d’avoir et que je n’avais pu contrôler. Je ne cherchais d’ailleurs en rien à me retenir. Je dévorais son cou et son torse avec une avidité et une gourmandise non feintes. A chaque instant, je savourais sa le gout de sa peau, unique et exaltant. Soudain, un couinement d’impatience s’échappa de ses lèvres entrouvertes lorsque ma langue vint jouer avec ces tétons durcis par le plaisir en même temps que mon genou venait écarter ses cuisses, rapprochant ainsi plus qu’il n’était possible, nos bassins et nos virilités douloureusement tendues. Je n’avais dès lors plus le moindre doute sur l’envie de Gabriel et sur mon propre désir. Les joues et le corps en feu, Gabriel s’abandonnait totalement à moi, m’offrant cette fameuse confiance qui m’effrayait…
Ses mains étaient toujours retenues prisonnières par ma poigne de fer, et il ne pouvait me toucher et me caresser à sa guise, alors que je sentais cette envie lui bruler les doigts. Pleins de ressources, Gabriel pris appuis contre le mur avant de passer ses jambes autour de mes hanches, le pantalon ouvert. Esquissant un lent déhanchement tout en gémissant sans retenue aucune, Gabriel accroissait mon désir déjà plus que conséquent. Fier de l’effet considérable qu’il avait sur moi, il esquissa un sourire ravi, tandis que mes mains venaient se poser sur ses fesses. Les jambes fermement entourées sur ma taille, Gabriel ne pesais presque rien. Il passa un bras autour de mon cou pour m’attirer à lui et ravis mes lèvres d’un baiser enflammé. Se laisser vivre : Gabriel avait pris mon invective au pied de la lettre.
Nos langues se rencontraient ardemment, en manque l’un de l’autre, entraînant sa jumelle dans un ballait érotique et sensuel, toujours plus endiablé, toujours plus profond. Nos corps soudés l’un contre l’autre s’emboitaient à la perfection. Maintenant libre, les mains de Gabriel vinrent vagabonder sur mon corps laissant cours à la passion qui le consumait. Mes vêtements m’empêchaient de véritablement sentir le toucher direct de ses doigts sur ma peau, et cela semblait le troubler tout autant. Bientôt, je laissais sa langue abandonner la mienne, et Gabriel alla se perdre dans la peau de mon cou. Celui-ci prit un mail plaisir à titiller les zones érogènes qu’il y trouva. Le plaisir apporté m’obligeant à laissé échapper des gémissements qui semblait ravir les oreilles de mon amant. Totalement attentif, mon attention toute entière tendu vers ce qu’il me faisait, j’étais tout entier soumis à la moindre de ses caresses et de son bon vouloir.
J’acceptais cette douce torture qu’il fit durer encore un instant, puis lassé de ce petit jeu, il entreprit de passer à autre chose. Non sans difficulté, il déboutonna mon jean. Au contact aérien de ses doigts effleurant ma virilité, je ne pus m’empêcher de me cambrer afin d’approfondir ce contact jugé trop succin, tout en étouffant dans son cou un gémissement rauque incontrôlable. En position d’infériorité face à moi, je ne lui concédais pas moins qu’il était maître de mon plaisir.
Se démenant, il parvint à glisser sa main dans mon boxer et du bout des doigts, il effleura avec hésitation mon érection alors qu’ondulant du bassin, les dents plantées dans son cou, je me laissais complètement aller au plaisir qu’il me faisait ressentir. Les petits cris que je poussais aidèrent Gabriel à prendre confiance en lui et il raffermit sa prise sur ma virilité.
Lentement, il entama un lent va et vient ponctuer de baisers frénétiques déposés dans mon cou. Ivre de plaisir, je tentais d’atteindre le plus rapidement possible les sommets du plaisir en de vigoureux déhanchement, savourant à chaque instant ce que m’offrait mon amant. Cependant, Gabriel gardait obstinément le même rythme horriblement lent dans le but d’attisé au maximum mon désir, cessant parfois tout mouvement ce qui lui valait de ma part un grognement rauque de mécontentement. Jouant de ma patience et de ma capacité à tenir, il accéléra enfin la cadence de ses va et vient, cessant sa torture, m’arrachant un cri d’exaltation à l’état pur. Alors que j’étais sur le point de me libérer, me retenant au maximum, Gabriel finit par accélérer d’avantage. Un instant plus tard, je me libérais dans sa main en un cri de jouissance, irradié par ce plaisir irrationnel et dévastateur.
Il fallut un moment avant que je reprenne mes esprits, restant la tête posée sur son épaule et le visage enfoui dans son cou. La respiration saccadée, je pris le temps de me remettre de cet orgasme violent qui avait déferlé sur moi.
Lorsque ma respiration fut redevenue à peu près régulière, je plongeais mon regard dans le sien, un petit sourire satisfait encore dépeint sur ses lèvres. Avec une avidité sans cesse renouvelée, je m’emparais de ses lèvres tout en entamant un langoureux mouvement de bassin qui réveilla instantanément son désir, bien décidé à lui rendre la pareille. Ravis, j’entendis un gémissement étouffé naître dans sa gorge alors que je me frottais lascivement contre son intimité, lui rendant la monnaie de sa pièce de la manière la plus agréable possible.
Puis, je retirais mes mains de sous ses fesses, et les posais sur ses hanches nue, désirant une position plus convenable pour ce qui allait suivre. L’esprit embué, Gabriel se contenta de me libérer de ses jambes et repris appuis sur ses pieds. Ravi, je laissais glisser mes mains jusque sur ses fesses, m’insinuant sans pudeur mais sans brusquement aucune dans son boxer que je fis lentement glisser le long de ses cuisses en même temps que son jean et ses chaussettes, le voulant entièrement nu sous mes yeux.
Jamais je ne me lasserais de cette vue qui s’offrait maintenant à moi. Je le vis fermer les yeux, et il retint à grand peine un gémissement de plaisir lorsque mes doigts s’enroulèrent délicatement et avec savoir faire sur sa virilité tendue que je savais douloureuse.
M’agenouillant face à lui, je ne tardais pas à laisser ma langue s’enrouler autour de son érection alors que je le prenais en bouche. A mon tour avec une lenteur exagérée, j’entamai un doux va et vient le long de son intimité, lui arrachant un profond soupir de bien être que je désirais entendre encore et encore. Me concentrant sur ma tache, je sentis tout de même les doigts de mon amant se glisser dans mes cheveux. Après un instant de ce traitement, je cessais tout mouvement, lui arrachant un sanglot de protestation qui mourut dans ma bouche après que je me sois relevé afin de lui voler un baiser fiévreux, déjà en manque de ses lèvres.
Puis, libérant ses lèvres après avoir léché le sang séché de ma morsure, ma langue explora son corps comme pour la première fois, le faisant frissonner de plaisir. Il était indéniable que je prenais autant de plaisir que lui à agir ainsi. Le voir se languir ainsi valait tout les trésors du monde. Reprenant ma descente, je m’arrêtais sur son tout nouveau tatouage, prenant cette fois véritablement le temps de l’observer. Avec une extrême délicatesse, j’effleurais de mes doigts cette zone encore sensible, qui eu pour effet de lui déclencher un violent frisson.
Je l’étudiais longuement, l’impriment en ma mémoire comme une chose faisant maintenant partie de mon amant, avant de prendre de nouveau entièrement son sexe en bouche. Les yeux clos, Gabriel cria de plaisir, m’invitant à aller bien plus loin et à cesser de me faire languir. Ma langue experte s’enroulait en un mouvement irrégulier autour de son intimité, le guidant irrémédiablement aux portes de la jouissance. Je sentais Gabriel se noyer dans le plaisir qu’il ressentait, perdant peu à peu conscience de l’espace et du temps. Nous étions tous deux uniquement concentré sur le plaisir que je lui offrais.
Ce fut après une caresse plus poussée que je sentis Gabriel vaciller. Le comprenant proche de la libération, j’accélérais la cadence. Allant toujours plus loin, ce fut après une dernière caresse profonde et bien plus poussée que Gabriel se libéra dans un cri de jouissance qui tinta harmonieusement à mes oreilles. Ses jambes ne supportant plus son poids, il s’écroula sur le sol, le souffle erratique. Sautant sur l’occasion, je vins immédiatement lui voler un baiser passionné.
Agenouillé entre ses cuisses, je déposais des milliers de baisers papillons sur son visage, et son corps moite de sueur, le laissant lentement se remettre de ses émotions et qu’il stabilise sa respiration.
Levant la main, il la posa avec tendresse sur ma joue rugueuse et mal rasé, me forçant à relever la tête et planta son regard dans le mien. Dans ses pupilles, je pu y lire les mots qu’il n’avait pas la force de prononcer. Après une longue minute à nous fixer ainsi, il m’attira à moi et avec une extrême délicatesse, il prit possession de mes lèvres, dans un baiser débordant d’amour, un baiser emprunt d’une douceur qui m’avait fait défaut depuis des années.
Ce baiser n’avait rien à voir avec les précédents baisers enflammés que nous avions partagés. Non, celui-ci scellait enfin notre réconciliation et le pacte que nous venions d’échanger silencieusement. Nous nous promettions tous deux, que plus jamais une crise comme celle que nous venions de vivre n’arrive à nouveau. Jamais nous n’oublierons ces deux dernières semaines, les gardant en mémoire pour ne plus jamais en arriver là…
Dans ce baiser, je sentis Gabriel mettre tout son amour et son désir pour moi, alors que ses bras se refermaient sur moi, me laissant dans une étreinte qui faisait battre mon cœur.
Lorsque nos lèvres ses séparèrent, Gabriel glissa son visage dans mon cou, inspirant profondément avant de murmurer au creux de mon oreille dans un souffle :
- J’ai envie de toi… Mais pas ici… Pas comme ça…
Sa demande me surpris, jamais Gabriel ne s’était montré aussi direct et avenant. Plantant mon regard dans le sien, je cherchais ce qui pouvait être la cause d’un tel changement. Je ne pouvais pas dire que je n’appréciais pas Gabriel ainsi, plus débridé, au contraire, mais je n’étais pas habitué. Celui-ci se mit à rougir, sans détourner les yeux, me montrant à quel point il était déterminé. Il en avait autant envie que moi, mais s’offrait de manière différente. Etait-ce du au fait qu’il m’avait révélé m’aimer, ne voyant plus de limite entre nous deux. Mon regard s’illumina, heureux de connaître à nouveau ce sentiment, heureux de sentir Gabriel plus proche de moi comme jamais il ne l’avait été.
Un sourire vint se dépeindre sur mes lèvres et m’arrachant à son étreinte, je me levais pour accéder à sa requête. Debout face à lui, je ne pus m’empêcher de le contempler sa nudité, avant de lui tendre la main, jugeant l’avoir suffisamment admiré. Gabriel m’adressa un sourire et attrapa la main que je lui tendais avec cette confiance en cet instant ne m’effrayais pas.
D’un geste vif, mais emprunt de tendresse, je l’aidais à se relever, l’attirant contre moi, entourant sa taille d’un bras possessif, ne désirant pour rien au monde le laisser fuir. Un léger sourire dépeint sur les lèvres, Gabriel soutint mon regard. Il s’avança lentement vers moi afin de ravir mes lèvres, à mon plus grand plaisir. Ne pouvant cependant pas supporter sa progression volontairement hésitante, je comblais l’espace qui nous séparait encore avec un empressement non dissimulé.
Bientôt, ma main alla se perdre sur ses fesses, très vite rejointe par sa jumelle. Sans jamais rompre le contact de nos lèvres soudées, je le guidais à travers le salon. Au passage, il fallut bien évidemment que je trébuche sur un objet non identifié, qui faillit nous faire chuter tous les deux. Cramponnés l’un à l’autre, Gabriel esquissa un sourire amusé, tandis que je reprenais ses lèvres en otage. Jamais je ne me lasserais de leur gout, jamais je ne voulais les laisser à quelqu’un d’autre.
Une fois arrivés dans la chambre, je laissais à peine le temps à Gabriel de fermer la porte sur notre passage, la poussant simplement du pied. Sans faire attention, je buttais contre le pied du lit. Chutant sur le matelas, je m’agrippais à lui, l’entrainant dans ma chute. Gabriel se retrouva allongé sur moi, le visage enfoui dans mon cou. Je ne pu retenir un sourire, amusé par cette chute, mais je fus bien vite emporté par la bouche de Gabriel se déposant sur ma peau. Il était indéniable qu’il gagnait en savoir faire…
Il finit par se redresser, s’agenouillant sur mon bas ventre. Me chevauchant sans la moindre honte, il ondula du bassin, provoquant chez moi une réaction qu’il fut obligé de sentir. Comme si rien n’avait été fait jusqu’à maintenant, mon excitation revenait au point de départ, avide de toujours plus. Les deux mains posées à plat sur mon torse, Gabriel ferma les yeux, mordant sa lèvre inférieure en retenant un gémissement la tête légèrement penché sur le côté. Cette vue me rendait encore plus fou.
Le souffle erratique, il reporta son attention sur moi, me fixant d’un regard à moitié voilé par le plaisir qu’il partageait avec moi. Mes mains posées sur ses hanches, je le guidais au mieux dans son déhanchement, ne le quittant pour rien au monde du regard. Je n’arrivais cependant pas à cacher ma surprise de le voir ainsi, poussant toujours les limites qu’il s’était inconsciemment fixé. C’était parfait pour ce que je prévoyais pour la suite. Rien que l’idée que je sois sien faisait battre mon cœur encore plus vite, vibrant à cette simple pensée.
Comprenant mon étonnement, Gabriel esquissa un petit sourire en coin, et dans un geste narquois, il pressa plus vivement son intimité contre la mienne, déjà douloureuse, m’arrachant un cri de plaisir à l’état pur.
Dans un état second, je le sentis tout de même se pencher vers moi. Il entreprit de gouter la peau de mon cou, alors que ses doigts se faufilaient habilement sous mon t-shirt. Comment avions nous pu nous passer de cela pendant deux semaines ? Je me rendais compte à chaque instant à quel point Gabriel était devenu vital pour moi, sa présence, son odeur, son corps, son être tout entier… Oh comme il m’avait manqué…
Lentement, il remonta mon vêtement, découvrant la peau de mon ventre sans se gêner pour la regarder et la caresser. Je me laissais faire, trop heureux de lui laisser prendre des initiatives. Attiré par mon corps, Gabriel finit par y poser ses lèvres. A ce contact, mon ventre se contracta alors qu’un gémissement rauque s’échappa de ma gorge. Avec une lenteur exagérée, il redessina la courbe de mes muscles, remontant vers mes tétons durcis par le plaisir qu’il me procurait. Je pouvais sentir mon corps entier bouillir de désir, me vrillant les reins, me coupant du monde extérieur, pour ne vivre qu’avec mon amant.
D’humeur taquine, celui-ci se contenta d’en effleurer un du bout de la langue avant de faire le même avec le second, me laissant en plus la caresse de son souffle chaud irradiant l’entièreté de mon corps. Gabriel réitéra son action plusieurs fois et je ne pus retenir un grondement sourd d’impatience, lui faisant comprendre qu’il était temps de passer à autre chose.
Un sourire satisfait étira ses lèvres alors qu’il se redressait pour dévorer avec avidité mes lèvres, baiser auquel je souhaitais répondre avec la même envie. Mais alors que j’entrouvrais la bouche, Gabriel s’écarta de moi, m’adressant un regard menaçant et cessant tout mouvement du bassin. Ne comprenant pas ce qu’il voulait, je rongeais mon frein, alors qu’il se penchait vers moi. Mordillant le lobe de mon oreille, il me souffla de manière suave :
- Tu es bien pressé, honey… N’était-ce pas toi qui me disais que nous avions tout notre temps ?
A ces mots, il me lécha l’oreille, me faisant frissonner avant de se redresser. Je ne pu m’empêcher de lui adresser un regard meurtrier, faussement agacé par sa réplique, alors qu’il avait tout fait pour me mettre dans cet état. Son sourire s’accentua, et après m’avoir volé un énième baiser, il commença à jouer avec mon téton droit de manière plus franche, le mordillant délicatement avant de le suçoter longuement. Je me cambrais alors violemment sous l’afflux de plaisir et ne tenant plus, j’inversais nos positions d’un habile cou de rien. Son petit jeu avait assez duré et j’allais lui rendre la monnaie de sa pièce.
A présent totalement à merci, je ne surplombais de toute ma hauteur, le contemplant tout en réfléchissant à ce que j’allais pouvoir lui faire. Une lueur victorieuse illuminait mon regard, tandis que Gabriel acceptait sans broncher le changement de situation.
Comme il l’avait fait précédemment, j’entamais un lent et langoureux déhanchement qui lui arracha un gémissement muet, sa voix se bloquant dans sa gorge. Puis, sans cesser d’attiser son désir, je retirais mon t-shirt, le laissant tomber au pied du lit d’une manière sensuelle.
Gabriel ne sembla pas se gêner pour me contempler comme je l’avais fait. Mais bien vite en manque de nos baisers, il m’attira pas la ceinture qui ne maintenait plus vraiment mon jean, et dans un mouvement brusque, il m’attira à lui avant de ravir mes lèvres avec toute la passion qui grandissait en lui. Amusé, je me retins de lui donner la même réplique. Pas le moins du monde décontenancé par sa son excès de désir, je répondis avec fougue à son baiser alors qu’il tentait, avec une certaine maladresse due à la hâte de retirer mon jean et mon boxer, dans un désir d’égalité.
Une fois cela fait, j’entendis Gabriel soupirer de contentement lorsque je collais mon corps tout contre le sien, sentant sa peau brûlante, m’électriser un peu plus. Il laissa ses mains caresser ma peau luisante de sueur. Soudées, nos lèvres s’emboitaient parfaitement, ne désirant pour rien au monde se séparer. Avide l’un de l’autre, nous nous faisions mutuellement savoir à quel point nous nous étions manqué et l’importance de notre frustration. Dévorant ses lèvres avec avidité, j’entrainais sa langue dans une chorégraphie complexe et tumultueuse, à laquelle il répondit sans se faire prier, me montrant un désir de plus en plus pressent.
Après ce baiser qui nous laissa tout deux pantelant, j’imprimais un rapide déhanchement sur son intimité durcie, lui arrachant un cri de pur plaisir charnel. Glissant dans son cou dont des frissons parcouraient la peau, je décidais qu’il était plus que temps de passer à autre chose. Hésitant tout de même, et appréhendant sa réaction, je finis par me lancer, murmurant à son oreille :
- Gabriel… S’il te plait… Prend-moi…
Ce n’était qu’un murmure à peine soufflé, telle une supplique, agrémenté d’un langoureux déhanchement. Gabriel réagit aussitôt, se redressant sur un coudre, l’autre main posée sur ma poitrine, me repoussant à une distance raisonnable. Il semblait peu certain d’avoir compris le sens de ma supplication et il me demanda d’une voix tremblante de surprise et d’appréhension mêlés :
- Qu… Quoi ?
Je déposais ensuite mes lèvres sur les siennes, l’aidant à prendre sa décision, mais Gabriel me repoussa une seconde fois :
- Je… Non… Juha, je peux pas… Je ne sais pas… Ne me demande pas de…
Alors qu’il était en train de se perdre dans des explications impossibles, ses yeux s’humidifièrent de larmes, retrouvant alors le Gabriel sensible et pétri de timidité. Posant mon index sur ses lèvres, je lui intimais de se taire silencieusement. Je ne pouvais décemment pas le laisser ainsi.
- Qui aurait cru que derrière ses poses sensuelles se cacherait le plus grand timide que cette terre ait jamais vue ? Soufflais-je avec un sourire tendre. Je comprends ta peur pour l’avoir déjà ressentie, Gabriel, repris-je en retrouvant mon sérieux. Tu en es capable, je le sais et si cela te rassure, je te guiderais…
Honteux, Gabriel n’osait me regarder. Prenant son visage en coupe, je le forçais à me faire face, avant de m’emparer violemment de ses lèvres. Ce n’étais pas un de mes caprices, je voulais réellement que Gabriel me fasse sien. Si je ne pouvais encore lui ouvrir mon cœur totalement, je voulais qu’il sache combien il comptait pour moi. Dans mon baiser, je mis toute la passion et le désir dont j’étais capable. L’invitant à aller plus loin, le tentant, je fis preuve de savoir faire et d’érotisme, ma langue entrainant la sienne dans un ballet endiablé. Cela eu l’effet escompté, augmentant considérablement son désir jusque là entre-parenthèse.
Un gémissement de plaisir naquit bientôt dans sa gorge pour aller mourir dans ma bouche. Prenant cela comme une réponse muette, trop heureux, j’accentuais mes déhanchements, parachevant son désir pour moi. Mes lèvres se collèrent aux siennes et un cri de volupté s’échappa alors de ses lèvres entrouvertes, berçant mes oreilles avec douceur. Les mains posées sur son torse, j’ondulais sur son imitée, gémissant érotiquement son prénom, cherchant à le pousser au bout de ses limites pour ne pas laisser place à l’hésitation. J’obtins l’effet escompté. Alors que j’haletais son nom entre deux gémissements, Gabriel sembla perdre la tête et d’un mouvement brusque, il inversa nos positions.
Un sourire carnassier étira mes lèvres, le désirant à l’instant même tel que je n’avais jamais désiré un autre homme. J’oubliais Killian, ne désirant pour rien au monde comparer. Il n’y avait que Gabriel dans ce monde là, un monde qui n’était pas fait pour plus de deux personnes. Juste Gabriel et moi…
Avidement, Gabriel s’empara de mes lèvres pour un baiser ardent comme rarement encore il en avait été l’auteur. Alors que nos langues se caressaient avec sensualité, je sentis ses doigts s’immiscer entre nos lèvres.
Aussitôt, comprenant ce qu’il voulait, je délaissais sa langue, pour me concentrer sur ma nouvelle tache avec un plaisir que je ne cherchais pas à lui dissimuler.
Pendant un long moment, j’humidifiais abondamment ses doigts, Gabriel mêlant parfois sa salive à la mienne lorsqu’il était trop en manque de nos baisers. Un instant plus tard, je consentis à les libérer, et après un énième baiser, désirant lui laisser tout le temps dont il avait besoin pour se lancer, Gabriel laissa ses doigts courir lentement sur mon corps luisant de transpiration. Je ne pus retenir un gémissement rauque lorsque sa main arriva au niveau de mon intimité, luttant contre un désir terrible d’être possédé à l’instant. J’écartais mes cuisses, en une invitation plus qu’explicite. Gabriel sembla rougir, mais il ne me laissa pas le temps de voir ses joues, car il s’empara de mes lèvres, certainement pour se donner du courage.
Avec une lenteur un peu trop exagérée qui trahissait son anxiété de mal s’y prendre, il insinua un premier doit en moi avec délicatesse. Avec inquiétude, il fixa mon visage, comme prêt à tout arrêter au premier signe de douleur. Savait-il seulement la torture qu’il me faisait vivre ? Un sourire amusé étira mes lèvres et passant un bras autour de son cou, je l’attirais à moi et murmurais à son oreille :
- Je ne suis pas en sucre, tu sais…
- Te moques pas, gémit-il honteux. J’ai tellement peur de te faire mal…
- Je ne moque pas Gabriel, soufflais-je avant de l’embrasser tendrement afin de le rassurer. Continue comme tu fais, c’est parfait…
Gabriel esquissa un sourire timide et repris à ma plus grande joie, un lent va et vient, entreprenant de me préparer avec un peu plus de conviction. Je n’hésitais pas à le guider à l’aide de soupirs et de gémissements. Ce début de préparation était fait avec tellement de douceur et de tendresse que je ne ressentis aucune douleur. L’excitation était de toute façon trop forte et j’étais parfaitement détendu dans ses bras. Étrangement, c’était une forme de confiance que je commençais déjà à lui offrir…
Après un temps, rassuré de ne pas me faire mal, Gabriel me pénétra d’un deuxième doigt, l’insérant en moi avec la même délicatesse. Si celui-ci fut au départ gênant, il n’était pas douloureux. Sans se départir de sa douceur, il entama un lent mouvement de va et vient, alors que je m’emparais de nouveau de ses lèvres. Une fois le baiser rompu, Gabriel se redressa, observant avec attention mon visage. Gémissant sans retenu, m’empalant de moi-même sur ses doigts, je lui donnais une réponse plus qu’explicite.
Une lueur de désir à l’état pur éclaira ses prunelles alors qu’il inséra un dernier doigt en moi. Celui-ci fut légèrement douloureux, mais je fis tout pour m’habituer à cette intrusion. Gabriel cessa tout mouvement, déposant des dizaines de baiser papillons sur mon visage, souhaitant me faire oublier… Un sourire de remerciement naquit sur mes lèvres, entièrement satisfait de Gabriel et de ses attentions.
Gabriel me vola un baiser, comme dépendant de ma bouche, tout comme je l’étais avec ses lèvres. La douleur finit par n’être plus qu’un vague souvenir, mais Gabriel continua de longues minutes à me préparer. Je n’avais pas besoin de me servir de mon don pour comprendre qu’il avait du mal à se retenir, ressentant la même envie pressante. M’empalant toujours plus profondément sur ses doigts, mon corps entier réclamait bien plus. Lorsque je ne pus plus tenir une minute de plus, je murmurais entre deux gémissements, l’esprit dans le vague, perdu dans mon désir, enivré par mon plaisir :
- Gabriel… Maintenant… Prend-moi… S’il te plait…
Tétanisé par ma demande empressée, Gabriel stoppa net tout mouvement avant de plonger son regard dans le mien. Je ne pouvais rien faire pour lui cacher mon désir puissant et enflammé. M’apercevant de son hésitation, je me redressais sur mes coudes, et le fixant dans les yeux, je déclarais le plus sérieusement du monde :
- Je te veux Gabriel… Viens…
Sans lui laisser le temps de répondre, je l’embrassais avais voracité, tandis qu’il prenait place avec hésitation entre mes cuisses. De fine gouttes de sueur perlaient sur ses tempes, collant ses cheveux à son front. A aucun instant je ne quittais ses yeux, le suppliant de venir enfin…
Ce ne fut heureusement qu’après un dernier instant d’hésitation qu’il finit par s’insinuer extrêmement lentement en moi. Un soupire de satisfaction traversa mes lèvres alors que Gabriel découvrait l’inconnu.
Toujours trop précautionneux, Gabriel ne se laissait malheureusement pas totalement aller. Tout deux satisfait de manière incomplète, je pris les choses en main, ne pouvant plus attendre pour le sentir entièrement en moi, lui livrant mon corps… Je lui arrachais un cri de surprise et de plaisir mêlés lorsque je m’empalais brusquement sur son érection, d’un habile coup de rein. Un cri de pur plaisir enfin assouvi s’échappa de mes lèvres, faisant écho au sien. Sans attendre, en voulant toujours plus, j’entamais un rapide va et vient, ignorant la douleur qui, je le sentais, passerait très vite…
Gabriel me laissa faire un instant, trop envahi par ce nouveau plaisir, le regard perdu sur mon corps. M’enveloppant dans cette luxure, je me laissais totalement aller à notre plaisir, me mouvant sur lui, dans un état second. Mais mon amant finit par reprendre le contrôle de notre union, et je le laissais faire sans la moindre résistance. Les mains posées sur mes hanches, il nous imposa un tout autre rythme, bien plus langoureux, qui je le savais était destiné à attiser notre plaisir.
Ivre, je laissais cours à mes gémissements, qui finirent par avoir raison de Gabriel qui accéléra sa cadence, me pénétrant toujours plus profondément. Je n’avais connu pareille intensité qu’avec une seule personne, mais c’était à Gabriel uniquement que je m’offrais cette nuit-là, comme toutes celles qui suivraient. Je n’appartenais qu’à lui et à son amour…
Les yeux rivés sur mon visage ravagé par le plaisir, Gabriel ajouta encore à mon plaisir en prenant mon sexe en main, calquant sur celui-ci le même rythme régulier de ses déhanchements. Je ne pus qu’ouvrir la bouche en un cri muet de plaisir, et passant mes bras autour de son cou, je l’attirais à moi pour un baiser ardent, le remerciant ainsi silencieusement.
Puis, sentant que j’arrivais au point de non-retour, Gabriel accéléra astucieusement la cadence, menant la danse à la perfection. Dans un ultime coup de rein, bien plus amble et plus profond que les précédents, Gabriel m’envoya dans les bras d’un orgasme foudroyant, d’une intensité sans pareille. Je me libérais entre nos deux corps enlacés, criant son prénom. Gabriel ne tarda pas à me rejoindre alors que je cambrais mon corps tout entier, effleurant la chute de ses reins. Il se libéra en moi dans un cri de jouissance qui me combla plus qu’il n’était possible.
Le corps luisant de sueur et parsemé de tremblements, mon amant se laissa retomber entre mes bras, enfouissant son visage dans mon cou. Sa respiration était encore saccadée et de mon côté, je me remettais lentement de mon orgasme, mes doigts effleurant lentement le creux de ses reins en un apaisant mouvement qui le fit frissonner.
- Je ne te savais pas si sensible à cet endroit, soufflais-je en esquissant un sourire.
- Je t’aime, souffla-t-il sans relever ma remarque précédente.
Au lieu de me faire peur, de me paralyser, un sourire tendre se dessina sur mes lèvres alors qu’il se redressait pour me voir. Je ne pouvais encore lui donner de réponse orale, mais alors qu’il répondait à mon sourire, je m’emparais de ses lèvres pour un baiser des plus doux, lui montrant que j’étais loin d’y être indifférent, acceptant ces quelques mots et ses sentiments. Gabriel finit par se retirer de moi, et se blotti amoureusement entre mes bras. Je l’embrassais sur la tempe tandis que du bout des doigts, je décollais les mèches de cheveux collées sur son front.
La tête callée au creux de mon épaule, mon amant effleura délicatement du bout des doigts la peau de mon torse, engourdi par la fatigue.
Il finit par s’endormir alors que je veillais encore quelques instant, ne me laçant pas de passer lentement mon bras dans son dos, enivré par son souffle chaud dans mon cou. J’avais du mal à croire que tout cela était réel, et pourtant… Emporté à mon tour, bercé par sa respiration calme et régulière, j’allais le rejoindre dans les bras de Morphée…
Je me réveillais seul dans le lit le lendemain matin. Ouvrant les yeux, le cœur battant, j’eus peur d’avoir simplement vécu un rêve cette nuit là, même si mon corps légèrement courbaturé semblait me prouver le contraire. Tendant l’oreille, je n’aurais su décrire le soulagement que je ressentis lorsque j’entendis du bruit dans la cuisine. Un sourire se dessina alors sur mes lèvres au souvenir de cette nuit partagée… Certes, une discussion allait être nécessaire, mais un espoir nouveau prenait naissance en moi.
Après quelques minutes, je décidais de me lever pour aller le rejoindre, craignant malgré moi sa réaction. Tentant de ne pas y penser d’avantage, j’attrapais mon boxer et mon jean négligemment jeté sur le sol la veille avant de les mettre, n’ayant rien d’autre sous la main à me mettre. Une douche serait de toute façon nécessaire.
Je retrouvais Gabriel dans la cuisine, mais je ne m’attendais certainement pas à le voir ainsi, nu, avec une simple serviette autour de la taille, dos à moi, en train de faire la vaisselle. D’ici, je pouvais voir sa fine cicatrice, mais rien n’aurait pu enlever à mes yeux la beauté de son corps. Elle faisait partie de lui, simple pointe de l’iceberg, cachant bien plus de souffrance qu’on ne pouvait se l’imaginer. Aurais-je un jour le courage de lui dire comment je pouvais le comprendre ?
M’approchant légèrement de lui, un désir à nouveau insatiable s’empara de moi, et d’une voix rauque, je déclarais avec une pointe d’amusement :
- Quelle agréable vision divine qui s’offre à moi au réveil. J’espère avoir droit plus souvent à des visions de rêves comme celle là…
Sursautant, Gabriel marmonna ensuite en râlant :
- Oui, dans tes rêves.
Loin d’être arrêté, je réduisis la distance entre nos deux corps avant de l’enlacer jalousement par la taille une fois arrivé à sa hauteur. Mes lèvres se déposèrent presque instinctivement sur sa nuque en un frôlement à peine prononcé. Loin d’être satisfait, je l’attirais d’avantage à moi, collant volontairement mon intimité contre ses fesses pour lui montrer l’effet que la vue de son corps aussi peu vêtu produisait chez moi.
Prenant plaisir à le voir perdre ses moyens, déjà fébrile à mon contact, je déposais une nouvelle fois mes lèvres dans son cou avant de les laisser dériver jusqu’à son oreille au creux de laquelle je murmurais après l’avoir léchée avec sensualité :
- Tu disais ?
Pour toute réponse, Gabriel pencha légèrement la tête en arrière afin de m’offrir son cou, laissant à ma langue un plus grand champ d’action. Cédant avec plaisir à sa demande muette, je m’empressais de le combler. Dans un soupire qui ressemblait plus à un gémissement, Gabriel finit par souffler :
- Tu es insatiable, mon amour…
- Comment l’être, répondis-je ayant du mal à cacher mon trouble au sujet du dernier mot qu’il avait employé. Tu es tellement désirable… Surtout quand tu te promènes nu dans l’appartement, ajoutais-je avec une pointe de moquerie, afin de dissimuler au mieux le sentiment étrange qu’il faisait naître en moi à m’appeler ainsi.
S’arrachant à mon étreinte, il se retourna vivement, les joues rouges cramoisies. Il s’exclama, protestant :
- Je ne suis pas nu !!
D’un air mi amusé mi sceptique, je me reculais et d’un air appréciateur qui ne fis qu’accentuer sa gène, je le détaillais de la tête aux pieds sans la moindre pudeur avant de déclarer :
- C’est tout comme… Répondis-je, un sourire intentionnellement vicieux étirant mes lèvres.
Sur ces mots, je m’approchais à nouveau de lui et l’embrassais avec passion, tandis que sans la moindre résistance, mes mains se posèrent sur ses fesses. Le soulevant, je le fis s’asseoir sur le plan de travail. Gabriel s’empressa de m’emprisonner entre ses jambes, les mains posées sur mes hanches alors que les miennes caressaient lentement ses cuisses avec une envie non dissimulée.
- Bonjour, murmurais-je entre deux baisers déposés à la base de son cou.
- Bonjour, souffla-t-il à son tour, semblant avoir beaucoup de difficulté à retenir un gémissement de satisfaction.
Je ne pouvais m’empêcher de repenser au terme qu’il avait employé et au plaisir que j’en avais ressentis. Si bien qu’au bout d’un moment, je finis par craquer :
- Et si… Tu me redisais… Ce que tu as dit tout à l’heure, soufflais-je tout en embrassant son cou, le faisant frissonner de plaisir alors que ma langue explorait cette zone que je savais particulièrement sensible.
- Ce que j’ai dit tout à l’heure ? Répéta-t-il, semblant surpris par ma demande et ne voyant pas là où je voulais en venir.
- Oui, ce que tu as dit, repris-je en lui faisant face, le fixant avec insistance, déterminé. Rappel-toi…
Après quelques secondes de réflexion, il répondit :
- J’ai dit que tu étais insatiable…
- Non, le coupais-je sans méchanceté, d’une voix douce. Après…
- J’ai dit que je n’étais pas nu, murmura-t-il en rougissant légèrement.
- Avant, le corrigeais-je avec une pointe d’amusement dans la voix, prenant plaisir à le voir chercher, ayant du mal à ne pas se laisser déconcentrer par mes doigts qui se faufilaient sans la moindre honte sous sa serviette pour effleurer l’intérieur de ses cuisses.
L’esprit embrouillé, loin d’être aidé par mes attouchements, Gabriel finit par déclarer d’une petite voix penaude :
- Je… Je suis désolé… Hummm… Je ne vois pas, gémit-il après une caresse plus poussée prodigué de ma part par sadisme.
- Tu vas devoir te faire pardonner alors… Soufflais-je avant de laisser ma langue suivre la courbe de sa clavicule gauche, savourant comme à chaque fois le goût suave de sa peau, lui arrachant un couinement de plaisir.
- Pourquoi ? Haleta-t-il. Qu’est ce que j’ai dit ?
- Tu m’a appelé « mon amour », murmurais-je à son oreille, comprenant qu’il ne trouverait pas de lui-même.
Je sentis Gabriel frémir sous mon corps. Savait-il seulement l’effet qu’il me faisait, ainsi dénudé, à ma merci, et empli de tous ces sentiments à mon égard. Après ces dix années jamais je n’aurais imaginé connaître à nouveau ce bonheur. Je ne l’avais pas encore pleinement atteint, privant malgré moi Gabriel d’un sentiment semblable.
- Oh… Répondit-il, me cachant assez mal son malaise. Et… Ça ne te plait pas ? Ajouta-t-il, appréhendant à tort ma réponse.
- J’ai jamais dis ça, susurrais-je avant de dévorer ses lèvres avec avidité, l’entrainant dans un baiser fougueux.
Dans un mouvement brusque, ne pouvant contenir mon désir plus longtemps, je glissais mes mains sous ses fesses et le décollais de son siège de fortune. Je sentis Gabriel raffermir la prise de ses jambes autour de mon bassin, frottant son intimité contre la mienne. Avait-il seulement conscience de la douce torture qu’il m’infligeait ?
Gémissant sous ce contact brûlant, aveuglé par mon désir et la passion qui me consumait, je le posais brutalement sur la table, ne pouvant décemment pas le porter plus loin. Le forçant à s’allonger, je me couchais sur lui pour atteindre sa bouche, saisis par le manque. Dans un geste maladroit de par ma précipitation, je dénouais sa serviette qui faisait rempart à sa nudité. Lorsqu’il fut nu, je me redressais et posais sur lui un regard brillant de désir et de fierté. Il n’y avait pas de mot pour décrire sa beauté et ce qu’il représentait pour moi…
Je finis par fondre sur lui pour m’emparer à nouveau de ses lèvres pendant que mes mains dansaient sur son corps en ébullition. En un contact aérien, mes doigts frôlèrent sa peau sensible, lui arrachant des gémissements de plaisir à l’état pur. Sans la moindre honte, il s’abandonnait au plaisir que je lui offrais…
Mu par mes envies, ma langue redessinait maintenant les traits ses abdominaux, tandis que plus entreprenante, ma main remontait lentement l’intérieure de sa cuisse, le faisait se tordre de plaisir sous moi. Sa peau était d’une douceur sans pareille, et son corps ainsi exposé : une véritable invitation à la luxure. Mon bassin collé au sien trahissait mon désir qui augmentait à chaque minute, semblant attiser le sien de façon plus que certaine.
Une sonnerie de téléphone sembla parvenir à mes oreilles, mais je n’y prêtais guère attention, bien trop occupé avec Gabriel.
- Tu… Tu devrais aller répondre… Me murmura alors mon amant.
- … Rappellerons… Soufflais-je en m’emparant de ses lèvres afin de le faire taire.
- Non… Reprit-il en mettant fin au baiser. C’est… C’est peut être important.
J’émis un gémissement de frustration, et soupirant pour la forme, je lui volais un baiser avant de l’abandonner à contrecœur. Quittant la cuisine, je décrochais le téléphone d’un geste rageur, offrant un « allo » peu aimable.
- Bonjour, je désirerais parler à Hugo s’il vous plait.
Ne pouvant me retenir de lâcher un soupire, comprenant qu’il s’agissait d’un faux numéro, je finis par répondre qu’il n’y avait aucun Hugo ici. Mon interlocuteur n’insista heureusement pas, et raccrocha après s’être excusé. Dès que j’eus reposé le combinais, je retournais directement dans la cuisine. Gabriel était toujours assis sur la table de la cuisine, et je ne pus faire autrement qu’arriver en face de lui, la mine renfrognée. Gabriel me demanda, inquiet :
- C’était qui ?
Lui lançant un regard assassin, je répondis :
-Un faux numéro…
Face à ma mine frustrée et rageuse, Gabriel finit par éclater de rire. Me prenant à son petit jeu, je le stoppais d’une voix glaciale en déclarant, le visage à seulement quelques centimètres du sien :
- « C’était peut être important », hein ?
Un peu effrayé par mon comportement et ma voix froide, Gabriel m’appela :
- Euh… Juha ?
Un sourire en coin étira mes lèvres. Je lui demandais alors en le plaquant de nouveau contre la table avec une violence emprunte de douceur :
- Qu’y-a-t-il ? Tu as peu ? Demandais-je amusé et surpris par l’effet que j’avais produit. Tu as peur ou tu me désires ? Tu trembles tellement…
Ma voix susurrée à son oreille sembla attiser son désir.
Ma voix susurrée à son oreille sembla attiser son désir. Pour toute réponse, Gabriel m’emprisonna de ses jambes avant d’onduler éhonteusement contre mon inimité tendue sous mon jean. M’attrapant par les cheveux dans un geste doué de douceur, il m’attira contre lui :
- Cela répond à ta question ?
A ces mots, il m’embrassa franchement, dévorant mes lèvres tandis que sa langue franchissait sans difficulté le barrage de mes dents. Après ce baiser qui nous laissa tout deux à bout de souffle, ne pouvant plus me contenir bien longtemps, j’humidifiais rapidement mes doigts. A bout de patience et avec empressement mais non sans douceur, j’entrepris de le préparer. Un gémissement de plaisir s’échappa de sa gorge alors que mon premier doigt entrait en lui.
Ne négligent pas son érection déjà conséquente, mon autre main s’activa sur celle-ci, lui arrachant des gémissements non contenus. Ne sachant plus vraiment par quelle force de volonté je parvenais à me contenir, un second doigt ne tarda par à rejoindre le premier. Celui-ci ne fut presque pas douloureux, mais Gabriel gémis de douleur lorsque j’entamais un mouvement de ciseau avec mes doigts. Mais cela ne fut bientôt qu’un lointain souvenir, et Gabriel finit par ne ressentir plus que du plaisir. Galvanisé, Gabriel finit par entamer un langoureux déhanchement, s’empalant de lui même sur mes doigts. Retenant de justesse un cri de surprise, je craquais, déclarant d’une voix rauque :
- Gabriel…. Je n’en peux plus… Je te veux…
A mon plus grand soulagement, Gabriel répondit à ma supplication, un sanglot de plaisir se brisant dans sa gorge :
- Viens… Juha, viens… Maintenant….
Répondant au quart de tour à son injonction, je déboutonnais mon jean et le baissais en même temps que mon boxer libérant mon intimité de son étau. Me présentant à l’entrée de son intimité, un violent frisson de désir me parcourut alors que mon sexe effleurait son orifice. Lui volant un baiser, je me penchais à son oreille et d’une voix pleine de remord sachant pertinemment qu’il n’était pas suffisamment préparé, je murmurais :
- Pardonne-moi…
Sans tenir une seconde de plus, je m’enfonçais vivement en lui, le pénétrant entièrement cédant enfin à ma pulsion. Comme je l’avais craint, Gabriel se cambra violemment, un cri de douleur lui arrachant la gorge. Je connaissais que trop bien ce qu’il devait ressentir. Des larmes coulèrent silencieusement le long de ses joues tandis que ses ongles étaient plantés dans mes épaules. Oubliant le plaisir vif que je ressentais de mon côté, je le laissais s’habituer à ma présence. Mes lèvres parsemaient son visage de baisers papillons, en un pardon qui avait pour but de le détourner de sa souffrance.
Puis, ne pouvant rester ainsi, dans un lent mouvement, je commençais à me mouvoir en lui, tout en lui murmurant des mots doux et apaisant. Me servant de mon empathie, je mettais totalement de côté mes propres ressentis, l’accompagnant au mieux. Soudain, la douleur fit place à un plaisir insoupçonné lorsque, d’un mouvement plus puissant et plus profond, je semblais toucher quelque chose en lui qui lui vrilla les reins. Chutant dans mon corps, je fus saisi à mon tour par mon propre plaisir. Je ne perdis pas une seconde avant de réitérer mon action, accélérant la cadence de mes va et vient.
Alors que je gémissais de plaisir, Gabriel était emporté par un plaisir puissant. Plantant violemment ses ongles dans mes épaules, il m’emprisonna entre ses jambes. Laissant libre court à notre passion et l’amour qui le consumait, Gabriel cria sans la moindre retenu. Il criait à s’en briser la voix, comme jamais je ne l’avais entendu, me dévoilant une expression dépeinte sur le visage qu’il n’offrait qu’à moi. Je ne me lassais pas d’admirer les traits tirés et déformés par le plaisir que ressentais mon amant ; cet homme que j’étais le seul à connaître ainsi…
Gabriel étant bien trop proche de la jouissance à mon goût, je cessais subitement tout mouvement et avec une lenteur infinie, emprunte de sadisme, je me retirais de lui. Frustré au plus haut point, Gabriel entrouvris les yeux qu’il avait fermés depuis le début de son plaisir. J’étais dans le même état que lui, nous désirions tous deux cette libération, et pourtant, je voulais plus ! Quasiment couché sur lui, je le fixais de mon regard perçant et pétillant de désir et d’autres sentiments qui ne portaient pas encore de noms définis. Un sourire narquois étira mes lèvres, n’ayant pas oublié notre conversation matinale.
Sous moi, il se tortillait désespérément en sanglotant de frustration tandis qu’il tentait par tous les moyens d’accéder à la jouissance que je lui refusais sans savoir pourquoi je le faisais. Entre deux sanglots, il déclara, la voix brisée :
- Juha… S’il te plait… Ne… Ne me laisse pas ainsi…
Me penchant vers lui, je murmurais à son oreille, un large sourire étirant mes lèvres :
- Dis le mot magique… Je ne te laisserais pas venir avant de l’avoir entendu… Tu sais que tu as une voix magnifique quand tu es sur le point de jouir ? Et la vue me plait tout autant…
Ponctuant mes mots d’une caresse intime des plus poussée qui lui arracha un cri de plaisir, j’happais ses lèvres entrouverte pour un baiser endiablé. Je n’étais pas prêt à lui céder.
- Allez… Dis le moi… Susurrais-je après l’avoir libérer de ses lèvres, désirant l’encourager.
- Je… Je t’en prie… Sanglota-t-il après qu’un nouveau cri de plaisir lui ait arraché la gorge. Viens… Viens…
- Tss… Tsss… Pas avant que tu n’aies dis ce que je veux entendre, répondis-je la voix rauque du au désir et à la frustration que je m’infligeais aussi.
Un nouveau hoquet de sanglot déchira sa gorge alors que son corps était prit de violents tremblements, réclamant lui aussi d’être comblé.
- Allez, dis-le… Insistais-je avant de laisser ma langue lécher ses larmes qui maculaient ses joues, m’offrant un étrange goût salé.
L’esprit apparemment trop embrumé, Gabriel se mit à gémir quelques mots :
- Je… Juha… Je t’…
- Oui… Allez mon ange… Dis-le… Dis-je en l’encourageant, la voix brisée par le plaisir.
- Je t’… Aime Juha… J’ai envie… Amour… S’il te…
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’un cri de pur extase s’échappa de ses lèvres entrouvertes alors que d’un ample mouvement de bassin, je le pénétrais de nouveau entièrement. Il venait de me combler, bien plus encore que je ne l’avais espérer. Non, ce moment ne pouvait pas être plus parfait.
En lui, je restais immobile l’espace d’un instant avant de reprendre un déhanchement encore plus déchaîné qu’avant l’interruption. Submergé par le plaisir, il ne fallut pas bien longtemps avant que je ne craque. Envahi, dévasté par une jouissance fulgurante, je me répandis en Gabriel dans un ultime coup de rien plus profond et plus puissant que les précédents, gémissant son nom. Mon amant me suivit de près, criant mon prénom qui tinta à mes oreilles avec douceur pour parfaire cet instant…
Haletant, le corps recouvert d’une fine pellicule de sueur, Gabriel ouvrit les bras pour m’accueillir. Dans le même état que lui, épuisé mais comblé, je me laissais aller contre lui, enfouissant mon visage dans son cou, inspirant son odeur à plein poumon, celle que j’avais failli ne plus jamais connaître pour la laisser à un autre…
Je pouvais sentir ses doigts jouer avec les petits cheveux de ma nuque, tandis que je l’embrassais du bout des lèvres dans le cou. Dans un souffle, je murmurais au creux de son oreille, le faisant frissonner :
- J’aime quand tu m’appelles avec des petits mots doux comme tu l’as fait tout à l’heure…
- Ouais ben n’y prend pas trop goût non plus, marmonna-t-il vexé, ne faisant pas preuve d’humour.
- … Ce petit côté fleur bleue, ça me donne envie de te faire l’amour encore et encore… Poursuivis-je sans tenir compte de sa remarque.
Je sentis Gabriel troublé et honteux mais tentant de me le cacher, il posa ses mains sur mes épaules et faisant mine de me repoussé il marmonna :
- T’es lourd…
Sans tenir compte de sa remarque, une fois de plus, je repris, une pointe d’amusement dans la voix :
- On est pas bien là, toi et moi ?
Exaspéré face à mon comportement, il déclara d’une voix blasée sans parvenir néanmoins à me cacher son amusement :
- Tu es d’un romantisme… Je pense qu’il y a quand même mieux qu’une table de cuisine pour ce genre… D’activités, non ?
Me redressant sur mes coudes, je plantais mon regard dans le sien, un sourire vicieux étirant mes lèvres, n’ayant pas dit mon dernier mot, je déclarais :
- Oh mais on peut arranger ça tu sais… Il nous reste la salle de bain, la voiture, le…
- Stop ! S’exclama-t-il.
Me repoussant avec plus de conviction cette fois-ci, il reprit :
- Je vais prendre ma douche…
Face à mon regard lubrique en rapport à cette phrase, Gabriel crut bon d’ajouter :
- Seul !!
Sans me laisser le temps de répondre, il m’embrassa furtivement avant de s’éclipser.
A suivre…
Chapitre 11 par Lybertys
Cela faisait plus d’une semaine que nous restions à la cabane. J’attendais patiemment que Gwendal reprenne un poids de forme et se retape. Au fils des jours, il avait commencé à aménager la pièce, la décorant parfois de bouquets de fleurs qu’il trouvait dans les environs. Mon compagnon de voyage me fit part qu’il avait l’impression de se sentir un peu comme chez lui ici et j’avais rit doucement, amusé. Mais au plus profond de moi, cette idée m’avait effrayé. Je ne voulais pas rester ici, je voulais continuer à avancer, comme un être en fuite perpétuelle. Car rester dans un endroit était pour moi avoir trop de temps pour penser et me rappeler, me souvenir de ce que j’avais fait. J’avais pris goût au voyage et je réalisais que c’était devenu comme une drogue, une drogue depuis trop longtemps consommée pour arriver à s’arrêter. C’était bien simple : la route me manquait…
Ce jour là, j’étais dans la rivière, tandis que Gwendal allongé sur le ventre à l’ombre d’un arbre me regardait. Le pantalon relevé jusqu’aux genoux, je tentais tant bien que mal d’attraper du poisson pour le repas de ce soir à l’aide d’un fils de pêche. Cela faisait plus d’une heure que je bataillais et je devais avouer que la patience nécessaire à la pêche n’était pas mon fort. Mais, obstiné, je refusais d’abandonner. C’est alors que, brisant le silence de ce milieu d’après-midi, Gwen m’appela :
- Hayden…
- Tais-toi ! Chuchotais-je, faussement contrarié. Tu fais fuir les poissons…
Je vis Gwendal esquisser un petit sourire amusé, tandis que je repartais à l’affût.
- Quand est-ce que l’on part ? Demanda-t-il.
Cette question si brusque manqua de me faire tomber, glissant sur une pierre bancale.
- Tu veux repartir ? Demandais-je, sans cacher ma surprise. Je croyais que tu te plaisais bien ici…
- Moi oui, mais je vois bien que ce n’est pas ton cas… Répondit-il doucement.
Comprenant que le sujet était sérieux, je ne répondis pas tout de suite et m’approchais de lui, abandonnant à contre-coeur mon idée de pêche. Une fois face à lui, je me laissais tomber sur le sol, m’asseyant en croisant les jambes.
- Je vais être honnête avec toi, déclarais-je en posant mon regard sur lui, sondant inquiet son état de santé. La route me manque, mais je ne veux pas repartir au risque de mettre ta santé en danger.
- En danger ? Répéta-t-il, incrédule. Je ne suis pas en danger ! Tiqua-t-il.
- Même si tu n’en montres rien, j’ai bien vu que tu avais perdu beaucoup de poids, Gwen… Tu n’étais déjà pas épais à la base, mais là c’est devenu flagrant…
A ces mots, je vis Gwen rougir, comme affreusement gêné. Croyait-il vraiment que je n’avais rien remarqué ? Donnant une réponse à ma question il commença, sans oser croiser mon regard :
- Comment tu…
- Le lacet ! Avouais-je avec un sourire un coin. Celui que tu as piqué sur ma chaussure pour attacher ton pantalon… Tu l’as laissé traîner l’autre jour…
- Oh… Souffla-t-il, gêné.
- Tout ça pour dire, repris-je plus sérieusement, que cela ne me gêne pas de rester ici le temps que tu te remplumes un peu. De plus, C’est à moi de faire un effort pour adapter mon rythme de marche au tien. J’ai bien vu que tu faisais ton possible pour suivre mon rythme sans te plaindre, mais je ne peux pas toujours te demander d’arriver à me suivre. Cela fait des années que je mène cette vie, alors que tu n’es à mes côtés que depuis quelques semaines. Du coup, c’est à moi de faire un effort et de m’adapter à ton rythme et de ralentir un peu.
Il sembla touché par mes mots, car il détourna le regard mal à l’aise. Mon coeur s’emballa malgré moi, je commençais véritablement à le désirer et j’avais de plus en plus de mal à réfréner ces pulsions. Mon corps parlait pour moi. Gwen déclara timidement sans se douter de quoi que ce soit :
- Je… Tu n’as pas à faire tous ces efforts pour moi Hayden… C’est moi qui me suis imposé à toi, alors c’est à moi de m’adapter… Et je… Je voudrais que tu me dises si ma présence t’ennuie…
Retrouvant tout mon sérieux, je pris son menton entre mes doigt et l’obligeai à me regarder, avec des gestes emplis de douceur :
- Tu ne me déranges pas le moins du monde, Gwendal, déclarais-je.
- Tu es sincère ? Demanda-t-il, ancrant son regard au mien.
- Je n’ai jamais été aussi sincère, déclarais-je, gravement.
Plongé dans son regard, je n’arrivais pas à décider lequel de ses yeux était le plus profond. J’aimais ses yeux pers, cela lui donnait quelque chose de si particulier et terriblement envoutant. J’aurais pu les regarder pendant des heures. Cependant, ce n’était pas du goût de Gwen qui tenta de se libérer ma poigne. Je libérais alors son menton, pour poser ma main sur sa joue, alors qu’il baissait les yeux, reportant son attention sur le sol.
- Pourquoi détournes-tu le regard ? Demandais-je, ma main posée sur sa joue, la caressant doucement. Tu as des yeux magnifiques… N’ai pas peur de les montrer…
- Mes yeux ne sont pas beau, Hayden, soupira-t-il sans pour autant relever la tête. Tu n’imagines pas ce que c’est d’avoir à assumer le regard des autres, d’avoir à accepter que les grand-mères se signent en me traitant de sorcière dès qu’elles croisent mon regard…
- En quoi leurs réactions t’importent-elles tant, Gwendal ? Demandais-je, agacé malgré moi. En quoi leur avis te tient-il tant à coeur ? Qui sont-ils ? Qu’as-tu à leur prouver ?
- Je… Commença-t-il, hésitant.
- Ignore les, Gwen… Tu ne leur dois rien ! Tes yeux sont une partie de toi, de ce que tu es… Ils sont juste, fascinant… Soufflais-je alors que mon regard accrochait à nouveau le sien.
Envouté, je fus à nouveau possédé par un vague de désir, plus forte que les précédentes. J’avais envie de gouter à nouveau à ses lèvres, de le toucher, le caresser, de l’atteindre…
La distance qui séparait nos lèvres s’amenuisait dangereusement. Et alors que ma bouche effleurait enfin la sienne en une caresse éthérée, Gwendal sursauta violemment sans parvenir à retenir un cri de frayeur lorsqu’un coup de tonnerre retentit bruyamment au dessus de nos têtes.
L’instant suivant, une pluie diluvienne s’abattie sur nous, caractéristique de la fin de l’été. Nous relevant d’un bond, nous rassemblâmes précipitamment nos affaires avant de partir en courant vers la cabane. Les quelques dizaines de mètres que nous avions à parcourir suffirent pour que nous arrivions complètement trempés. Alors que nous courrions pour nous mettre à l’abri, j’entendis soudain Gwen se mettre à rire. Surpris, je me tournais vers lui, plus qu’étonné.
Pris d’un fou rire, il semblait incapable de s’arrêter, comme possédé par l’euphorie. Si je ne le connaissais pas, ainsi, à rire sous la pluie, trempé jusqu’aux os, on aurait pu croire à un fou.
- Gwen ? L’appelais-je déconcerté.
Lâchant ses affaires, il se mit à tournoyer sur lui-même, les bras écartés, le visage levé au ciel, offert à la pluie qui tombait, ignorant les grondements du ciel. S’il était fou alors j’étais fou de le trouver plus beau encore par ce qu’il dégageait. Posant les affaires à l’abri de la cabane, je courus le rejoindre.
Les yeux fermés, il ne me vit pas venir et manqua de tomber en vacillant. Sans plus attendre, je passais mes bras autour de ses hanches, laissant mon corps se coller à lui dans son dos. Gwendal se détendit presque aussitôt à mon contact, se laissant aller à mon étreinte. Emporté par notre élan, il se laissa aller à laisser ses mains rejoindre les miennes et avec tendresse, je nouais mes doigts aux siens, posés sur son ventre. Même son odeur reflétait sa pureté et sa fragilité.
Pourtant, là, au creux de mes bras, il semblait plus fort que jamais, atteignant un bonheur qu’il semblait n’avoir jamais connu. Il semblait, je l’espérais, avoir enfin compris l’essence même de la vie que je menais : cette liberté qui s’insinuait au plus profond de notre être prodiguant ce sentiment d’euphorie.
Mon regard posé sur lui, jamais il ne m’était apparut aussi beau. Le véritable Gwendal se dévoilait peu à peu. Je finis par fermer les yeux, laissant aller toutes mes autres sens en éveils. Je sentais l’eau glacée tomber sur nous et pourtant, je n’avais pas froid. Le parfum de Gwendal envahissait tout mon espace olfactif et ses mains étaient d’une douceur incomparable. L’eau tombait dans un bruit assourdissant et pourtant il me semblait entendre les battements d’un coeur aussi frénétique que le mien qui ne semblait pas m’appartenir.
Malgré moi je pris peur. Je commençais à sérieusement m’accrocher à cette vie de voyage à deux. Je savais que cela ne serait pas éternel, que Gwendal se lasserait. Personne ne pouvait voyager aussi longtemps que moi et garder toujours cette même volonté. Gwen était encore dans la découverte et la surprise. Ignorant ces pensées, je me choisis de me concentrer exclusivement sur ce que je ressentais là, maintenant, sous la pluie : un profond bien être.
Ce fut l’idée qu’il n’était pas bon pour la santé fragile de Gwen de rester ainsi sous la pluie qui me ramena à la réalité.
- Ne restons pas sous la pluie… Viens… Murmurais-je au creux de son oreille.
Détachant à contre coeur mon corps du sien, nos doigts s’enlacèrent comme pour ne pas rompre le contact. Regardant nos mains, Gwendal finit par reporter son attention sur moi, comme s’il revenait de lui.
égèrement éloigné de lui, je ne pu m’empêcher de lui sourire, heureux et toujours envouté par sa beauté. J’avais l’impression que nos routes ne se croisaient véritablement que maintenant. Et que Gwendal, d’une manière que je ne parvenais pas à déterminer, venait de m’atteindre là où jamais personne ne l’avait fait. J’étais heureux d’avoir fait sa rencontre et heureux de ce que cette rencontre m’apportait.
Gwendal se laissa docilement guider. Lentement, je l’entraînais vers la cabane. Une fois à l’intérieur, je refermais vivement la porte derrière nous afin d’éviter que la pluie ne nous suive à l’intérieur. Puis, me dirigeant vers le petit poêl qui trônait dans un coin de la pièce, je l’allumais. Lorsque le feu eu prit, je me tournais vers Gwen. Immobile, il était pris de tremblement. Sans perdre un instant, je me mis à frotter ses bras en une vaine tentative de le réchauffer.
- Tu ne devrais pas rester avec tes vêtements mouillés, Gwen… Change-toi avant que tu n’attrapes froid…
Honteux, il détourna le regard et jeta un coup d’oeil à l’unique pièce, cherchant très certainement un endroit discret où il pourait se changer. Je souris constatant en même temps que lui qu’il n’y avait absolument aucun recoin où il aurait pu se dissimuler. Comprenant son désarrois et toujurs amusé par tant de pudeur de sa part, je déclarais en souriant :
- Promis je ne te regarderais pas ! Allez, change-toi !
Pour lui prouver ma bonne volonté, j’allais me poster devant l’unique fenêtre, lui tournant le dos. Il vallait de toute façon mieux que je ne le vois pas se déshabiller. Ces derniers temps ce n’était pas innocemment que je le regardais…
Je fixais l’extérieur, tentant d’imaginer autre chose que son corps certainement à moitié nu derrière moi. J’allais même jusqu’à prendre une grande inspiration tentant de me calmer, mais rien n’y faisait. Mon imagination me jouait des tours… Il fallait sérieusement que j’arrête. Gwen n’était pas le genre à m’aider à soulager ses pulsions. Cela était surement du au fait que je n’avais pas eu de rapport depuis un certain temps. Un frisson de dégout me saisit à la pensée de ma dernière relation que j’avais connue mais je la repoussais rapidement, continuant de l’oublier volontairement. Ce fut à ce moment là que j’entendis une petite voix, affreusement mal à l’aise :
- Hayden…
- Il y un a problème Gwen ? Demandais-je sans me retourner.
- Je… Je suis coincé… J’ai… Besoin de ton aide… Souffla-t-il.
J’imaginais déjà ses joues rouges.
- Tu es conscient qu’en me demandant mon aide, cela me force à me retourner ? Demandais-je avec une pointe d’humour.
- Dépêches-toi ! Marmonna-t-il. J’ai froid.
Il ne m’en fallut pas plus pour me décider. Il me tournait le dos. Je me retins de rire lorsque je le vis ainsi coincé dans son tee-shirt, mais je déglutis lorsque mon regard se posa sur son dos nu à moitié dévoilé. Savait-il combien cela me coûtait ? Posant mes mains sur les siennes, j’entrepris avec douceur à l’aider à retirer son tee-shirt, dévoilant à mon regard ce que je m’étais interdit d’admirer.
Il était trop près de moi, trop facile à atteindre, trop tentant. Alors qu’il baissait les bras, libéré de sa prison de toile, je ne pus m’empêcher de poser mes mains sur ses hanches nues, juste au dessus de son pantalon, provoquant chez lui un violent sursaut. Cependant, il n’esquissa pas le moindre geste et ne voyant rien qui pouvait me retenir, je déposais avec une douceur extrême mes lèvres sur son omoplate, cédant à la tentation de goûter enfin à sa peau. Elle était si douce, si sensible… Son odeur embaumait mon être entier et réveillait en moi un désir puissant que j’avais essayé de faire taire avec difficultés ces derniers temps.
J’aurais voulu continuer, l’embrasser plus près du cou, lécher sa peau, le goûter tout entier mais ce fut mon intimité brusquement éveillée qui me fit revenir à la réalité. Brusquement, je m’éloignait de lui. D’une voix rauque de désir, je déclarais difficilement :
- Finis de te changer, Gwen… Tu es glacé…
Puis, sans plus de cérémonie, je retournais près de la fenêtre, mes pas résonnant dans le silence seulement brisé par les grondements du tonnerre et la pluie qui tombait toujours. Mon rythme cardiaque était sensiblement accéléré, mon souffle saccadé. Le désir coulait dans mes veines, brûlant une à une toutes les barrières qui m’aider à me contenir. Fixant l’extérieur, je tentais de me calmer, mais je n’y arrivais pas. Gwendal finit par venir vers moi et déclara simplement :
- La place est libre…
M’empêchant de le regarder, je m’empressais de m’éloignait, le fuyant. Je ne pouvais pas rester là. Il fallait véritablement que je calme mes ardeurs, et quoi de mieux qu’une douche froide. Au lieu d’aller me changer, j’ouvris la porte de la cabane et la refermais en claquant la porte derrière moi.
Ignorant la pluie qui continuait de tomber, je me mis à courir aussi vite que je pus jusqu’au grand sapin que j’avais déjà remarqué. Une douche froide ne suffirait pas. Voilà bien longtemps que je n’en étais pas arrivé là. Un problème de partenaire était rarement mon quotidien. Trouvant l’arbre en question, je m’abritais dessous et caché de tous les regards, je m’assis sur le sol m’asseyant sur l’herbe sèche.
Lentement, je laissais ma main glisser jusqu’à l’ouverture de mon jean et laissais plusieurs fois glisser ma main dessus en une caresse éthérée qui ne fit que m’exciter d’avantage. Me déhanchant légèrement malgré moi, j’ouvris un a un chacun de mes boutons, tout en prenant soins de caresser mes cuisses et mon entrejambe. Fermant les yeux, je libérais mon sexe, poussant un gémissement de satisfaction.
S’il faisait froid tout autour de moi, j’avais l’impression de brûler d’un feu insatiable. Incapable d’y mettre fin, les seules images de Gwendal nu qu’il m’avait été offert de voir me revinrent à l’esprit et ce fut honteux que je commençais à me caresser plus intimement. Si Gwen avait eut la moindre idée de ce que j’étais en train de faire, il serait déjà partit en courant. Murmurant son prénom sans savoir me retenir, j’accélérais mes caresses, me perdant dans des pensées plus perverses les unes que les autres.
J’avais l’impression de le sentir tout contre moi, de goûter sa peau, de me délecter de la saveur de ses lèvres et de respirer son odeur à plein poumon. Ma respiration se fit saccadée, mon rythme cardiaque endiablé. Les yeux toujours désespérément clos, je ne voulais m’arracher à cette idylle de mon imaginaire.
Ce fut en gémissant son prénom que je finis par me libérer dans mes mains. Je restais là encore un moment, soupirant de bien être, enfin calmé. Je restais là encore un moment, avant d’aller rincer mes mains à la rivière, honteux de m’être soulagé à l’insu de Gwen. Trempé jusqu’aux os, je commençais à avoir froid et n’eus d’autre choix que de rentrer. Poussant lentement la porte, j’espérais que Gwen aurait comprit la raison de ma fuite. Mais ce ne fut pas le cas. Allongé sur le ventre, un livre posé devant lui, il ne tarda pas à me demander, d’une voix légèrement tremblante :
- Tu étais où ?
- Je… J’ai cru avoir oublié quelque chose à la rivière, tentais-je en espérant qu’il n’insisterait pas.
- Tu mens ! Déclara-t-il simplement, sans relever les yeux de son livre.
Il n’y avait ni reproches, ni accusation dans sa voix, seulement une constatation. A l’entente de ses mots, je poussais un profond soupir et me dirigeant vers mon sac de voyage, je déclarais :
- Ecoute Gwen, je ne suis pas certain que tu ai réellement envie de connaître la raison pour laquelle je suis sortis.
Alors que je me changeais enfin, appréciant les vêtements secs, il déclara simplement :
- Fais bien ce que tu veux. Après tout, tu n’as pas besoin de moi.
Je ne répondis rien, et une fois que je fus changé, je vins m’asseoir à côté de lui. La pluie n’était pas prête de se calmer et je n’avais aucune envie de me retrouver enfermé ici avec un Gwendal boudeur. Gardant obstinément les yeux fixés sur son livre, il ignora ma présence alors que je tentais de lui parler. Ne supportant pas son attitude de gamin, je refermais brusquement son livre.
- Hey ! S’exclama-t-il, furieux.
- Ecoute-moi quand je te parles ? Déclarais-je, las.
- Parce que tu m’as écouté toi peut-être ? Siffla-t-il en se redressant avant de s’éloigner de moi.
Comprenant ses intentions de fuite, je lui attrapais le poignet. Il resta un instant immobile avant de reprendre brusquement son poignet, s’arrachant furieusement à ma poigne.
- Ne me touche pas !
Sur ces mots, il se redressa. Sentant la colère monter en moi, je fis de même et très vite, Gwendal se retrouva coincé entre le mur et mon corps, les poignets maintenant fermement au dessus de sa tête. Furieux, il m’adressa un regard assassin, en s’exclamant :
- Lâche-moi ! Tu n’as pas le droit !
- Je ne te lâcherais pas avant que tu m’es écouté ! Déclarais-je, ancrant mon regard dans le sien. Et arrête de gesticuler, ça ne sert à rien !
- Je n’ai pas envie de t’écouter ! S’exclama-t-il. Je n’ai que faire de tes excuses, s’entêta-t-il.
C’était incroyable comme il pouvait être têtu. Il mettait vraiment mes nerfs à rude épreuve.
- Ecoute-moi ! M’exclamais-je en haussant le ton, le faisant sursauter. Je suis désolé si je t’ai blessé d’une quelconque façon, repris-je plus doucement. Ca n’était aucunement mon intention…
- Je ne suis pas blessé ! Répliqua-t-il cinglant.
- Ah oui ? Pourquoi est-ce que tu me fuis ainsi alors ? Renchéris-je, un sourire en coin étirant mes lèvres.
Pour toute réponse, Gwen tenta une nouvelle fois de se soustraire à ma poigne.
- Tu me fais mal ! Siffla-t-il, furieux.
- Excuses-moi, soufflais-je, en desserrant ma prise.
- Je t’excuse ! A présent, lâche-moi ! Ordonna-t-il.
- Pas avant que tu ne m’ai écouté ! M’exclamais-je déterminé.
Il finit enfin par céder, cessant de se débattre. Il m’adressa un regard assassin qui me fit sourire. S’il cherchait à m’impressionner ou à me faire peur, c’était raté. Il décida alors de m’ignorer et reporta son attention sur la fenêtre. Soupirant bruyamment, je sus qu’il ne cesserait pas d’agir ainsi sans avoir entendu la vérité, même si celle-ci ne lui plairait pas forcément.
- Si je suis partis comme un sauvage c’est que… Commençais-je hésitant, cherchant mes mots pour ne pas le heurter. Je ne suis qu’un homme, Gwen… Avec mes désirs et mes faiblesses… Et tu es loin de me laisser indifférent…
A ces mots, je vis Gwen sursauter, surpris, ne s’attendant visiblement pas à cela.
- Je te désire Gwen, ajoutais-je gravement. Et si je suis parti, c’était pour éviter de faire une bêtise.
Gwendal s’empourpra violemment, comprenant enfin la raison de mon départ. Loin d’être complètement calmé, je posais à nouveau mon regard sur lui, le déshabillant du regard. Il était tout simplement beau à couper le souffle. Sans pouvoir me retenir, je posais sur lui un regard brûlant et empli de désir…
S’en apercevant, terriblement gêné, Gwendal détourna de nouveau les yeux, sous mon sourire attendrit. Il ne prononça pas le moindre mot, et ses joues se teintèrent d’un joli rouge carmin. Réalisant ce que j’étais réellement en train de faire, je libérais ses poignets et m’éloignais sensiblement de lui afin que nos deux corps ne soient plus en contact. Si je m’étais calmé une première fois, je n’avais aucune envie de recommencer maintenant et de retourner sous la pluie. Gwen resta immobile, encore en train d’assimiler mes révélations. Mais bientôt, je le sentis s’approcher lentement de moi et alors qu’il allait poser une main sur mon épaule, j’esquissais un mouvement de recul, un pauvre sourire dépeint sur les lèvres :
- Ca ne serait pas prudent… Déclarais-je simplement. Je… Je crois qu’il vaudrait mieux que tu dormes dans ton duvet ce soir…
Les joues brûlantes sous mon insinuation, il esquissa à son tour un pas de recul, terriblement gêné.
La soirée se déroula lentement, dans un silence gêné. Nous étions couché depuis plusieurs heures, mais entendant Gwendal tourner et retourner dans tous les sens, je compris qu’il avait autant de mal à s’endormir que moi. Cela faisait plus d’une semaine que nous dormions côte à côte et il était étrange de ne pas passer une nuit contre lui. Plongé dans mes pensées, je l’entendis pousser un énième soupir de lassitude avant de l’entendre de lever et sortir.
Ne trouvant pas non plus le sommeil, je décidais d’aller le rejoindre. Rien de mieux que d’observer le calme de la nuit après un orage. Je ne tardais pas à le retrouver, assis dans l’herbe que la pluie n’avait pas pu atteindre. Je vins m’asseoir à ses côtés. Remarquant ma présence, il m’adressa un simple sourire auquel je répondis, puis nous reportâmes notre attention sur les bois. Nous restâmes ainsi, silencieux, l’un à côté de l’autre, admirant la beauté de la nuit, sans qu’aucun de nous n’ose briser le calme de la nuit. Finalement, Gwendal fut le premier à se jeter à l’eau :
- Comment tu l’as découvert ? Demanda-t-il.
- Découvert quoi ? Répétais-je, surpris.
- Ton homosexualité, répondit-il en se tournant vers moi.
- Oh ça… Soufflai-je amusé. Et bien… Au fond de moi, je crois que je l’ai toujours su… Peut-être est-ce à cause de ma mère… A la voir se faire passer dessus par tous ces mecs… A voir dans l’état dans lequel elle était chaque jour, à la voir en redemander encore, à faire la salope pour quelques euros… Peut-être est-ce cela qui m’a dégoûté des femmes, je ne saurais le dire… Quoi qu’il en soit, dès le collège, je n’ai jamais porté la moindre attention sur les filles… Au contraire, voir ses pré-adolescentes se trémousser avec des vêtements vulgaires pour attirer l’attention des garçons… Tout cela me répugnais ça me rappelais bien trop ma mère, ce qu’elle était devenu… Instinctivement, je sais pas, je me suis surpris à observer les garçons et je ne m’en suis pas retrouvé dégoûté, comme avec les filles… Lui répondis-je avec sincérité, sans la moindre gêne.
- Comment l’a prit ta famille quand ils l’ont appris ? S’enquit-il alors.
- Je ne connais pas mes grands-parents, ceux-ci ayant renié ma mère lorsqu’elle a commencé à se vendre… Quant à ma mère, elle s’est mise à hurler, me criant que j’étais un monstre, que je la dégoûtais…
Je me souvenais amèrement de ce jour. C’est à partir de ce moment précis qu’elle avait augmenté ses doses… Mon coeur se serra. Je ne voulais pas y penser. Gwendal ne fit aucun commentaire, gardant pour lui ses impressions. Après un long silence cependant, il finit par prendre à nouveau la parole :
- Père et mère ont toujours eut une vision plus que négative sur l’homosexualité, ne cessant de se plaindre d’eux et les dénigrant comme des moins que rien. Pour eux, le SIDA est de leur faute… Ils disent qu’ils l’ont bien mérité, qu’à force de forniquer à tout va, il fallait bien que quelque chose les punissent… Ils disent que c’est contre-nature… J’avais un cousin… Lorsqu’il a décidé d’assumer son homosexualité et qu’il a présenté son ami à ses parents, il s’est fait renié comme un malpropre et mettre à la porte, comme on jeterai une paire de chaussette abimée à la poubelle… Je ne l’ai jamais revu… Je ne sais pas ce qu’il est devenu… Et pourtant, il était quelqu’un que j’appréciais énormément… Peut-être l’un des seuls d’ailleurs… Mais parce qu’il était différent de ce qu’ils auraient voulu qu’il soit, ils l’ont tous renié, sans chercher à le comprendre, sans se mettre à sa place et essayer d’imaginer ce qu’il a du ressentir… J’ai haïs ma famille plus qu’il n’était possible après ça… Cette famille qui n’en est pas une, avec leurs valeurs préhistoriennes et leurs préjugés… Cette famille qui ne jurent que par leur statut social et se foutent du bien être de leurs enfants… Pour eux, nous ne sommes qu’un moyen d’assurer la lignée de la famille et, en nous utilisant intelligemment en nous mariant avec des hommes ou des femmes influant, d’assurer leur bien-être et leur place dans la société… Et dès qu’un des enfants sort du droit chemin, dès que l’un d’eux se met à montrer des signes d’anomalies ou des tares, comme l’homosexualité, on le renie… On le chasse de cette famille soit disant unie, afin de ne pas salir son nom… Cracha-t-il, comme envahi d’une fureur que je ne lui connaissais pas.
- Et toi ? Demandais-je en me tournant vers lui. Quel est ton point de vue ?
- Je… Je ne sais pas, souffla-t-il, gêné. Je ne pense pas avoir de point de vue particulier… Les sentiments ne se contrôlent pas, ce n’est pas nous qui choisissons la personne, c’est notre coeur… Et lui se fout que la personne qu’il aime soit un homme ou une femme…
- Tu as l’air de parler en connaissance de cause… Soufflais-je, un sourire amusé étirant mes lèvres, surpris d’une telle réponse de sa part.
- Moi ? Non… S’empressa-t-il de répondre, affreusement gêné.
- Menteur, sourit-je. Tu rougis…
- C’est de ta faute ! M’accusa-t-il en se tournant vers moi. Tu poses des questions gênantes.
- C’est toi qui a abordé le sujet… Répliquais-je.
Il ne répondit rien, se contentant de détourner les yeux, mal à l’aise sous mon regard qui se faisait de plus en plus insistant et que je ne parvenais pas à contrôler. Finalement, après un long silence gêné, il me demanda, changeant délibérément de sujet :
- Hayden ?
- Oui Gwen… Répondis-je avec une pointe d’amusement dans la voix.
- Jusqu’où tu serais prêt à aller pour ta liberté ? Demanda-t-il.
- Comment ça ? Dis-je de plus en plus surpris par ses questions.
- Je veux dire, que sacrifice serais-tu prêt à faire ? Que serais-tu capable d’abandonner derrière toi pour rester tel que tu l’es aujourd’hui ? N’as-tu jamais songé à t’arrêter et t’installer quelque part ? N’y a-t-il jamais eu personne qui t’as donné envie de te poser, d’abandonner la vie que tu menais jusqu’à maintenant pour elle ?
Je ne pus m’empêcher de soupirer. Gwendal avait le don pour me poser des questions que je n’aimais pas. Il abordait toujours des sujets sensibles.
Fixant les bois, je finis par lui répondre :
- Je ne sais pas, avouais-je. Je ne me suis jamais suffisamment attaché à quelqu’un pour avoir envie de tout abandonner pour lui… Je n’ai aucune attache nulle part, Gwen comme une feuille morte qui s’envole au premier coup de vent… Je me pose au gré de mes envies, mais, un jour ou l’autre, le désir de repartir se fait de plus en plus pressant, jusqu’au jour où, finalement, je finis par lui céder… Je suis comme ça, Gwen, c’est dans ma nature…
Après une courte pause, je repris :
- Le seul pour qui cela a été beaucoup plus difficile que je ne le pensais, à été Julien… J’étais prêt à tout plaquer pour lui… A arrêter de voyager et m’installer avec lui… Mais finalement, encore une fois, l’appel de la liberté à été le plus fort…
Je l’avais fait espérer. Et je l’avais blessé. Toute ma vie, je ne pourrais me départir de cette culpabilité.
- Il t’arrive de regretter ? Demanda-t-il, comme touché. Tu ne t’es jamais demandé ce qu’aurait pu être ta vie si tu étais resté près de lui ?
- Tu ne t’arrêtes jamais de poser des questions ? Lui demandais-je en riant.
- Désolé… Souffla-t-il en détournant le regard, honteux.
- C’est bon, je plaisantais, le rassurais-je. Tant qu’on en est aux confidences, autant parler non ? Et pour répondre à ta question, non, je ne regrette pas… Je sais que Julien a une meilleure vie que celle qu’il aurait eut avec moi si j’étais resté…
- Comment peux-tu en être certain ? Demanda-t-il en me regardant.
Tournant la tête vers lui, un sourire amusé, je déclarais :
- Tu as toujours réponse à tout, n’est-ce-pas…
Rougissant à nouveau, il frissonna légèrement sous la fraîcheur de la nuit. J’aurais bien voulu le prendre dans mes bras, mais je me l’interdit. Je repensais à ce qu’il venait de me dire. Regretter n’était pas dans mon mode de vie. Cela ne servait à rien de regretter le passé. Tout ce qui m’importait, c’était que Julien soit heureux. Je n’étais simplement pas fait pour une relation.
- Et toi… Déclarais-je après un instant de silence en lui souriant. Parle-moi un peu de toi ?
- De moi ? Répéta-t-il, confus.
- Oui, souris-je, de toi…
- Il n’y a rien à dire, soupira-t-il en détournant les yeux. Je m’appelle Gwendal, j’ai vingt ans et je me suis enfui avec un inconnu lorsque mon père m’a contraint à un mariage forcé… Tu vois, ma vie n’a rien de bien passionnant…
- Il y a forcément d’autres choses à dire, m’entêtais-je. Ce que tu aimes, ton enfance, la famille on va éviter, ajoutais-je, lui arrachant un petit sourire, tes goûts, tes rêves… Tu vois, il y a pleins de choses à dire sur toi…
- Pourquoi est-ce que tu veux savoir tout ça ? Demanda-t-il, surpris, en croisant mon regard.
- Ce n’est pas ce que font deux personnes qui voyagent ensemble ? Chercher à se connaître… Demandais-je en souriant, reprenant ses propres mots.
Gwendal sourit. A chaque fois qu’il souriait, il était encore plus beau… Reportant son regard devant lui, il commença à parler après un instant de silence :
- Je n’ai jamais vraiment réfléchis à tout ça, avoua-t-il. Dès mon plus jeune âge j’ai toujours fait ce que l’on me demandait, parce que c’est comme cela que l’on m’a élevé et c’est ce que l’on attendait de moi… Je suis fils unique et mes parents n’ont jamais été très présents pour moi, mais mon rôle de fils unique me contraignait à me plier à leurs exigences… C’est pourquoi, je n’ai jamais discuté leurs ordres, faisant ce que l’on exigeait de moi…
- Et pourtant, tu t’es enfuis de chez toi lorsqu’ils ont voulu te marier… Commentais-je.
- Oui, souffla-t-il. Peut-être ai-je été docile trop longtemps, ajoutais-je avec un petit sourire amer. Je n’avais peut-être rien à moi, mes goûts étaient ceux que l’on m’imposaient, mais j’ai toujours eu ce désir au fond de moi… Quand j’étais petit, je rêvais que j’avais des ailes, et que je m’envolais loin de chez moi… Je rêvais de découvrir le monde, de rencontrer les gens que j’aurai aimé rencontrer et non ceux que l’on m’imposait… Je voulais tant être… Normal…
- Et maintenant ? Demandais-je en me souriant. Est-ce que la vie que tu mènes à présent te plait davantage ?
- Bien plus, répondit-il sincère avant de se rembrunir. Tellement qu’il m’arrive de croire que tout cela n’est qu’un rêve… Que si je ferme les yeux trop longtemps, lorsque je les ouvrirais, je me réveille dans ma chambre et que tout ce que j’ai vécu jusqu’à présent ne soit qu’une douce illusion…
Délicatement, ma main vint se poser sur sa joue, et avec une douceur infinie, je l’incitais à tourner la tête vers moi. Nos regards se croisèrent, chamboulant Gwendal. Avec ce que je m’apprêtais à faire, j’étais certain qu’il ne croirait plus à une illusion. Je voulais le ramener à la réalité et de la manière la plus douce qui soit. Lentement, je me penchais vers lui, cédant à la tentation, mon regard toujours ancré au sien, alors que Gwen ne bougeait pas, semblant parfaitement conscient de mes intentions.
Lentement, comme pour ne jamais le heurter, je posais mes lèvres sur les siennes. Gwen poussa alors un soupir de satisfaction qui me fit esquisser un sourire. Bientôt, mes lèvres s’entrouvrirent sur ma langue qui, tendrement, vint caresser ses lèvres, pour l’inviter à les entrouvrir. Enivré par son odeur et le goût si particulier de ses lèvres, je fermais les yeux, le sentant s’abandonner à moi. Cédant à mon invitation, il entrouvrit timidement les lèvres. Il ne m’en fallut pas plus et l’instant suivant, ma langue se faufilait entre ses lèvres, partant à la recherche de la sienne.
Lorsque nos langue s’effleurèrent en une tendre caresse, je sentis Gwendal frissonner violemment. Délicatement, je posai sa main sur ma joue alors qu’il n’osait esquisser le moindre mouvement. Très vite, notre échange gagna en intensité. Ma langue entraîna la sienne en un ballet vieux comme le monde. Soudain, ce fut trop pour moi et pris d’une frénésie incontrôlable, je le guidais dans un baiser fiévreux qui n’avait plus rien à avoir avec ceux que nous avions échangé jusqu’à maintenant.
Mon rythme cardiaque s’accéléra, possédé par le désir, je pressais mon corps contre le sien. Ce fut son corps tendu qui me montra que j’allais trop loin. Il était en train de prendre peur. Reprenant brusquement mes esprits, je m’écartais vivement de lui, rompant brusquement le baiser. Je m’étais laissé prendre… Il était rare que j’éprouve une telle attirance pour quelqu’un… Peut-être était-ce du à son inaccessibilité…
- Excuse-moi, murmurais-je, ma main caressant doucement sa joue. Je me suis laissé emporter… Ca va ?
- Je… Oui… Murmura-t-il, plus qu’embarrassé.
- Alors, demandais-je après un court instant, reprenant notre conversation où nous l’avions laissée. Tu crois encore que tout ceci n’est qu’une illusion ? As-tu déjà rêvé d’être embrassé par un homme, même dans tes rêves les plus fous ?
- Jamais… Avoua-t-il les joues rouges.
- Alors ceci n’est pas un rêve, Gwen… C’est réel… Déclarais-je en souriant.
Il ne répondit rien, et le silence nous enveloppa à nouveau. Finalement, la fatigue le gagna et alors qu’il étouffait un baîllemnt, je déclarais :
- Allez, va dormir… Tu tombes de sommeil…
Après m’avoir souhaité une bonne nuit, il retourna dans la cabane. Pour ma part, je continuais d’observer la forêt avec envie. Je pouvais entendre au plus profond de mon être, me crier de reprendre la route. Poussant un soupir, j’allais à mon tour me coucher. Je ne tardais pas à trouver le sommeil, emporté dans des rêves sans images…
Finalement, nous ne reprîmes la route que trois jours plus tard, la pluie n’ayant pas cessée avant. Au matin du quatrième jour, profitant d’une éclaircie, nous rangeâmes nos bagages et reprîmes la route. Si Gwendal avait du mal à quitter cet endroit il n’en laissa rien paraître. Pour ma part, la joie de reprendre la route embaumait mon coeur d’étincelles.
Nous marchâmes pendant deux jours avant de finalement prendre le bus jusqu’à Birmingham. Là, après une nuit à l’hôtel, nous prîmes le train jusqu’à Edimbourg. Je lui avais avoué avoir un ami là bas et lui avais demandé s’il était d’accord pour lui rendre visite. A sa mine renfrognée, j’avais éclaté de rire en lui expliquant que cet ami n’était pas le moins du monde attiré par les hommes et que je n’avais jamais eus d’aventure avec lui. Partiellement rassuré, il avait tout de même fini par accepter.
Et après une petite semaine de marche, nous arrivâmes enfin à Fakland, une petite ville au nord d’Edimbourg. Ne m’y étais jamais rendu, ayant rencontré Darren en Angleterre, je demandais mon chemin et nous arrivâmes enfin à la petite villa un peu en retrait de la ville dont il m’avait tant parlé. Là, je passais devant lui et allait frapper à la porte. Ce fut une jeune femme qui vint nous ouvrir et que je ne connaissais pas. D’un ton poli, je demandais :
- Bonjour, est-ce que Darren MacKay est là, s’il vous plait ?
- C’est de la part de qui ? Demanda la jeune femme un peu sceptique.
- Hayden…
- Chéri ! Appela la jeune femme en se tournant vers l’intérieur. Un certain Hayden demande à te voir.
L’instant d’après, Darren, sorte de gros ours, fit irruption dans l’encadrement de la porte. Je souris en voyant Gwendal esquisser un pas en arrière. Darren était tout simplement immense. Mais ses yeux bleu et ses cheveux roux dégageait quelque chose de tendre. Darren était tout sauf un mauvais type, il ne fallait simplement pas le chercher trop longtemps.
- Par la barbe de Merlin ! S’exclama Darren avec un grand sourire. Hayden ! Qu’est ce que tu fais là, mon vieux !?
L’instant d’après, comme il en avait pris l’habitude, il m’attrapa à l’aide de ses deux bras énorme et me soulevant de terre comme si je ne pesais rien, il me serra contre lui. Me serrant plus fort qu’il n’était capable de le supporter, il m’étouffa presque.
- Salut Darren ! Soufflais-je en lui rendant son étreinte. Content de te voir vieux !
Nos embrassades s’éternisèrent avant que je ne me souvienne de la présence de Gwendal. Me tournant vers lui, je fis les présentations et Gwendal lui serra poliment la main retenant tant bien que mal un gémissement de douleur sous sa poigne de fer.
C’est avec entrain que Darren nous invita à entrer chez lui et après nous avoir présenté sa compagne, Blair, il nous offrit à boire.
Très vite, la discussion s’engagea entre Darren et moi et c’est à peine si je vis disparaître Gwendal dans la cuisine. J’avais rencontré Darren lors d’un travail et l’amitié s’était tout de suite créée. A son départ, il m’avait fait promettre de venir lui rendre visite dans la villa qu’il venait d’acquérir, trop heureux de rentrer enfin dans son pays. Il m’interrogea sur ce que j’avais fait durant tout ce temps là et il ne fut pas surpris de voir que je n’avais pas changé. Sa seule surprise fut que j’ai un compagnon de voyage. Brièvement et confiant, je lui racontais comment je l’avais rencontré.
Darren m’apprit qu’il allait se marier avec Blair. Heureux pour eux, je le félicitais en lui souhaitant tous mes voeux de bonheur. Il le méritait. A mes souvenirs, sa dernière copine l’avait quitté sans la moindre considération et il avait eu beaucoup de mal à se relever. Il semblait avoir enfin atteint le bonheur qu’il espérait et me parla même d’enfants qu’il espérait avoir.
Le soir, nous fûmes conviés à rester dormir et lors du dessert, Darren, après avoir probablement reçu l’accord de sa future épouse, nous proposa de rester pour leur union, chose que je m’empressais d’accepter avec une joie non feinte.
La soirée du s’éterniser, car Gwendal s’endormit, la tête callée contre mon épaule. Ce fut à ce moment là que Darren me souffla, comme attendrit :
- Je suis content que tu ais trouvé quelqu’un avec qui partager ta vie et qui suive ton rythme.
- Que veux-tu dire pas là ? Lui demandais-je en fronçant les sourcils.
- Je veux simplement dire que vous faîtes un très beau couple.
Si ce mot m’hérissa je n’en laissais rien paraître et riant légèrement je m’empressais de le corriger :
- Darren, nous sommes simplement des compagnons de voyage, rien de plus.
- Je ne pense pas que Gwen te voit simplement comme un compagnon de voyage, souligna Blair avec une moue dubitative.
- Quoi ? Qu’est que vous allez vous imaginez… Gwen n’éprouve pas ce genre de sentiments pour moi. Dis-je en posant mon regard sur lui. Il est plus souvent choqué et dégoûté par mon style de vie.
- Pourtant, ce n’est vraiment pas ce que ses yeux te disent, argumenta Darren.
- Je pense que votre imagination est trop fertile, répliquais-je. On ne tombe pas amoureux de quelqu’un aussi vite. Surtout de moi. Non, ce n’est pas possible, répliquais-je comme pour me convaincre et faire taire le doute qu’ils venaient de faire naître en moi.
- Si tu le dis… Mais méfie-toi quand même. Gwendal a l’air d’être un garçon sensible, conclu Blair.
- Pas comme toi, ajouta Darren en riant.
Je fus blessé d’être traité de coeur de pierre mais je ne répondis rien. Après tout, il touchait peut être dans le vrai. Je n’étais tout simplement pas capable d’aimer. Mais il était simplement impossible que Gwen éprouve quelque chose pour moi. De l’affection peut-être mais rien de plus. Il en était de même pour moi. J’éprouvais de la tendresse, de l’affection, une volonté de le protéger, mais ça s’arrêtait là.
Le dimanche matin, nous nous préparâmes tous pour la cérémonie qui devait avoir lieu en fin de matinée. Darren venait de me donner des vêtements pour Gwendal et je m’empressais de les lui apporter. Il était en train de s’habiller dans la salle de bain et sursauta à mon arrivée. Lui tendant une chemise blanche et un pantalon noir, je déclarais :
- Tiens, met ça ! Et fait quelque chose pour tes cheveux ! Ajoutais-je en les avisant soigneusement peignés. Comme le matin quand tu te réveilles par exemple ! Ajoutais-je, un sourire en coin étirant mes lèvres.
- Tu veux dire que j’ai l’air de sortir de mon lit ? S’exclama-t-il, surpris.
- Ou du mien, de préférence ! Répondis-je avant de quitter aussitôt la pièce, amusé de voir l’air stupéfait de son visage.
Il était définitivement trop facile de le faire marcher. Pour ma part, déjà près, j’allais rejoindre les autres dans le salon.
Quelques instants plus tard, discutant avec Blair des derniers préparatifs, je ne pus m’empêcher de m’arrêter en plein milieu de ma phrase en voyant Gwendal apparaître. Dans ses vêtements pourtant si simples, il était de toute beauté. Un ange… Face à mon regard intense, Gwendal détourna le regard, mal à l’aise, et une fois de plus rougissant. Blair s’approcha de lui tout sourire :
- Tu es ravissant, Gwendal ! Déclara-t-elle.
Il lui adressa un petit sourire de remerciement puis nous nous mîmes en route.
Ce n’était pas le premier mariage auquel j’assistais mais je fus particulièrement heureux pour mon ami lorsqu’ils échangèrent enfin leurs voeux et leurs anneaux avant de s’embrasser passionnément. Au fond de moi, je savais que cela m’était interdit, que jamais je ne connaitrais ce qui les liait aussi profondément. Je me l’interdisais. Je n’avais pas le droit, pas après ce que j’avais fait à ma mère et ce qu’elle avait fait de moi.
Durant la fête qui suivit, je fus heureux de voir Gwendal passer sa soirée à danser avec Blair ou Darren, ceux-ci l’ayant visiblement très vite adopté. Pour ma part, j’étais engagé dans une profonde discussion sur mon style de vie avec le cousin de Blair qui rêvait de voyager.
Lorsque vint le moment des slows, Gwendal alla rejoindre sa place, regardant simplement danser les autres, le menton calé dans sa main. Repensant au slow que nous avions dansé tous les deux, j’eus envie de retenter l’expérience. Charmé par sa beauté, je m’approchais de lui alors qu’il semblait prêt à aller faire un tour dehors. Charmeur, je m’approchais de lui dans une démarche féline. Il commençait à occuper très sérieusement toute mes pensées. Ainsi vêtu, il semblait être un ange venu tout droit des cieux dont aucune beauté ne pouvait égaler. M’approchant de lui, je lui tendis la main, et le regardant dans yeux, un tendre sourire étirant mes lèvres, je demandais :
- Tu viens danser ?
Comme pour s’assurer que c’était bien à lui que je parlais, il regarda autour de lui et s’aperçut qu’il était le seul à ce coin de la table. Amusé de le voir réagir ainsi, je fus heureux de le voir rougissant, attraper timidement ma main. Fier, je l’entraînais à ma suite sur la piste de danse, au milieu des couples tendrement enlacés. Puis avec une tendresse qui me surprit moi même, ne m’inspirant rien d’autre lorsque j’étais à ses côtés, je passais mon bras autour de sa taille, l’attirant délicatement à moi.
Timidement, Gwendal enlaça ses doigts au mien tandis que je le regardais en souriant. Bientôt, nous commençâmes à danser au rythme lent de la musique. Lentement, je pus sentir Gwendal finir par se détendre, se laissant complètement aller entre mes bras. La tête calée sur mon torse, j’ignorais s’il pouvait percevoir les battements endiablés de mon coeur. Mes doigts passaient et repassaient dans son dos, l’effleurant en une caresse aérienne à travers sa chemise. Je ne pus m’empêcher de sourire de contentement lorsque je l’entendis soupirer longuement de bien-être.
- Ca va ? Lui demandais-je.
- Oui, répondit-il dans un murmure.
Pour toute réponse, je lui embrassais les cheveux, envahi d’un sentiment étrange qui ne m’inspirait que douceur et tendresse à son égard. Je n’aurais su dire combien de temps nous restâmes ainsi enlacés, guidés par le rythme de la musique. Au bout d’un long moment, fatigué, Gwen redressa la tête et d’une petite voix, il déclara :
- Hayden… Je voudrais rentrer… Je suis fatigué…
- D’accord, répondis-je. Va chercher ta veste, je vais prévenir Darren que nous rentrons…
Me séparant de lui à contre-coeur, j’allais glisser un bref mot à Darren, le félicitant encore une fois pour ce jour qui allait changer sa vie. Il me donna un double des clefs de sa maison. Revenant vers Gwendal, celui-ci était en train d’enfiler sa veste. Sans un mot, je lui souris avant de le prendre par la main, l’entraînant à ma suite. Le chemin jusqu’à chez Darren n’était pas long et se déroula dans le silence le plus complet. Gardant ses doigts prisonniers, il m’était impossible de rompre le contact. Il regardait le sol, comme s’il avait peur de relever la tête et de croiser mon regard. Il n’y aurait pourtant vu que le reflet de sa beauté qui illuminait mes yeux.
Arrivés chez Darren, je sortis la clef de ma poche et ouvrit la porte, l’invitant galamment à me précéder. Il me sourit, à la fois amusé et intimidé, et entrant derrière lui, je refermais simplement la porte. Une fois arrivé dans la chambre, Gwendal se débarrassa de ses chaussures et de sa veste et, attrapant un boxer propre et son pyjama, il alla s’enfermer dans la salle de bain. Pour ma part, je pris plus de temps et je dus ronger mon frein pour ne pas aller le rejoindre. Je finis par simplement attendre, vêtu de mon boxer, allongé sur le lit. Gwendal revint après un moment. Je pouvais sentir l’odeur du savon jusqu’ici. Amusé, je vis qu’il s’efforçait de ne pas me regarder.
- Tu as fini avec la salle de bain ? Lui demandais-je.
- Oui, répondit-il simplement, en dénouant ses cheveux, assis en tailleur de son côté du lit.
Puis, sur un simple sourire, je l’abandonnais momentanément.
Lorsque j’eus terminé de me laver, Gwendal était déjà sous les couvertures. Il n’ouvrit les yeux que lorsque je vins me glisser entre les couvertures et m’allonger près de lui. Je ne voulus pas éteindre la lumière tout de suite, voulant une fois de plus admirer son visage. Ancrant mon regard au sien, je vis Gwendal répondre timidement au sourire que je lui adressais.
- Tu as passé une bonne soirée ? Demandais-je dans un chuchotement.
- L’une des meilleures de ma vie, répondit-il avec sincérité. Je suis vraiment heureux pour Blair et Darren, ils sont vraiment très gentils.
- Oui, approuvais-je. Blair est une femme merveilleuse, je suis content pour Darren, elle le rendra heureux.
Gwen ne répondit rien, se contentant de répondre au sourire que je lui adressais. Avait-il seulement la moindre idée de la beauté qu’il dégageait. Mon regard ancré au sien, je ne parvenais pas à le quitter du regard, comme hypnotisé. Angel… C’était le mot qui le qualifiait parfaitement. Je ne pus me contrôler plus avant. D’un geste d’une tendresse qui me troublais, je levais une main vers son visage et du bout des doigts, je replaçais la mèche de cheveux qui lui tombait devant les yeux derrière son oreille.
Puis, au lieu de récupérer ma main, je la posais sur sa joue, la caressant affectueusement. Sous la douceur de mes doigts, je pus voir Gwen se laisser aller à fermer les yeux, soupirant de bien-être. La tentation était trop forte. Lentement, je m’approchais de lui, attiré par ses lèvres qui ne demandaient qu’à être recouvertes. Sans plus attendre, mes lèvres happèrent les siennes avec une tendresse dont je ne faisais preuve qu’avec lui. J’avais constamment peur de le heurter, comme s’il s’agissait d’un être d’une sensibilité et d’une fragilité extrême.
Très vite, ma langue vint caresser ses lèvres et à mon plus grand plaisir, Gwendal accéda docilement à ma requête. Ma langue rencontra alors la sienne et l’entraîna dans un ballet sensuel. Ma main quitta alors sa joue pour aller se poser dans le creux de ses reins, le faisant tressaillir. J’avais besoin de plus qu’un simple baiser, mais je ne savais pas s’il était prêt. Cependant, comme rassuré par ma tendresse, il se laissa aller, me laissant le guider sur ce chemin qui lui était inconnu.
Fébrilement, ma main se glissa sous son haut de pyjama, effleurant enfin sa peau. A ce contact, Gwen poussa un petit gémissement de surprise qui ne fit que m’encourager. Prenant sa réaction pour un consentement, j’entrepris alors de le caresser plus franchement. Lentement mes doigts remontèrent le long de sa colonne vertébrale, lui arrachant un frisson de bien être tandis que je me perdais sous la douceur et la finesse de sa peau.
Je fus amusé de voir Gwen se cambrer légèrement, rapprochant nos deux corps plus encore, éveillant le mien. Bientôt, mon baiser se fit plus entreprenant. La douceur, bien que toujours présente, laissa place à quelque chose de plus pressant que je ne pouvais contrôler alors que ma langue caressait la sienne avec frénésie. Jamais encore nous n’avions échangé un tel baiser et lentement, je continuais de lui faire découvrir un monde qu’il allait adorer.
Partit comme nous l’étions, nous nous acheminions peu à peu vers un chemin de non retour, non prémédité, profitant simplement du présent. Mes mains étaient enfin en contact avec sa peau, son corps en contact avec le mien me grisait. J’étais certain qu’il était un amant extraordinaire et touché qu’il me laisse être sa première fois. Je ne voulais pas le lui faire regretter. Il était le premier vierge avec qui j’allais coucher, aussi j’allais devoir user de toute ma patience et ma douceur pour qu’il n’oublie jamais cette nuit et la magie de ce moment.
Un petit gémissement rauque que je ne pus m’empêcher de retenir mourut dans la bouche de mon vis à vis, alors que mon corps se pressait davantage contre le sien. Ma main abandonna son dos pour aller s’ancrer sur ses fesses. Un nouveau frisson s’empara de lui, alors qu’il semblait se laisser aller en confiance entre mes bras. Timidement, il posa une main sur ma nuque, ce qui me fit violemment frissonner à ce contact, ne m’attendant pas à un tel geste de sa part.
Invité à poursuivre, je le fis brusquement rouler sur le dos, laissant le poids de mon corps sur le sien. Je le vis aussitôt rougir en réalisant notre position. Allongé de tout mon être entre ses jambes et sur son torse, je l’embrassais à en perdre haleine, pressant mon corps contre le sien, gagné par l’ivresse de le sentir enfin si proche. Libérant ses lèvres après un baiser des plus fiévreux, j’enfouis mon visage dans son cou alors qu’il refermait ses bras autour de moi, comme pour m’empêcher de m’éloigner de lui. C’était loin d’être mon intention…
Alors que je posais mes lèvres dans son cou tant désiré, il frissonna violemment à ce contact, avant de pousser un petit gémissement plaintif qui vint ravir mes oreilles. L’instant suivant, ma langue vint rejoindre ses lèvres alors que j’explorais dans retenue les courbes de son cou, mordillant délicatement sa peau au passage avant de la parsemer d’une multitude de baiser papillons, pour me faire pardonner de ma brusquerie.
Jamais je n’aurais pensé faire autant preuve de douceur et ô combien il était agréable d’éveiller Gwendal aux plaisirs de la chair. Là, en dessous de moi, il se laissait aller à fermer les yeus, rejetant la tête en arrière, en proie à des sensations qui lui étaient jusqu’alors inconnues. M’offrant un plus grand champ d’action, je ne pus me retenir de pousser un grognement guttural qui le fit frissonner.
Puis restant contre ses lèvres, mes mains se mirent en mouvement sur son corps, effleurant ses côtes pour longer sa taille et ses hanches, avant de finalement se poser sur l’une de ses cuisses que je lui fis relever, faisant s’accentuer le contact de mon aine sur son bas ventre. A ce rapprochement, Gwendal réagit aussitôt, se cambrant contre moi, poussé par le désir d’intensifier le contact de nos deux corps.
Satisfait, j’abandonnais momentanément son cou pour m’emparer à nouveau de ses lèvres tandis que j’esquissais un mouvement de bassin, faisant se frotter mon intimité contre la sienne. Cette fois-ci, un gémissement de pur plaisir s’échappa de ses lèvres et profitant de cet instant, je glissais ma langue entre ses lèvres pour un baiser passionné comme jamais nous n’avions échangé.
Son corps était une véritable invitation à la luxure. Tous ses sens semblaient en éveil et il était comme perdu au milieu de cet afflux de sensations. Mes mains dansaient sur son corps l’investissant avec délicatesse et savoir faire, désirant pousser plus loin encore son envie pour moi.
Mettant fin à notre échange, je me redressais légèrement et ancrant mon regard au sien, je lui offris un sourire. Voilà ce que m’inspirait Gwendal : beaucoup de tendresse et cette sensation de bien être à côtés. J’avais l’impression en l’espace d’un instant, que sa pureté pouvait m’atteindre et qu’elle éclairait mon être, le rendant moins sombre. Je lui souris parce qu’il était beau, je lui souris pour le rassurer. Je me sentais si bien, là, si proche de lui.
Ma main vint délicatement se poser sur sa joue, une fois de plus teintée d’une couleur carmine. Sans m’en soucier davantage, je caressais tendrement sa joue avant d’y déposer une multitude de baisers aériens. Je fus heureux de le voir sourire. Ancrant mon regard au sien, mes lèvres à quelques centimètres des siennes, je lui demandais d’une voix sensuellement rauque :
- Tu as peur ?
- Oui…
- Tu veux que j’arrête ? Demandais-je, aussitôt en proie à l’inquiétude que je laissais transparaître dans ma voix.
- Non… Souffla-t-il à ma plus grande surprise, s’abandonnant entièrement à moi.
Encouragé par sa réponse, je ne pus retenir un immense sourire qui vint étirer mes lèvres, touché par sa confiance, poussant un soupir de soulagement. Avait-il seulement conscience de l’ampleur du désir que j’éprouvais dès à présent pour lui. Je fus surpris du sentiment qui m’étreint alors le coeur. Plus qu’un désir physique, je voulais le posséder tout entier, je voulais être son premier, le marquer à jamais de cette expérience comme étant une des plus belles de sa vie.
Changeant de position, je me redressais avant de m’agenouiller entre ses cuisses. A sa vue, les jambes éhonteusement écartées, et les joues rouges, je ne pus que sourire face à ce contraste. Me penchant vers lui, je lui volais un tendre baiser, cherchant à le rassurer. Je ne voulais surtout pas lui faire de mal. Puis, fébrilement, j’entrepris de déboutonner son haut de pyjama. Gwen en sembla terriblement gêné mais il ne m’incita pas à arrêter, me laissant au contraire tout le loisir de dévoiler son corps.
Alors que j’ouvrais sa chemise, exposant son torse nu à mon regard impudique, je fus envahi d’une chaleur insoutenable. Son corps était tout simplement magnifique. Sa peau laiteuse sans la moindre imperfection semblait aussi douce que de la soie. Jamais je n’aurais cru ressentir quelque chose d’aussi fort pour quelqu’un. Réagissant physiquement, je voulais sentir le sexe de Gwendal gonfler et se durcir d’avantage alors que j’esquissais un lent et délicat déhanchement qui lui arracha une plainte de plaisir.
Rassuré par ma douceur, il retira complètement son haut de pyjama, m’offrant une vision complète de son torse dénudé. A cette vision, je ne pus que frissonner violemment et, fébrilement, n’osant pas croire ce que j’avais sous les yeux, hésitant à le toucher, je posais mes deux mains sur son ventre plat.
Mes mains se mirent alors à parcourir son corps en toute liberté, redessinant du bout du doigt les courbes graciles de son corps, apprenant chaque mont et vallée. Lorsque mes lèvres se posèrent quelques centimètres plus loin au dessus de son nombril, mes mains échouées sur ses hanches, Gwendal m’offrit encore le plaisir d’entendre l’un de ses gémissements de plaisir. Son corps se cambra violemment. Satisfait de sa réaction, je réitérais mon geste encore et encore, laissant s’embraser en lui un feu qu’il n’avait encore jamais connu. Sa main de posa sur mon épaule, tandis que l’autre allait se perdre dans mes cheveux, comme pour se raccrocher quelque part.
Puis, je finis par relever la tête, en manque du goût de ses lèvres, je remontais m’en emparer pour un baiser passionné, ma langue entraînant la sienne pour un baiser des plus ardents. Puis, à bout de souffle, je rompis notre échange et enfoui de nouveau mon visage dans son cou. Gwendal referma ses bras autour de moi, comme pour m’empêcher de partir, caressant délicatement ma nuque du bout des doigts. A ce contact, je ne pus me retenir de frissonner violemment alors qu’un gémissement de plaisir venait mourir sur sa peau que j’embrassais avidement.
Délicatement, je mordillais la peau sensible de son cou, réitérant le même manège que précédemment, mais de l’autre côté. Remontant sur son menton, j’embrassais alors la ligne de sa mâchoire avant de mordiller délicatement le lobe de son oreille, lui arrachant un nouveau gémissement de plaisir, alors que ses ongles se plantaient dans mon épaule. Puis, après avoir délicieusement torturé son oreille, je redescendis dans son cou, mais je ne m’y attardais pas, descendant davantage au sud.
Je marquais une pause au niveau de sa clavicule, laissant ma langue caresser sa peau qui s’avéra être très sensible à cet endroit. Puis, reprenant ma navigation, trop heureux de découvrir son corps, embrassant chaque parcelle de peau offerte, je stoppais l’exploration de son corps lorsque j’arrivais au niveau de ses tétons déjà durcis. Lorsque je les effleurais du bout de la langue, il émit un long gémissement plaintif qui sonna à mes oreilles comme la plus douce des mélodies jamais entendue.
Je fis durer cette douce torture un moment, titillant ses boutons de chair l’un après l’autre, en léchant un tandis que mes doigts jouaient avec l’autre et inversement, le plongeant dans un monde qu’il n’avait jamais connu. Puis, lassé, j’entrepris de passer à autre chose. Toujours avec tendresse, je repris mon exploration, laissant mes lèvres et ma langue découvrir le reste de son corps, descendant jusqu’à son ventre, jouant avec son nombril, passant et repassant sur ses abdominaux, cherchant à imprimer leur courbe dans ma mémoire.
Subitement, je me redressais, le surplombant de toute ma hauteur, posant sur lui un regard brûlant de désir. Puis, me penchant vers lui, je m’emparais de ses lèvres pour un baiser ardent mais toujours avec cette douceur et cette tendresse dont j’avais si rarement fait preuve avec autrui. A bout de souffle, haletant, ce fut Gwendal qui mit fin à notre échange.
Ancrant son regard au mien, dans un geste qui me surpris énormément, il posa sa main sur ma joue et m’adressa un sourire tendre avant de s’emparer de mes lèvres pour un baiser d’une douceur infinie. Mon corps se tendit tout entier à ce contact, alors que pour la première fois, il était à l’initiative d’un de nos baisers. Et il apprenait très vite… Il finit par libérer mes lèvres, rougissant et détournant les yeux, gêné de son audace.
Aussitôt, je m’empressais de bloquer son geste d’une main sur sa joue, le forçant à me regarder. Je voulais qu’il soit certain de ce qu’il était en train de faire, que ça ne soit pas juste une lubie ou une décision sur un coup de tête. Je ne voulais surtout pas qu’il regrette et mon sourire laissa place à une expression bien plus sérieuse. J’avais tellement peur de le blesser. Lui qui semblait alors à mon regard, si pur…. Mon coeur battait extrêmement vite sous l’excitation, mais le sien battait tous les records.
Délicatement, avec une tendresse extrême, j’effleurais ses lèvres du bout des doigts. D’une voix chargée d’émotions, je demandais dans un souffle :
- Tu es certain que c’est ce que tu souhaites ?
Pour toute réponse, il se leva de façon à ce que son visage ne soit plus qu’à quelques centimètres du mien, et murmura tout contre mes lèvres :
- Je suis sûr…. Hayden… Me supplia-t-il avant de s’emparer une seconde fois de mes lèvres.
Rassuré et reprenant mes esprits, je repris délicatement le contrôle de notre échange et de nouveau, mes mains partirent à l’aventure de son corps. Lorsque je mis fin à notre échange, je lui volais un furtif baiser juste après, avant de me redresser.
Je voulais lui offrir ce que j’avais été forcé de donner à Thomas. Je voulais avec lui effacer définitivement ce souvenir. Me penchant à nouveau au dessus de lui, je déposais mes lèvres sur son ventre, lui arrachant un frisson de bien être. Puis, ancrant mon regard au sien, pour m’assurer de son approbation, je posais mes mains sur ses hanches, à l’endroit où était posé son pantalon et lentement, pour ne pas l’effrayer, j’entrepris de le lui retirer. Semblant prendre entièrement conscience de ce qui était en train de se passer, je vis Gwen rougir de plus bel, comme honteux de son corps. Il ne fallut pas beaucoup de temps pour que Gwendal se retrouve entièrement nu, exposé à mon regard appréciateur, un désir sans nom s’y reflétant. Angel… C’était véritablement ce qu’il était.
C’est alors que mon vis à vis se mit à trembler, esquissant un geste pour se soustraire à mon retard. Comprenant aussitôt son intention, je le retins pas les hanches :
- N’ai pas honte, Gwen, murmurais-je d’une voix rauque. Tu es magnifique…
Troublé, Gwen m’adressa un petit gêné auquel je répondis en l’embrassant tendrement tout en esquissant un lent déhanchement. A ce contact, Gwen poussa un gémissement de plaisir. Satisfait de sa réaction, je réitérais mon geste, faisant frotter contre lui mon sexe durement gonflé à travers la toile de mon boxer. Alors que je me frottais impudiquement contre son intimité, le faisant haleter de plaisir, je laissais ma langue parcourir de nouveau son corps, attisant au maximum le plaisir de mon amant.
Puis, petit à petit, mes lèvres arrivèrent au niveau de son bas ventre, après avoir redessiné chaque courbe de son torse et de son ventre. Progressivement, je laissais ma langue caresser l’intérieur de ses cuisses, évitant délibérément de toucher son intimité. Un gémissement étouffé s’échappa de ses lèvres entrouvertes tandis que je prenais plaisir à le faire languir, plus que satisfait de le voir se tortiller sous moi.
Lorsque je sentis que la frustration était trop forte et que Gwen était plus que prêt, je passais ma langue sur son intimité, la léchant sur toute sa longueur. Le sanglot de frustration que Gwen poussait se transforma subitement en un cri de surprise. Fort de mon effet, je réitérais mon geste plusieurs fois, lui arrachant à chaque fois un gémissement de plaisir. Puis, sans le prévenir, je pris son intimité entre ses lèvres, effaçant à jamais le souvenir de Thomas. Ce fut à ce moment précis que je lui arrachais son premier vrai cri de pur plaisir. Un violent spasme parcouru son corps comme s’il était en train de perdre pied.
Délicatement, je commençais alors un lent mouvement de va et vient, prenant son intimité toujours plus profondément entre mes lèvres. Je sentis les doigts de Gwen se perdre dans mes cheveux, ne faisant que m’encourager à lui offrir encore plus.
Jamais je ne m’étais autant donné. Les mains ancrées sur ses hanches, je le gardais plaqué contre le matelas, lui interdisant tout mouvement. Un gémissement de mécontentement s’échappa de ses lèvres entrouvertes, alors que je gardais toujours ce même rythme volontairement lent.
Bientôt, ses gémissements se muèrent en sanglots. Accédant alors à sa requête, j’accélérais subitement les mouvements de va et bien, ma langue experte s’enroulant sensuellement autour de son intimité. Ne pouvant davantage faire taire mon propre plaisir, je glissais une main dans mon boxer, m’offrant quelques caresses intimes pour calmer le feu qui brûlait en moi. Peu à peu, le sentant sur le point de non retour, j’accélérais davantage la cadence de mes vas et vient, lui arrachant un sanglot de pur plaisir alors qu’il s’exclamait :
- Non… Arrête… Arrête… Supplia-t-il.
Sourd à ses implorations, j’accentuais au contraire mes vas et vient, l’accompagnant jusqu’au bout. Il finit par se libérer entre mes lèvres, l’orgasme le fauchant de plein fouet. Dans un cri de pur plaisir, les mains crispées dans mes cheveux, il se cambra violemment avant de se laisser lourdement tomber sur le matelas.
es joues rouges, le corps luisant de sueur et la respiration erratique, les yeux fermés, il m’offrit la plus belle des images. Ne pouvant rester davantage loin de lui, je m’allongeais sur son corps. Alors qu’il ouvrit enfin les yeux, je lui souris tendrement. Rougissant, il répondit timidement à mon sourire. je caressais alors ses cheveux dans un geste d’une douceur extrême, décollant les cheveux collés à son front par la sueur. Dans un murmure, je lui demandais :
- Ca va ?
Comme incapable de parler, mon amant se contenta de hocher positivement la tête alors que ses joues prenait une belle teinte carmine qui me firent sourire. Lentement, comme en manque de lui, je mis bas à la distance qui séparait nos lèvres et m’emparais des siennes pour un baiser des plus tendre qui gagna bien vite en intensité. Galvanisé, j’esquissais un lent déhanchement qui lui arracha un feulement de plaisir alors que mon intimité dure et palpitante de vie se frotta contre la sienne qui à mon plus grand plaisir commençait à s’éveiller de nouveau.
Mettant fin au baiser, j’ancrais de nouveau mon regard au sien. Le plus sérieux du monde, ne voulant en aucun cas le forcer, je lui demandais :
- Si tu souhaite arrêter, c’est le moment de le dire, Gwen, déclarais-je d’une voix rauque de désir. Car si nous poursuivons, je serais incapable de me contrôler… C’est pourquoi tu dois être sûr…
Je voulais qu’il soit entièrement consentant. Je ne voulais pas porter sur mes épaules par la suite le poids de la culpabilité où le voir regretter un instant qui se devait d’être magique. Jamais je n’avais été aussi précautionneux avec mes amants. Jamais je n’avais été aussi attentif à leurs besoins. Jamais ne m’était sentis aussi protecteur envers qui que ce soit.
Gwendal posa une main sur ma joue, laissant son pouce redessiner la courbe de mes lèvres avant de s’en emparer timidement. Il ne m’en fallut pas plus pour comprendre le message. Trop heureux de son cadeau, touché d’être celui qui l’initiait, je lui adressais un sourire éblouissant lorsque nous mîmes fin à notre échange.
Pour le remercier, je m’emparais de nouveau de ses lèvres et lui offrit un baiser empli de tendresse et de douceur, sans jamais chercher à l’approfondir. Je voulais qu’il se sente confiant avec moi. Lorsque j’en fus assuré, je libérais ses lèvres, mordillant délicatement la zone sensible que j’avais découvert dans son cou, lui arrachant un frisson de plaisir avant de poursuivre ma descente plus au sud.
Là, je déposais un tendre baiser sur le bout de son intimité à nouveau éveillée et je ne pus retenir un sourire amusé lorsque Gwendal poussa un petit cri de surprise et de plaisir mêlé. Sans m’arrêter là, je poursuivis ma course un peu plus au sud, laissant un doigt effleurer la partie la plus intime de son anatomie. Gwendal tressailli violemment.
Satisfait de sa réaction, je laissais mes doigts jouer un moment avec l’entrée de son intimité, lui arrachant de petits gémissements de plaisir. Puis, je finis par le faire se retourner pour avoir plus de liberté pour le préparer le mieux possible. A la position qui fut alors la sienne en cet instant : les jambes écartée, les fesses tendues vers moi, je dus me faire durement violence pour ne pas le posséder à l’instant. Ne faisant aucun commentaire, je déposais un tendre baiser sur le gable de sa fesse droite, provoquant chez lui quelques frissons.
Je réitirais alors mon geste, déposant une multitude de baisers papillon sur ses fesses, alternant entre caresses et baisers. Le sentant peu à peu être rassuré et se détendre, je laissais enfin ma langue effleurer l’entrée de son intimité. A ce contact, Gwendal se cambra violemment, un gémissement de plaisir lui échappant. Il ne me rendait vraiment pas la tâche facile. Avec un autre amant, je n’aurais pas fait autant de manières. J’étais moi-même surpris de mon self-control et de ma patience.
Sa sensibilité était sans pareille, comme si elle n’attendait qu’à être réveillée. Bientôt, la mélodie de ses gémissements plaintifs et cris de plaisir virent ravirent mes oreilles alors que je m’activais à le préparer. Ma langue jouant avec son intimité, je finis par laisser un doigt rejoindre ma langue. A ce contact, Gwendal se tendis imperceptiblement et je pris mon temps pour le rassurer, laissant mon doigt jouer avec son entrée, comme ma langue un peu avant.
Durant de longues minutes, je continuais à le caresser, me laissant guider par ses gémissements et réactions. Puis, à nouveau, je réitérais mon geste, et l’instant d’après, je laissais ma langue forcer doucement l’entrée de son intimité. Il se cambra violemment, en proie à des sensations qu’il ne connaissait pas. Satisfait, je poursuivis par des caresses plus poussées et lorsque je le sentis entièrement détendu, je repris mon idée première et au lieu de ma langue, ce fut mon doigt délicat qui s’insinuait en lui.
Il ne sembla pas sentir la moindre douleur. Profitant du fait qu’il soit parfaitement détendu, j’insinuais alors un second doigt en lui, mais contrairement au premier, celui-ci lui fit pousser un cri de douleur. Son corps se tendit aussitôt. Je cessais aussitôt tout mouvement, lui laissant le temps de s’habituer à la présence de mes doigts en lui. Lorsqu’il fut enfin détendu, j’entamais un lent mouvement de va et vient qui lui arracha un gémissement de surprise. Puis, lorsque la douleur eut complètement disparut, j’esquissais un mouvement de ciseaux, continuant délicatement ma préparation.
Pendant un temps qui me parut infini, je continuais de le préparer, attendant qu’il soit parfaitement prêt et parfaitement détendu pour passer à la suite. Je devais me faire de plus en plus sérieusement violence pour me retenir, surtout quand Gwendal se mit à esquisser de lui même un déhanchement, s’empalant de son plein gré sur mes doigts. Je ne pus retenir un gémissement rauque. L’instant suivant, j’insérais un troisième et dernier doigt en lui et Gwen ne pu retenir un gémissement de douleur. Instantanément, je cessais tout mouvement, lui laissant le temps de s’habituer à l’intrusion.
Au bout d’un temps, la douleur commença à refluer et Gwendal se détendit. Cependant, prenant sur moi, je restais complètement immobile, me contentant de déposer mille baisers sur ses épaules et sa nuque. Gwendal finit par lâcher un gémissement impatient. N’en pouvant plus, je me tendis contre lui et l’instant d’après, mes doigts se mouvaient en lui avec savoir faire. Tout son corps semblait victime d’un brasier qui lui était jusqu’alors inconnu. Ne tenant plus, je retirais subitement mes doigts de son intimité, lui arrachant à mon plus grand plaisir un gémissement de frustration.
Me débarrassant de mon boxer, je présentais sans perdre de temps mon sexe à l’entrée de son intimité, prêt à le posséder. Mais c’est alors que Gwendal se tendit brusquement, et il chercha à se soustraire à ma poigne avant de s’effondrer sur le matelas. Se tortillant, il tentait de se retourner, et je fus effrayé de le voir pleurer.
- Non… Gémit-il, comme en proie à une peur panique.
Immobilisé sous l’effet de la surprise, je l’aidais aussitôt à se retourner. Lorsque je vis son visage ravagé par les larmes, mon coeur se serra douloureusement. Je ne supportais pas de le voir pleurer et encore moins d’être la cause de ses larmes. Délicatement, avec des gestes tendres, je pris son visage entre mes mains et ancrant mon regard au sien, je déclarais d’une voix peinée, sans me rendre compte du surnom que j’employais :
- Calme-toi, Angel… Je m’arrête, regarde… Allez, c’est fini… Je t’en prie, calme-toi, murmurais-je.
- Hayden… Gémit-il lamentablement entre deux sanglots qui me transperçaient le coeur.
- Oui, Gwen ? Murmurais-je.
- Pardon… Pardon…
- Il n’y a rien à pardonner, Gwen, le rassurais-je. C’est normal d’avoir peur lors d’une première fois…
Gwendal garda le silence un instant avant de déclarer d’une toute petite voix :
- Je… Je veux continuer…
- Non, Gwen… Ce n’est pas prudent…
- C’est… C’est parce que tu étais derrière… Avoua-t-il alors, comme terriblement honteux.
A ces mots, je ne pus m’empêcher de me détendre complètement, alors qu’un soupir de soulagement s’échappait de mes lèvres. Lui caressant doucement la joue, je murmurais :
- Je m’excuse, Gwen… J’aurais du me douter que ce n’était pas la position rêvée pour une première fois… Je crois que je me suis un peu trop laissé emporté par la tentation que tu représentes… Avouais-je, sincère.
Semblant touché, Gwen pris appuis sur ses bras et se soulevant jusqu’à mon visage, il s’empara de mes lèvres pour un tendre baiser dans lequel je me perdis. Rares étaient les fois où j’avais connue pareil échange, et si mon coeur s’emballait étrangement, je le fis taire. S’écartant de moi, il déclara d’une voix tremblante :
- Je… Je veux que nous reprenions où… Où on en était…
- Tu es certain ? Demandais-je gravement. Je ne veux pas que tu te forces, Gwen… Sous aucun prétexte…
- Je suis certain, approuva-t-il confiant. S’il te plait…
Hésitant un instant, la tentation finit par se faire trop forte et j’y cédais. Avec douceur, je m’emparais de ses lèvres pour un baiser des plus tendres qui, bien vite, gagna en intensité. Puis, m’activant à faire renaître son plaisir, je fus soulagé de le voir se réveiller à nouveau. Durant un long moment, j’entrepris d’attiser à son paroxysme son désir, de mes doigts habiles, autour de son inimité à présent tout à fait réveillée.
Mes yeux ne pouvaient quitter son corps, l’observant avec une convoitise telle que je ne pouvais la cacher.
- Tu es si beau, Angel… Magnifique… Gwen, je… Oh Seigneur, je te veux tellement… Gémis-je en enfouissant mon visage dans son cou.
Gwendal s’abandonna entièrement à moi, écartant les jambes avant de les refermer autour de ma taille, m’interdisant toute tentative de fuite. Surpris, je me relevais, inquiet. Etait-il vraiment sur ? Je cherchais à déceler toute crainte dans son regard, et pourtant, il semblait si confiant. Comment pouvait-on m’offrir une telle confiance aveugle ? Savait-il que ces mains qui le caressaient étaient teintées de sang ? Savait-il que je n’étais pas à la hauteur…
Repoussant ces interrogations, je m’emparais vivement de ses lèvres pour un baiser passionné auquel il répondit avec entrain, me faisant oublier. Puis, abandonnant ses lèvres, je posais mes mains sur ses cuisses et lui fit relever une jambe afin que nos entrejambes se frottent l’une contre l’autre. A ce contact, Gwendal gémit de plaisir. Puis, au comble de l’impatience, je me redresser légèrement et lui sourit avant de prendre mon érection en main qui était plus que douloureuse. Lisant un peu de peur dans on regard, j’esquissais un petit sourire rassurant :
- Je serais doux, ne t’inquiète pas, Angel… Et puis, à toi de me dire si ça ne va pas, d’accord ?
- D’accord, souffla-t-il confiant.
Prenant mon sexe entre mes doigts, je me présentais enfin à son entrée, arrachant à Gwendal un violemment frisson d’anticipation. Puis, avec une délicatesse infinie, je m’insinuais lentement en lui, écartant ses chairs si fermes pour me fondre en lui. Ce fut son gémissement de douleur alors que je le pénétrais lentement qui me permit de ne pas perdre le pied et de maintenir les rênes de mon plaisir. Je m’immobilisais aussitôt faisant preuve d’un self-control qui m’étonna. La respiration saccadée, je devais puiser dans les moindres recoins de mon être la force de tenir pour ne pas simplement forcer l’entrée et le pénétrer entièrement.
Lentement, la douleur commença à refluer pour Gwendal et d’un léger déhanchement, il m’indiqua que je pouvais reprendre. Plongeant cependant mon regard dans le sien, je lui demandais, inquiet :
- Ca va ? Je ne te fais pas mal ?
Pour toute réponse, il hocha négativement la tête. Rassuré, je patientais encore quelques seconde avant de reprendre doucement, le pénétrant avec une lenteur presque exagérée qui lui arrachant un gémissement de frustration. Soulagé, j’esquissais un petit sourire avant de le pénétrer plus franchement, m’enfonçant entièrement en lui. Je perdis pied, tandis que Gwendal se cambrait violemment laissant un petit cri de plaisir s’échapper de ses lèvres.
- Gwen… Gémis-je en m’allongeant tout contre lui. Oh Gwen… Tu es merveilleux, Angel… Murmurais-je en esquissant un premier coup de rein.
Je sentis Gwendal s’agripper de toutes ses forces à mes épaules. Mes mains posées sous ses cuisses, j’entamais alors un lent mouvement de va et vient, le pénétrant avec précaution, craignant de lui faire mal. Puis, mes lèvres vinrent chercher les siennes et ma langue entraînant la sienne dans un ballet érotique terriblement excitant.
Très vite, mes coups de reins se firent plus ciblés et lorsque j’atteins enfin un point anatomique sensible, j’entendis Gwendal pousser un cri de plaisir. Je me sentais si bien, là en lui, si serrein comme je ne l’avais jamais été. J’avais l’impression de me noyer dans sa pureté et d’oublier qui j’étais, ce que j’avais fait. Plongé dans l’ivresse de l’instant, je l’entendis à peine murmurer mon prénom.
Lors d’un mouvement de bassin plus profond que les précédents, je touchais quelque chose en lui. Son corps se cambra violemment à la recherche du mien. Plus que satisfait, je réitérais mon geste encore et encore, inlassablement jusqu’à ce que ses gémissements se muent en cris de plaisir. Gwendal semblait noyé dans le même plaisir que moi, son corps se soulevant en rythme avec le mien, se cambrant toujours plus afin d’aller à ma rencontre.
Grisé, je finis par passer mes bras dans son dos pour le ramener véritablement contre moi. Assis sur mes cuisses, il passa alors ses bras autour de mon cou, comme pour nous rapprocher plus qu’il n’était possible. Mes mains posées sur ses hanches, je l’aidais à garder le rythme, le pénétrant toujours avec plus de fougue. Ivre de plaisir, Gwendal m’emportait plus loin encore que je ne l’avais espéré.
Brusquement, il posa une main sur mon torse et me repoussa, me forçant à m’allonger. Amusé par son audace, un petit sourire amusé vint étirer mes lèvres. L’instant d’après, comme s’il avait oublié toute pudeur, ses mains posées sur mon ventre contracté afin de garder l’équilibre, il se mit à me chevaucher, se déhanchant lascivement au dessus de moi.
- Oui… Gwen… Gémis-je, emportait par un plaisir intense incontrôlable.
Ivre de plaisir, il s’empalait toujours plus profondément sur mon sexe. Les mains sur ses fesses, je l’aidais à garder un rythme soutenu et cadencé alors qu’un sanglot s’échappait de ses lèvres. Jamais je n’aurais pensé que le sexe soit aussi bon avec lui, aussi intense. Sous sa timidité se cachait un amant hors pair et j’étais orgueilleusement le premier à le découvrir.
Bientôt, ses forces semblèrent l’abandonner et ses bras ne le soutinrent plus. Vacillant, il s’écroula sur mon torse, haletant d’un plaisir intense. Une main dans son dos et l’autre sur sa hanche, j’échangeais à nouveau nos positions et le fit rouler sous moi. Alors que je le surplombais de toute ma hauteur, je me penchais vers lui et m’emparais de ses lèvres pour un baiser impétueux.
Il y répondit avec fièvre avant de le rompre lorsqu’un cri de plaisir s’échappa de ses lèvres. Nous y étions…
- Oh, Angel, gémis-je, en mordant un peu trop violemment la peau de cou, emporté par le vif plaisir, le faisant tressaillir. Gwen… Je vais…
- Hayden… Hayden, sanglota-t-il, répétant mon prénom en une litanie incessante.
L’orgasme déferla sur nous avec la violence d’un tsunami. Dans un cri de jouissance, Gwendal se libéra entre nos deux corps étroitement enlacés, criant mon prénom tandis que je me libérais en lui dans un cri qui fit échos au sien, le marquant à jamais. Alors que Gwendal poussait un gémissement de bien être, à bout de force, je m’écroulais sur lui.
Nos corps luisant de sueur, tremblant sous l’effet des dernières vagues de la jouissance, la respiration erratique, je sentis Gwendal refermer ses bras autour de mon cou.
L’embrassant délicatement dans le cou à l’endroit où je l’avais mordu un peu plus tôt, je tentais de me faire pardonner de ma sauvagerie. Puis, mes lèvres vinrent se poser sur les siennes pour un baiser d’une incroyable tendresse.
Gwendal me rendit mon baiser, toujours avec cette étrange sensation qui me donnait le vertige. Je finis par me retirer de lui, m’allongeant à ses côtés. Lui faisant face, je lui caressais tendrement la joue, le faisant soupirer de bien-être :
- Comment tu te sens ? Demandais-je doucement.
- Je me sens bizarre, avoua-t-il le rouge aux joues sous le sourire que je lui adressais. Bizarre, mais merveilleusement bien…
Un sourire amusé étira mes lèvres. Repensant à nos conversations passées je lui demandais alors :
- Alors ? Toujours convaincu que c’est mieux de coucher avec une personne qu’on aime ?
A ces mots, l’expression de Gwendal changea du tout au tout. Son sourire s’effaça subitement pour laisser place à une mine dévastée. La gorge brusquement nouée, il déclara dans un murmure étranglé :
- Oui…
Ce ne fut qu’à cet instant précis que je pris entièrement conscience de l’ampleur de ma bêtise. Jamais je n’aurais pensé que… Qu’il… Comment pouvait-il penser m’aimer… Perdant mes couleurs, je me redressais sur mon coude pour le surplomber, perdant subitement mes mots, je dis lamentablement :
- Merde… Gwen, je…
Sans me laisser le temps de finir ma phrase, il se releva et sans un regard pour moi, il quitta le lit et alla s’enfermer dans la salle de bain, ignorant mes appels désespérés.
Si j’avais su… Si j’avais su qu’il ressentait cela pour moi alors jamais je n’aurais couché avec lui. J’aurais du le savoir, j’aurais du m’en rendre compte et pourtant, cela me semblait impossible. Il ne pouvait pas m’aimer. Il ne faisait que le croire. L’entendre pleurer fut une torture sans nom et je n’osais pas pousser la porte, je n’osais pas voir ce que je venais de lui faire. S’il était vraiment tombé amoureux de moi alors il était tombé amoureux de la seule personne dont il ne fallait pas.
Dès lors que l’on s’approchait trop de moi, je ne faisais que semer de la souffrance. Alors que je pouvais l’entendre vomir, je me dégoutais. Je ne valais pas ses sentiments. Je n’étais pas à la hauteur. Si j’avais voulu de tout mon coeur protéger Gwendal, je n’avais pas pu le protéger de moi…
Ce fut en prenant sur moi que j’osais pousser la porte de la salle de bain. Le spectacle qui s’offrit à moi me serra si douloureusement le coeur que je crus qu’il allait s’arrêter. Là, adossé contre le mur, recroquevillé sur lui même, son visage enfouis dans ses bras, il pleurait toutes les larmes de son corps, transpirant la souffrance. M’approchant de lui, je posais ma main sur son bras. Vivement, il retira son bras et s’éloigna légèrement de moi, refusant tout contact :
- Ne me touche pas ! Cracha-t-il avec tout le mépris qu’il ressentais pour moi.
Je détestais ses paroles, je détestais les entendre, me rabaissant plus bas que terre, comme ma mère l’avait si souvent fait. Non, ce n’était pas possible qu’il m’aime. Guidé par la peur, je tentais :
- Gwen… S’il te plait, commençais-je. Tu sais, je… Je ne crois pas que tu éprouves vraiment de l’amour moi pour moi… Tu as juste été attiré par la nouveauté… Tu ne connaissais pas, tu voulais découvrir… C’est tout à fait normal…
Avant que je n’ai pu terminer ma phrase, sa main s’abattit durement sur ma joue avec une force telle que la douleur fut aussitôt cuisante.
- Qui es-tu pour me dire que ce que je ressens n’est pas réel ? S’exclama-t-il avec fureur. Toi qui n’as jamais aimé personne de ta vie !
Mon coeur se brisa alors que je tentais :
- Ecoute, Gwen…
- Laisse-moi ! Souffla-t-il, subitement las.
- Gwen… S’il te plait… Insistais-je, me sentant dangereusement tomber là où je ne voulais pas.
- Tu es sourd ? S’exclama-t-il alors. Laisse-moi je te dis ! Dégage ! Je ne veux plus te voir… Acheva-t-il dans un sanglot avant de se détourner de moi, mettant un terme à la discussion.
Si j’avais un coeur de pierre alors pourquoi celui-ci était-il si douloureux en cet instant. Sans un mot, je quittais la salle de bain refermant la porte derrière moi. M’allongeant dans le lit imprégné de nos ébats, je me recroquevillais sur moi-même. Non, je n’étais pas capable d’aimer. J’étais fait pour être seul. Dès lors que je laissais quelqu’un s’approcher trop près de moi, je le faisais souffrir.
Julien avait pourtant été une bonne leçon, mais je n’avais pas du la comprendre. J’étais misérable, dangereux pour autrui. Comment pourrais-je réparer cette erreur ? Pourrais-je seulement y faire quelque chose ? Alors que je sentais mon coeur se craqueler et les larmes monter, je murais aussitôt toutes ses sensations. Je ne voulais pas chuter, je ne voulais pas être faible.
Je devais être fort, oublier, ignorer les pleurs de Gwendal qui me refusait à ses côtés. Je n’étais qu’un bourreau, un monstre de la pire espèce et j’avais heurté l’être le plus pur et le plus fragile que je connaissais. Dieu comme je regrettais.
Je ne méritais pas ses sentiments. Je ne méritais pas de l’amour, mais du mépris. Ma main se posa inconsciemment sur la cicatrice à ma hanche. Si seulement je ne m’étais pas fait attaquer, alors je ne l’aurais jamais rencontré, je ne lui aurais pas fait autant de mal. Je n’aurais jamais du entrer dans sa vie, et jamais je n’aurais du lui proposer mon aide. Ma mère aurait du m’emporter avec elle, mieux encore, ne jamais me mettre au monde.
Je me détestais, me dégoutais… Me donnait envie de vomir et je n’avais pas la moindre idée de comment rattraper mes erreurs…
Lorsque j’ouvris les yeux, je dus faire immédiatement face à ce qui s’était passé la veille. A la place vide qu’occupait normalement Gwen se trouvait un mot. Me redressant aussitôt, je l’attrapais fébrilement et pu y lire :
« Je pars, ne cherche pas à me retrouver… Adieu, Gwen. Ps : Je t’aime. ».
Mon coeur s’emballa aussitôt. Attrapant des vêtements, je m’habillais en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire et sortit de la chambre. A peine avais-je fais deux pas à l’extérieur qu’une main s’abattit violemment sur ma joue.
- Qu’est-ce que tu lui as fait ? Cria Blair hors d’elle.
Alors que sa main s’élevait à nouveau dans les airs, elle fut stoppée par Darren qui lui retint solidement le poignet.
- Si tu lui laissais le temps de s’expliquer au lieu de t’acharner tout de suite sur lui.
- Parce que tu crois qu’il y a besoin d’explications, dit-elle en dégageant vivement sa main. Je pense que tout est parfaitement clair. Ce salaud a fait du mal à Gwendal malgré mes mises en garde.
Sa main libre tomba à nouveau sur ma joue, rougie par le coup précédent.
- Elle a raison, soufflais-je, froid.
Je ne ressentais plus rien. Pas même ma joue qui me cuisait. Même mes paroles sonnaient comme si elles m’étaient étrangères.
- Qu’est ce qui s’est passé ? Demanda Darren.
- J’ai merdé… Répondis-je dans un souffle.
- Tu as merdé ! S’exclama Blair. C’est tout ce que tu trouves à dire, simplement merdé !
- J’ai couché avec lui sans faire attention à ses sentiments, rétorquais-je. J’ai été odieux. Je n’ai pas cru à ses sentiments, soufflais-je alors que la douleur refaisait surface.
- Je t’avais pourtant mis en garde, idiot ! S’exclama Blair.
- Bon dieu Hayden, quand est-ce que tu arrêteras de penser avec tes couilles et que réfléchiras avec ton cerveau. Soupira Darren.
Blessé d’entendre cela de la part de mon ami, je ne répondis rien. Qu’aurais-je pu répondre, après tout il avait raison.
- Tu n’es qu’un putain d’égoïste insensible, surenchéri Blair.
- C’est bon ! Je crois que j’ai compris. Je suis méprisable, un connard d’égoïste, un salopard qui ne pense qu’à sa petite personne et à sa queue. D’ailleurs je me demande ce que je fais ici. Claquais-je brusquement avant de leur tourner le dos et de foncer vers la porte de sortie.
J’entendis à peine Darren me criais d’attendre. En un rien de temps, j’étais dehors. Où était Gwendal ? Où était-il partit ? Inconsciemment, je fis notre chemin inverse, sachant pertinemment que je ne le trouverais pas. Méritais-je seulement de le retrouver.
N’avait-il pas pris la bonne décision en me quittant ? Il fallait qu’il s’éloigne de moi, le plus possible, là où je ne pourrais plus l’atteindre, là où je ne pourrais plus le heurter. Je errais sur la route toute la journée, marchant sans jamais m’arrêter comme si revenir sur mes pas pouvait effacer le mal que je lui avais causé. M’enfonçant dans la forêt, loin de toute civilisation, mes jambes ne me portèrent plus et je m’écroulais.
Ce ne fut qu’à cet instant où je ne pu plus rien retenir. Les larmes tombèrent toutes seules alors que mon coeur si oppressé à me faire crier de douleur. Je pleurais, recroquevillé sur moi même, seul dans la forêt. Je pleurais pour le mal que j’avais causé et l’être que j’avais perdu.
J’avais effleuré un ange et je l’avais fait tombé. Je voulais me faire mal mais je n’en avais pas la force. Je repensais au soir où j’avais pleuré dans ses bras et au bien être qu’il m’avait apporté. Gwendal… La seule personne à qui j’avais dévoilé mes faiblesses. Je repensais à tout ce que nous avions vécu, à tout ce que je venais de perdre….
La nuit était déjà tombée lorsque je repris le chemin du retour pitoyable. Seulement, je n’avais aucune envie de rentrer chez Darren et Blair. Je n’avais pas la force de supporter leur regard accusateur. Ce fut dans le bar le plus glauque de la ville que je me perdis. Je n’ai plus de souvenirs très précis de cette nuit là, faite d’alcool trop fort et de sexe animal, ne pouvant jamais m’ôter de l’esprit Gwendal et le mal que je lui avais fait.
Je me perdis, oubliant la notion du temps, ne vivant plus que des sensations, sans jamais atteindre la puissance de ce que j’avais vécu avec Gwendal. Je restais là le lendemain, oubliant toute notion de jour ou de nuit, m’enfonçant dans une débauche que je n’avais pas connu depuis l’âge de mes 16 ans. Ce fut tard le soir suivant que perdu au fond du bar, alors qu’un homme dont j’ignorais le nom me léchait délicieusement le cou, sa main dans mon pantalon, qu’un autre me cacha brusquement la lumière tamisée de l’endroit. Lorsque je relevais les yeux, je tombais nez à nez avec Darren. Il posa un regard peiné sur moi avant de dire :
- Je pensais que tu avais changé, que tu étais devenu plus responsable. Et pourtant, j’étais certain de te trouver dans ce genre d’endroit. Allez, lève-toi, on rentre.
- Je ne veux pas, soufflais-je, froid et las. Je veux rester là.
- Si tu as un tant soit peu d’estime pour les sentiments de Gwendal, alors lève-toi et suis moi. Ne donne pas raison à Blair. Tu vaux mieux que ça, dit-il en me montrant d’un bref geste de la tête, l’homme qui continuait ses attentions dans mon cou. Allez, insista-t-il, dépêche toi et ne me fais pas regretter ce que je m’apprête à te dire.
Sans un mot, je repoussais l’homme et refermant mon pantalon, je suivis piteusement Darren. Arrivé dehors, je le suivis silencieusement. Nous montâmes dans sa voiture et pas un mot ne fut décroché jusqu’à chez lui, mon regard perdu face au paysage nocturne qui défilait devant mes yeux.
Une fois chez lui, je fus invité dans plus de cérémonie à aller prendre une douche, Blair me lançant un regard noir que je ne pouvais pas supporter. Puis, je retournais les voir dans le salon comme demandé.
M’asseyant en face d’eux, je ne pus faire face à leur regard empli de reproche.
- Est-ce que tu es sûr qu’il mérite de savoir, déclara Blair en s’adressant à Darren.
Darren soupira et sans répondre à sa femme, il me souffla :
- Gwen vient d’arriver chez Julien. Julien m’a téléphoné avant que je vienne te chercher.
Aussitôt, je redressais la tête et demandais :
- Comment va-t-il ?
- A ton avis idiot, déclara Blair.
- Blair arrête, s’il te plait, tu ne nous aides pas vraiment. Déclara Darren, agacé.
- Est-ce que je peux appeler Julien ? Demandais-je alors gravement.
- Bien sur, déclara Darren en attrapant le téléphone avant de me le tendre.
Ne souhaitant pas rendre publique cette communication, après avoir demandé le numéro, je disparus dans la cuisine. Blair, épuisée, alla se coucher. Fébrilement, je laissais sonner, conscient de l’heure tardive. A vrai dire, il était presque le matin.
- Allo, dit une voix que je ne connaissais que trop bien.
- Hayden ! Déclara-t-il.
- Avant que tu ne m’insultes et me dise ô combien ce que j’ai fait ai mal, dis-moi comment va Gwendal… Soufflais-je, le coeur serré.
- Je ne peux pas vraiment te parler maintenant, murmura Julien. Je vais être sincère, il ne va pas bien. Mince, Marie arrive, je te rappelle plus tard.
Sans que j’ai le temps de dire un mot de plus, Julien raccrocha. Je posais le téléphone devant moi, plus que mal à l’aise et c’est ce moment précis que Darren fit irruption dans la cuisine.
- Je pense que tu as besoin d’avaler un petit quelque chose Hayden. Je doute que tu te sois nourris depuis l’autre jour.
- Je n’ai vraiment pas faim, soupirais-je.
- Laisse-moi au moins te préparer une boisson chaude, déclara-t-il avec un petit sourire.
Alors qu’il s’affairait dans la cuisine, je ne pus m’empêcher de lui dire :
- Je suis désolé Darren. Vous venez juste de vous marier et… Et je vous apporte tous ces soucis. Ne t’inquiète pas, demain je m’en irais.
- Si tu me dérangeais Hayden, il y a longtemps que je t’aurais mis dehors. Hayden… Souffla-t-il en venant prendre place en face de moi après avoir mit l’eau à chauffer. Je peux te parler franchement.
- Je… Oui… Dis-je.
- Je m’inquiète pour toi. Ton style de vie n’est pas sain… Regarde où je t’ai retrouvé tout à l’heure, et… Gwendal était quelque chose de bien qui t’arrivait dans ta vie et tu as…
- J’ai tout gâché, je sais mais c’était sûrement mieux pour lui.
- Qu’est ce que tu veux dire ? Me demanda-t-il.
- Je ne suis pas fait pour les relations humaines…
Darren partit à rire, avant d’ajouter :
- Tu dois être le seul homme que je connaissais à avoir autant de relations humaines Hayden ! Tu as des amis aux quatre coins de l’Angleterre.
- Oui, mais ça ne reste que superficiel…
- Alors à toi de changer les choses.
- Je ne sais pas comment, répondis-je, soucieux.
Ce fut à ce moment là que le téléphone sonna. Aussitôt, je décrochais, certain qu’il s’agisait de Julien, et cela ne manqua pas. J’entendis Julien soupirer avant de dire.
- Je vais être honnête avec toi Hayden. Il n’a fait que pleurer jusque là. Tu n’y es vraiment pas allé de main morte avec lui. Tu fais tout pour que Marie te déteste encore plus… Mais ne t’inquiète pas, il est entre de bonnes mains. Quelle idée tu as eu de t’en prendre à lui…
- Je…
C’est alors que le téléphone sembla lui être arraché des mains et j’entendis Marie et Julien parler.
- Laisse moi le téléphone, je sais bien qui tu as appelé, je vais lui faire entendre ce qu’il a causé.
- Marie ! Je pense qu’il le sait déjà, ça ne sert à rien.
- Qu’il écoute, cracha-t-elle. J’espère au moins que son coeur de pierre en souffrira !
C’est alors que je reconnu une voix que j’aurais reconnu entre mille. Julien ne m’avait pas mentis. Je pouvais l’entendre. Gwendal pleurait sans s’arrêter. Mon coeur se serra alors que je tenais fébrilement le combiné. Je ne pouvais pas le laisser comme ça et lorsque j’entendis à nouveau Julien me dire :
- Je suis désolé, c’est Marie…
- Je vais venir le chercher Julien, au moins lui parler, mais ne lui dit rien. Je ne veux pas qu’il parte de chez toi. Il n’a nulle part d’autre où aller.
- Est-ce que tu crois que c’est vraiment une bonne idée ? Je veux bien que tu viennes, mais pas pour lui faire mal davantage… Souffla Julien. Je connais sa douleur.
- Je suis désolé Julien… Désolé pour ce que je t’ai fait, gémis-je alors.
- C’est du passé, souffla-t-il.
- Je pars demain, déclarais-je. Ne dis rien à Gwen et encore moins à Marie.
- Je… D’accord… Souffla-t-il. Je dois te laisser Marie m’appelle.
- Merci Julien… Merci pour ce que tu fais. Déclarais-je sincèrement.
- C’est normal Hayden. Prend soin de toi !
La communication fut brusquement coupée. Posant le téléphone devant moi, je soupirais. Ce soir j’empaquetterais toutes mes affaires. Demain matin, je partirais à l’aube pour tenter d’au moins m’excuser… Je ne voulais pas que ça se finisse ainsi… Je ne voulais pas que ça se finisse tout court. Darren, toujours présent, me tendis une tasse de thé fumante, avant de dire tout simplement :
- Je n’aurais jamais cru dire ça un jour de toi Hayden, mais je pense que nous nous sommes trompés sur ton compte Blair et moi. Tu as définitivement un coeur.
Fronçant les sourcils, je ne compris pas où il venait en venir. Et Darren explicita alors sa déclaration.
- Tu l’aimes.
- Ne dis pas de bêtises, soufflais-je. Je n’aime personne, pas même ma petite personne. Dis-je en riant.
- Hayden, est-ce que tu paniquerais comme ça pour n’importe qui ?
- Je tiens à lui, répliquais-je. C’était la dernière personne à qui je voulais faire du mal. Et oui, je m’en veux terriblement.
- Ce n’est pas à moi que tu devrais dire tout cela.
- Je sais… Dis-je en me levant brusquement. Je partirais tôt demain matin. Déclarais-je, soudain épuisé. Si je ne te revois, pas, transmet toute mes amitiés à Blair et Darren je te dis encore mille fois merci. Je m’excuse encore…
- Je te mènerais à la gare demain matin, déclara Darren en souriant. Je pense que c’est la meilleure décision que tu viens de prendre. Allez… Va te coucher, tu as une mine affreuse.
Ce fut la mort dans l’âme que je retournais dans ce lit où tout avais basculé. Je ne pus fermer l’oeil de la nuit. J’entendais encore et encore les pleurs de Gwendal et je le voyais là, recroquevillé dans la salle de bain, seul.
Le lendemain matin, à l’aube, je fus près, mes bagages pliés. Comme promis Darren m’emmena à la gare et après l’avoir chaleureusement remercié, il me fit promettre de revenir le voir. Je pris le premier train en partance pour l’Angleterre. Sans vraiment savoir pourquoi, j’avais l’intime conviction que je devais faire vite.
Je n’avais pas la moindre idée de ce que j’allais faire ou tout simplement lui dire. Comment allait-il prendre ma venue ? Accepterait-il simplement de m’adresser la parole ? Je tenais juste à m’excuser et je savais que je lui devais plus au plus profond de moi. Je ne pourrais effacer le mal que je lui avais fait mais je ne voulais pas que notre histoire se termine ainsi et je ne voulais plus l’entendre pleurer ainsi par ma faute. Je soupirais alors que je réalisais au plus profond de mon coeur, qu’il me manquait.
J’avais pris goût à ma vie avec lui, j’avais apprécié sa présence à mes côtés et même son caractère et ses questions déplacées. Il était la seule personne à qui j’aurais voulu tout avouer. Avec le temps, j’aurais accepter de lui parler plus profondément de moi, lui avouer qui j’étais véritablement.
Oui… Gwendal faisait ressortir en moi le petit Hayden apeuré qui craignait les coups de sa mère avant d’apprendre à éprouver de la haine pour elle, le petit Hayden qui ne cherchait qu’à être aimé avant d’avoir été désillusionné. Mais je n’étais plus cet être là, ma mère avait fait de moi un monstre et je m’étais complais dans ce rôle. La liberté avait donc un prix et je ne me rendais compte que maintenant de combien elle m’en coûtait.
Je ne sus combien de temps dura mon trajet. Je n’étais pas spécialement habitué à voyager en train ou en bus, mais je n’avais pas le temps de faire autrement. Lorsque je marchais je tentais d’ignorer les chemins que nous avions parcourut avec Gwendal, allant même jusqu’à choisir la route plutôt que la forêt. J’arrivais tôt le lendemain matin, et anxieux, je pris une grande respiration. Qu’allais-je lui dire ? Comment allais-je faire ? Je finis pas frapper quelques coups à la porte, le coeur battant.
La porte ne tarda pas à s’ouvrir me dévoilant Marie qui fronça aussitôt les sourcils et me claqua la porte au nez sans que je n’ai eu le temps de faire quoi que ce soit.
Sans me laissait démonter, j’insistais et ce fut Julien qui finit par m’ouvrir après avoir entendu une dispute. Sans laisser le temps à Julien de me dire quoi que ce soir, Marie poussa Julien et se planta devant moi, et me colla une gifle bien plus forte encore que celle de Blair.
- Tu as vraiment du culot de te pointer ici, cria-t-elle.
Puis, sans plus de cérémonie, elle me tourna le dos et repartie à l’intérieur. Je me retrouvais face à Julien qui, les sourcils froncés, semblait tout aussi en colère. Déglutissant, je vis son poing se serrer.
Tournant légèrement la tête, je lui dis :
- Vas-y à ton tour, je le mérite de toute façon… Soufflais-je, prêt à tout endurer pour arriver à voir Gwendal.
Je fermais les yeux, ne voulant pas voir le coup venir. Cependant, rien de tel ne se produisit, et brusquement, je me sentis attiré dans des bras puissants. Ouvrant les yeux, je remarquais être dans les bras de Julien.
- Pourquoi… Lui demandais-je dans un murmure.
- Tu n’as pas changé Hayden et je pense que ce n’est pas à coup de baffe que ça y fera quelque chose… Laisse-moi juste prendre dans mes bras, mon salopard d’ami.
Je finis par lui rendre son étreinte, plus touché que je ne l’aurais cru par son geste. C’était comme s’il me donnait un peu plus de force pour aller voir Gwendal. Je ne tins pas plus de quelques minutes pour lui dire :
- Où est Gwen ? Est-ce que je peux aller le voir.
Julien s’écarta aussitôt de moi et à la mine peinée qu’il employa mon inquiétude grimpa aussitôt.
- Qu’est ce qui se passe ? Il ne lui est rien arrivé au moins ? Déclarais-je, sentant mon coeur heurter douloureusement contre ma poitrine.
- Son père est venu le chercher hier matin… Souffla-t-il.
- Et il est partit avec lui ! Vous n’avez pas cherché à le retenir et à empêcher son père de…
- Il y est retourné volontairement Hayden, il a dit que c’était la meilleur décision qu’il aurait du prendre depuis longtemps.
Me retournant aussitôt, je m’apprêtait à partir lorsque Julien me demanda :
- Où vas-tu Hayden ?
- Le chercher ! M’exclamais-je en me tournant vers Julien.
- Arrête ! Lança Julien en m’attrapant pas le bras. Ca ne sert à rien d’y aller comme ça, sur un coup de tête. Tu crois que son père n’a pas prévu que tu reviendrais.
- Mais, je ne peux pas le laisser là-bas. Il ne peut pas Julien. Pas par ma faute ! Jamais je ne me le pardonnerais.
- Je sais Hayden… Crois-moi, j’aurais empêché son père de le prendre si Gwen n’avait pas parut aussi décidé. C’est son choix Hayden. Tu ne peux pas forcer Gwendal à faire ce qui te parait être juste pour toi.
- Mais… Il… Il détestait sa vie là bas… Soufflais-je sentant les larmes venir, que je ravalais aussitôt avec amertume.
Julien m’attrapa par le bras et me guida vers la rivière. Le même endroit où Gwen et moi avions conclu notre pacte de voyager ensemble. C’était à cet endroit que je lui avais fait cette promesse que je n’avais su tenir…
Une fois que je fus assis à côté de Julien, il posa sa main sur ma cuisse.
- Il se marie demain Hayden… Nous sommes invités au mariage. Marie est partagée entre l’envie de s’y rendre pour soutenir Gwendal et le désir de ne surtout pas le voir gâcher sa vie ainsi.
- Il faut l’en empêcher ! M’exclamais-je.
- Je pense que si une seule personne le peut, c’est toi Hayden. Mais si tu désires vraiment te lancer dans cette voix, promet-moi une chose.
- Laquelle ? Lui demandais-je.
- Ne le fais que si tu es sur de pouvoir lui apporter quelque chose. Promet-moi de ne plus jamais le faire souffrir… Promet-moi de ne pas lui faire la même chose que moi. Promet-moi que tu ne fais pas ça par égoïsme pour simplement racheter tes erreurs à titre purement personnel.
- Je lui ai promis de le protéger Julien. Je n’ai jamais failli à une promesse.
- Alors protège-le de toi… Mon invitation est cachée dans mon bureau. Si tu peux me promettre tout ce que je viens de te demander alors, vole la moi à la première heure demain matin et fonce avant que Marie ne t’attrape, dit-il avec un petit sourire.
- Merci Julien, soufflais-je, sans parvenir à lui rendre son sourire.
- Bon et si tu allais poser tes affaires. Après j’ai du travail pour toi ! Déclara-t-il. Ca me permettra de passer un peu de temps avec Marie et Lyah.
Sans un mot de plus, nous nous levâmes. Lorsque nous entrâmes, je vis Lyah dans le couloir, je m’approchais d’elle. Voulant la prendre dans ses bras, celle-ci s’en fut aussitôt dans la cuisine en me jetant un regard noir.
- Elle est amoureuse de Gwen, déclara Julien en riant. Et c’est réciproque ! Malgré son âge elle semble avoir parfaitement compris que tu avais fait du mal à Gwen.
- Marie doit y être pour quelque chose, dis-je en souriant à mon tour.
Nous ne perdîmes pas beaucoup de temps. Déposant mes affaires dans la chambre qui sentait encore amèrement la présence de Gwen, même si plus aucune de ses affaires n’était présente, je suivis Julien jusqu’à l’établit. Me fournissant tout ce dont j’avais besoin, il me demanda de faire un nouveau pré pour ses vaches, d’aller dégourdir les jambes de sa jument et de nettoyer son box. S’en suivit d’une folle liste de travail que j’exécutais sans broncher. Je compris rapidement qu’il cherchait à m’éloigner de Marie et surtout à me laisser seul pour réfléchir à ma décision.
A aucun moment Marie ne m’adressa la parole et je dînais seulement en compagnie de Julien silencieusement. C’est alors qu’il me demanda :
- Pourquoi tu agis comme ça Hayden ? Il n’y a pas plus gentil et honnête que toi mais dès qu’une relation devient sérieuse, on dirait un gamin égoïste qui ne sait que blesser les autres. Pourquoi dès que quelqu’un s’approche trop de toi, tu te débrouilles pour qu’il te haïsse ou souffre trop pour chercher à te suivre… Pourquoi tu t’en es pris à Gwen… Est-ce que c’est vraiment l’envie de voyager qui t’as poussé à partir ou ta peur de t’engager sérieusement avec moi… Quand tu es parti Hayden… Quand tu m’as quitté… C’était juste après que je t’ai dis “je t’aime”. Je savais… Je savais pourtant que tu continuais d’aller à droite et à gauche. Je savais que tu saurais toujours frivole et libertin. Et pourtant, quand je me retrouvais au creux de tes bras, tu avais cette tendresse. Tu me donnais l’impression d’être aimé. Est-ce que tu as simplement une seule fois ressentis quelque chose pour moi, ou tu as trop peur et tu as fuis ?
- Je suis désolé, soufflais-je simplement, incapable de répondre à toute ses questions.
- C’est du passé Hayden… Et tu resteras toujours mon ami. J’espère que tu le sais.
Nous fûmes à nouveau plongé dans le silence, jusqu’à la fin du repas. Lorsque j’eus terminé, j’aidais Julien à nettoyer avant de le remercier et de prendre la direction de ma chambre. Ce fut au moment où je passais le pas de la porte, que Julien me demanda :
- Depuis quand tu donnes des surnoms à tes amants ?
- Comment ça ? Dis-je en fronçant légèrement les sourcils, me tournant vers lui.
- Tu as appelé Gwen “Angel”… Tu n’as jamais usé d’un tel surnom avec moi. Se pourrait-il que tu ressentes vraiment quelque chose pour lui ?
Sans lui offrir de réponse, n’en n’ayant pas, je quittais la cuisine pour aller dans ma chambre. Après une bonne douche et un rasage de près, je fouillais dans mon sac et réalisais que je n’avais pas grand chose à me mettre le lendemain. Il faudrait que je parte tôt et que je dégote quelque chose en ville. Allais-je vraiment m’y rendre ? Allais-je retrouver Gwendal ? Ce fut cette question qui me hantant toute la nuit et ce fut à l’aube que je me dirigeais sur la pointe des pieds jusqu’au bureau de Julien.
Qu’elle ne fut pas ma surprise de découvrir un magnifique costume noir et une chemise blanche, accompagné d’une petite note agrafée « Soit certain de ce que tu fais» et de l’invitation au mariage.
Attrapant le tout, fébrile, je fonçais dans la salle de bain et me préparais du mieux que je pus. On aurait dit que ce costume avait été taillé pour moi et je remerciais le fait que nous ayons à peu près la même corpulence avec Julien. Disciplinant mes cheveux avec du gel je m’observais ensuite dans le miroir ayant du mal à me reconnaître.
Après une petite touche de parfum, je m’enfus dehors, ne voulant surtout pas être intercepté par les habitants de cette maison. Une fois dehors, je marchais jusqu’au village et de là, pris une voiture. Je m’arrêtais à distance de la grande propriété, décidant de faire le reste du chemin à pied.
Perdu dans mes pensées, sans vraiment m’en rendre compte, je finis devant la rivière, à l’endroit même où j’avais rencontré Gwendal. Mon coeur se serra alors que je m’asseyais sur le muret en pierre. Étais-je vraiment en train de prendre la bonne décision ? Qu’allais-je lui dire ? Qu’avais-je à lui proposer… Comment allait-il ?
Ce fut le soleil haut dans le ciel qui me tira de mes pensées. Réalisant aussitôt que le mariage avait sûrement commencé, je me traitais de tous les noms. Je n’avais pas à hésiter. Je devais faire quelque chose, mettre mon orgueil de côté même si je me faisais rejeter. Je courus, plus vite encore que je ne l’avais jamais fait, ignorant les habits que je portais qui étaient loin d’être fait pour une course folle.
J’arrivais près de la chapelle et fut soulagé de ne voir personne m’empêchait de rentrer. Devant la porte, je pris une grande inspiration. Mes mains se posèrent sur celle-ci, et je restais figé, incapable d’aller plus loin. Ce fut à cet instant, que j’entendis le prête demander si quelqu’un s’opposait cette union. Sans savoir ce qui allait réellement se passer, passant outre ma peur, je poussais les grandes portes qui s’ouvrir dans un grand grincement.
Tous les regards se tournèrent aussitôt vers moi, mais je les ignorer, ne me focalisant que sur Gwendal. Il semblait brusquement apeuré de me voir ici. Rassemblant tout mon courage, je finis par m’arrêter, et déclarais :
- Moi ! Moi je m’y oppose !
M’approchant un peu plus de Gwendal, je le regardais droit dans les yeux avant d’ajouter :
- Ne fais pas ça Gwen ! Ne gache pas ta vie…
- Ne t’approche pas ! Je ne veux plus te voir ! Rétorqua aussitôt Gwendal me faisant m’arrêter net.
Sans lâcher son regard et sans sourciller, le coeur battant, j’ajoutais :
- Pourquoi gâches-tu cette liberté à laquelle tu semblais tant tenir ?
- Parce que ma liberté n’avait de valeur à mes yeux uniquement parce que je la partageais avec toi, rétorqua-t-il amer alors que je pouvais voir ses yeux s’humidifier.
- Tu ne m’as même pas laissé le temps de m’excuser, soufflais-je, touché par ce qu’il venait de me dire plus que je ne l’aurais cru. Je suis désolé Gwendal… Ne fait pas ça ! Je t’en supplie, tu n’as même pas découvert la moitié de ce que je voulais te faire découvrir…
- C’est trop tard, répliqua-t-il. Pourquoi tu reviens me torturer ?! Je ne veux plus te voir ! Arrête ! Arrête de me faire souffrir, cracha-t-il, les larmes aux yeux.
- Tu n’es pas le seul à avoir mal Gwendal ! Tu n’imagines pas combien ton départ m’a fait mal… Je suis désolé Gwendal, dis-je en tombant pitoyablement à genoux. Si je pouvais revenir en arrière, je le ferais. Mais te savoir loin de moi, je ne peux pas, ça fait trop mal… Avec toi, c’était différent et magique…
- Tais-toi ! S’exclama-t-il. Arrête ! Je t’en supplie, laisse moi !
Ignorant son ordre, je poursuivis :
- Je m’en veux Gwendal ! Si tu savais comme je m’en veux… Je t’ai promis de te protéger et je n’ai même pas su te protéger de moi-même. Pardonne-moi Gwendal. Ne gâche pas ta vie à cause de moi !
- Je t’ai tout donné Hayden, déclara Gwendal en séchant ses larmes d’un revers de manche. Et tu m’as trahis… Hayden, comment veux-tu que je te fasse confiance…
Un silence suivit cette déclaration. Et alors que j’allais répondre quelque chose, Gwendal me devança :
- Si tu as un minimum de respect pour moi, alors tu dois t’en aller, déclara-t-il en détournant son regard.
Je me sentis alors hisser vers le haut et je ne compris que trop tard qu’il s’agissait de deux vigiles bien trop costauds pour tenter de m’en dégager. Le coeur battant, alors que j’étais tiré vers la sortie la vue de Gwendal et de sa futur femme me serra si durement le coeur que je criais alors :
- Apprend moi Gwendal ! Déclarais-je alors qu’il tournait brusquement la tête vers moi. Apprend moi à aimer…
Gwendal ne répondit rien, me fixant d’un regard que je ne parvenais pas à décrire. Alors que j’ajoutais plus bas, les larmes me montant aux yeux à l’idée que c’était surement la dernière fois que je le verrais :
- Je t’en supplie, apprend-moi à t’aimer…
Sans avoir le temps d’ajouter quoi que ce soit, je fus dehors et les portes se fermèrent derrière nous.
Je fus brusquement jeter sur les dalles d’entrée de l’église et un coup de pied dans le ventre me heurta de plein fouet. Brusquement, l’un des vigile me saisit par le col et me plaqua violemment contre le mur :
- Ecoute-moi bien, cracha l’un d’eux, ne remet plus jamais les pieds ici ! Ne tente plus jamais de t’approcher de lui où tu ne repartiras pas vivant.
Son poing s’abattit durement son mon visage avant qu’ils ne me jettent en bas des marches comme une vulgaire poupée de chiffon. Me redressant difficilement, je toussais avant de cracher du sang. Me massant la mâchoire, j’eus à peine la force de me redresser. Je venais de tout perdre, définitivement. Rester près de cette église m’écœura mais je ne parvins pas à aller plus loin que le banc que je remarquais.
M’y asseyant je souris amèrement en voyant en face de moi l’église. J’avais mal, affreusement mal et la douleur que je ressentais n’avait rien à voir avec les coups que j’avais reçu. J’avais l’impression que quelqu’un prenait mon coeur à pleine main et tentait de l’arracher de mon corps avec une violence inouïe.
Ce fut alors que la porte s’ouvrit brusquement sur Gwen en pleurs suivit de toute sa famille qui lui criait après de revenir. J’eus à peine le temps de me redresser que Gwendal me sauta dans les bras. Grimaçant sous la douleur, je l’ignorais alors que mes bras se refermaient sur lui comme pour l’empêcher de partir. Là, tout contre mon oreille, au milieu de ses larmes, il murmura comme une plainte :
- J’ai tout abandonné pour toi, ne me fait pas regreter mon choix…
Le père de Gwendal se rua sur nous et s’arrêta à quelques mètres.
- Gwendal ! Revient ici tout de suite ! Déclara-t-il. Tu n’imagines pas la honte que tu viens de nous faire vivre. Reviens maintenant !
- Gwendal, gémis sa mère, oh mon dieu, Gwendal.
- Tu fais erreur Gwendal, tu ne peux pas être un sale pédéraste. C’est cet homme, cet animal qui t’a embobiné. Gwendal ! Mon fils, reprend la raison et revient. On tentera d’oublier cet incident.
J’entendis Gwen gémir de douleur et n’en supportant pas d’avantage, je fis ce que je lui avais toujours promis. Le gardant tout contre moi, protecteur, je toisais son père avec tout le mépris dont j’étais capable avant de répliquer, assez fort pour que tout le monde l’entende :
- Il était parfaitement homosexuel lorsque nous avons couché ensemble ! Vous ne méritez pas votre fils. Vous ne l’avez jamais connu, jamais regardé ! Vous ne savez même pas qui il est ! Vous ne l’avez jamais aimé…
Je sentis Gwendal frémir au creux de mes bras et je le serrais encore plus fort tout contre moi, comme si cela pouvait l’empêcher d’être atteint par la méchanceté et la brutalité de ses géniteurs.
Ce fut à cet instant que Gwendal tourna la tête, et sans pour autant quitter mon étreinte, il fit face à son père, comme mue par une force que je ne lui connaissais pas :
- Je ne veux pas de cette vie que vous avez décidé pour moi. Mon choix est d’être avec Hayden. Je l’aime ! Déclara-t-il. Qu’importe si je suis renié ! Ma vie c’est auprès d’Hayden, et j’assume mes sentiments.
Ne résistant pas, je m’emparais aussitôt de ses lèvres. Elles m’avaient tant manquées. Comment avais-je pu vivre ne serait-ce qu’une seconde sans elles ! Comment avais-je pu me priver de ce bonheur. Sous la surprise, Gwendal entrouvris ses lèvres et j’en profitais aussitôt pour investir sa bouche. Avec vigueur et une douceur non feinte, je l’entraînais dans un baiser emplie de sentiments comme pour panser la souffrance causée, comme pour lui apporter la force qui lui était nécessaire.
Notre baiser avait le goût amer du sang à cause du coup que j’avais reçu et j’ignorais la douleur que cela me causait encore. Je voulais me fondre en lui, je voulais qu’il me possède comme jamais encore je ne l’avais désiré de personne. Je voulais être à lui et fut effrayé par ce sentiment. J’étais près à ignorer ma liberté, si importante à mes yeux et à la lui offrir. Mon coeur battait douloureusement dans ma poitrine à m’en couper le souffle. Ce fut les deux mains de Gwendal me repoussant fermement qui me firent revenir à la raison.
- Gwendal ! Ceci est la dernière chance que je te laisse, claqua son père écoeuré. Si tu pars avec cet animal, je te renie ! Je ne veux plus jamais te voir ici ! Je ne veux plus entendre parler de toi ! Jamais tu m’entends.
La mère de Gwendal s’effondra brusquement alors qu’un homme la retins de justesse avant qu’elle ne touche le sol.
Echangeant un bref regard avec moi, Gwendal se tourna à nouveau vers son père et déclara avec une force qui le rendait encore plus beau :
- La ferme ! Cracha-t-il Je préfère être renié que de me soumettre encore à vos ordres.
Son père parut brusquement horrifié. Sans un mot, il lui tourna le dos, et suivit de toute la famille et des personnes présentes, ils retournèrent dans l’église, claquant violemment la porte. Seul un jeune homme un peu plus âgé que nous resta présent.
Il s’approcha alors de nous, tandis qu’agrippé à moi, Gwendal tremblait. Je ne pouvais avoir idée de ce qu’il devait ressentir. Il avait tourné le dos à sa famille entière pour moi et je devais en endosser toute la responsabilité. Indéniablement je m’étais lié à lui alors qu’il venait de mettre ma vie entre ses mains. Le jeune homme s’arrêta devant et posant sa main sur l’épaule de Gwendal, celui-ci sursauta avant de se tourner vers lui :
- Je suis fier de toi Gwendal, tu as su faire ce que je n’ai jamais osé….
Gwendal esquissa aussitôt un sourire et se dégageant de mon étreinte, restant tout de même contre moi, il lui demanda aussitôt :
- Nathaniel ! S’exclama-t-il. Je ne pensais pas te revoir un jour ! Est-ce que ça va ? Demanda-t-il en séchant ses larmes comme honteux.
- Je vais bien… J’admire vraiment le courage que tu as eu, insista-t-il. Et je tenais à te dire que si tu avais besoin de quoi que ce soit, tu peux compter sur moi. Je peux t’accueillir chez moi si tu veux. Ce n’est pas immense, mais on pourra te faire une place, dit-il avec un petit sourire.
- C’est très gentil de ta part, mais je vais rester avec Hayden, répondit Gwen en m’adressant un petit sourire.
- En tout cas, si jamais tu as besoin de quoi que ce soit, je tenais à ce que tu saches que je suis là. Entre cousins reniés, déclara-t-il amusé, on doit s’entraider.
- Je… Merci, souffla Gwendal, certainement plus touché qu’il ne le laissais paraître.
- Ce que tu traverses est difficile Gwendal, ajouta-t-il. Je peux te le dire, je l’ai vécu… Mais, ça vaut le coup ! Déclara-t-il.
Puis s’adressant à moi, il me dit avec sérieux :
- Prenez soin de mon cousin et soutenez-le…
- Je vous le promet, dis-je, passant tendrement mes bras autour de son corps frêle.
Gwen semblait avoir encore perdu du poids. Nathaniel attrapa alors son portefeuille et en sortit un papier sur lequel il griffonna un numéro avant de le tendre à Gwendal.
- Appelle-moi si tu as besoin. Je dois y aller… J’espère avoir de tes nouvelles.
- Merci, souffla Gwendal, profondément touché.
Nathaniel s’éloigna après un sourire et un dernier signe de la main. Nous nous retrouvâmes brusquement seul. Reportant toute mon attention sur Gwendal, je lui soufflais alors, comme pour définitivement sceller ma promesse, passant une main délicate dans ses cheveux, comme pour m’assurer qu’il était bien présent, là, dans mes bras :
- Je te promets Gwen, je te promets que je ne te le ferais pas regretter…
Gwen me pris aussitôt dans ses bras et alors que je cherchais à approcher mes lèvres des siennes, il tourna la tête, me faisant clairement comprendre qu’il n’en avait pas envie. Blessé, je ne n’insistais pas, le serrant plus fermement dans mes bras. Je murmurais alors à son oreille :
- Ca y est… Tu es enfin libre maintenant…
Pour toute réponse, Gwen enfouit sa tête dans mon cou. Nous restâmes ainsi entrelacé un temps que je n’aurais su définir, profitant simplement du fait de se retrouver. Mon coeur qui avait été si douloureux se calmait enfin, retrouvant une forme de chaleur que je n’avais connue qu’à ses côtés. Ce fut Gwendal qui finit par s’écarter légèrement de moi.
- Comment tu te sens ? Soufflais-je.
- Je suis épuisé… J’ai faim… Dit-il avec un petit sourire.
Soudain son visage se décomposa et il ajouta :
- Je n’ai plus rien ! Pas d’argent, pas de vêtement, pas de…
Je posais aussitôt un doigt sur ses lèvres, l’incitant au silence.
- Ce n’est que du matériel Gwendal. Je te prêterais des affaires et on achètera le reste. C’est aussi ça la liberté Gwen ! Tu as perdu toutes tes attaches. Quand je suis partit de chez moi, je n’avais plus rien… Plus personne… Mais tu m’as moi…
Gwendal me sourit timidement, et je lui dis alors :
- Et si nous rentrions, déclarais-je avec un sourire. Mais avant laisse-moi-t’acheter quelque chose à manger en ville.
- Je… Merci, dit-il avec un petit sourire.
- Gwen, tu n’as pas à être timide ou gêné avec moi d’accord ? Je crois qu’on a dépassé ce stade.
Gwendal rougit de plus belle. Paradoxalement, ce fut moi qui attrapait timidement sa main et l’entraînais à ma suite, l’éloignant à jamais de sa famille.
Comme promis, nous nous arrêtâmes en ville et n’ayant plus à nous cacher, je lui proposais d’aller dans un restaurant. S’il refusa prétextant que nous n’avions pas assez d’argent pour ça, je ne lui laissais pas le choix. Installé à une table, nous passâmes commande, et Gwendal, me regardant avec un sourire amusé, déclara :
- Tu devrais faire un tour aux toilettes et laver ton visage… Tu as encore du sang sur le coin de la lèvre… Ils ne t’ont pas fait mal au moins ! Ajouta-t-il soudain inquiet.
- Quelques bleus sûrement. Mais rien de grave. M’empressais-je de le rassurer. Crois-moi, dis-je en me levant, j’aurais été prêt à bien plus pour te récupérer.
Me redressant, sous les conseils de Gwendal, je m’absentais et allais aux toilettes. Le reflet qu’il me renvoya me fit sourire malgré moi. En effet, il ne m’avait pas loupé. Attrapant un morceau de papier, je le passais sous l’eau et tentais d’enlever le sang séché. N’ayant pas de glace sous la main, le coin de ma lèvre droite était déjà en train d’enfler. Après avoir passé un peu d’eau sur mes cheveux en bataille, je partis rejoindre Gwendal.
Celui-ci semblait comme apeuré, assis seul sur la banquette. Sans perdre de temps, je vins aussitôt m’asseoir près de lui. Il jeta alors un regard effrayé autour de lui, et je le rassurais aussitôt, comprenant sa crainte :
- Ne t’occupe pas du regard des autres Gwen. Allez viens-là…
Je l’attirais aussitôt dans mes bras alors qu’il souffla :
- Je n’ai plus rien… J’ai peur….
Passant une main dans ses cheveux, je répondis alors :
- Tu es surtout affamé et épuisé Gwen… Demain après une bonne nuit de sommeil, tu auras les idées plus claires.
Gwendal acquiesça et ce fut à ce moment là que l’on nous apporta nos assiettes. M’éloignant à contre coeur de Gwendal après avoir déposé un baiser sur son front, je le laissais face à son assiette. N’ayant rien avalé non plus, ce fut avec un appétit que nous dévorâmes nos assiettes sans laisser une miette. Nous prîmes ensuite le bus pour nous approcher de chez Julien. Assis tout contre lui, Gwendal était venu se réfugier dans mes bras, comme s’il avait peur que je m’éloigne ou que tout cela ne soit qu’un rêve. Avant qu’il ne s’assoupisse, je lui soufflais amusé :
- Je peux te dire que quelqu’un se languit de toi. Ta fiancée t’attend désespérément…
Sentant Gwendal se tendre, je rajoutais aussitôt :
- Je parle de Lyah. Elle t’a vraiment adopté, dis-je avec un petit sourire.
Gwendal se détendit aussitôt et ce fut un petit sourire accroché aux lèvres qu’il s’endormit contre moi.
Une fois arrivé, n’ayant pas le coeur à le réveiller, je décidais de le porter dans mes bras. Ce ne fut que lorsque nous fûmes sur le pas de la porte, que je le tirais de son sommeil à contre-coeur.
- Nous sommes arrivé Gwen… Je pensais que tu voulais les voir avant d’aller te coucher.
- Mmmh, merci, souffla-t-il alors que je le posais par terre.
Alors qu’il se frottait les yeux, je frappais quelques coups à la porte. Ce fut Marie qui vint nous ouvrir, Lyah accroché à ses jambes.
- Endal ! Cria aussitôt Lyah.
Lâchant les jambes de sa mère, elle se rua aussitôt sur Gwendal qui déjà abaissé, la prenait dans ses bras, la serrant fortement contre lui. Il ne fallut pas plus longtemps avant que Julien n’arrive.
Ce fut de grands sourires et une joie non feinte qui accueillirent Gwendal. Chacun le serra dans ses bras, et le bonheur que je pus voir sur son visage me rempli de joie. Marie déboucha une bouteille que nous savourâmes dehors. Gwendal se contenta d’un jus de fruit, et fut aussitôt accaparé par Lyah. Ce fut à cet instant que Julien m’attira à lui et me serra dans ses bras.
- Tu as fait le bon choix ! Déclara-t-il. Je suis fier de mon ami.
Alors qu’il me serrait un peu trop fort, je me tendis en grimaçant.
- Qu’est ce qui s’est passé ?
- Disons que les molosses de son père ne sont pas très tendre.
- Fait moi voir ! Déclara-t-il.
- C’est bon… Soufflais-je.
- Hayden ! S’il te plait ! Insista-t-il.
Loin d’être pudique, ce fut la première fois que j’enlevais à contre coeur mon tee-shirt. Le visage de mon ami s’horrifia tout à coup.
- Hayden, souffla-t-il…
Gwendal, Marie et Lyah arrêtèrent leur discussion et me fixèrent aussitôt comme si ils voyaient la chose la plus horrible de leur vie.
- Quoi ? Dis-je mal à l’aise rabaissant aussitôt mon tee-shirt.
- Suis-moi, déclara Marie. Il faut te mettre quelque chose là dessus… Où demain tu en paieras les conséquences.
Docile je la suivis, laissant Julien, Lyah et Gwendal. Arrivé dans la salle de bain, elle me demanda de retirer mon tee-shirt et de m’asseoir sur le rebord de la baignoire. M’exécutant docilement, je vis alors ce qui avait horrifié tout le monde dans le reflet du miroir. Un hématome presque noir ressortait sur ma peau, juste en dessous des côtes. C’était certainement quand j’avais reçut leur coup de pied.
Attrapant une crème, Marie commença à me l’appliquer avant de lever les yeux vers moi.
- Même si c’est en partie de ta faute, merci de l’avoir tirer de là… Mais attention, dit-elle en appuyant sur mon hématome avec sadisme, me faisant pousser un petit gémissement de douleur. Ne le fais surtout pas souffrir une seconde fois où je te promets que tu auras à faire à moi !
- Ca fait beaucoup de promesse en une journée, dis-je amusé, avant qu’elle ne réitère son geste plus franchement.
- Aie ! Criais-je. Je n’ai aucune promesse à te faire Marie, déclarais-je alors en attrapant sa main. Cette promesse, je l’ai faite à Gwendal, dis-je avec sérieux.
Aussitôt, les traits de Marie s’adoucirent.
- Je commence enfin à voir le bon côté que Julien clame connaître chez toi, dit-elle avec un petit sourire. Maintenant il te reste pas mal de travail !
- Pour quoi ? Lui demandais-je en fronçant les sourcils alors qu’elle finissait d’appliquer la crème.
- Pour regagner sa confiance, souffla-telle avec un petit sourire.
- Je serais patient, soufflais-je.
- Je n’en doute pas.
Ayant terminé, elle se releva, me laissant remettre mon tee-shirt. Tendant la main vers elle, je lui dis alors :
- Et si nous faisions la paix après toutes ces années.
- Je t’en veux toujours, déclara-t-elle.
Mais à ma plus grande surprise, elle attrapa ma main et avec un sourire elle ajouta :
- Mais c’est d’accord.
Serrant sa main, je lui offrit un sourire. Après ces entrefaits, nous rejoingnîmes les autres et aussitôt, je m’approchais de Gwendal, assis à la table, somnolent. M’asseyant juste à côté de lui, étonné par ma propre attitude, je posais une main sur sa cuisse. Tournant la tête vers moi, il me dit :
- Est-ce que ça va ? Je suis désolée Hayden… C’est de ma faute… Ajouta-t-il.
- Non Gwen… C’est à cause de moi… J’aurais mérité bien pire…
Alors que Gwendal allait répliquer quelque chose, j’ajoutais sans réfléchir avec un faux sourire :
- Ne t’inquiète pas, j’ai reçu pire avant…
Voyant son expression se décomposer aussitôt, je l’attirais contre moi et soufflais :
- Je suis si heureux de te savoir à nouveau à mes côtés…
Déposant un baiser sur sa tempe, je lui proposais ensuite en lui rendant sa liberté :
- Et si nous allions nous coucher… Tu as l’air aussi épuisé que moi.
Gwendal acquiesça. Après avoir remercier nos hôtes, Gwendal offrit un bisous à Lyah lui promettant de s’occuper d’elle.
Nous allâmes dans notre chambre. Gwendal alla se mettre en pyjama dans la salle de bain, m’empruntant un tee-shirt trop petit pour moi et un pantalon trop grand pour lui. Je fis de même dans la chambre, grimaçant. Je commençais seulement maintenant à véritablement avoir mal. Lorsqu’il eut finit avec la salle de bain, j’allais rapidement me débarbouiller avant de le rejoindre.
Il était allongé dans le lit. Sans trop savoir comment me comporter, je m’allongeais à ses côtés, gardant une distance minime entre nous. Ce fut Gwendal qui vint de lui même contre moi. Soupirant de bien être alors que je posais mes bras autour de lui, il murmura alors :
- Hayden…
- Oui ?
- Qu’est-ce que je vais devenir maintenant ? Qu’est-ce je vais faire ?
- Nous allons rester un moment ici, le temps que tu reprennes du poids et que tu te sentes mieux, murmurais-je. Nous n’avons plus à fuir maintenant. Et puis… Nous avons obligation de retourner voir Blair et Darren. Et, après, nous envisagerons peut-être un voyage en France…
Gwendal s’écarta de moi :
- En France ? Mais… Tu…
- Il faudra bien que tu pratiques ce que tu as appris, dis-je avec un sourire.
- Je ne veux pas t’obliger à y aller, déclara-t-il.
Je soupirais avant d’ajouter en le regardant droit dans les yeux :
- Il est temps que je me décide à faire face à mes vieux démons et à aller de l’avant, murmurais-je, perdant mon assurance. Mais… Je vais avoir besoin de toi…
Enfouissant à nouveau sa tête contre moi, il ajouta :
- Ca fait beaucoup de choses à faire tous les deux, déclara-t-il.
- Ce ne te convient pas ? Demandais-je soudain inquiet.
- Tant que je suis avec toi, ça me convient, dit-il en s’écartant et en me regardant dans les yeux.
Si l’envie de l’embrasser se lisait dans mon regard, je n’en fis rien, ne sachant pas ce que j’avais vraiment le droit de faire avec lui. J’avais connaissance de ses sentiments pour moi, et malgré moi, j’en été effrayé… J’avais peur de ne pas être à la hauteur, de le heurter ou de ne pas savoir comment m’y prendre avec lui.
- Tu étais sérieux, me demanda alors Gwendal, quand… Quand tu m’as demandé de t’apprendre à…
- Oui, j’étais sérieux, murmurais-je sincère. Mais ça prendra du temps… Avouais-je, gêné.
- Je serais patient… Répondit-il avec un petit sourire.
- Je ne mérite pas ta patience, répondis-je en détournant le regard comme rarement il m’arrivait de le faire.
- Ca, c’est à moi de le décider, répondit Gwendal.
Se callant à nouveau contre moi, ce fut le silence qui nous enveloppe. Serrés l’un contre l’autre, c’est à peine si nous arrivions à réalisé que nous étions ensemble. Rien n’était encore résolu et il me faudrait du temps pour regagner sa confiance. Mais en l’instant présent, je laissais ces pensées s’envoler. Ce fut bercé par sa respiration détendue que je finis par trouver le sommeil… Là, tout contre lui… Serrein.
A suivre…
Chapitre 10 par Shinigami
Durant la semaine qui suivit, nous nous éloignâmes, comme si nous fuyons la peste. Si j’avais toujours du mal à suivre le rythme imposé par Hayden, j’avais à présent une nouvelle motivation, habité par la crainte d’être un jour retrouvé et reconduit dans ma prison dorée. Cette peur me tenaillait au ventre et sans que je ne m’en rende compte, je finis par m’enfermer dans un mutisme qui ne me ressemblait pas. Assis contre un arbre, je tentais de me concentrer pour lire un des livres que j’avais emprunté à Hayden. Lorsque je m’étais rendu compte qu’il en avait dans son sac, je lui avais aussitôt demandé la permission de lui en emprunter un, permission qu’Hayden m’avait donnée en souriant.
Lorsque je vis Hayden s’asseoir à côté de moi, je lui adressais un petit sourire avant de reporter mon attention sur la page que je tentais de lire depuis cinq minutes déjà. Mais comme précédemment, je ne parvins pas à me concentrer. J’entendis vaguement Hayden soupirer bruyamment, mais je ne lui prêtais pas plus attention. Les yeux rivés sur le livre, les mots dansaient devant mes yeux et semblaient ne rien vouloir dire, alors que, perdu dans mes pensées, je songeais encore et toujours à ce qui se passerait si jamais mon père arrivait à me retrouver. Si la dernière fois j’y avais échappé, cette fois-ci, il me punirait bien plus sévèrement qu’en me forçant à épouser une femme dont je ne voulais pas.
Je voulais demander à Hayden de partir, je voulais lui demander qu’il m’emmène ailleurs, loin d’ici, en France par exemple, mais au fond de moi, je savais pertinemment qu’il n’accepterait jamais. C’est pourquoi je ne lui demandais rien, me contentant de le suivre sur ses sentiers qu’il connaissait.
Finalement, ce fut la voix d’Hayden qui me sortit de mes pensées :
- .. va pas, Gwen ?
- Hein ? Sursautais-je en l’entendant prononcer mon prénom, mais n’ayant rien entendu du début de la phrase.
- Qu’est-ce qui ne va pas ? Déclara-t-il, posant sur moi un regard grave et sérieux.
- Rien, m’empressais-je de répondre, détournant cependant le regard, je vais très bien.
- Arrête, on ne me la fait pas… Insista-t-il. Pas à moi. Qu’est-ce qui te tracasse ? Tu peux peut-être m’en parler…
A ces mots, je reportais mon attention sur lui et ancrais mon regard au sien, cherchant à déterminer s’il se moquait de moi ou pas. Mes yeux dans les siens, je tentais de le sonder, sans grand succès cependant, Hayden étant passé maître dans l’art et la manière de dissimuler ses sentiments.
N’ayant pas su déterminer à quoi pensait Hayden, je refermais mon livre en soupirant de lassitude, laissant ma tête partir en arrière, la posant contre le tronc d’arbre avant de me décider à lui répondre :
- Je suis en train de prendre goût à cette vie… Murmurais-je, surpris de m’être laissé aller à dire ces quelques mots que je n’avais jamais oser prononcer à voix haute.
Je m’étais retenu à temps… Emporté dans mon élan, j’avais failli lui avouer que cette vie n’était pas la seule chose à laquelle je m’étais attaché… Malgré moi, je m’étais aussi attaché à Hayden. En dépit de nos débuts difficiles, il avait toujours été là pour moi, m’acceptant dans sa vie et faisant tout un tas de concessions pour mon propre bien-être. Hayden était le genre de personne qui avait le coeur sur la main et j’avais appris à l’apprécier pour sa gentillesse et pour la personne qu’il était au fond de lui.
- Alors pourquoi ça ne va pas ? Demanda Hayden, une pointe de ce que je cru être de l’inquiétude dans la voix.
- Parce que j’ai peur que ça ne dure pas… Avouais-je en baissant les yeux, reportant mon attention sur l’herbe qui dansait au gré du vent.
- Pourquoi cela s’arrêterait ?
- Mon père ne baissera pas les bras, Hayden… Soupirais-je. Nous serons toujours en fuite jusqu’à ce qu’il réussisse à me rattraper.
Délicatement, avec une douceur que je ne lui connaissais pas, Hayden prit mon menton entre ses doigts et me fit relever la tête, m’obligeant à le regarder. Lorsqu’il fut certain d’avoir toute son attention, il déclara gravement :
- Ton père ne te possède pas, Gwen. Tu es libre de choisir ta vie. Quoi qu’il arrive, quelque soit le choix que tu fais, je serais là pour t’aider et te protéger. Je te le promets !
Son regard ne quittait pas le mien, et gêné de l’intensité avec laquelle il me regardait, je me mis à rougir. Fuyant son regard, je murmurais un faible “merci”, sentant toujours le regard d’Hayden ancré sur moi, refusant visiblement de me quitter. Sans que je ne sache pourquoi, mon coeur se mit à battre plus rapidement, cognant bruyamment dans ma poitrine et l’espace d’un instant, je craignais qu’Hayden ne l’entende. Jamais encore je ne m’étais sentis aussi vulnérable et mal à l’aise sous le regard de quelqu’un, et que cette personne soit Hayden me troublait plus que je ne l’aurais souhaité. Hayden était la première personne avec qui j’étais aussi lié, dans le sens où nous partagions nos vies, et en cet instant précis, mon manque d’expérience me parut d’autant plus cruel.
Hypnotisé par le regard envoûtant qu’Hayden posait sur moi, je ne pouvais détourner mon attention de lui, et ce, même lorsque je le vis s’approcher lentement de moi. Son regard posé sur mes lèvres ne laissait aucun doute sur ce qu’il avait en tête. Ce ne fut que lorsque son souffle chaud caressa mon visage, ses lèvres à seulement quelques millimètres des miennes que je retrouvais mes esprits et ma volonté. Affreusement gêné, je tournais la tête au moment où ses lèvres allaient se poser sur les miennes. Honteux comme jamais, je n’osais pas le regarder, tentant d’ignorer les battements frénétiques de mon coeur.
- Pardon, soupira Hayden en s’éloignant légèrement de moi. Je n’aurai pas du…
Si je ne compris pas la seconde phrase, je n’en laissais cependant rien paraître. Me tournant vers lui, je lui adressais un petit sourire timide avant de me lever, tentant tant bien que mal de dissimuler le trouble grandissant qui m’habitait. Pourquoi avait-il prononcé ces derniers mots ? Laissait-il sous-entendre que s’il s’apprêtait à m’embrasser c’était parce qu’il le voulait ? Mettant fin à mes pensées, mal à l’aise par ces sentiments indescriptibles qu’ils faisaient naître en moi, je tentais de détendre l’atmosphère et changeant délibérément de sujet, je demandais :
- Où va-t-on ce soir ? A l’hôtel ? Demandais-je plein d’espoir à l’idée d’un bon lit et d’une douche digne de ce nom.
- Non, répondit mon vis à vis avec un petit sourire. J’ai une connaissance à quelques heures de marche d’ici. On devrait y être ce soir. Il nous hébergera contre quelques jours de travail pour lui.
Ma mauvaise humeur revint au galop à cette réponse qui figurait en première place dans la liste des phrases que je ne souhaitais pas entendre.
- Ah… Répondis-je simplement, toute lueur espoir envolée, pas enchanté le moins du monde à cette idée.
A la limite, je préférerais même dormir dehors pendant le reste du mois. Cela me conviendrait bien mieux que d’aller encore une fois loger chez un homme que je ne connaissais pas et avec qui Hayden aurait envie de passer un bon moment.
- Et si ça devait arriver, ajouta mon aîné en m’adressant un sourire malicieux, comme s’il avait lu dans mes pensées, je serais discret, promis… Rit-il.
Pour ma part, cela ne me fit pas rire. Au contraire, cela renforça mon sentiment de malaise et taciturne, je m’éloignais de lui sans un regard afin d’aller rassembler mes affaires. Sans que je ne sache réellement pourquoi, je fut pris d’une subite envie de pleurer. Cependant, gardant mes état d’âmes pour moi, je refoulais ce sentiments, ignorant les noeuds de mon estomac et l’arrière goût amer dans ma gorge. Ce fut dans un silence gêné et morose que nous reprîmes la route.
Comme Hayden l’avait prédit, nous arrivâmes en fin de journée dans l’immense ferme de son ami répondant au prénom de Thomas. Prénom dont je gardais un souvenir loin d’être élogieux. D’un pas traînant, montrant ainsi à Hayden la motivation qui était la mienne à aller passer quelques jours chez son ami, je lui suivis à contrecoeur à travers la cour, regardant où je mettais les pieds. Ignorant royalement ma réticence, Hayden poursuivit son chemin et une fois arrivé sur le pas de la porte, il m’attendit patiemment. Si j’avais pu y aller à reculons, je l’aurais fait avec la plus grande joie. Cependant, ne pouvant faire attendre Hayden trop longtemps, j’accélérais sensiblement mon allure. Une fois à ses côtés, je poussais un soupir à fendre l’âme qu’Hayden ignora avec superbe, frappant à la porte.
Celle-ci ne mit pas longtemps à s’ouvrir et un énorme chien noir en bondit, me prenant comme cible. Effrayé, c’est de justesse que je retins un hurlement de terreur à la vue de l’énorme boule de poils qui fonçait sur moi. Inconsciemment, je me collais aussitôt à Hayden, cherchant sa protection.
- Hayden ! S’exclama alors une grosse voix grave que je devinais être celle de ce fameux Thomas. Quelle bonne surprise ! S’exclama-t-il. Tu tombes à pic. Mes moutons se sont échappés et si tu pouvais me donner un coup de main, ça me simplifierait les choses.
Brusquement, il s’arrêta lorsqu’il s’aperçut de ma présence derrière Hayden. Cependant, je ne prêtais aucune attention à lui, toute ma vigilance étant portée sur le chien.
- Tiens, déclara-t-il. C’est bien la première fois que tu viens accompagné. A qui ais-je l’honneur ? Demanda-t-il en attrapant son chien par le collier.
- Je m’appelle Gwendal, répondis-je simplement en m’éloignant légèrement d’Hayden, pas vraiment rassuré.
- Moi c’est Thomas, dit-il avec un sourire qui me déplut. Bon, on ne serra pas trop de trois, allons-y ! Ajouta-t-il en passant devant nous.
Après une longue course pour ramener tous les moutons dans leur enclos, Thomas nous proposa d’aller boire une limonade pendant qu’il préparait quelque chose à manger. Transpirant et épuisés, Hayden accepta pour nous deux. Assis à la terrasse, c’est avec plaisir que je savourais la fraîcheur de la boisson. Thomas ne tarda pas à nous rejoindre et s’installa à côté d’Hayden.
- Combien de temps comptez-vous rester ? Demanda-t-il à Hayden, alors qu’il posait sur moi un regard que je ne parvins pas à déchiffrer.
Sous l’insistance de son regard, je détournais les yeux, mal à l’aise. Encore un homme qui ne m’inspirait pas confiance. Cependant, je me gardais bien de faire part de mes craintes à Hayden, de peur de passer pour un paranoïaque.
- Quelques jours, si ça ne te dérange pas, répondit Hayden sans me concerter du regard.
- Bien sûr que non ! Vous tombez à pic, j’ai une montagne de choses à faire et un employé m’a fait faux bond.
- Marché conclu ! Répondit Hayden en souriant.
Le reste de la soirée se déroula tranquillement, mais toujours dans la mauvaise humeur pour moi. Après une douche qui me fit le plus grand bien, nous eûmes droit à un copieux repas avant de prendre le dessert dans le salon. Durant tout le temps que dura le repas, je ne décrochais pas le moindre mot, n’ayant aucunement envie de me mêler à leur conversation. De plus je n’aimais pas ce Thomas et j’espérais ainsi le faire comprendre à Hayden. Avec un peu de chance, il écourterait notre séjour. Mais ça, je ne comptais pas trop dessus…
Lorsque j’eu terminé de manger, n’ayant plus aucun prétexte pour rester auprès d’eux, je m’excusais du bout des lèvres et montais me coucher, sans un regard derrière moi. Je savais qu’Hayden passerait la nuit avec Thomas, mais intérieurement, je me surpris à vouloir qu’il reste avec moi. Retenant une nouvelle envie de pleurer, je fermais la porte derrière moi avant de m’effondrer au milieu du lit deux place qui, de toute façon, ne servirait qu’à moi ce soir, et sans doute les autres soirs aussi.
Déprimé, le moral à zéro, je me déshabillais et enfilais mon pyjama, l’esprit ailleurs. Sans trop savoir ce que je voulais, j’attrapais alors mon livre dans le sac d’Hayden et m’installais dans le lit, m’offrant le luxe de m’allonger au milieu en maigre compensation du vide que je ressentais en moi. Ouvrant le livre, je parcourais les lignes des yeux sans parvenir à comprendre la signification des mots qui s’enchaînaient. Tout cela n’avait aucun sens. Comprenant que je n’arriverais à rien ce soir, je refermais le livre et le coeur lourd, j’éteignis la lumière.
Les yeux rivés sur la fenêtre dont les volets étaient restés ouverts, je contemplais la lune et le ciel. Un faible sourire étira mes lèvres, accompagné d’un douloureux pincement au coeur au souvenir des nuits durant lesquelles Hayden avait passé des heures à m’apprendre le nom des constellations qui parsemaient le ciel. Abandonnant mon oreiller, je m’allongeais sur le ventre de l’autre côté du lit afin d’avoir une meilleure vue sur le ciel nocturne. Là sans que je ne puisse les retenir des larmes vinrent me brouiller la vue. Le coeur douloureux, songeant à Hayden, je fondis en larmes. Je devais me rendre à l’évidence… J’étais entrain de tomber amoureux de lui…
Mon coeur se compressa plus qu’il n’était possible à cette constatation et enfouissant mon visage dans les couvertures, je me laissais aller à pleurer toutes les larmes de mon corps.
Je ne saurais dire combien de temps je restais là, à pleurer, jusqu’à ce que finalement, vaincu par mes larmes et mon épuisement, je sombrais dans un sommeil profond et sans rêve. Je fus réveillé avec l’horrible sensation d’être secoué dans tous les sens, la voix paniquée d’Hayden me parvenant un moment après :
- Gwen ! S’exclama-t-il. Réveille-toi, nous devons partir !
A ces mots, je sursautais, avant de me redresser difficilement, encore à moitié endormis :
- Qu’est-ce qui se passe ? Demandais-je, d’une voix éraillée par mes larmes récentes et le sommeil.
- Il faut qu’on parte ! Maintenant ! Répéta-t-il sans prendre le temps de m’expliquer ce qui se passait.
- Pourquoi ? Quelle heure est-il ? Demandais-je, en voyant que la nuit était toujours noire.
- Ne pose pas de questions ! Habille-toi et dépêche-toi ! M’interrompit-il avec empressement. Nous ne sommes plus en sécurité ici.
Face à son aire grave et empressé, je compris qu’il avait du se passer quelque chose de sérieux. Cédant à la panique contagieuse d’Hayden, j’enfilais mes vêtements en un temps record tandis qu’il surveillait la porte. Puis attrapant nos deux sacs, il m’entraîna dans un course folle jusqu’à l’extérieur de la ferme. Et même lorsque nous fûmes dehors il continua de courir sans me lâcher la main, m’obligeant à suivre le même rythme effréné que lui. A bout de souffle, alors que j’allais demander à Hayden de ralentir, il le fit de lui-même, sans pour autant nous accorder de pause. Les poumons en feu, je tentais laborieusement de retrouver une respiration régulière, mon coeur tambourinant violemment dans ma poitrine.
Brusquement, il nous fit quitter la route, m’entraînant à sa suite dans les bois, ses doigts toujours fermement enroulés autour de mon poignet qu’il serrait douloureusement. Ce ne fut qu’après un temps qui me parût affreusement long qu’il consentit enfin à s’arrêter afin de nous laisser reprendre notre souffle. Lâchant alors nos sacs qui tombèrent sur le sol en un bruit étouffé, Hayden se tourna vers moi et avant que je ne réalise ce qui se passait, il me prit dans ses bras, m’enlaçant en une étreinte possessive qui m’effraya malgré moi. Que c’était-il passé pour qu’il soit dans un tel état ?
Aussi soudainement qu’il m’avait attiré à lui, il me repoussa vivement, comme si mon simple contact le brûlait. Ce geste me noua douloureusement la gorge, mais décidé à ne rien laisser transparaître de mes sentiments, me concentrant sur la colère qui grandissait en moi, je m’exclamais alors, furieux :
- Non mais je peux savoir ce qui te prend ? Pourquoi est-ce que l’on s’enfuit comme des voleurs au milieu de la nuit ? Qu’est-ce qui s’est passé ? M’exclamais-je, au bord de l’hystérie. Tu m’as fait une peur bleue !!
Pour toute réponse, Hayden s’adossa à un arbre et se laissa tomber au sol, gardant obstinément le silence. Face à son absence de réponse, comprenant que quelque chose n’allait vraiment pas, je me calmais et, inquiet comme jamais, je m’agenouillais près d’Hayden :
- Qu’est-ce qui s’est passé, Hayden ? Demandais-je, pour la énième fois, effrayé de ne pas savoir.
Je vis Hayden s’enfermer dans un mutisme qui m’inquiéta. M’efforçant de ne pas céder à la panique qui commençait à s’emparer de moi, je réitérais ma question, posant une main rassurante sur son épaule :
- Hayden… Qu’est-ce qui s’est passé chez Thomas ? Tu es pâle, est-ce que ça va ?
- Je l’ai tellement haïs, Gwen, lâcha-t-il finalement.
- Qui ? Demandais-je perdu, ne comprenant pas de qui il parlait ni où il voulait en venir.
- Je lui en ai voulu de m’avoir mis au monde… Continua-t-il, répondant indirectement à ma question, en prenant sa tête entre ses mains.
Le voir ainsi me compressa douloureusement le coeur.
- J’ai l’impression de ne pas avoir ma place ici… Je ne suis qu’un accident indésiré avec l’un de ses clients… Et finalement, je lui ressemble… Je suis même pire… Déclara-t-il, me laissant complètement perdu face à ses paroles décousues sans le moindre sens pour moi.
- De quoi est-ce que tu parles ? Demandais-je, déboussolé. Pourquoi est-ce que tu me dis tout ça ? Quel est le rapport avec le fait que l’on parte de chez Thomas au milieu de la nuit ?
Hayden s’obstinait à ne pas répondre à mes questions et pour un peu, j’en aurai hurlé de frustration. Alors que je m’apprêtais à lui poser une nouvelle fois la question, il déclara en une plainte à peine audible :
- J’ai fait pire que ma mère, j’ai fait pire que de la prostitution…
Cette réponse n’eut d’autre effet que de me serrer davantage le coeur. Que c’était-il donc passé pour qu’Hayden soit dans un tel état, pour qu’il se dénigre ainsi lui qui était si fier habituellement. Redressant la tête, je croisais son regard troublé. Echappant à ma main toujours posée sur son épaule, il déclara d’une voix monotone :
- Je vais marcher un peu, je te laisse t’installer ici… Je… Je reviens… J’ai besoin d’être seul.
Me laissant en plan, il se détourna de moi et commença à s’éloigner, m’abandonnant à mes peurs et mes interrogations restées sans réponses. De nouveau, la colère s’empara de moi. Pour une fois, cela ne se passerait pas comme Hayden l’avait décidé ! J’avais le droit de savoir et, sur mon honneur, je saurais ce qui avait bien pu troubler autant Hayden.
Le rattrapant, je l’incitais à se retourner d’une main sur son épaule. Ce n’est qu’une fois qu’il fut face à moi que je déclarais :
- Je te le demande une dernière fois Hayden, qu’est-ce qui s’est passé chez Thomas ? C’est quelque chose qu’il t’a dit sur ta mère ?
- N’insiste pas, Gwen, souffla-t-il.
Ces mots me blessèrent plus que je ne l’aurai souhaité. Pourquoi refusait-il de se confier à moi ? Avait-il si peut d’estime et de confiance en moi pour me parler ? Ignorant la boule qui se formait dans ma gorge, je m’exclamais, farouchement déterminé à avoir le fin mot de cette histoire :
- J’ai le droit de savoir ! Je veux t’aider… Ajoutais-je, d’une petite voix tremblante d’émotion.
- Je… Commença-t-il, hésitant, comme s’il cherchait ses mots. Thomas savait qui tu es Gwendal, déclara-t-il. Il a voulu te dénoncer…
- Ce n’est pas ça qui te met dans cet état, fis-je remarquer, commençant à connaître suffisamment bien Hayden pour savoir qu’il ne se serait pas laisser intimider par une menace.
- Il a menacé de s’en prendre à toi et…
A ces mots, mon coeur faillit louper un battement tandis qu’Hayden marquait une pause. Après un court silence, il ajouta :
- Je l’ai assommé et nous nous sommes enfuis…
Si Hayden refusa de me dire ce qui s’était passé, son silence parla pour lui. Je ne pouvais qu’émettre des suppositions, et toutes celles qui me venaient à l’esprit me touchèrent. Ainsi, tout cela était arrivé à cause de moi… Je me sentais tellement coupable… Par égard pour Hayden, je n’insistais pas plus et avant que je ne réalise entièrement la porté de mon geste, je l’attirais doucement à moi. Docilement, Hayden posa sa tête contre mon épaule. Brusquement, Hayden s’effondra en larmes. Lui, d’habitude si fort semblait aussi fragile qu’un enfant.
Jamais encore je n’avais vu Hayden dans un tel état de détresse et cela m’effraya. Il avait toujours été le plus fort d’entre nous. Il était celui qui me protégeait des autres, celui qui veillait sur moi et, ce brusque inversement des rôles me terrifiais. Jamais je n’avais été confronté à une telle situation. J’avais toujours été celui que l’on consolait, et me retrouver dans le rôle inverse était quelque chose de nouveau et effrayant. J’avais peur de ne pas savoir m’y prendre avec lui, de ne pas trouver les mots justes. C’est pourquoi je restais silencieux, me contentant de le garder près de moi, tandis que je caressais son dos en une timide tentative d’apaisement.
Pour la première fois depuis que nous voyagions, ce fut moi qui préparais notre lit. Aucun mot ne fut échangé et lorsqu’il se fut couché, il se colla tout contre moi, enfouissant son visage dans mon cou. Malgré le trouble qui m’habitais à le sentir si proche de moi, je ne le repoussais pas, savourant la chaleur de son corps tout contre le mien. Alors que je le sentis s’endormir, son corps se faisant plus lourd contre le mien, je me laissais aller à pleurer, libérant les sanglots que j’étais parvenu à contenir jusqu’à maintenant. Je me sentais tellement coupable… Je savais qu’il n’y avait plus qu’une seule solution face à ce problème que je représentais, mais rien que d’y songer, mon coeur se compressait douloureusement dans ma poitrine. Je ne pouvais pas… Je ne voulais pas abandonner cette liberté, pas plus que je ne voulais quitter Hayden…
Finalement, épuisé par mes larmes et les événements de cette nuit, je finis par m’endormir, bercé par la respiration calme et régulière d’Hayden.
Lorsque je me réveillais le lendemain matin, le jour était à peine levé. Contre moi, je pouvais sentir le corps chaud d’Hayden et les événements de cette nuit me revinrent en mémoire en même temps que ma tristesse. Jamais encore je ne m’étais sentis aussi perdu et bouleversé.
Il ne fallut pas longtemps à Hayden pour se réveiller à son tour. Terrifié à l’idée qu’il puisse s’éloigner de moi, ne voulant pas le laisser partir, je raffermis ma prise autour de lui, m’accrochant à sa chemise comme si ma vie en dépendait. Ce fut avec un soulagement non feint que je sentis Hayden répondre à mon étreinte, m’attirant davantage tout contre lui, me serrant entre ses bras puissants et protecteurs.
Dans un sanglot étouffé, je murmurais alors :
- Je suis désolé… Tout est de ma faute…
A ces mots, Hayden s’écarta de moi et ancrant son regard dans le mien, il déclara gravement :
- Jamais, tu m’entends ! Ne pense jamais que ce qui est arrivé hier était de ta faute.
- Bien sûr que si ! Rétorquais-je vivement, ne pouvant retenir mes larmes. Si je n’avais pas choisis de venir avec toi, jamais rien ce tout cela ne serait arrivé. C’est moi qui t’ai mis dans cette situation. Je te mets en danger… Je pense qu’il vaut mieux que je rentre chez moi, Hayden… Ajoutais-je en détournant les yeux, ignorant les protestations de mon coeur qui se brisait à l’idée de devoir renoncer à Hayden et à ma liberté.
Comme pour m’empêcher de mettre mon plan à exécution, Hayden raffermis la prise de ses bras autour de mon corps, m’empêchant toute tentative de fuite.
- Tu restes avec moi, Gwendal, tu ne repartiras pas là-bas ! Décréta-t-il, intraitable. Je t’en ai fait la promesse.
- Ta promesse te coûte trop cher, répliquais-je, sans chercher à me soustraire de son étreinte, profitant au contraire de sentir sa présence rassurante. Tu en as déjà fait assez pour moi. Je ne peux pas t’en demander plus…
Hayden s’écarta alors de moi. Se redressant, il ancra son regard au mien, son visage à quelques centimètres du mien.
- Ce qui est arrivé n’est pas de ta faute, mais uniquement de la mienne, déclara-t-il d’un ton sans appel. Je ne me méfie pas assez des gens Gwen. Et puis c’est trop tard. Nous avons fait notre choix en connaissance de cause. On savait que nous serions en fuite et que ton père ne te laisserait pas en paix. Ce qui vient de se passer est un accident. Ne rend pas cet accident comme étant la cause de ton départ où alors, tout ce que nous avons fait jusqu’à maintenant n’aura servi à rien. Je veux que tu restes à mes côtés, que tu t’épanouisses. Que tu découvres tous les bons côtés de la vie que je mène. Je veux que tu découvres la liberté Gwen… Tu as encore tellement à découvrir… Et lorsque ce sera fait… A ce moment seulement, alors, tu pourras envisager à nouveau la question de rentrer chez toi.
- Mais je ne veux pas rentrer chez moi, soufflais-je dans un gémissement douloureux. Hayden, je me sens tellement coupable de…
Je fus coupé en plein milieu de ma phrase par quelque chose de chaud et humide qui se posait sans brusquerie aucune sur mes lèvres. Sous le coup de la surprise, je cessais presque de respirer alors que la langue d’Hayden glissait lentement sur mes lèves. Une de ses mains passa sur ma nuque pour me rapprocher de lui tandis que l’autre se posait dans mon dos, m’arrachant un frisson. Timidement, mettant de côté ma gêne et ma pudeur, j’entrouvris légèrement les lèvres. Répondant au quart de tour mais toujours avec cette tendresse particulière, sans la moindre précipitation, il laissa sa langue se glisser entre mes lèvres entrouvertes et partir à la recherche de la mienne. Lorsqu’il la trouva, il la caressa avec une douceur qui me fit tressaillir. Timidement, je finis par me laisser guider par l’expérience d’Hayden, et avec hésitation, je laissais ma langue répondre aux caresses de sa jumelle.
Le fait qu’Hayden ne fit aucun mouvement brutal, ne cherchant jamais à me forcer à aller plus loin ou à approfondir davantage notre échange m’aida à me détendre et à apprécier ce baiser. Perdu dans un océan de sensations nouvelles que je n’avais encore jamais éprouvé auparavant, je m’accrochais à la chemise d’Hayden afin de ne pas me laisser emporter et trouvant là une prise pour garder pied dans la réalité.
C’est à contrecoeur que je me séparais d’Hayden lorsque l’air vint à nous manquer. Le souffle court, je m’empourprais alors face à mon audace et atrocement gêné, je détournais le regard, tandis qu’Hayden m’observait avec un certain amusement, un sourire que je qualifierais presque de tendre étirant ses lèvres rougies. Délicatement, il passa une main sur mon visage, replaçant une mèche de cheveux derrière mon oreille en laissant ses doigts caresser ma joue au passage.
Allongés l’un en face de l’autre, nous restâmes silencieux un moment, alors que je me laissais aller à fermer les yeux, repassant dans ma tête l’instant de tendresse que nous venions de partager. Dans ma poitrine, mon coeur battait à toute allure sous l’effet du bien-être que je ressentais en cet instant alors que je m’interrogeais sur le pourquoi de ce baiser et sa signification.
D’un commun d’accord, nous décidâmes qu’il était temps de se lever. Après un petit déjeuner frugal, j’allais m’habiller à l’abri des regards indiscrets. Comme chaque matin depuis une semaine, je constatais que mon pantalon se faisait de plus en plus grand… Il devenait urgent que je trouve un moyen de l’attacher sous peine de me retrouver un jour avec le pantalon sur les chevilles. Honteux, je m’empressais de dissimuler mon corps laid et trop maigre sous ma chemise qui, elle aussi, commençait à se faire trop grande.
Alors que, part respect pour moi, Hayden allait s’habiller un peu plus loin, je cherchais dans son sac quelque chose qui aurait pu maintenir mon pantalon en place. Avisant un lacet, je m’en emparais avant de tout remettre en place, en entendant Hayden revenir. Je mis précipitamment l’objet de mon délit dans ma poche et retournais vaquer à mes occupations. Nous fîmes nos sacs et reprîmes la route. Nous allions définitivement quitter la région. Selon Hayden, plus nous serions loin, plus facilement nous trouverions la paix. Il envisageait même de prendre un bus ou un train pour nous éloigner au plus vite et cette idée m’enchanta.
Alors que nous marchions depuis une petite heure, marchant aux côtés d’Hayden et non pas derrière lui comme à mon habitude, je l’appelais d’une petite voix hésitante :
- Hayden…
- Hn ? Souffla-t-il en se tournant vers moi.
- Même si je t’ai promis de ne plus te questionner sur ton passé… Je… Je voulais que tu saches que je suis toujours là pour t’écouter. Et… Si tu veux un jour me raconter, je ne te jugerais jamais, déclarais-je timidement.
Pour toute réponse, Hayden m’offrit un sourire sincère qui me toucha plus qu’il n’aurait du. D’un geste si rapide que je ne le vis pas venir, il passa son bras autour de mon cou, m’attirant brusquement à lui, il déclara :
- Je suis content de t’avoir comme compagnon de voyage, Gwen !
Puis, dans un rire, il ajouta :
- Si tu me connaissais vraiment, Gwen, tu serais déjà en train de courir chez ton père !
- Je suis sûr que tu n’es pas aussi horrible que tu penses l’être, déclarais-je sérieusement en reportant mon attention sur lui. Tu es quelqu’un de bien !
Hayden m’adressa un sourire avant de me libérer de son étreinte. Une fois libre, nous reprîmes la route sur un ton plus léger. Après la courte nuit que nous avions eut, la fatigue ne tarda pas à se faire ressentir. Cependant, comprenant le désir d’Hayden se s’éloigner au maximum de cet endroit, je ne me plaignis pas, me forçant à suivre le rythme imposé. Mais malgré toute ma bonne volonté, je ne tardais pas à faire des pauses qui n’échappèrent pas à l’attention d’Hayden qui me proposa alors de s’arrêter dans un refuge abandonné qu’il semblait bien connaître, afin de nous reposer quelques jours. L’idée m’enchanta au plus haut point et oubliant momentanément ma fatigue, je repris la route, accélérant le pas, ignorant les protestations de mon corps.
Il faisait nuit lorsque nous arrivâmes enfin au refuge. Comme l’avait dit Hayden il était abandonné et mal entretenu, mais cela serait bien suffisant. Tant que je pouvais me reposer, le reste n’avait pas la moindre importance. Au vue de la fraîcheur de la nuit, Hayden me proposa de faire un feu et dormir dehors pour profiter du ciel étoilé. Plus que ravi, j’acceptais avec enthousiasme, mettant mon épuisement de côté. Pendant qu’Hayden s’occupait de faire démarrer le feu, je mis en place notre couchette, cherchant le coin le plus confortable pour étaler les couvertures. Puis, Hayden alla ramasser un peu de bois avant de préparer notre repas du soir. Après s’être rempli le ventre d’un bon repas chaud, nous nous installâmes tous deux près du feu.
Me couchant dans notre lit improvisé, je fis tout de même attention à ne pas être trop prêt d’Hayden, ne sachant pas comment me comporter vis à vis de lui après le baiser que nous avions échangé ce matin même. Finalement, ce fut Hayden qui esquissa le premier geste pour nous rapprocher. Il passa son bras autour de ma taille et m’attira tout contre lui. A l’instant ou son bras s’était posé sur mes hanches, j’avais retenu ma respiration, me tendant malgré moi. Cependant, je ne le repoussais pas et fini par me détendre lorsque je fus certain qu’il n’irait pas plus loin. Ignorant les noeuds de mon estomac, je m’installais plus confortablement contre lui, calant ma tête sur son bras avant de reporter mon attention sur le ciel étoilé. Après avoir repéré celles que je connaissais déjà, je lui demandais de m’en apprendre une nouvelle, chose qu’il fit avec un plaisir évident. Peu à peu, le silence vint s’installer entre nous. Alors que je m’apprêtais à m’endormir, Hayden se redressa pour alimenter le feu. Réveillé, je ne pu retenir un gémissement de mécontentement à être ainsi dérangé. Finalement, Hayden vint se rallongea, mais à présent, le sommeil me fuyait.
- Gwen, appela alors Hayden, brisant le silence apaisant de la nuit.
- Hn ? Soufflais-je, renonçant à trouver le sommeil.
- Qu’est-ce que tu aimerais faire ? Demanda-t-il.
- Comment ça ? Demandais-je sans cacher mon incompréhension, ne comprenant pas le sens de sa question.
- C’est toujours moi qui choisi où l’on va et ce qu’on fait, mais j’aimerais savoir ce que toi tu veux faire ou bien où tu veux aller, m’expliqua-t-il.
- Je… J’aurais bien aimé aller en France, avouais-je, hésitant, sachant parfaitement que cette réponse ne plairait pas à Hayden.
A ces mots, je sentis Hayden se tendre et ne souhaitant aucun mal entendu entre nous, je m’empressais d’ajouter :
- Mais je sais que c’est loin d’être une destination rêvée pour toi alors, pourquoi pas l’Ecosse ? Proposais-je, me rabattant sur la seconde destination de mes rêves.
- Va pour l’Ecosse, répondit-il visiblement soulagé que je n’insiste pas.
Le silence revint à nouveau nous envelopper jusqu’à ce que, ma curiosité éveillée, je finisse par demander :
- Est-ce que j’ai le droit de te poser une question ? Une seule…
- Vas-y, soupira-t-il. Mais je ne te promets pas de te répondre.
- Tu n’as jamais cherché à savoir qui était ton père ?
A ces mots, Hayden partit à rire, avant de répondre :
- Gwen, ma mère était une prostituée. Elle couchait avec des tas de mecs chaque soir alors partir à la recherche de mon père, c’est une mission impossible. Et puis, même si j’en avais la possibilité, je ne voudrais pas savoir.
- Pourquoi ? Demandais-je, intéressé. Tu n’es pas curieux ? Ca ne te manque pas de ne pas avoir de père ?
- Je ne sais pas ce que c’est, déclara-t-il simplement. Alors comment ça pourrait me manquer. Gwen, je crois qu’il vaut mieux que tu considères que je n’ai pas eu de parents. Ma mère ne s’est jamais occupé de moi et la plupart du temps les rôles étaient inversés…
- Comment ça ? Demandais-je, un peu perdu.
- J’étais d’accord pour répondre à une question, Gwen, pas dix. Pourquoi tu es aussi intéressé par le fait de connaître mon passé ? Demanda-t-il patiemment.
- Chercher à se connaître, c’est ce que font les gens normaux, répondis-je, simplement.
- Nous ne sommes pas normaux, s’exclama Hayden en riant.
- Qu’est-ce que tu sous-entends par là ? Demandais-je, ne comprenant pas vraiment le sens de sa phrase.
- Un fils de prostituée et un garçon de noble famille qui parcourent les routes ensembles Gwen, c’est pas vraiment commun ! Renchérit-il.
Je ne répondis pas tout de suite, songeant à ce qu’il venait de me faire prendre conscience. Puis, après un court silence, je repris, hésitant :
- Je suis sûr que ta mère était plus qu’une prostituée, tu as l’air de tout le temps la dénigrer. Elle n’a juste jamais su te montrer qu’elle t’aimait.
- Elle ne m’aimait pas Gwendal ! Soupira Hayden. Une droguée n’aime personne… Juste sa drogue.
Sa voix se noua sur ces derniers mots et avant que je n’ai le temps de répliquer quelque chose, il déclara :
- Maintenant, j’aimerais vraiment qu’on change de sujet, d’accord ?
- Désolé, murmurais-je à la fois gêné et peiné, réalisant alors seulement combien ce sujet devait être difficile pour Hayden.
Avant de réalise entièrement mon geste, je me tournais alors vers lui et posais ma main sur son torse avant de caler ma tête au creux de son épaule, respirant son odeur masculine. S’il parut surpris, Hayden ne dit rien et bientôt, son bras à présent libre, il posa sa main dans mon dos.
- Bonne nuit, murmura-t-il.
- Bonne nuit, Hayden, soufflais-je en fermant les yeux, me laissant aller au bien-être qui s’emparait de moi.
Il ne me fallut pas longtemps pour trouver le sommeil et bercé par la respiration calme et régulière d’Hayden, je sombrais dans un sommeil profond et sans rêve.
Lorsque j’ouvris les yeux le lendemain, le soleil était déjà haut dans le ciel. Ebloui, je papillonnais des yeux pour m’habituer à la clarté environnante et me réveillant lentement, je manquais de sursauter en sentant mon matelas bouger sous moi. Surpris, je pris alors conscience que j’étais allongé tout contre Hayden, mon visage reposant au creux de son épaule, mes doigts fermement crispés sur le t-shirt qui lui servait de pyjama. Délicatement, je me redressais sur un coude afin de le surplomber juste assez pour observer son visage. Ainsi endormi, les traits détendus, il était beau…
Rougissant de mes propres pensées, je me libérais délicatement de son étreinte afin de ne pas le réveiller. Sans bruit, j’attrapais des affaires propres et mon nécessaire de toilette. Puis, profitant du sommeil d’Hayden, je courrais jusqu’à la rivière afin de me laver tranquillement, sans craindre de le voir débarquer à l’improviste. Une fois au bord de l’eau, j’entrepris de me dévêtir, évitant cependant de m’attarder trop longtemps sur mes côtes un peu trop saillantes à mon goût. Puis, mon savon et mon shampoing en main, j’entrais dans l’eau. Au contact entre l’eau glaciale et ma peau encore toute chaude de sommeil, je réprimais tant bien que mal un cri de surprise alors que tout mon être se mettait à frissonner. Prenant mon courage à deux mains, je retins mon souffle et fermant les yeux, je plongeais dans l’eau pour en ressortir l’instant suivant, complètement mouillé. Là, j’attrapais mon shampoing et me savonnais vigoureusement les cheveux avant de les rincer et de m’attaquer à ma toilette.
Ce fut la désagréable impression d’être observé qui me fit me retourner. Et lorsque mon regard se posa sur Hayden qui me contemplait de la berge, je restais, l’espace d’un instant, pétrifié et incapable du moindre mouvement. Puis, retrouvant mes esprits, je fis la première chose qui me venait à l’esprit et, honteux comme jamais, je plongeais dans l’eau, me recroquevillant sur moi-même, tentant de me dissimuler de son regard insistant.
- Tu aurais pu me dire que tu étais là ! M’exclamais-je, furieux qu’il m’ait ainsi observé à mes dépends. Pervers ! Dégage ! Hurlais-je.
Quelle ne fut pas ma surprise lorsque, au lieu de s’éloigner, Hayden commença à retirer ses vêtements. Une fois dévêtu, m’adressant un regard amusé, il entra à son tour dans la rivière. Puis, sans plus se préoccuper de moi, il entreprit de se laver. Honteux, je détournais la tête, m’efforçant à garder Hayden hors de mon champ de vision et malgré les frissons glacés qui commençaient à s’emparer de moi, je ne bougeais pas, restant obstinément dans l’eau.
Hayden se tourna alors vers moi et, amusé, il s’exclama :
- Tu sais Gwen, tu n’as vraiment rien à cacher… Tu ne devrais pas avoir honte de son corps. Tu es beau…
A ces mots, je ne pu m’empêcher de m’empourprer violemment, gêné par le compliment qui, bien qu’il ait été dit dans un but gentil, était totalement erroné. Comment pouvait-il trouver beau ce corps devenu beaucoup trop maigre que je ne reconnaissais plus ? Avait-il dit cela pour se moquer de moi ?
Terriblement gêné, je me recroquevillais davantage dans l’eau, me mordant les lèvres pour ne pas claquer des dents.
- En plus, ajouta Hayden, nous sommes fait pareil, alors…
Sans plus de cérémonies, il reprit ce qu’il était en train de faire, se détournant de moi. Comment pouvait-il être aussi à l’aise alors qu’il était complètement nu ? Lorsqu’il fut propre, il sortit de l’eau et attrapant sa serviette, il se sécha vigoureusement. Sans que je ne puisse m’en empêcher, mon regard se posa alors sur le corps nu d’Hayden. Malgré ma gêne, j’étais incapable de détourner les yeux. Il avait un corps magnifique… Bien plus beau que le mien… Sa peau dorée par le soleil contrastait avec la mienne trop pâle, ses muscles roulaient sous sa peau et son corps était parfaitement bien proportionné, ni trop maigre ni trop gros. Juste parfait… Me comparant à lui, je ne pus m’empêcher de me sentir un peu jaloux. Comment faisait-il pour rester ainsi, alors que quelques jours de marche suffisaient à me faire perdre suffisamment de poids pour ressembler à un enfant du tiers-monde ?
Je réalisais que mon regard était toujours posé sur Hayden lorsque je le vis m’observer avec un amusement certain, visiblement satisfait. Plus honteux que jamais, craignant qu’il interprète mal mon comportement, je m’empressais de détourner les yeux, sentant mes joues s’empourprer violemment.
- Et après tu dis que c’est moi le pervers, déclara-t-il en riant. Tu devrais sortir de l’eau, Gwendal, ajouta-t-il. Tu vas attraper la mort à rester sans bouger, l’eau est glacée.
Mortifié, je n’esquissais pas le moindre mouvement. Si j’avais pu me noyer en cet instant précis, j’aurais sauter sur l’occasion de le faire. Hayden acheva de s’habiller et à mon plus grand soulagement, il déclara :
- Je vais préparer le petit déjeuner, je t’attends pour manger.
Je ne répondis rien mais ne bougeais pas d’un pouce avant qu’il ne soit parti. Lorsqu’il eut disparut de mon champ de vision, je me précipitais hors de l’eau. Frigorifié, claquant des dents à me les fendre, je m’enveloppais dans ma serviette et entreprit de me sécher vigoureusement, tentant de réchauffer mon corps glacé. Il me fallut bien cinq minutes pour que le sang recommence à couler dans mes veines et que je puisse m’habiller. Durant tout le temps que je passais à me préparer, je ne pus m’empêcher de me sentir en colère contre Hayden. Pourquoi devait-il toujours surgir au mauvais moment et surtout, pourquoi s’amusait-il toujours à me mettre dans l’embarras ? Cela l’amusait-il tant que ça de me voir perdre mes moyens ? Pourquoi devait-il toujours trouver un moyen pour m’humilier ?
C’est en colère contre lui que je retournais au chalet. Là, j’étendais ma serviette au soleil pour la faire sécher et avisant Hayden, je lui adressais un regard noir. Durant tout le repas, je ne décrochais pas un mot, lui faisant clairement comprendre que je n’étais pas disposé à lui adresser la parole et encore moins à lui pardonner. Après le repas, j’allais chercher le livre qu’il m’avait prêté et allais m’installer dans un coin un peu plus loin tandis qu’Hayden entreprit de nettoyer la cabane.
Plongé dans ma lecture, je ne vis pas le temps passer. J’allais me lever lorsque je vis Hayden se diriger vers moi. Aussitôt, je reportais mon attention sur mon livre encore ouvert, l’ignorant totalement, feignant de lire afin de ne pas avoir à lui parler. Agacé, Hayden demanda :
- Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi est-ce que tu boudes Gwen ?
Comme s’il ne savait pas… Pas disposé le moins du monde à lui parler, je ne répondis rien, m’enfermant dans un mutisme délibéré.
- Je vais préparer à manger… Soupira-t-il avant de s’éloigner.
Discrètement, je relevais la tête je le vis s’affairer à ranger nos affaires dans la cabane. Ma colère contre Hayden avait finalement fait place à une grande lassitude. Le moral à zéro, je le rejoignis lorsqu’il m’appela pour passer à table. Il avait préparé une soupe accompagnée de viande et de fromage et c’est seulement à la vue du repas que je me rendis compte à quel point j’étais affamé. Murmurant un “merci” à peine audible, j’entamais mon repas avec appétit. Je mangeais sans prononcer le moindre mot quand, brisant le silence, Hayden demanda :
- Que dirais-tu de rester ici quelques temps ?
- Pourquoi pas, répondis-je simplement après un temps de réflexion.
- J’irais faire quelques courses demain pour que l’on soit tranquille pour quelques temps, ajouta-t-il. Nos provisions sont à sec. Tu restera ici pour garder nos sacs et surtout te reposer. Ca te conviens ?
- Oui, répondis-je simplement.
A vrai dire, c’est à peine si j’écoutais ce qu’il me disait, trop aveuglé par la rancoeur que je ressentais vis à vis de lui. Subitement, Hayden se redressa brusquement en s’exclamant :
- Qu’est-ce que tu peux être pénible quand tu t’y mets Gwen.
Et sans plus de cérémonies, il se dirigea vers le feu, me laissant seul à notre table improvisée, tandis que je restais immobile. Je n’avais plus faim… Me levant à mon tour, je jetais le reste de mon assiette et celle d’Hayden et rassemblant la vaisselle sale, je la posais dans le seau d’eau avant de ranger les restes de notre repas. Une fois fait, j’allais rejoindre Hayden, toujours en silence. Là, je m’installais de mon côté du lit, bien décider à mettre un terme rapidement à cette horrible journée. Bientôt, Hayden vint me rejoindre et alors qu’il esquissait un mouvement pour me prendre dans ses bras, je me détournais de lui, lui tournant le dos, l’ignorant totalement. J’entendis Hayden soupirer bruyamment mais il ne fit aucun commentaire.
Le sommeil tarda à venir, se refusant à moi et je dormis très mal cette nuit là, me réveillant toutes les heures. A l’aube, j’entendis Hayden se réveiller et quitter le lit le plus silencieusement possible. Fermant les yeux, je feignais le sommeil afin de ne pas avoir à supporter ses moqueries et ses reproches dès le matin. Je l’entendis s’affairer un instant autour de moi, allant et venant avant de finalement attraper son sac et partir.
Finalement, je dus finir par m’endormir, car lorsque j’ouvris les yeux de nouveau, le soleil était déjà haut dans le ciel. Repoussant les couvertures, je m’étirais longuement avant de consentir à me lever. Je réalisais alors à quel point tout était silencieux autour de moi et le départ d’Hayden pour la ville me revint en mémoire. Je poussais alors un profond soupir, soulagé de ne pas avoir à revivre une journée comme hier à ses côtés. Entrant dans la cabane, je me préparais un petit déjeuner succinct et avisais le mot qu’Hayden avait laissé. Il ne rentrerait pas de la journée.
Un nouveau soupir s’échappa de mes lèvres et une fois rassasié, j’allais ranger les duvets à leur place puis, attrapant mes affaires de toilette et des vêtements propres, j’allais à la rivière et comme hier, je pris une douche rapide. Une fois propre et habillé, je cherchais quelque chose à faire, mais je dus bien vite me rendre à l’évidence, je m’ennuyais…
L’après-midi qui passa fut la plus longue de toute mon existence. Jamais encore je ne m’étais ennuyé à ce point et, je devais bien l’admettre, Hayden me manquait… En début de soirée, me doutant bien qu’Hayden ne devrait plus tarder à rentrer, je voulu lui faire plaisir et décidais de préparer le repas. M’approchant du foyer, j’entrepris d’allumer un feu. Cependant, j’eus beau reproduire les gestes de Hayden, rien n’y fit.
Je ne su combien de temps je restais là à essayer d’allumer un feu qui refusait catégoriquement de s’allumer. De plus, le temps passait et je n’avais toujours aucune nouvelle d’Hayden. Bientôt, mon inquiétude fit place à une réelle angoisse. Et s’il lui était arrivé quelque chose ? Alors que, de rage, j’allais jeter mon bout de bois, j’entendis la voix d’Hayden dans mon dos, me faisant sursauter :
- Est-ce que tu aurais besoin d’aide ? Demanda-t-il en s’approchant de moi.
Me tournant vers lui, la rage au coeur, je jetais violemment mon bâton dans le foyer du feu et m’exclamais furieux, une subite envie de pleurer s’emparant de moi :
- Je n’y arriverais jamais ! M’exclamais-je. Ca fait deux heures que je m’acharne sur ce maudit feu et je n’y arrive pas ! Et toi ! Ajoutais-je en reportant mon attention sur lui, laissant libre court à toute l’angoisse que j’avais ressentis. Qu’est-ce que tu faisais ?! J’étais mort d’inquiétude de ne pas te voir revenir !
- Calme-toi Gwen… Répondit-il simplement. Ca a juste pris plus de temps que prévu, ajouta-t-il calmement alors que je manquais de céder à la crise de nerf. Tu sais bien que je ne t’aurai jamais abandonné, ajouta-t-il.
- Mais il aurait pu t’arriver quelque chose, gémis-je, subitement calmé. Peut-être que Thomas aurait pu te retrouver ou, je ne sais pas…
- Je vis seul depuis des années, Gwendal, tenta-t-il de me rassurer. Et même s’il y a des risques, il ne m’est jamais rien arrivé…
- Menteur, soufflais-je en le regardant d’un air accusateur. Quand on s’est rencontré, on venait de te poignarder…
- Et je suis toujours vivant, Gwen… Je suis là… Déclara-t-il d’une voix douce, comme pour m’apaiser.
Il ne m’en fallut pas plus pour m’effondrer en sanglots, libérant ces larmes que j’avais trop longtemps retenues. Enfouissant mon visage entre mes mains, je pleurais sans pouvoir m’arrêter. Noyé dans mes sanglots, je ne vis pas Hayden s’approcher de moi, ne me rendant compte de sa présence que lorsqu’il me prit entre ses bras et m’attira doucement à lui. Rassuré par la douce chaleur de son étreinte, je me laissais aller contre lui, oubliant momentanément ma colère et ma rancoeur. Entourant ses bras autour de ma taille, une de ses mains me caressant le dos en signe d’apaisement, il murmura :
- Il ne m’arrivera rien, Gwendal…
C’est mots firent redoubler mes sanglots. Comment pouvait-il dire ça ? Comment pouvait-il ainsi ignorer la peur et l’angoisse que je ressentais à l’idée de le perdre… Surtout depuis que je m’étais rendu compte que mes sentiments pour lui semblaient évoluer au fils du temps.
- Tu ne peux pas dire ça… Déclarais-je entre deux sanglots. Tu ne sais pas…
Malgré mes pleurs, je sentis Hayden me serrer davantage contre lui, sa main passant dans mon dos en une caresse réconfortante. Le visage enfoui dans son cou, mes mains fermement agrippées à sa chemise, je mis un temps fou à me calmer, me libérant de toute l’angoisse qui avait été la mienne durant ces dernières heures. Lorsque mes sanglots se tarirent, je ne fis aucun mouvement pour m’arracher à l’étreinte d’Hayden, savourant sa chaleur contre moi et la présence rassurante de ses bras puissant autour de mes hanches. Bientôt, mon ventre se mit à gargouiller, brisant la magie de l’instant. Le rouge me monta aux joues et me repoussant gentiment, Hayden déclara avec un sourire :
- Et si je t’apprenais à allumer un feu et que l’on préparait à manger ?
J’acquiesçais silencieusement. Patiemment, Hayden m’apprit à allumer un feu et, une fois la technique enregistrée, j’y parvins sans la moindre difficulté. Cependant, ma rancoeur n’étant pas tout à fait éteinte, je gardais une certaine distance entre nous. Alors qu’il sortait les provisions de son sac et me laissais le choix de ce que je voulais manger, il demanda, sa voix s’élevant claire et nette dans le silence de la nuit :
- Et si tu me disais maintenant ce qui ne va pas ?
- Je voulais te punir, répondis-je gêné, après un court silence.
- Me punir ? Répéta Hayden, surpris. Mais de quoi ?
- Parce que je t’en veux de t’être moqué de moi… Avouais-je en détournant le regard.
A ces mots, Hayden partit à rire.
- A cause de la rivière ? Demanda-t-il entre deux éclats de rire.
Vexé de le voir se moquer de moi encore, je me contentais d’hocher la tête. Et Hayden partit à rire plus fort.
- Tu vois ! M’exclamais-je, irrité. Tu le fais encore ! Tu te moques de moi, ajoutais-je, avec une moue boudeuse.
Cessant aussitôt de rire, Hayden posa sur moi un regard particulièrement tendre qui me troubla, avant de reprendre sérieusement :
- Tu sais Gwen, il faut que tu apprennes à avoir de l’humour sur toi-même et ne pas être susceptible comme ça. Je ne l’ai vraiment pas fait méchamment. Mais je m’excuse si ça t’a blessé… S’il te plaît, ajouta-t-il, à l’avenir, dis-moi quand tu trouves que je vais trop loin. D’accord ?
Touché par ses mots, je lui adressais un petit sourire, oubliant ma rancune. Nous finîmes de préparer à manger et il m’abandonna momentanément le temps d’aller se laver à la rivière. Il fut de retour en un temps record, revenant près du feu en courant. Là, il s’installa près de moi. Je lui tendis alors son assiette et nous mangeâmes en parlant de tout et de rien.
Alors que nous mangions le dessert, Hayden me demanda de lui passer son sac. Je m’exécutais sans discuter et le laissant à ses affaires, je terminais mon dessert. Soudain, je le vis me tendre un sac en plastique. Surpris, je m’en emparais et timidement, j’entrepris de le vider. Quelle ne fus pas ma surprise lorsque je sortis un pull en laine doux au toucher, deux jeans et quelques t-shirts.
Affreusement gêné de ce cadeau inattendu, mais tout de même très touché par l’intention d’Hayden, je déclarais timidement, le rouge aux joues, ne sachant pas vraiment quoi dire, :
- Je… Merci Hayden… Mais il ne fallait pas, j’ai pleins de vêtements…
- Ceux-ci seront plus adaptés pour la vie que nous menons, répondit-il simplement en me souriant.
- Merci, murmurais-je, à nouveau, la gorge nouée par l’émotion et le coeur battant à tout rompre.
- Tu n’as pas à me dire merci, souffla Hayden.
Je ne répondis rien, ne sachant que dire, puis le silence s’installa de nouveau entre nous. Par la suite, nous entreprîmes ensuite de tout ranger et c’est avec un plaisir non feint que nous nous mîmes au lit. Alors qu’ Hayden se glissait entre les couvertures, que je me collais à lui. Loin de me repousser, il passa ses bras autour de ma taille, comme pour m’attirer davantage tout contre lui, poussant un soupir de satisfaction. Fermant les yeux sous le bien-être que je ressentais, je me laissais aller tout contre Hayden et bientôt, bercé par le rythme régulier des battements de son coeur, je finis par m’endormir.
Finalement, nous restâmes plus que quelques jours dans la cabane, profitant du minimum de confort qu’elle nous offrait. Au fil des jours, j’avais commencé à aménager la pièce, la décorant parfois de bouquets de fleurs que je trouvais dans les environs. Et malgré que le tout restait très impersonnel, je commençais à m’y sentir un peu comme chez moi… Chez nous… Et lorsque j’avais fais part de mes impressions à Hayden, il avait rit doucement, amusé. Cependant, l’étincelle qui avait traversé son regard à cet instant ne m’avait pas échappée… La route lui manquait…
C’est pourquoi, ce jour là, alors que nous étions installés depuis près de huit jours, je me décidais à aborder le sujet. Allongé sur le ventre à l’ombre d’un arbre au bord du ruisseau, le menton posé sur mes mains, j’observais Hayden qui, le pantalon relevé jusqu’aux genoux, tentait tant bien que mal d’attraper un poisson pour le repas de ce soir, à l’aide d’un fils de pêche. Il bataillait depuis près d’une heure avec son fils de pêche et son morceau de pain sec et malgré moi, je ne pouvais m’empêcher de le trouver attendrissant avec son petit air d’enfant obstiné.
- Hayden… Appelais-je, brisant ainsi le silence de ce milieu d’après-midi.
- Tais-toi ! Chuchota-t-il, faussement contrarié. Tu fais fuir les poissons…
Amusé plus qu’autre chose, j’esquissais un petit sourire alors qu’il repartait à l’affût.
- Quand est-ce qu’on repart ? Demandais-je.
Les yeux rivés sur Hayden, j’esquissais un petit sourire en le voyant manquant de glisser à l’eau après avoir posé le pied sur une pierre bancale.
- Tu veux repartir ? Demanda-t-il, visiblement plus que surpris. Je croyais que tu te plaisais bien ici…
- Moi oui, mais je vois bien que ce n’est pas ton cas… Répondis-je doucement.
Pour toute réponse, Hayden s’approcha de moi, abandonnant son idée de pêche. Une fois face à moi, il se laissa tomber au sol, s’asseyant en croisant les jambes.
- Je vais être honnête avec toi, déclara-t-il en posant sur moi un regard que je ne parvins pas à déchiffrer. La route me manque, mais je ne veux pas repartir au risque de mettre ta santé en danger.
- En danger ? Répétais-je, incrédule. Je ne suis pas en danger ! Tiquais-je.
- Même si tu n’en montre rien, j’ai bien vu que tu avais perdu beaucoup de poids, Gwen… Tu n’étais déjà pas épais à la base, mais là c’est devenu flagrant…
A ces mots, je ne pus m’empêcher de rougir, affreusement gêné. Ainsi il s’en était rendu compte… J’avais pourtant bien fait attention à ce qu’il ne remarque rien…
- Comment tu… Commençais-je, n’osant pas croiser son regard.
- Le lacet ! Répondit-il avec un sourire en coin. Celui que tu as piqué sur ma chaussure pour attacher ton pantalon… Tu l’as laissé traîner l’autre jour…
- Oh… Soufflais-je, gêné.
- Tout ça pour dire, reprit Hayden plus sérieusement, que cela ne me gêne pas de rester ici le temps que tu te remplumes un peu. De plus, c’est à moi de faire un effort pour adapter mon rythme de marche au tien. J’ai bien vu que tu faisais ton possible pour suivre mon rythme sans te plaindre, mais je ne peux pas toujours te demander d’arriver à me suivre. Cela fait des années que je mène cette vie, alors que tu n’es à mes côtés que depuis quelques semaines. Du coup, c’est à moi de faire un effort et de m’adapter à ton rythme et de ralentir un peu.
Touché par ces mots, je ne pus m’empêcher cependant de me sentir coupable. Détournant le regard, mal à l’aise sous l’intensité du regard qu’il posait sur moi, je déclarais timidement :
- Je… Tu n’as pas à faire tous ces efforts pour moi Hayden… C’est moi qui me suis imposé à toi, alors c’est à moi de m’adapter… Et je… Je voudrais que tu me dises si ma présence t’ennuie…
A ces mots, Hayden prit mon menton entre ses doigts et m’obligea à le regarder, avec des gestes emplis de douceur.
- Tu ne me dérange pas le moins du monde, Gwendal, déclara-t-il.
- Tu es sincère ? Demandais-je, ancrant mon regard au sien.
- Je n’ai jamais été aussi sincère, déclara-t-il gravement.
Dans son regard, je pus constater tout le trouble qu’il ressentait à la vue de l’anomalie de mes yeux, comme s’il ne savait pas lequel regarder. Atrocement gêné, ayant toujours détesté mon regard pour ce genre de réaction qu’il entraînait, je tentais de me libérer de la poigne d’Hayden. Lorsqu’il s’en rendit compte, il libéra mon menton pour poser sa main sur ma joue, alors que je baissais les yeux, reportant mon attention sur l’herbe qui dansait au gré du vent.
- Pourquoi détournes-tu le regard ? Demanda-t-il, sa main posée sur ma joue la caressant doucement. Tu as des yeux magnifiques… N’ai pas peur de les montrer…
- Mes yeux ne sont pas beau, Hayden, soupirais-je sans pour autant relever la tête. Tu n’imagines pas ce que c’est d’avoir à assumer le regard des autres, d’avoir à accepter que les grand-mères se signent en me traitant de sorcière dès qu’elles croisent mon regard…
- En quoi leurs réactions t’importent-elles tant, Gwendal ? Demanda-t-il. En quoi leur avis te tient-il tant à coeur ? Qui sont-ils ? Qu’as-tu à leur prouver ?
- Je… Commençais-je, hésitant.
- Ignore les, Gwen… Tu ne leur dois rien ! Tes yeux sont une partie de toi, de ce que tu es… Ils sont juste, fascinant… Souffla-t-il alors que son regard accrochait le mien.
Le regard ancré à celui d’Hayden, je me laissais hypnotisé par l’intensité de la flamme qui illuminait ses yeux, les faisant briller d’une force que je n’avais encore jamais remarquée. Ensorcelé, je ne me rendis pas compte que la distance qui séparait nos lèvres s’amenuisait dangereusement. Et alors que sa bouche chaude et humide effleurait la mienne en une caresse éthérée, je sursautais violemment sans parvenir à retenir un cri de frayeur lorsqu’un coup de tonnerre retentit bruyamment au dessus de nos têtes.
L’instant suivant, une pluie diluvienne s’abattit sur nous. Nous relevant d’un bon, nous rassemblâmes précipitamment nos affaires avant de partir en courant vers la cabane. Les quelques dizaines de mètres que nous avions à parcourir suffirent pour que nous arrivions complètement trempés. Alors que nous courions pour nous mettre à l’abri, je m’arrêtais subitement et me mis à rire. Surpris, Hayden se tourna vers moi, m’adressant un regard étonné. Et moi, je ne pouvais m’empêcher de rire. En cet instant, trempé jusqu’aux os sous cette pluie torrentielle, j’étais tout simplement heureux…
- Gwen ? M’appela Hayden, déconcerté.
Lâchant alors mes affaires, je me mis à tournoyer sur moi-même, les bras écartés, le visage levé au ciel, offert à la pluie qui tombait, ignorant les grondements du ciel. Les yeux fermés, vacillant face à mon manque d’équilibre, je sursautais en sentant deux bras puissant se refermer autour de mes hanches alors qu’un torse chaud et athlétique se collait à moi dans mon dos. Reconnaissant Hayden à son odeur et à la façon si particulière qu’il avait de coller son corps au mien, je me détendis, me laissant aller à son étreinte. Emporté par notre élan, je me laissais aller à laisser mes mains rejoindre les siennes et d’un geste d’une tendresse qui me fit tressaillir, il noua mes doigts aux siens posés sur mon ventre.
Là, entre les bras rassurant d’Hayden, je n’avais plus peur… Je me sentais protégé et en sécurité, avec l’agréable impression que rien ne pourrait m’atteindre ni me blesser tant qu’il resterait près de moi. Et si tout mon être cherchait à dissimuler ses sentiments qui m’habitaient, mon coeur lui, le criait haut et fort : j’étais amoureux d’Hayden…
Mon coeur était prit d’une frénésie inquiétante lorsque je sentais son regard posé sur moi et la façon dont il me fixait parfois avait le don de me mettre mal à l’aise. Comme s’il cherchait à lire à travers moi… Je craignais qu’à force de m’observer, il finisse pas se rendre compte des sentiments trop tendres que je nourrissais à son égard. Comment réagirait-il alors ? Se rirait-il de moi ? C’était fort probable, Hayden ayant le don de tout tourner en dérision… Et je ne pouvais l’en blâmer… Quoi de plus comique que et improbable qu’un fils de noble famille qui s’entiche d’un vagabond ? Aussi gentil soit-il qu’Hayden…
Ce fut la voix d’Hayden au creux de mon oreille qui me ramena à la réalité :
- Ne restons pas sous la pluie… Viens….
Ce ne fut que lorsque son corps se détacha du mien que je réalisais qu’il n’avait cessé de m’enlacer depuis tout à l’heure. Délicatement, ses doigts enlacèrent les miens et malgré moi, je ne pouvais détacher mon regard de ce spectacle. Puis, quittant nos doigts enlacés du regard, je reportais mon attention sur Hayden. Légèrement éloigné de moi, il me souriait avec cette expression si particulière que je ne parvenais pas à déchiffrer. Et là, mon regard ancré à celui d’Hayden, j’eus l’intime conviction que ma vit avait prit un tout autre chemin, passant de statut de “infernale” à “véritable conte de fées”.
Rougissant, honteux des pensées qui étaient les miennes en cet instant, je me laissais docilement guider par Hayden qui, lentement, m’entraîna vers la cabane. Une fois à l’intérieur, il referma vivement la porte derrière lui afin d’éviter que la pluie nous suive à l’intérieur. Puis, se dirigeant vers le petit poêle qui trônait dans un coin de la pièce, il l’alluma. Lorsque le feu eu prit, il se tourna vers moi. Plongé dans mon observation, je n’avais même pas réalisé que je tremblais de froid. Ce fut Hayden qui me ramena à la réalité, lorsque ses mains se mirent à frotter mes bras en une vaine tentative pour me réchauffer :
- Tu ne devrais pas rester avec tes vêtements mouillés, Gwen… Change-toi avant que tu n’attrapes froid…
Honteux, je détournais le regard et jetais un coup d’oeil à l’unique pièce, cherchant un endroit discret où je pourrais me changer. Cependant, à mon plus grand malheur, il n’y avait absolument aucun recoin où j’aurai pu me dissimuler. Semblant comprendre mon désarrois, Hayden déclara en souriant :
- Promis je ne te regarderais pas ! Allez change-toi !
Et comme pour me prouver sa bonne volonté, il alla se poster devant l’unique fenêtre, me tournant le dos. Sortant de ma torpeur, je me dirigeais vers mon sac de voyage et en sortis des affaires propres et tournant moi aussi le dos à Hayden, j’entrepris de me dévêtir. Attrapant mon t-shirt par le bas, j’entrepris de le passer au dessus de ma tête. Cependant, ce que je n’avais pas prévu, c’était qu’il reste coincé. Affreusement gêné, ne pouvant plus bouger, j’appelais Hayden d’une petite voix, affreusement mal à l’aise :
- Hayden…
- Il y a un problème Gwen ? Demanda-t-il sans se retourner.
- Je… Je suis coincé… J’ai… Besoin de ton aide… Soufflais-je, tentant de ne pas rougir.
- Tu es conscient qu’en me demandant mon aide, cela me force à me retourner ? Demanda-t-il avec ce que je décelais être une pointe d’humour dans la voix.
- Dépêches-toi ! Marmonnais-je. J’ai froid…
Il n’en fallut pas plus pour décider Hayden. L’instant d’après, je le sentis s’arrêter juste derrière moi et je me félicitais alors de lui tourner le dos afin qu’il ne soit pas témoin de la brusque rougeur de mes joues. Et lorsque ses mains vinrent se poser sur les miennes, je dus me faire violence pour réprimer un frisson. Avec douceur, il entrepris de m’aider à retirer mon t-shirt, et terriblement gêné, je ne pus m’empêcher de me sentir mal à l’aise. J’étais sans doute en train de vivre l’un des instants les plus intimes de ma vie et malgré moi, mon coeur tambourinait dans ma poitrine qui semblait être sur le point d’exploser.
Alors que je baissais les bras, enfin libéré de ma prison de toile, je sursautais violemment en sentant les mains d’Hayden se poser sur mes hanches nues, juste au dessus de mon pantalon. Le coeur battant, je n’osais plus esquisser le moindre geste tandis que ma respiration se bloquait et que mon coeur loupait un battement. Puis, avec une douceur extrême, il déposa ses lèvres sur mon omoplate. Au contact de ses lèvres brûlantes sur ma peau glacée et de ses cheveux qui effleurèrent timidement ma nuque, je ne pus retenir un violent frisson, fermant les yeux sous l’effet du soudain bien-être qui s’emparait de moi. A présent, je n’avais plus froid, c’était comme si la brûlure des lèvres d’Hayden se répandait dans mes veines, réchauffant tout mon corps.
Puis, bien trop brusquement, Hayden s’éloigna de moi et le froid m’envahit de nouveau. D’une voix étrangement rauque, il déclara :
- Finis de te changer, Gwen… Tu es glacé…
Puis, sans plus de cérémonie, il retourna près de la fenêtre, ses pas résonnant lugubrement dans le silence seulement briser par les grondements du tonnerre et la pluie qui tombait toujours. Le coeur battant et la tête emplie de questions, j’achevais de me changer retirant mon boxer et mon pantalon trempés pour les remplacer par ses secs. Puis, attrapant ma serviette, je défis ma queue de cheval et me séchais les cheveux. Une fois fait, j’attrapais ma brosse et me dirigeant vers Hayden, je déclarais simplement :
- La place est libre…
Sans un regard pour moi, il s’empressa de s’éloigner, et j’eus l’horrible impression qu’il me fuyait. Cette sensation fut renforcée lorsque, au lieu d’aller se changer, Hayden ouvrit la porte de la cabane et la referma en claquant la porte derrière lui. Sans que je ne puisse les retenir, des larmes s’échappèrent subitement de mes yeux, cascadant en silence le long de mes joues. Blessé, je ne pouvais détourner mon regard de la porte, espérant qu’Hayden revienne et s’excuse d’être partit ainsi.
Pourquoi un tel comportement de sa part ? Avais-je malgré moi, sans m’en rendre compte, fait quelque chose qui lui a déplut ? Pourquoi m’avait-il embrassé ainsi si c’est pour me fuir par la suite ? Des questions pleins la tête, je me détournais alors de la fenêtre et allais m’asseoir en tailleur devant le poêle, tournant délibérément le dos à la pièce. Là, j’entrepris de dénouer mes cheveux, ignorant les larmes qui coulaient sur mes joues, ne pouvant m’empêcher de me sentir coupable.
Je ne saurais dire combien de temps s’était écoulé lorsqu’Hayden poussa à nouveau la porte de la cabane. Sentant les larmes revenir au galop, je m’efforçais de les retenir. Allongé sur le ventre, mon livre posé devant moi, je demandais d’une voix que j’espérais pas trop tremblante :
- Tu étais où ?
- Je… J’ai cru avoir oublié quelque chose à la rivière…
- Tu mens ! Déclarais-je simplement, sans relever les yeux de mon livre.
Il n’y avait ni reproches, ni accusation dans ma voix, seulement une constatation. A ces mots, Hayden poussa un profond soupir et se dirigeant vers son sac de voyage, il déclara :
- Ecoute Gwen, je ne suis pas certain que tu ais réellement envie de connaître la raison pour laquelle je suis sortis…
Alors qu’il se changeait, je déclarais simplement :
- Fais bien ce que tu veux. Après tout, tu n’as pas besoin de moi.
Hayden ne répondit rien et lorsqu’il fut changé, il vint s’asseoir en face de moi. Gardant obstinément les yeux fixés sur mon livre, je tentais d’ignorer sa présence. Ce n’était pas sans compter sur la coopération d’Hayden qui referma brusquement mon livre :
- Hey ! M’exclamais-je, furieux.
- Ecoute-moi quand je te parles ! Déclara Hayden.
- Parce que tu m’as écouté toi peut-être ? Sifflais-je en me redressant pour m’éloigner de lui.
Comme s’il avait compris mes intentions, Hayden m’attrapa le poignet. Je restais un instant immobile avant de reprendre brusquement mon poignet, m’arrachant furieusement à sa poigne.
- Me touche pas !
Sur ses mots, je me redressais. Et avant que je ne comprenne ce qui se passe, je me retrouvais coincé entre le mur et le corps d’Hayden, les poignets maintenus fermement au dessus de ma tête. Furieux, j’adressais un regard assassin à Hayden en m’exclamant :
- Lâche-moi ! Tu n’as pas le droit !
- Je ne te lâcherais pas avant que tu m’ais écouté ! Déclara-t-il en ancrant son regard dans le mien. Et arrête de gesticuler, ça ne sert à rien !
- Je n’ai pas envie de t’écouter ! M’exclamais-je. Je n’ai que faire de tes excuses, m’entêtais-je.
Il m’avait blessé et je tentais de me protéger comme je le pouvais.
- Ecoute-moi ! S’exclama Hayden en haussant le ton, me faisant sursauter. Je suis désolé si je t’ai blessé d’une quelconque façon, reprit-il plus doucement. Ca n’était aucunement mon intention…
- Je ne suis pas blessé ! Répliquais-je cinglant.
- Ah oui ? Pourquoi est-ce que tu me fuis ainsi alors ? Renchérit-il, un sourire en coin étirant ses lèvres.
Pour toute réponse, je tentais une nouvelle fois que me soustraire à sa poigne de fer.
- Tu me fais mal ! Sifflais-je furieux, alors que ses doigts me broyaient les poignets.
- Excuses-moi, souffla-t-il en desserrant sa prise.
- Je t’excuses ! A présent, lâche-moi ! Ordonnais-je.
- Pas avant que tu ne m’ai écouté ! Répéta-t-il.
A contrecoeur, je finis par céder, cessant de me débattre. J’adressais à Hayden un regard assassin qui le fit sourire. Je décidais alors de l’ignorer et reportais mon attention sur la fenêtre, ne cillant pas lorsque je l’entendis soupirer bruyamment avant de déclarer :
- Si je suis partis comme un sauvage c’est que… Commença-t-il, hésitant, comme s’il cherchait ses mots. Je ne suis qu’un homme, Gwen… Avec mes désirs et mes faiblesses… Et tu es loin de me laisser indifférent…
A ces mots, je ne pus m’empêcher de sursauter, surpris, alors que mon coeur battait dans ma poitrine.
- Je te désire Gwen, ajouta-il gravement. Et si je suis partis, c’est pour éviter de faire une bêtise…
Je ne pus m’empêcher de m’empourprer violemment en réalisant ce qu’il venait d’avouer. Il me désirait ? Etait-il sérieux où bien cherchait-il simplement à se moquer de moi ? Presque malgré moi, je détournais mon attention de la fenêtre pour la reporter sur Hayden et l’intensité du regard qu’il posait sur moi me coupa le souffle. Jamais personne ne m’avait regardé ainsi, posant sur moi un regard si brûlant et empli de désir…
Terriblement gêné, je détournais de nouveau les yeux, sous le sourire attendrit d’Hayden. Je n’osais pas prononcer le moindre mot et subitement, l’ambiguïté de notre position acheva de colorer mes joues d’un joli rouge carmin. Semblant se rendre compte de mon malaise, Hayden me libéra les poignets et s’éloigna sensiblement de moi afin que nos deux corps ne soient plus en contact.
Pour ma part, je restais immobile, encore entrain d’assimiler les révélations d’Hayden. Jamais je n’aurai pu croire une chose pareille… Lorsque je repris mes esprits, je m’approchais lentement de lui. Et alors que j’allais poser une main sur son épaule, il esquissa un pas de recul, un pauvre sourire dépeint sur les lèvres :
- Ca ne serait pas prudent… Déclara-t-il simplement. Je… Je crois qu’il vaudrait mieux que tu dormes dans ton duvet ce soir…
Les joues brûlantes sous l’insinuation d’Hayden, j’esquissais à mon tour un pas de recul, terriblement gêné.
La soirée se déroula lentement et dans un silence gêné. Alors que j’étais couché depuis plusieurs heures, le sommeil me fuyait toujours. J’avais pris l’habitude de m’endormir entre les bras d’Hayden et à présent, sa présence et sa chaleur me manquait… Il me manquait ce sentiment de sécurité et de bien-être qui s’emparait de moi lorsque je me retrouvais entre les bras d’Hayden.
Après un énième soupir de lassitude, lassé de me tourner et me retourner sans arrêt dans mon lit de fortune, je quittais mon lit sans bruit et sortis. Je profitais que la pluie avait cessée pour m’installer dehors, m’asseyant sur un coin d’herbe sec. Bientôt, les bruits de la nuit m’apaisèrent et bien que le ciel était encore couvert, me voilant les étoiles, je me sentais bien, apaisé. Plongé dans mes pensées, je n’entendis pas Hayden me rejoindre et ne me rendis compte de sa présence que lorsqu’il vint s’asseoir à mes côtés.
Je lui adressais un simple sourire auquel il répondit, puis nous reportâmes notre attention sur les bois. Je ne saurais dire combien de temps nous restâmes ainsi, silencieux, aucun de nous n’osant briser le calme de la nuit. Finalement, je fus le premier à me jeter à l’eau :
- Comment tu l’as découvert ? Demandais-je.
- Découvert quoi ? Répéta Hayden, surpris.
- Ton homosexualité, répondis-je en me tournant vers lui.
- Oh ça… Souffla-t-il amusé. Et bien… Au fond de moi, je crois que je l’ai toujours su… Peut-être est-ce à cause de ma mère… A la voir se faire passer dessus par tous ces mecs… A voir dans l’état dans lequel elle était chaque jour, à la voir en redemander encore, à faire la salope pour quelques euros… Peut-être est-ce cela qui m’a dégoûter des femmes, je ne saurais le dire… Quoi qu’il en soit, dès le collège, je n’ai jamais porté la moindre attention sur les filles… Au contraire, voir ses pré-adolescentes se trémousser avec des vêtements vulgaires pour attirer l’attention des garçons… Tout cela me répugnais ça me rappelais bien trop ma mère, ce qu’elle était devenu… Instinctivement, je sais pas, je me suis surpris à observer les garçons et je ne m’en suis pas retrouvé dégoûté, comme avec les filles…
- Comment l’a prit ta famille quand ils l’ont appris ?
- Je ne connais pas mes grands-parents, ceux-ci ayant renié ma mère lorsqu’elle a commencé à se vendre… Quant à ma mère, elle s’est mise à hurler, me criant que j’étais un monstre, que je la dégoûtais…
Je ne fis aucun commentaire, gardant pour moi mes impressions. Après un long silence, je finis par prendre la parole :
- Père et mère ont toujours eut une vision plus que négative sur l’homosexualité, ne cessant de se plaindre d’eux et les dénigrant comme des moins que rien, commençais-je. Pour eux, le SIDA est de leur faute… Ils disent qu’ils l’ont bien mérité, qu’à force de forniquer à tout va, il fallait bien que quelque chose les punissent… Ils disent que c’est contre-nature… J’avais un cousin… Lorsqu’il a décidé d’assumer son homosexualité et qu’il a présenté son ami à ses parents, il s’est fait renié comme un malpropre et mettre à la porte, comme on jetterai une paire de chaussette abîmée à la poubelle… Je ne l’ai jamais revu… Je ne sais pas ce qu’il est devenu… Et pourtant, il était quelqu’un que j’appréciais énormément… Peut-être l’un des seuls d’ailleurs… Mais parce qu’il était différent de ce qu’ils auraient voulu qu’il soit, ils l’ont tous renié, sans chercher à le comprendre, sans se mettre à sa place et essayer d’imaginer ce qu’il a du ressentir… J’ai haïs ma famille plus qu’il n’était possible après ça… Cette famille qui n’en est pas une, avec leurs valeurs préhistoriennes et leurs préjugés… Cette famille qui ne jure que par leur statut social et se fout du bien être de leurs enfants… Pour eux, nous ne sommes qu’un moyen d’assurer la lignée de la famille et, en nous utilisant intelligemment en nous mariant avec des hommes ou des femmes influant, d’assurer leur bien-être et leur place dans la société… Et dès lors qu’un des enfants sort du droit chemin, dès que l’un d’eux se met à montrer des signes d’anomalies ou des tares, comme l’homosexualité, on le renie… On le chasse de cette famille soit disant unie, afin de ne pas salir son nom… Crachais-je, en sentant une fureur sans nom s’emparer de moi.
- Et toi ? Demanda Hayden en se tournant vers moi. Quel est ton point de vue ?
- Je… Je ne sais pas, soufflais-je, gêné. Je ne pense pas avoir de point de vue particulier… Les sentiments ne se contrôlent pas, ce n’est pas nous qui choisissons la personne, c’est notre coeur… Et lui se fout que la personne qu’il aime soit un homme ou une femme…
- Tu as l’air de parler en connaissance de cause… Souffla Hayden, un sourire amusé étirant ses lèvres.
- Moi ? Non… M’empressais-je de répondre, affreusement gêné de m’être ainsi laissé aller à exprimer ce que je ressentais.
- Menteur, sourit Hayden. Tu rougis…
- C’est de ta faute ! L’accusais-je en me tournant vers lui. Tu poses des questions gênantes.
- C’est toi qui a abordé le sujet…
Je ne répondis rien, me contentant de détourner les yeux, mal à l’aise sous le regard insistant qu’il posait sur moi. Finalement, après un long silence gêné, je demandais, changeant délibérément de sujet :
- Hayden ?
- Oui, Gwen… Répondit-il avec une pointe d’amusement dans la voix.
- Jusqu’où tu serais prêt à aller pour ta liberté ? Demandais-je.
- Comment ça ?
- Je veux dire, que sacrifice serais-tu prêt à faire ? Que serais-tu capable d’abandonner derrière toi pour rester tel que tu l’es aujourd’hui ? N’as-tu jamais songé à t’arrêter et t’installer quelque part ? N’y a-t-il jamais eu personne qui t’a donné envie de te poser, d’abandonner la vie que tu menais jusqu’à maintenant, pour elle ?
J’entendis Hayden soupirer et alors que je m’attendais à ne recevoir aucune réponse, il commença, le regard fixé droit devant lui :
- Je ne sais pas, avoua-t-il. Je ne me suis jamais suffisamment attaché à quelqu’un pour avoir envie de tout abandonner pour lui… Je n’ai aucune attache nulle part, Gwen, comme une feuille morte qui s’envole au premier coup de vent… Je me pose au gré de mes envies, mais, un jour ou l’autre, le désir de repartir se fait de plus en plus pressant, jusqu’au jour où, finalement, je finis par lui céder… Je suis comme ça, Gwen, c’est dans ma nature…
Après une courte pause, il reprit :
- Le seul pour qui cela a été beaucoup plus difficile que je ne le pensais, à été Julien… J’étais prêt à tout plaquer pour lui… A arrêter de voyager et m’installer avec lui… Mais finalement, encore une fois, l’appel de la liberté à été le plus fort…
- Il t’arrive de regretter ? Demandais-je, touché malgré moi. Tu ne t’es jamais demandé ce qu’aurait pu être ta vie si tu étais resté près de lui ?
- Tu ne t’arrêtes jamais de poser des questions ? Demanda Hayden en riant.
- Désolé… Soufflais-je en détournant les yeux, honteux.
- C’est bon, je plaisantais, me rassura-t-il. Tant qu’on en est aux confidences, autant parler non ? Et pour répondre à ta question, non, je ne regrettes pas… Je sais que Julien a une meilleure vie que celle qu’il aurait eut avec moi si j’étais resté…
- Comment peux-tu en être certain ? Demandais-je en le regardant.
Tournant la tête vers moi, un sourire amusé faisant pétiller son regard, il déclara :
- Tu as toujours réponse à tout, n’est-ce pas…
De nouveau je sentis le rouge me monter aux joues avant de me mettre à frissonner sous la fraîcheur de la nuit.
- Et toi… Déclara-t-il après un instant de silence en me souriant. Parle-moi un peu de toi ?
- De moi ? Répétais-je, confus.
- Oui, sourit-il, de toi…
- Il n’y a rien à dire, soupirais-je en détournant les yeux. Je m’appelle Gwendal, j’ai vingt et un ans et je me suis enfui avec un inconnu lorsque mon père m’a contraint à un mariage forcé… Tu vois, ma vie n’a rien de bien passionnant…
- Il y a forcément d’autres choses à dire, s’entêta Hayden. Ce que tu aimes, ton enfance, la famille on va éviter, ajouta-t-il, m’arrachant un petit sourire, tes goûts, tes rêves… Tu vois, il y a pleins de choses à dire sur toi…
- Pourquoi est-ce que tu veux savoir tout ça ? Demandais-je, surpris en croisant son regard.
- Ce n’est pas ce que font deux personnes qui voyagent ensembles ? Chercher à se connaître… Demanda-t-il en souriant, reprenant mes propres mots.
A ces mots, je ne pus m’empêcher de sourire, amusé malgré moi.
Reportant alors mon regard devant moi, je commençais à parler après un instant de silence :
- Je n’ai jamais vraiment réfléchis à tout ça, avouais-je. Dès mon plus jeune âge j’ai toujours fait ce que l’on me demandait, parce que c’est comme cela que l’on m’a élevé et c’est ce que l’on attendait de moi… Je suis fils unique et mes parents n’ont jamais été très présents pour moi, mais mon rôle de fils unique me contraignait à me plier à leurs exigences… C’est pourquoi, je n’ai jamais discuté leurs ordres, faisant ce que l’on exigeait de moi…
- Et pourtant, tu t’es enfuis de chez toi lorsqu’ils ont voulu te marier…
- Oui, soufflais-je. Peut-être ais-je été docile trop longtemps, ajoutais-je avec un petit sourire amer. Je n’avais peut-être rien à moi, mes goûts étaient ceux que l’on m’imposaient, mais j’ai toujours eu ce désir au fond de moi… Quand j’étais petit, je rêvais que j’avais des ailes, et que je m’envolais loin de chez moi… Je rêvais de découvrir le monde, de rencontrer les gens que j’aurai aimé rencontrer et non ceux que l’on m’imposait… Je voulais tant être… Normal…
- Et maintenant ? Demanda Hayden en me souriant. Est-ce que la vie que tu mènes à présent te plait davantage ?
- Bien plus, répondis-je sincère avant de me rembrunir. Tellement qu’il m’arrive, parfois, de croire que tout cela n’est qu’un rêve… Que si je ferme les yeux trop longtemps, lorsque je les ouvrirais, je me réveille dans ma chambre et que tout ce que j’ai vécu jusqu’à présent ne soit qu’une douce illusion…
Délicatement, la main d’Hayden vint se poser sur ma joue, et avec une douceur infinie, il m’incita à tourner la tête vers lui. Lorsque nos regards se croisèrent, je sentis mon coeur s’emballer dans ma poitrine et je dus me faire violence pour soutenir le regard brûlant qu’Hayden posait sur moi. Puis, lentement Hayden se pencha vers moi, son regard toujours ancré au mien, alors que, le coeur battant, je ne bougeais pas, parfaitement conscient de ses intentions. Bien trop lentement à mon goût ses lèvres se posèrent enfin sur les miennes et je ne pus retenir un soupir de bien-être et de satisfaction. Tout contre mes lèvres, je pus sentir Hayden esquisser un sourire et bientôt, ses lèvres s’entrouvrirent sur sa langue qui, tendrement, vint caresser mes lèvres, comme pour m’inviter à les entrouvrir. Grisé par la douceur dont il faisait preuve, je me laissais aller à fermer les yeux et m’abandonnant à lui, je cédais à son invitation et entrouvris timidement les lèvres. Il n’en fallut pas plus à Hayden et l’instant suivant, sa langue se faufilait entre les lèvres, partant à la recherche de la mienne.
Lorsque nos langue s’effleurèrent en une tendre caresse, je frissonnais violemment. Délicatement, Hayden posa sa main sur ma joue alors que je n’osais esquisser le moindre mouvement. Très vite, notre échange gagna en intensité. Sa langue entraînait la mienne en un ballet vieux comme le monde et j’eu toutes les peines du monde à retenir le gémissement de plaisir qui menaçait à tout moment de franchir mes lèvres. Soudain, Hayden fut comme prit de frénésie, me guidant dans un baiser fiévreux qui n’avait plus rien à voir avec ceux que nous avions échangé jusqu’à maintenant.
Je sentis mon coeur s’emballer dans ma poitrine et l’espace d’un instant, je pris peur en sentant Hayden presser mon corps contre le sien. Alors que je commençais à prendre peur, il sembla soudainement reprendre ses esprits et s’écarta vivement de moi, rompant brusquement le baiser.
- Excuses-moi, murmura-t-il, sa main caressant doucement ma joue. Je me lui laisser emporter… Ca va ?
- Je… Oui.. Murmurais-je, affreusement embarrassé.
- Alors, demanda-t-il après un court instant, reprenant notre conversation où nous l’avions laissée. Tu crois encore que tout ceci n’est qu’une illusion ? As-tu déjà rêvé d’être embrassé par un homme, même dans tes rêves les plus fou ?
- Jamais… Avouais-je, les joues rouges.
- Alors ceci n’est pas un rêve, Gwen… C’est réel… Déclara-t-il en souriant.
Je ne répondis rien et le silence nous enveloppa de nouveau. Finalement, la fatigue me gagna et alors que j’étouffais un bâillement, Hayden déclara :
- Allez, va dormir… Tu tombes de sommeil…
Après lui avoir souhaité une bonne nuit, je retournais dans mon sac de couchage. Dans les cinq minutes qui suivirent, j’étais endormi.
Finalement, nous ne reprîmes la route que trois jours plus tard, la pluie n’ayant pas cessé avant. Au matin du quatrième jour, profitant d’une éclaircie, nous rangeâmes nos bagages et reprîmes la route. J’avais un pincement au coeur en quittant cet endroit mais bientôt, la joie et l’excitation de découvrir d’autres endroits vint effacer mon amertume.
Nous marchâmes pendant deux jours avant de finalement prendre le bus jusqu’à Birmingham. Là, après une nuit à l’hôtel, nous prîmes le train jusqu’à Edimbourg. Hayden m’avait avoué avoir un ami là bas, et m’avait demandé si j’étais d’accord pour aller lui rendre visite. A ma mine renfrognée, il avait éclaté de rire en m’expliquant que cet ami n’était pas le moins du monde attiré par les hommes et qu’il n’avait jamais eu d’aventures avec lui. Partiellement rassuré, j’avais tout de même accepté.
Et après une petite semaine de marche, nous arrivâmes enfin à Fakland, une petite ville au nord d’Edimbourg. Après avoir demandé son chemin, Hayden nous conduisit jusqu’à une petite villa un peu en retrait de la ville. Là, il passa devant moi et alla frapper à la porte. Ce fut une jeune femme qui vint nous ouvrir et si Hayden parût surpris, il n’en laissa rien paraître. D’un ton poli, il demanda :
- Bonjour, est-ce que Darren MacKay est là, s’il vous plaît ?
- C’est de la part de qui ? Demanda la jeune femme, un peu sceptique.
- Hayden…
- Chéri ! Appela la jeune femme en se tournant vers l’intérieur. Un certain Hayden demande à te voir.
L’instant d’après, un colosse fit irruption dans l’encadrement de la porte et malgré moi, je ne pus m’empêcher d’esquisser un pas en arrière, effrayé par l’immense homme roux qui venait de faire son apparition.
- Par la barbe de Merlin ! S’exclama le dénommé Darren. Hayden ! Qu’est-ce que tu fais là, mon vieux !?
L’instant d’après, Hayden était happé par les deux bras les plus énormes que je n’avais jamais vu et fut soulevé de terre comme s’il ne pesait rien. A tout instant, je m’attendais à entendre ses côtes se briser, mais il était plus solide qu’il ne le laissait croire.
- Salut Darren ! Souffla Hayden en lui rendant son étreinte. Content de te voir vieux !
Leur embrassades s’éternisa avant qu’Hayden ne se souvienne de ma présence. Se tournant vers moi, il fit les présentations et si j’échappais à l’étreinte à laquelle avait eu droit Hayden, je ne pus refuser de lui serrer la main sans paraître impoli et lorsque ses doigts se refermèrent autour de ma main, je retins tant bien que mal un gémissement de douleur alors que mes os se broyaient sous sa poigne de fer.
C’est avec entrain que Darren nous invita à entrer chez lui et après nous avoir présenter sa compagne, Blair, il nous offrit à boire. Très vite, la discussion s’engagea entre Hayden et Darren tandis que j’allais rejoindre Blair à la cuisine, profitant d’une échappatoire pour m’échapper d’une conversation qui ne me concernait pas. Timidement je proposais à Blair de l’aider et très vite, la nous engageâmes la conversation sur tout et rien. Bientôt, j’appris qu’elle et Darren étaient sur le point de se marier. Plus qu’heureux pour eux, je la félicitais, lui souhaitant tous mes voeux de bonheur.
Le soir, nous fûmes conviés à rester dormir et lors du dessert, Darren, après avoir probablement reçu l’accord de sa future épouse, nous proposa de rester pour leur union, chose qu’Hayden s’empressa d’accepter avec une joie non feinte.
La soirée se traîna en longueur et épuisé, je ne tardais pas à m’endormir la tête calée contre l’épaule d’Hayden.
Le dimanche matin, nous nous préparâmes tous pour la cérémonies qui devait avoir lieu en fin de matinée. Alors que je m’habillais dans la salle de bain, Hayden fit subitement irruption, me faisant sursauter. Me tendant une chemise blanche et un pantalon noir, il déclara :
- Tien, met ça ! Et fait quelque chose pour tes cheveux ! Ajouta-t-il en avisant mes cheveux soigneusement peignés. Comme le matin quand tu te réveilles par exemple ! Ajouta-t-il, un sourire en coin étirant ses lèvres.
- Tu veux que j’ai l’air de sortir de mon lit ? M’exclamais-je, surpris.
- Ou du mien, de préférence ! Répondit-il avant de quitter la pièce comme il était venu, me laissant complètement stupéfait.
Alors que je réalisais la portée de ses paroles, je ne pus m’empêcher de rougir. Puis, reportant mon attention sur mon reflet je tentais de suivre son conseil avant d’enfiler les vêtements qu’il m’avait apporté. Et bien qu’ils soient des plus simples, je ne pus m’empêcher de contempler mon reflet.
Puis, après m’être assuré que tout était en ordre, je quittais la salle de bain et allais rejoindre tout le monde au salon. Lorsque j’arrivais, Hayden s’arrêta en plein milieu de sa phrase, m’observant avec une intensité qui me mit mal à l’aise. Je détournais alors les yeux en rougissant alors que Blair s’approchait de moi tout sourire.
- Tu es ravissant, Gwendal ! Déclara-t-elle.
Je lui adressais un petit sourire de remerciement puis nous nous mîmes en route.
C’était le premier mariage auquel j’assistais et malgré moi, je ne pus m’empêcher de me sentir ému lorsque les mariés se passèrent la bague au doigt avant de s’embrasser passionnément. Durant la fête qui suivit, je passais ma soirée à danser avec Blair ou Darren, ceux-ci m’ayant visiblement très vite adopté. Puis, lorsque vint le moment des slow, je regagnais ma place, laissant les jeunes mariés se retrouvaient. Le menton calé dans ma main, je les regardais danser avec une certaine envie, les images de mon premier et unique slow avec Hayden me revenant sournoisement à l’esprit.
Alors que je m’apprêtais à aller faire un tour dehors, je vis Hayden s’approcher de moi et je ne pus détourner mon regard de sa silhouette féline. Habillé d’un costume noir qui lui allait à merveilles, il était magnifique et son regard pétillait d’une lueur que je n’arrivais pas à définir. S’approchant de moi, il me tendit la main et, me regardant dans les yeux, un tendre sourire étirant ses lèvres, il demanda :
- Tu viens danser ?
Comme pour m’assurer que c’était bien à moi qu’il parlait, je regardais autour de moi et m’aperçus que j’étais seul à ce coin de la table. Rougissant, j’attrapais timidement sa main et il m’entraîna à sa suite sur la piste de danse, au milieu des couples tendrement enlacés. Puis, avec une tendresse qui ne cessait de m’étonner, il passa son bras autour de ma taille, m’attirant délicatement à lui. Timidement, j’enlaçais mes doigts aux sien tentant de ne pas rougir alors qu’il m’observait en souriant. Bientôt, guidé par Hayden, nous commençâmes à danser au rythme lent de la musique. Lentement, je finis par me détendre, me laissant complètement aller entre ses bras. La tête calée contre son torse puissant, les yeux fermés, je savourais les caresses aériennes des doigts d’Hayden qui passaient et repassaient dans mon dos, m’effleurant à travers ma chemise.
Je dus me faire violence pour ne pas frissonner sous ses caresses et, de bien être, je soupirais longuement.
- Ca va ? Me demanda Hayden.
- Oui, répondis-je dans un murmure.
Pour toute réponse, Hayden m’embrassa sur les cheveux.