Once in a lifetime - chapitre 10
Chapitre 10 par Shinigami
Durant la semaine qui suivit, nous nous éloignâmes, comme si nous fuyons la peste. Si j’avais toujours du mal à suivre le rythme imposé par Hayden, j’avais à présent une nouvelle motivation, habité par la crainte d’être un jour retrouvé et reconduit dans ma prison dorée. Cette peur me tenaillait au ventre et sans que je ne m’en rende compte, je finis par m’enfermer dans un mutisme qui ne me ressemblait pas. Assis contre un arbre, je tentais de me concentrer pour lire un des livres que j’avais emprunté à Hayden. Lorsque je m’étais rendu compte qu’il en avait dans son sac, je lui avais aussitôt demandé la permission de lui en emprunter un, permission qu’Hayden m’avait donnée en souriant.
Lorsque je vis Hayden s’asseoir à côté de moi, je lui adressais un petit sourire avant de reporter mon attention sur la page que je tentais de lire depuis cinq minutes déjà. Mais comme précédemment, je ne parvins pas à me concentrer. J’entendis vaguement Hayden soupirer bruyamment, mais je ne lui prêtais pas plus attention. Les yeux rivés sur le livre, les mots dansaient devant mes yeux et semblaient ne rien vouloir dire, alors que, perdu dans mes pensées, je songeais encore et toujours à ce qui se passerait si jamais mon père arrivait à me retrouver. Si la dernière fois j’y avais échappé, cette fois-ci, il me punirait bien plus sévèrement qu’en me forçant à épouser une femme dont je ne voulais pas.
Je voulais demander à Hayden de partir, je voulais lui demander qu’il m’emmène ailleurs, loin d’ici, en France par exemple, mais au fond de moi, je savais pertinemment qu’il n’accepterait jamais. C’est pourquoi je ne lui demandais rien, me contentant de le suivre sur ses sentiers qu’il connaissait.
Finalement, ce fut la voix d’Hayden qui me sortit de mes pensées :
- .. va pas, Gwen ?
- Hein ? Sursautais-je en l’entendant prononcer mon prénom, mais n’ayant rien entendu du début de la phrase.
- Qu’est-ce qui ne va pas ? Déclara-t-il, posant sur moi un regard grave et sérieux.
- Rien, m’empressais-je de répondre, détournant cependant le regard, je vais très bien.
- Arrête, on ne me la fait pas… Insista-t-il. Pas à moi. Qu’est-ce qui te tracasse ? Tu peux peut-être m’en parler…
A ces mots, je reportais mon attention sur lui et ancrais mon regard au sien, cherchant à déterminer s’il se moquait de moi ou pas. Mes yeux dans les siens, je tentais de le sonder, sans grand succès cependant, Hayden étant passé maître dans l’art et la manière de dissimuler ses sentiments.
N’ayant pas su déterminer à quoi pensait Hayden, je refermais mon livre en soupirant de lassitude, laissant ma tête partir en arrière, la posant contre le tronc d’arbre avant de me décider à lui répondre :
- Je suis en train de prendre goût à cette vie… Murmurais-je, surpris de m’être laissé aller à dire ces quelques mots que je n’avais jamais oser prononcer à voix haute.
Je m’étais retenu à temps… Emporté dans mon élan, j’avais failli lui avouer que cette vie n’était pas la seule chose à laquelle je m’étais attaché… Malgré moi, je m’étais aussi attaché à Hayden. En dépit de nos débuts difficiles, il avait toujours été là pour moi, m’acceptant dans sa vie et faisant tout un tas de concessions pour mon propre bien-être. Hayden était le genre de personne qui avait le coeur sur la main et j’avais appris à l’apprécier pour sa gentillesse et pour la personne qu’il était au fond de lui.
- Alors pourquoi ça ne va pas ? Demanda Hayden, une pointe de ce que je cru être de l’inquiétude dans la voix.
- Parce que j’ai peur que ça ne dure pas… Avouais-je en baissant les yeux, reportant mon attention sur l’herbe qui dansait au gré du vent.
- Pourquoi cela s’arrêterait ?
- Mon père ne baissera pas les bras, Hayden… Soupirais-je. Nous serons toujours en fuite jusqu’à ce qu’il réussisse à me rattraper.
Délicatement, avec une douceur que je ne lui connaissais pas, Hayden prit mon menton entre ses doigts et me fit relever la tête, m’obligeant à le regarder. Lorsqu’il fut certain d’avoir toute son attention, il déclara gravement :
- Ton père ne te possède pas, Gwen. Tu es libre de choisir ta vie. Quoi qu’il arrive, quelque soit le choix que tu fais, je serais là pour t’aider et te protéger. Je te le promets !
Son regard ne quittait pas le mien, et gêné de l’intensité avec laquelle il me regardait, je me mis à rougir. Fuyant son regard, je murmurais un faible “merci”, sentant toujours le regard d’Hayden ancré sur moi, refusant visiblement de me quitter. Sans que je ne sache pourquoi, mon coeur se mit à battre plus rapidement, cognant bruyamment dans ma poitrine et l’espace d’un instant, je craignais qu’Hayden ne l’entende. Jamais encore je ne m’étais sentis aussi vulnérable et mal à l’aise sous le regard de quelqu’un, et que cette personne soit Hayden me troublait plus que je ne l’aurais souhaité. Hayden était la première personne avec qui j’étais aussi lié, dans le sens où nous partagions nos vies, et en cet instant précis, mon manque d’expérience me parut d’autant plus cruel.
Hypnotisé par le regard envoûtant qu’Hayden posait sur moi, je ne pouvais détourner mon attention de lui, et ce, même lorsque je le vis s’approcher lentement de moi. Son regard posé sur mes lèvres ne laissait aucun doute sur ce qu’il avait en tête. Ce ne fut que lorsque son souffle chaud caressa mon visage, ses lèvres à seulement quelques millimètres des miennes que je retrouvais mes esprits et ma volonté. Affreusement gêné, je tournais la tête au moment où ses lèvres allaient se poser sur les miennes. Honteux comme jamais, je n’osais pas le regarder, tentant d’ignorer les battements frénétiques de mon coeur.
- Pardon, soupira Hayden en s’éloignant légèrement de moi. Je n’aurai pas du…
Si je ne compris pas la seconde phrase, je n’en laissais cependant rien paraître. Me tournant vers lui, je lui adressais un petit sourire timide avant de me lever, tentant tant bien que mal de dissimuler le trouble grandissant qui m’habitait. Pourquoi avait-il prononcé ces derniers mots ? Laissait-il sous-entendre que s’il s’apprêtait à m’embrasser c’était parce qu’il le voulait ? Mettant fin à mes pensées, mal à l’aise par ces sentiments indescriptibles qu’ils faisaient naître en moi, je tentais de détendre l’atmosphère et changeant délibérément de sujet, je demandais :
- Où va-t-on ce soir ? A l’hôtel ? Demandais-je plein d’espoir à l’idée d’un bon lit et d’une douche digne de ce nom.
- Non, répondit mon vis à vis avec un petit sourire. J’ai une connaissance à quelques heures de marche d’ici. On devrait y être ce soir. Il nous hébergera contre quelques jours de travail pour lui.
Ma mauvaise humeur revint au galop à cette réponse qui figurait en première place dans la liste des phrases que je ne souhaitais pas entendre.
- Ah… Répondis-je simplement, toute lueur espoir envolée, pas enchanté le moins du monde à cette idée.
A la limite, je préférerais même dormir dehors pendant le reste du mois. Cela me conviendrait bien mieux que d’aller encore une fois loger chez un homme que je ne connaissais pas et avec qui Hayden aurait envie de passer un bon moment.
- Et si ça devait arriver, ajouta mon aîné en m’adressant un sourire malicieux, comme s’il avait lu dans mes pensées, je serais discret, promis… Rit-il.
Pour ma part, cela ne me fit pas rire. Au contraire, cela renforça mon sentiment de malaise et taciturne, je m’éloignais de lui sans un regard afin d’aller rassembler mes affaires. Sans que je ne sache réellement pourquoi, je fut pris d’une subite envie de pleurer. Cependant, gardant mes état d’âmes pour moi, je refoulais ce sentiments, ignorant les noeuds de mon estomac et l’arrière goût amer dans ma gorge. Ce fut dans un silence gêné et morose que nous reprîmes la route.
Comme Hayden l’avait prédit, nous arrivâmes en fin de journée dans l’immense ferme de son ami répondant au prénom de Thomas. Prénom dont je gardais un souvenir loin d’être élogieux. D’un pas traînant, montrant ainsi à Hayden la motivation qui était la mienne à aller passer quelques jours chez son ami, je lui suivis à contrecoeur à travers la cour, regardant où je mettais les pieds. Ignorant royalement ma réticence, Hayden poursuivit son chemin et une fois arrivé sur le pas de la porte, il m’attendit patiemment. Si j’avais pu y aller à reculons, je l’aurais fait avec la plus grande joie. Cependant, ne pouvant faire attendre Hayden trop longtemps, j’accélérais sensiblement mon allure. Une fois à ses côtés, je poussais un soupir à fendre l’âme qu’Hayden ignora avec superbe, frappant à la porte.
Celle-ci ne mit pas longtemps à s’ouvrir et un énorme chien noir en bondit, me prenant comme cible. Effrayé, c’est de justesse que je retins un hurlement de terreur à la vue de l’énorme boule de poils qui fonçait sur moi. Inconsciemment, je me collais aussitôt à Hayden, cherchant sa protection.
- Hayden ! S’exclama alors une grosse voix grave que je devinais être celle de ce fameux Thomas. Quelle bonne surprise ! S’exclama-t-il. Tu tombes à pic. Mes moutons se sont échappés et si tu pouvais me donner un coup de main, ça me simplifierait les choses.
Brusquement, il s’arrêta lorsqu’il s’aperçut de ma présence derrière Hayden. Cependant, je ne prêtais aucune attention à lui, toute ma vigilance étant portée sur le chien.
- Tiens, déclara-t-il. C’est bien la première fois que tu viens accompagné. A qui ais-je l’honneur ? Demanda-t-il en attrapant son chien par le collier.
- Je m’appelle Gwendal, répondis-je simplement en m’éloignant légèrement d’Hayden, pas vraiment rassuré.
- Moi c’est Thomas, dit-il avec un sourire qui me déplut. Bon, on ne serra pas trop de trois, allons-y ! Ajouta-t-il en passant devant nous.
Après une longue course pour ramener tous les moutons dans leur enclos, Thomas nous proposa d’aller boire une limonade pendant qu’il préparait quelque chose à manger. Transpirant et épuisés, Hayden accepta pour nous deux. Assis à la terrasse, c’est avec plaisir que je savourais la fraîcheur de la boisson. Thomas ne tarda pas à nous rejoindre et s’installa à côté d’Hayden.
- Combien de temps comptez-vous rester ? Demanda-t-il à Hayden, alors qu’il posait sur moi un regard que je ne parvins pas à déchiffrer.
Sous l’insistance de son regard, je détournais les yeux, mal à l’aise. Encore un homme qui ne m’inspirait pas confiance. Cependant, je me gardais bien de faire part de mes craintes à Hayden, de peur de passer pour un paranoïaque.
- Quelques jours, si ça ne te dérange pas, répondit Hayden sans me concerter du regard.
- Bien sûr que non ! Vous tombez à pic, j’ai une montagne de choses à faire et un employé m’a fait faux bond.
- Marché conclu ! Répondit Hayden en souriant.
Le reste de la soirée se déroula tranquillement, mais toujours dans la mauvaise humeur pour moi. Après une douche qui me fit le plus grand bien, nous eûmes droit à un copieux repas avant de prendre le dessert dans le salon. Durant tout le temps que dura le repas, je ne décrochais pas le moindre mot, n’ayant aucunement envie de me mêler à leur conversation. De plus je n’aimais pas ce Thomas et j’espérais ainsi le faire comprendre à Hayden. Avec un peu de chance, il écourterait notre séjour. Mais ça, je ne comptais pas trop dessus…
Lorsque j’eu terminé de manger, n’ayant plus aucun prétexte pour rester auprès d’eux, je m’excusais du bout des lèvres et montais me coucher, sans un regard derrière moi. Je savais qu’Hayden passerait la nuit avec Thomas, mais intérieurement, je me surpris à vouloir qu’il reste avec moi. Retenant une nouvelle envie de pleurer, je fermais la porte derrière moi avant de m’effondrer au milieu du lit deux place qui, de toute façon, ne servirait qu’à moi ce soir, et sans doute les autres soirs aussi.
Déprimé, le moral à zéro, je me déshabillais et enfilais mon pyjama, l’esprit ailleurs. Sans trop savoir ce que je voulais, j’attrapais alors mon livre dans le sac d’Hayden et m’installais dans le lit, m’offrant le luxe de m’allonger au milieu en maigre compensation du vide que je ressentais en moi. Ouvrant le livre, je parcourais les lignes des yeux sans parvenir à comprendre la signification des mots qui s’enchaînaient. Tout cela n’avait aucun sens. Comprenant que je n’arriverais à rien ce soir, je refermais le livre et le coeur lourd, j’éteignis la lumière.
Les yeux rivés sur la fenêtre dont les volets étaient restés ouverts, je contemplais la lune et le ciel. Un faible sourire étira mes lèvres, accompagné d’un douloureux pincement au coeur au souvenir des nuits durant lesquelles Hayden avait passé des heures à m’apprendre le nom des constellations qui parsemaient le ciel. Abandonnant mon oreiller, je m’allongeais sur le ventre de l’autre côté du lit afin d’avoir une meilleure vue sur le ciel nocturne. Là sans que je ne puisse les retenir des larmes vinrent me brouiller la vue. Le coeur douloureux, songeant à Hayden, je fondis en larmes. Je devais me rendre à l’évidence… J’étais entrain de tomber amoureux de lui…
Mon coeur se compressa plus qu’il n’était possible à cette constatation et enfouissant mon visage dans les couvertures, je me laissais aller à pleurer toutes les larmes de mon corps.
Je ne saurais dire combien de temps je restais là, à pleurer, jusqu’à ce que finalement, vaincu par mes larmes et mon épuisement, je sombrais dans un sommeil profond et sans rêve. Je fus réveillé avec l’horrible sensation d’être secoué dans tous les sens, la voix paniquée d’Hayden me parvenant un moment après :
- Gwen ! S’exclama-t-il. Réveille-toi, nous devons partir !
A ces mots, je sursautais, avant de me redresser difficilement, encore à moitié endormis :
- Qu’est-ce qui se passe ? Demandais-je, d’une voix éraillée par mes larmes récentes et le sommeil.
- Il faut qu’on parte ! Maintenant ! Répéta-t-il sans prendre le temps de m’expliquer ce qui se passait.
- Pourquoi ? Quelle heure est-il ? Demandais-je, en voyant que la nuit était toujours noire.
- Ne pose pas de questions ! Habille-toi et dépêche-toi ! M’interrompit-il avec empressement. Nous ne sommes plus en sécurité ici.
Face à son aire grave et empressé, je compris qu’il avait du se passer quelque chose de sérieux. Cédant à la panique contagieuse d’Hayden, j’enfilais mes vêtements en un temps record tandis qu’il surveillait la porte. Puis attrapant nos deux sacs, il m’entraîna dans un course folle jusqu’à l’extérieur de la ferme. Et même lorsque nous fûmes dehors il continua de courir sans me lâcher la main, m’obligeant à suivre le même rythme effréné que lui. A bout de souffle, alors que j’allais demander à Hayden de ralentir, il le fit de lui-même, sans pour autant nous accorder de pause. Les poumons en feu, je tentais laborieusement de retrouver une respiration régulière, mon coeur tambourinant violemment dans ma poitrine.
Brusquement, il nous fit quitter la route, m’entraînant à sa suite dans les bois, ses doigts toujours fermement enroulés autour de mon poignet qu’il serrait douloureusement. Ce ne fut qu’après un temps qui me parût affreusement long qu’il consentit enfin à s’arrêter afin de nous laisser reprendre notre souffle. Lâchant alors nos sacs qui tombèrent sur le sol en un bruit étouffé, Hayden se tourna vers moi et avant que je ne réalise ce qui se passait, il me prit dans ses bras, m’enlaçant en une étreinte possessive qui m’effraya malgré moi. Que c’était-il passé pour qu’il soit dans un tel état ?
Aussi soudainement qu’il m’avait attiré à lui, il me repoussa vivement, comme si mon simple contact le brûlait. Ce geste me noua douloureusement la gorge, mais décidé à ne rien laisser transparaître de mes sentiments, me concentrant sur la colère qui grandissait en moi, je m’exclamais alors, furieux :
- Non mais je peux savoir ce qui te prend ? Pourquoi est-ce que l’on s’enfuit comme des voleurs au milieu de la nuit ? Qu’est-ce qui s’est passé ? M’exclamais-je, au bord de l’hystérie. Tu m’as fait une peur bleue !!
Pour toute réponse, Hayden s’adossa à un arbre et se laissa tomber au sol, gardant obstinément le silence. Face à son absence de réponse, comprenant que quelque chose n’allait vraiment pas, je me calmais et, inquiet comme jamais, je m’agenouillais près d’Hayden :
- Qu’est-ce qui s’est passé, Hayden ? Demandais-je, pour la énième fois, effrayé de ne pas savoir.
Je vis Hayden s’enfermer dans un mutisme qui m’inquiéta. M’efforçant de ne pas céder à la panique qui commençait à s’emparer de moi, je réitérais ma question, posant une main rassurante sur son épaule :
- Hayden… Qu’est-ce qui s’est passé chez Thomas ? Tu es pâle, est-ce que ça va ?
- Je l’ai tellement haïs, Gwen, lâcha-t-il finalement.
- Qui ? Demandais-je perdu, ne comprenant pas de qui il parlait ni où il voulait en venir.
- Je lui en ai voulu de m’avoir mis au monde… Continua-t-il, répondant indirectement à ma question, en prenant sa tête entre ses mains.
Le voir ainsi me compressa douloureusement le coeur.
- J’ai l’impression de ne pas avoir ma place ici… Je ne suis qu’un accident indésiré avec l’un de ses clients… Et finalement, je lui ressemble… Je suis même pire… Déclara-t-il, me laissant complètement perdu face à ses paroles décousues sans le moindre sens pour moi.
- De quoi est-ce que tu parles ? Demandais-je, déboussolé. Pourquoi est-ce que tu me dis tout ça ? Quel est le rapport avec le fait que l’on parte de chez Thomas au milieu de la nuit ?
Hayden s’obstinait à ne pas répondre à mes questions et pour un peu, j’en aurai hurlé de frustration. Alors que je m’apprêtais à lui poser une nouvelle fois la question, il déclara en une plainte à peine audible :
- J’ai fait pire que ma mère, j’ai fait pire que de la prostitution…
Cette réponse n’eut d’autre effet que de me serrer davantage le coeur. Que c’était-il donc passé pour qu’Hayden soit dans un tel état, pour qu’il se dénigre ainsi lui qui était si fier habituellement. Redressant la tête, je croisais son regard troublé. Echappant à ma main toujours posée sur son épaule, il déclara d’une voix monotone :
- Je vais marcher un peu, je te laisse t’installer ici… Je… Je reviens… J’ai besoin d’être seul.
Me laissant en plan, il se détourna de moi et commença à s’éloigner, m’abandonnant à mes peurs et mes interrogations restées sans réponses. De nouveau, la colère s’empara de moi. Pour une fois, cela ne se passerait pas comme Hayden l’avait décidé ! J’avais le droit de savoir et, sur mon honneur, je saurais ce qui avait bien pu troubler autant Hayden.
Le rattrapant, je l’incitais à se retourner d’une main sur son épaule. Ce n’est qu’une fois qu’il fut face à moi que je déclarais :
- Je te le demande une dernière fois Hayden, qu’est-ce qui s’est passé chez Thomas ? C’est quelque chose qu’il t’a dit sur ta mère ?
- N’insiste pas, Gwen, souffla-t-il.
Ces mots me blessèrent plus que je ne l’aurai souhaité. Pourquoi refusait-il de se confier à moi ? Avait-il si peut d’estime et de confiance en moi pour me parler ? Ignorant la boule qui se formait dans ma gorge, je m’exclamais, farouchement déterminé à avoir le fin mot de cette histoire :
- J’ai le droit de savoir ! Je veux t’aider… Ajoutais-je, d’une petite voix tremblante d’émotion.
- Je… Commença-t-il, hésitant, comme s’il cherchait ses mots. Thomas savait qui tu es Gwendal, déclara-t-il. Il a voulu te dénoncer…
- Ce n’est pas ça qui te met dans cet état, fis-je remarquer, commençant à connaître suffisamment bien Hayden pour savoir qu’il ne se serait pas laisser intimider par une menace.
- Il a menacé de s’en prendre à toi et…
A ces mots, mon coeur faillit louper un battement tandis qu’Hayden marquait une pause. Après un court silence, il ajouta :
- Je l’ai assommé et nous nous sommes enfuis…
Si Hayden refusa de me dire ce qui s’était passé, son silence parla pour lui. Je ne pouvais qu’émettre des suppositions, et toutes celles qui me venaient à l’esprit me touchèrent. Ainsi, tout cela était arrivé à cause de moi… Je me sentais tellement coupable… Par égard pour Hayden, je n’insistais pas plus et avant que je ne réalise entièrement la porté de mon geste, je l’attirais doucement à moi. Docilement, Hayden posa sa tête contre mon épaule. Brusquement, Hayden s’effondra en larmes. Lui, d’habitude si fort semblait aussi fragile qu’un enfant.
Jamais encore je n’avais vu Hayden dans un tel état de détresse et cela m’effraya. Il avait toujours été le plus fort d’entre nous. Il était celui qui me protégeait des autres, celui qui veillait sur moi et, ce brusque inversement des rôles me terrifiais. Jamais je n’avais été confronté à une telle situation. J’avais toujours été celui que l’on consolait, et me retrouver dans le rôle inverse était quelque chose de nouveau et effrayant. J’avais peur de ne pas savoir m’y prendre avec lui, de ne pas trouver les mots justes. C’est pourquoi je restais silencieux, me contentant de le garder près de moi, tandis que je caressais son dos en une timide tentative d’apaisement.
Pour la première fois depuis que nous voyagions, ce fut moi qui préparais notre lit. Aucun mot ne fut échangé et lorsqu’il se fut couché, il se colla tout contre moi, enfouissant son visage dans mon cou. Malgré le trouble qui m’habitais à le sentir si proche de moi, je ne le repoussais pas, savourant la chaleur de son corps tout contre le mien. Alors que je le sentis s’endormir, son corps se faisant plus lourd contre le mien, je me laissais aller à pleurer, libérant les sanglots que j’étais parvenu à contenir jusqu’à maintenant. Je me sentais tellement coupable… Je savais qu’il n’y avait plus qu’une seule solution face à ce problème que je représentais, mais rien que d’y songer, mon coeur se compressait douloureusement dans ma poitrine. Je ne pouvais pas… Je ne voulais pas abandonner cette liberté, pas plus que je ne voulais quitter Hayden…
Finalement, épuisé par mes larmes et les événements de cette nuit, je finis par m’endormir, bercé par la respiration calme et régulière d’Hayden.
Lorsque je me réveillais le lendemain matin, le jour était à peine levé. Contre moi, je pouvais sentir le corps chaud d’Hayden et les événements de cette nuit me revinrent en mémoire en même temps que ma tristesse. Jamais encore je ne m’étais sentis aussi perdu et bouleversé.
Il ne fallut pas longtemps à Hayden pour se réveiller à son tour. Terrifié à l’idée qu’il puisse s’éloigner de moi, ne voulant pas le laisser partir, je raffermis ma prise autour de lui, m’accrochant à sa chemise comme si ma vie en dépendait. Ce fut avec un soulagement non feint que je sentis Hayden répondre à mon étreinte, m’attirant davantage tout contre lui, me serrant entre ses bras puissants et protecteurs.
Dans un sanglot étouffé, je murmurais alors :
- Je suis désolé… Tout est de ma faute…
A ces mots, Hayden s’écarta de moi et ancrant son regard dans le mien, il déclara gravement :
- Jamais, tu m’entends ! Ne pense jamais que ce qui est arrivé hier était de ta faute.
- Bien sûr que si ! Rétorquais-je vivement, ne pouvant retenir mes larmes. Si je n’avais pas choisis de venir avec toi, jamais rien ce tout cela ne serait arrivé. C’est moi qui t’ai mis dans cette situation. Je te mets en danger… Je pense qu’il vaut mieux que je rentre chez moi, Hayden… Ajoutais-je en détournant les yeux, ignorant les protestations de mon coeur qui se brisait à l’idée de devoir renoncer à Hayden et à ma liberté.
Comme pour m’empêcher de mettre mon plan à exécution, Hayden raffermis la prise de ses bras autour de mon corps, m’empêchant toute tentative de fuite.
- Tu restes avec moi, Gwendal, tu ne repartiras pas là-bas ! Décréta-t-il, intraitable. Je t’en ai fait la promesse.
- Ta promesse te coûte trop cher, répliquais-je, sans chercher à me soustraire de son étreinte, profitant au contraire de sentir sa présence rassurante. Tu en as déjà fait assez pour moi. Je ne peux pas t’en demander plus…
Hayden s’écarta alors de moi. Se redressant, il ancra son regard au mien, son visage à quelques centimètres du mien.
- Ce qui est arrivé n’est pas de ta faute, mais uniquement de la mienne, déclara-t-il d’un ton sans appel. Je ne me méfie pas assez des gens Gwen. Et puis c’est trop tard. Nous avons fait notre choix en connaissance de cause. On savait que nous serions en fuite et que ton père ne te laisserait pas en paix. Ce qui vient de se passer est un accident. Ne rend pas cet accident comme étant la cause de ton départ où alors, tout ce que nous avons fait jusqu’à maintenant n’aura servi à rien. Je veux que tu restes à mes côtés, que tu t’épanouisses. Que tu découvres tous les bons côtés de la vie que je mène. Je veux que tu découvres la liberté Gwen… Tu as encore tellement à découvrir… Et lorsque ce sera fait… A ce moment seulement, alors, tu pourras envisager à nouveau la question de rentrer chez toi.
- Mais je ne veux pas rentrer chez moi, soufflais-je dans un gémissement douloureux. Hayden, je me sens tellement coupable de…
Je fus coupé en plein milieu de ma phrase par quelque chose de chaud et humide qui se posait sans brusquerie aucune sur mes lèvres. Sous le coup de la surprise, je cessais presque de respirer alors que la langue d’Hayden glissait lentement sur mes lèves. Une de ses mains passa sur ma nuque pour me rapprocher de lui tandis que l’autre se posait dans mon dos, m’arrachant un frisson. Timidement, mettant de côté ma gêne et ma pudeur, j’entrouvris légèrement les lèvres. Répondant au quart de tour mais toujours avec cette tendresse particulière, sans la moindre précipitation, il laissa sa langue se glisser entre mes lèvres entrouvertes et partir à la recherche de la mienne. Lorsqu’il la trouva, il la caressa avec une douceur qui me fit tressaillir. Timidement, je finis par me laisser guider par l’expérience d’Hayden, et avec hésitation, je laissais ma langue répondre aux caresses de sa jumelle.
Le fait qu’Hayden ne fit aucun mouvement brutal, ne cherchant jamais à me forcer à aller plus loin ou à approfondir davantage notre échange m’aida à me détendre et à apprécier ce baiser. Perdu dans un océan de sensations nouvelles que je n’avais encore jamais éprouvé auparavant, je m’accrochais à la chemise d’Hayden afin de ne pas me laisser emporter et trouvant là une prise pour garder pied dans la réalité.
C’est à contrecoeur que je me séparais d’Hayden lorsque l’air vint à nous manquer. Le souffle court, je m’empourprais alors face à mon audace et atrocement gêné, je détournais le regard, tandis qu’Hayden m’observait avec un certain amusement, un sourire que je qualifierais presque de tendre étirant ses lèvres rougies. Délicatement, il passa une main sur mon visage, replaçant une mèche de cheveux derrière mon oreille en laissant ses doigts caresser ma joue au passage.
Allongés l’un en face de l’autre, nous restâmes silencieux un moment, alors que je me laissais aller à fermer les yeux, repassant dans ma tête l’instant de tendresse que nous venions de partager. Dans ma poitrine, mon coeur battait à toute allure sous l’effet du bien-être que je ressentais en cet instant alors que je m’interrogeais sur le pourquoi de ce baiser et sa signification.
D’un commun d’accord, nous décidâmes qu’il était temps de se lever. Après un petit déjeuner frugal, j’allais m’habiller à l’abri des regards indiscrets. Comme chaque matin depuis une semaine, je constatais que mon pantalon se faisait de plus en plus grand… Il devenait urgent que je trouve un moyen de l’attacher sous peine de me retrouver un jour avec le pantalon sur les chevilles. Honteux, je m’empressais de dissimuler mon corps laid et trop maigre sous ma chemise qui, elle aussi, commençait à se faire trop grande.
Alors que, part respect pour moi, Hayden allait s’habiller un peu plus loin, je cherchais dans son sac quelque chose qui aurait pu maintenir mon pantalon en place. Avisant un lacet, je m’en emparais avant de tout remettre en place, en entendant Hayden revenir. Je mis précipitamment l’objet de mon délit dans ma poche et retournais vaquer à mes occupations. Nous fîmes nos sacs et reprîmes la route. Nous allions définitivement quitter la région. Selon Hayden, plus nous serions loin, plus facilement nous trouverions la paix. Il envisageait même de prendre un bus ou un train pour nous éloigner au plus vite et cette idée m’enchanta.
Alors que nous marchions depuis une petite heure, marchant aux côtés d’Hayden et non pas derrière lui comme à mon habitude, je l’appelais d’une petite voix hésitante :
- Hayden…
- Hn ? Souffla-t-il en se tournant vers moi.
- Même si je t’ai promis de ne plus te questionner sur ton passé… Je… Je voulais que tu saches que je suis toujours là pour t’écouter. Et… Si tu veux un jour me raconter, je ne te jugerais jamais, déclarais-je timidement.
Pour toute réponse, Hayden m’offrit un sourire sincère qui me toucha plus qu’il n’aurait du. D’un geste si rapide que je ne le vis pas venir, il passa son bras autour de mon cou, m’attirant brusquement à lui, il déclara :
- Je suis content de t’avoir comme compagnon de voyage, Gwen !
Puis, dans un rire, il ajouta :
- Si tu me connaissais vraiment, Gwen, tu serais déjà en train de courir chez ton père !
- Je suis sûr que tu n’es pas aussi horrible que tu penses l’être, déclarais-je sérieusement en reportant mon attention sur lui. Tu es quelqu’un de bien !
Hayden m’adressa un sourire avant de me libérer de son étreinte. Une fois libre, nous reprîmes la route sur un ton plus léger. Après la courte nuit que nous avions eut, la fatigue ne tarda pas à se faire ressentir. Cependant, comprenant le désir d’Hayden se s’éloigner au maximum de cet endroit, je ne me plaignis pas, me forçant à suivre le rythme imposé. Mais malgré toute ma bonne volonté, je ne tardais pas à faire des pauses qui n’échappèrent pas à l’attention d’Hayden qui me proposa alors de s’arrêter dans un refuge abandonné qu’il semblait bien connaître, afin de nous reposer quelques jours. L’idée m’enchanta au plus haut point et oubliant momentanément ma fatigue, je repris la route, accélérant le pas, ignorant les protestations de mon corps.
Il faisait nuit lorsque nous arrivâmes enfin au refuge. Comme l’avait dit Hayden il était abandonné et mal entretenu, mais cela serait bien suffisant. Tant que je pouvais me reposer, le reste n’avait pas la moindre importance. Au vue de la fraîcheur de la nuit, Hayden me proposa de faire un feu et dormir dehors pour profiter du ciel étoilé. Plus que ravi, j’acceptais avec enthousiasme, mettant mon épuisement de côté. Pendant qu’Hayden s’occupait de faire démarrer le feu, je mis en place notre couchette, cherchant le coin le plus confortable pour étaler les couvertures. Puis, Hayden alla ramasser un peu de bois avant de préparer notre repas du soir. Après s’être rempli le ventre d’un bon repas chaud, nous nous installâmes tous deux près du feu.
Me couchant dans notre lit improvisé, je fis tout de même attention à ne pas être trop prêt d’Hayden, ne sachant pas comment me comporter vis à vis de lui après le baiser que nous avions échangé ce matin même. Finalement, ce fut Hayden qui esquissa le premier geste pour nous rapprocher. Il passa son bras autour de ma taille et m’attira tout contre lui. A l’instant ou son bras s’était posé sur mes hanches, j’avais retenu ma respiration, me tendant malgré moi. Cependant, je ne le repoussais pas et fini par me détendre lorsque je fus certain qu’il n’irait pas plus loin. Ignorant les noeuds de mon estomac, je m’installais plus confortablement contre lui, calant ma tête sur son bras avant de reporter mon attention sur le ciel étoilé. Après avoir repéré celles que je connaissais déjà, je lui demandais de m’en apprendre une nouvelle, chose qu’il fit avec un plaisir évident. Peu à peu, le silence vint s’installer entre nous. Alors que je m’apprêtais à m’endormir, Hayden se redressa pour alimenter le feu. Réveillé, je ne pu retenir un gémissement de mécontentement à être ainsi dérangé. Finalement, Hayden vint se rallongea, mais à présent, le sommeil me fuyait.
- Gwen, appela alors Hayden, brisant le silence apaisant de la nuit.
- Hn ? Soufflais-je, renonçant à trouver le sommeil.
- Qu’est-ce que tu aimerais faire ? Demanda-t-il.
- Comment ça ? Demandais-je sans cacher mon incompréhension, ne comprenant pas le sens de sa question.
- C’est toujours moi qui choisi où l’on va et ce qu’on fait, mais j’aimerais savoir ce que toi tu veux faire ou bien où tu veux aller, m’expliqua-t-il.
- Je… J’aurais bien aimé aller en France, avouais-je, hésitant, sachant parfaitement que cette réponse ne plairait pas à Hayden.
A ces mots, je sentis Hayden se tendre et ne souhaitant aucun mal entendu entre nous, je m’empressais d’ajouter :
- Mais je sais que c’est loin d’être une destination rêvée pour toi alors, pourquoi pas l’Ecosse ? Proposais-je, me rabattant sur la seconde destination de mes rêves.
- Va pour l’Ecosse, répondit-il visiblement soulagé que je n’insiste pas.
Le silence revint à nouveau nous envelopper jusqu’à ce que, ma curiosité éveillée, je finisse par demander :
- Est-ce que j’ai le droit de te poser une question ? Une seule…
- Vas-y, soupira-t-il. Mais je ne te promets pas de te répondre.
- Tu n’as jamais cherché à savoir qui était ton père ?
A ces mots, Hayden partit à rire, avant de répondre :
- Gwen, ma mère était une prostituée. Elle couchait avec des tas de mecs chaque soir alors partir à la recherche de mon père, c’est une mission impossible. Et puis, même si j’en avais la possibilité, je ne voudrais pas savoir.
- Pourquoi ? Demandais-je, intéressé. Tu n’es pas curieux ? Ca ne te manque pas de ne pas avoir de père ?
- Je ne sais pas ce que c’est, déclara-t-il simplement. Alors comment ça pourrait me manquer. Gwen, je crois qu’il vaut mieux que tu considères que je n’ai pas eu de parents. Ma mère ne s’est jamais occupé de moi et la plupart du temps les rôles étaient inversés…
- Comment ça ? Demandais-je, un peu perdu.
- J’étais d’accord pour répondre à une question, Gwen, pas dix. Pourquoi tu es aussi intéressé par le fait de connaître mon passé ? Demanda-t-il patiemment.
- Chercher à se connaître, c’est ce que font les gens normaux, répondis-je, simplement.
- Nous ne sommes pas normaux, s’exclama Hayden en riant.
- Qu’est-ce que tu sous-entends par là ? Demandais-je, ne comprenant pas vraiment le sens de sa phrase.
- Un fils de prostituée et un garçon de noble famille qui parcourent les routes ensembles Gwen, c’est pas vraiment commun ! Renchérit-il.
Je ne répondis pas tout de suite, songeant à ce qu’il venait de me faire prendre conscience. Puis, après un court silence, je repris, hésitant :
- Je suis sûr que ta mère était plus qu’une prostituée, tu as l’air de tout le temps la dénigrer. Elle n’a juste jamais su te montrer qu’elle t’aimait.
- Elle ne m’aimait pas Gwendal ! Soupira Hayden. Une droguée n’aime personne… Juste sa drogue.
Sa voix se noua sur ces derniers mots et avant que je n’ai le temps de répliquer quelque chose, il déclara :
- Maintenant, j’aimerais vraiment qu’on change de sujet, d’accord ?
- Désolé, murmurais-je à la fois gêné et peiné, réalisant alors seulement combien ce sujet devait être difficile pour Hayden.
Avant de réalise entièrement mon geste, je me tournais alors vers lui et posais ma main sur son torse avant de caler ma tête au creux de son épaule, respirant son odeur masculine. S’il parut surpris, Hayden ne dit rien et bientôt, son bras à présent libre, il posa sa main dans mon dos.
- Bonne nuit, murmura-t-il.
- Bonne nuit, Hayden, soufflais-je en fermant les yeux, me laissant aller au bien-être qui s’emparait de moi.
Il ne me fallut pas longtemps pour trouver le sommeil et bercé par la respiration calme et régulière d’Hayden, je sombrais dans un sommeil profond et sans rêve.
Lorsque j’ouvris les yeux le lendemain, le soleil était déjà haut dans le ciel. Ebloui, je papillonnais des yeux pour m’habituer à la clarté environnante et me réveillant lentement, je manquais de sursauter en sentant mon matelas bouger sous moi. Surpris, je pris alors conscience que j’étais allongé tout contre Hayden, mon visage reposant au creux de son épaule, mes doigts fermement crispés sur le t-shirt qui lui servait de pyjama. Délicatement, je me redressais sur un coude afin de le surplomber juste assez pour observer son visage. Ainsi endormi, les traits détendus, il était beau…
Rougissant de mes propres pensées, je me libérais délicatement de son étreinte afin de ne pas le réveiller. Sans bruit, j’attrapais des affaires propres et mon nécessaire de toilette. Puis, profitant du sommeil d’Hayden, je courrais jusqu’à la rivière afin de me laver tranquillement, sans craindre de le voir débarquer à l’improviste. Une fois au bord de l’eau, j’entrepris de me dévêtir, évitant cependant de m’attarder trop longtemps sur mes côtes un peu trop saillantes à mon goût. Puis, mon savon et mon shampoing en main, j’entrais dans l’eau. Au contact entre l’eau glaciale et ma peau encore toute chaude de sommeil, je réprimais tant bien que mal un cri de surprise alors que tout mon être se mettait à frissonner. Prenant mon courage à deux mains, je retins mon souffle et fermant les yeux, je plongeais dans l’eau pour en ressortir l’instant suivant, complètement mouillé. Là, j’attrapais mon shampoing et me savonnais vigoureusement les cheveux avant de les rincer et de m’attaquer à ma toilette.
Ce fut la désagréable impression d’être observé qui me fit me retourner. Et lorsque mon regard se posa sur Hayden qui me contemplait de la berge, je restais, l’espace d’un instant, pétrifié et incapable du moindre mouvement. Puis, retrouvant mes esprits, je fis la première chose qui me venait à l’esprit et, honteux comme jamais, je plongeais dans l’eau, me recroquevillant sur moi-même, tentant de me dissimuler de son regard insistant.
- Tu aurais pu me dire que tu étais là ! M’exclamais-je, furieux qu’il m’ait ainsi observé à mes dépends. Pervers ! Dégage ! Hurlais-je.
Quelle ne fut pas ma surprise lorsque, au lieu de s’éloigner, Hayden commença à retirer ses vêtements. Une fois dévêtu, m’adressant un regard amusé, il entra à son tour dans la rivière. Puis, sans plus se préoccuper de moi, il entreprit de se laver. Honteux, je détournais la tête, m’efforçant à garder Hayden hors de mon champ de vision et malgré les frissons glacés qui commençaient à s’emparer de moi, je ne bougeais pas, restant obstinément dans l’eau.
Hayden se tourna alors vers moi et, amusé, il s’exclama :
- Tu sais Gwen, tu n’as vraiment rien à cacher… Tu ne devrais pas avoir honte de son corps. Tu es beau…
A ces mots, je ne pu m’empêcher de m’empourprer violemment, gêné par le compliment qui, bien qu’il ait été dit dans un but gentil, était totalement erroné. Comment pouvait-il trouver beau ce corps devenu beaucoup trop maigre que je ne reconnaissais plus ? Avait-il dit cela pour se moquer de moi ?
Terriblement gêné, je me recroquevillais davantage dans l’eau, me mordant les lèvres pour ne pas claquer des dents.
- En plus, ajouta Hayden, nous sommes fait pareil, alors…
Sans plus de cérémonies, il reprit ce qu’il était en train de faire, se détournant de moi. Comment pouvait-il être aussi à l’aise alors qu’il était complètement nu ? Lorsqu’il fut propre, il sortit de l’eau et attrapant sa serviette, il se sécha vigoureusement. Sans que je ne puisse m’en empêcher, mon regard se posa alors sur le corps nu d’Hayden. Malgré ma gêne, j’étais incapable de détourner les yeux. Il avait un corps magnifique… Bien plus beau que le mien… Sa peau dorée par le soleil contrastait avec la mienne trop pâle, ses muscles roulaient sous sa peau et son corps était parfaitement bien proportionné, ni trop maigre ni trop gros. Juste parfait… Me comparant à lui, je ne pus m’empêcher de me sentir un peu jaloux. Comment faisait-il pour rester ainsi, alors que quelques jours de marche suffisaient à me faire perdre suffisamment de poids pour ressembler à un enfant du tiers-monde ?
Je réalisais que mon regard était toujours posé sur Hayden lorsque je le vis m’observer avec un amusement certain, visiblement satisfait. Plus honteux que jamais, craignant qu’il interprète mal mon comportement, je m’empressais de détourner les yeux, sentant mes joues s’empourprer violemment.
- Et après tu dis que c’est moi le pervers, déclara-t-il en riant. Tu devrais sortir de l’eau, Gwendal, ajouta-t-il. Tu vas attraper la mort à rester sans bouger, l’eau est glacée.
Mortifié, je n’esquissais pas le moindre mouvement. Si j’avais pu me noyer en cet instant précis, j’aurais sauter sur l’occasion de le faire. Hayden acheva de s’habiller et à mon plus grand soulagement, il déclara :
- Je vais préparer le petit déjeuner, je t’attends pour manger.
Je ne répondis rien mais ne bougeais pas d’un pouce avant qu’il ne soit parti. Lorsqu’il eut disparut de mon champ de vision, je me précipitais hors de l’eau. Frigorifié, claquant des dents à me les fendre, je m’enveloppais dans ma serviette et entreprit de me sécher vigoureusement, tentant de réchauffer mon corps glacé. Il me fallut bien cinq minutes pour que le sang recommence à couler dans mes veines et que je puisse m’habiller. Durant tout le temps que je passais à me préparer, je ne pus m’empêcher de me sentir en colère contre Hayden. Pourquoi devait-il toujours surgir au mauvais moment et surtout, pourquoi s’amusait-il toujours à me mettre dans l’embarras ? Cela l’amusait-il tant que ça de me voir perdre mes moyens ? Pourquoi devait-il toujours trouver un moyen pour m’humilier ?
C’est en colère contre lui que je retournais au chalet. Là, j’étendais ma serviette au soleil pour la faire sécher et avisant Hayden, je lui adressais un regard noir. Durant tout le repas, je ne décrochais pas un mot, lui faisant clairement comprendre que je n’étais pas disposé à lui adresser la parole et encore moins à lui pardonner. Après le repas, j’allais chercher le livre qu’il m’avait prêté et allais m’installer dans un coin un peu plus loin tandis qu’Hayden entreprit de nettoyer la cabane.
Plongé dans ma lecture, je ne vis pas le temps passer. J’allais me lever lorsque je vis Hayden se diriger vers moi. Aussitôt, je reportais mon attention sur mon livre encore ouvert, l’ignorant totalement, feignant de lire afin de ne pas avoir à lui parler. Agacé, Hayden demanda :
- Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi est-ce que tu boudes Gwen ?
Comme s’il ne savait pas… Pas disposé le moins du monde à lui parler, je ne répondis rien, m’enfermant dans un mutisme délibéré.
- Je vais préparer à manger… Soupira-t-il avant de s’éloigner.
Discrètement, je relevais la tête je le vis s’affairer à ranger nos affaires dans la cabane. Ma colère contre Hayden avait finalement fait place à une grande lassitude. Le moral à zéro, je le rejoignis lorsqu’il m’appela pour passer à table. Il avait préparé une soupe accompagnée de viande et de fromage et c’est seulement à la vue du repas que je me rendis compte à quel point j’étais affamé. Murmurant un “merci” à peine audible, j’entamais mon repas avec appétit. Je mangeais sans prononcer le moindre mot quand, brisant le silence, Hayden demanda :
- Que dirais-tu de rester ici quelques temps ?
- Pourquoi pas, répondis-je simplement après un temps de réflexion.
- J’irais faire quelques courses demain pour que l’on soit tranquille pour quelques temps, ajouta-t-il. Nos provisions sont à sec. Tu restera ici pour garder nos sacs et surtout te reposer. Ca te conviens ?
- Oui, répondis-je simplement.
A vrai dire, c’est à peine si j’écoutais ce qu’il me disait, trop aveuglé par la rancoeur que je ressentais vis à vis de lui. Subitement, Hayden se redressa brusquement en s’exclamant :
- Qu’est-ce que tu peux être pénible quand tu t’y mets Gwen.
Et sans plus de cérémonies, il se dirigea vers le feu, me laissant seul à notre table improvisée, tandis que je restais immobile. Je n’avais plus faim… Me levant à mon tour, je jetais le reste de mon assiette et celle d’Hayden et rassemblant la vaisselle sale, je la posais dans le seau d’eau avant de ranger les restes de notre repas. Une fois fait, j’allais rejoindre Hayden, toujours en silence. Là, je m’installais de mon côté du lit, bien décider à mettre un terme rapidement à cette horrible journée. Bientôt, Hayden vint me rejoindre et alors qu’il esquissait un mouvement pour me prendre dans ses bras, je me détournais de lui, lui tournant le dos, l’ignorant totalement. J’entendis Hayden soupirer bruyamment mais il ne fit aucun commentaire.
Le sommeil tarda à venir, se refusant à moi et je dormis très mal cette nuit là, me réveillant toutes les heures. A l’aube, j’entendis Hayden se réveiller et quitter le lit le plus silencieusement possible. Fermant les yeux, je feignais le sommeil afin de ne pas avoir à supporter ses moqueries et ses reproches dès le matin. Je l’entendis s’affairer un instant autour de moi, allant et venant avant de finalement attraper son sac et partir.
Finalement, je dus finir par m’endormir, car lorsque j’ouvris les yeux de nouveau, le soleil était déjà haut dans le ciel. Repoussant les couvertures, je m’étirais longuement avant de consentir à me lever. Je réalisais alors à quel point tout était silencieux autour de moi et le départ d’Hayden pour la ville me revint en mémoire. Je poussais alors un profond soupir, soulagé de ne pas avoir à revivre une journée comme hier à ses côtés. Entrant dans la cabane, je me préparais un petit déjeuner succinct et avisais le mot qu’Hayden avait laissé. Il ne rentrerait pas de la journée.
Un nouveau soupir s’échappa de mes lèvres et une fois rassasié, j’allais ranger les duvets à leur place puis, attrapant mes affaires de toilette et des vêtements propres, j’allais à la rivière et comme hier, je pris une douche rapide. Une fois propre et habillé, je cherchais quelque chose à faire, mais je dus bien vite me rendre à l’évidence, je m’ennuyais…
L’après-midi qui passa fut la plus longue de toute mon existence. Jamais encore je ne m’étais ennuyé à ce point et, je devais bien l’admettre, Hayden me manquait… En début de soirée, me doutant bien qu’Hayden ne devrait plus tarder à rentrer, je voulu lui faire plaisir et décidais de préparer le repas. M’approchant du foyer, j’entrepris d’allumer un feu. Cependant, j’eus beau reproduire les gestes de Hayden, rien n’y fit.
Je ne su combien de temps je restais là à essayer d’allumer un feu qui refusait catégoriquement de s’allumer. De plus, le temps passait et je n’avais toujours aucune nouvelle d’Hayden. Bientôt, mon inquiétude fit place à une réelle angoisse. Et s’il lui était arrivé quelque chose ? Alors que, de rage, j’allais jeter mon bout de bois, j’entendis la voix d’Hayden dans mon dos, me faisant sursauter :
- Est-ce que tu aurais besoin d’aide ? Demanda-t-il en s’approchant de moi.
Me tournant vers lui, la rage au coeur, je jetais violemment mon bâton dans le foyer du feu et m’exclamais furieux, une subite envie de pleurer s’emparant de moi :
- Je n’y arriverais jamais ! M’exclamais-je. Ca fait deux heures que je m’acharne sur ce maudit feu et je n’y arrive pas ! Et toi ! Ajoutais-je en reportant mon attention sur lui, laissant libre court à toute l’angoisse que j’avais ressentis. Qu’est-ce que tu faisais ?! J’étais mort d’inquiétude de ne pas te voir revenir !
- Calme-toi Gwen… Répondit-il simplement. Ca a juste pris plus de temps que prévu, ajouta-t-il calmement alors que je manquais de céder à la crise de nerf. Tu sais bien que je ne t’aurai jamais abandonné, ajouta-t-il.
- Mais il aurait pu t’arriver quelque chose, gémis-je, subitement calmé. Peut-être que Thomas aurait pu te retrouver ou, je ne sais pas…
- Je vis seul depuis des années, Gwendal, tenta-t-il de me rassurer. Et même s’il y a des risques, il ne m’est jamais rien arrivé…
- Menteur, soufflais-je en le regardant d’un air accusateur. Quand on s’est rencontré, on venait de te poignarder…
- Et je suis toujours vivant, Gwen… Je suis là… Déclara-t-il d’une voix douce, comme pour m’apaiser.
Il ne m’en fallut pas plus pour m’effondrer en sanglots, libérant ces larmes que j’avais trop longtemps retenues. Enfouissant mon visage entre mes mains, je pleurais sans pouvoir m’arrêter. Noyé dans mes sanglots, je ne vis pas Hayden s’approcher de moi, ne me rendant compte de sa présence que lorsqu’il me prit entre ses bras et m’attira doucement à lui. Rassuré par la douce chaleur de son étreinte, je me laissais aller contre lui, oubliant momentanément ma colère et ma rancoeur. Entourant ses bras autour de ma taille, une de ses mains me caressant le dos en signe d’apaisement, il murmura :
- Il ne m’arrivera rien, Gwendal…
C’est mots firent redoubler mes sanglots. Comment pouvait-il dire ça ? Comment pouvait-il ainsi ignorer la peur et l’angoisse que je ressentais à l’idée de le perdre… Surtout depuis que je m’étais rendu compte que mes sentiments pour lui semblaient évoluer au fils du temps.
- Tu ne peux pas dire ça… Déclarais-je entre deux sanglots. Tu ne sais pas…
Malgré mes pleurs, je sentis Hayden me serrer davantage contre lui, sa main passant dans mon dos en une caresse réconfortante. Le visage enfoui dans son cou, mes mains fermement agrippées à sa chemise, je mis un temps fou à me calmer, me libérant de toute l’angoisse qui avait été la mienne durant ces dernières heures. Lorsque mes sanglots se tarirent, je ne fis aucun mouvement pour m’arracher à l’étreinte d’Hayden, savourant sa chaleur contre moi et la présence rassurante de ses bras puissant autour de mes hanches. Bientôt, mon ventre se mit à gargouiller, brisant la magie de l’instant. Le rouge me monta aux joues et me repoussant gentiment, Hayden déclara avec un sourire :
- Et si je t’apprenais à allumer un feu et que l’on préparait à manger ?
J’acquiesçais silencieusement. Patiemment, Hayden m’apprit à allumer un feu et, une fois la technique enregistrée, j’y parvins sans la moindre difficulté. Cependant, ma rancoeur n’étant pas tout à fait éteinte, je gardais une certaine distance entre nous. Alors qu’il sortait les provisions de son sac et me laissais le choix de ce que je voulais manger, il demanda, sa voix s’élevant claire et nette dans le silence de la nuit :
- Et si tu me disais maintenant ce qui ne va pas ?
- Je voulais te punir, répondis-je gêné, après un court silence.
- Me punir ? Répéta Hayden, surpris. Mais de quoi ?
- Parce que je t’en veux de t’être moqué de moi… Avouais-je en détournant le regard.
A ces mots, Hayden partit à rire.
- A cause de la rivière ? Demanda-t-il entre deux éclats de rire.
Vexé de le voir se moquer de moi encore, je me contentais d’hocher la tête. Et Hayden partit à rire plus fort.
- Tu vois ! M’exclamais-je, irrité. Tu le fais encore ! Tu te moques de moi, ajoutais-je, avec une moue boudeuse.
Cessant aussitôt de rire, Hayden posa sur moi un regard particulièrement tendre qui me troubla, avant de reprendre sérieusement :
- Tu sais Gwen, il faut que tu apprennes à avoir de l’humour sur toi-même et ne pas être susceptible comme ça. Je ne l’ai vraiment pas fait méchamment. Mais je m’excuse si ça t’a blessé… S’il te plaît, ajouta-t-il, à l’avenir, dis-moi quand tu trouves que je vais trop loin. D’accord ?
Touché par ses mots, je lui adressais un petit sourire, oubliant ma rancune. Nous finîmes de préparer à manger et il m’abandonna momentanément le temps d’aller se laver à la rivière. Il fut de retour en un temps record, revenant près du feu en courant. Là, il s’installa près de moi. Je lui tendis alors son assiette et nous mangeâmes en parlant de tout et de rien.
Alors que nous mangions le dessert, Hayden me demanda de lui passer son sac. Je m’exécutais sans discuter et le laissant à ses affaires, je terminais mon dessert. Soudain, je le vis me tendre un sac en plastique. Surpris, je m’en emparais et timidement, j’entrepris de le vider. Quelle ne fus pas ma surprise lorsque je sortis un pull en laine doux au toucher, deux jeans et quelques t-shirts.
Affreusement gêné de ce cadeau inattendu, mais tout de même très touché par l’intention d’Hayden, je déclarais timidement, le rouge aux joues, ne sachant pas vraiment quoi dire, :
- Je… Merci Hayden… Mais il ne fallait pas, j’ai pleins de vêtements…
- Ceux-ci seront plus adaptés pour la vie que nous menons, répondit-il simplement en me souriant.
- Merci, murmurais-je, à nouveau, la gorge nouée par l’émotion et le coeur battant à tout rompre.
- Tu n’as pas à me dire merci, souffla Hayden.
Je ne répondis rien, ne sachant que dire, puis le silence s’installa de nouveau entre nous. Par la suite, nous entreprîmes ensuite de tout ranger et c’est avec un plaisir non feint que nous nous mîmes au lit. Alors qu’ Hayden se glissait entre les couvertures, que je me collais à lui. Loin de me repousser, il passa ses bras autour de ma taille, comme pour m’attirer davantage tout contre lui, poussant un soupir de satisfaction. Fermant les yeux sous le bien-être que je ressentais, je me laissais aller tout contre Hayden et bientôt, bercé par le rythme régulier des battements de son coeur, je finis par m’endormir.
Finalement, nous restâmes plus que quelques jours dans la cabane, profitant du minimum de confort qu’elle nous offrait. Au fil des jours, j’avais commencé à aménager la pièce, la décorant parfois de bouquets de fleurs que je trouvais dans les environs. Et malgré que le tout restait très impersonnel, je commençais à m’y sentir un peu comme chez moi… Chez nous… Et lorsque j’avais fais part de mes impressions à Hayden, il avait rit doucement, amusé. Cependant, l’étincelle qui avait traversé son regard à cet instant ne m’avait pas échappée… La route lui manquait…
C’est pourquoi, ce jour là, alors que nous étions installés depuis près de huit jours, je me décidais à aborder le sujet. Allongé sur le ventre à l’ombre d’un arbre au bord du ruisseau, le menton posé sur mes mains, j’observais Hayden qui, le pantalon relevé jusqu’aux genoux, tentait tant bien que mal d’attraper un poisson pour le repas de ce soir, à l’aide d’un fils de pêche. Il bataillait depuis près d’une heure avec son fils de pêche et son morceau de pain sec et malgré moi, je ne pouvais m’empêcher de le trouver attendrissant avec son petit air d’enfant obstiné.
- Hayden… Appelais-je, brisant ainsi le silence de ce milieu d’après-midi.
- Tais-toi ! Chuchota-t-il, faussement contrarié. Tu fais fuir les poissons…
Amusé plus qu’autre chose, j’esquissais un petit sourire alors qu’il repartait à l’affût.
- Quand est-ce qu’on repart ? Demandais-je.
Les yeux rivés sur Hayden, j’esquissais un petit sourire en le voyant manquant de glisser à l’eau après avoir posé le pied sur une pierre bancale.
- Tu veux repartir ? Demanda-t-il, visiblement plus que surpris. Je croyais que tu te plaisais bien ici…
- Moi oui, mais je vois bien que ce n’est pas ton cas… Répondis-je doucement.
Pour toute réponse, Hayden s’approcha de moi, abandonnant son idée de pêche. Une fois face à moi, il se laissa tomber au sol, s’asseyant en croisant les jambes.
- Je vais être honnête avec toi, déclara-t-il en posant sur moi un regard que je ne parvins pas à déchiffrer. La route me manque, mais je ne veux pas repartir au risque de mettre ta santé en danger.
- En danger ? Répétais-je, incrédule. Je ne suis pas en danger ! Tiquais-je.
- Même si tu n’en montre rien, j’ai bien vu que tu avais perdu beaucoup de poids, Gwen… Tu n’étais déjà pas épais à la base, mais là c’est devenu flagrant…
A ces mots, je ne pus m’empêcher de rougir, affreusement gêné. Ainsi il s’en était rendu compte… J’avais pourtant bien fait attention à ce qu’il ne remarque rien…
- Comment tu… Commençais-je, n’osant pas croiser son regard.
- Le lacet ! Répondit-il avec un sourire en coin. Celui que tu as piqué sur ma chaussure pour attacher ton pantalon… Tu l’as laissé traîner l’autre jour…
- Oh… Soufflais-je, gêné.
- Tout ça pour dire, reprit Hayden plus sérieusement, que cela ne me gêne pas de rester ici le temps que tu te remplumes un peu. De plus, c’est à moi de faire un effort pour adapter mon rythme de marche au tien. J’ai bien vu que tu faisais ton possible pour suivre mon rythme sans te plaindre, mais je ne peux pas toujours te demander d’arriver à me suivre. Cela fait des années que je mène cette vie, alors que tu n’es à mes côtés que depuis quelques semaines. Du coup, c’est à moi de faire un effort et de m’adapter à ton rythme et de ralentir un peu.
Touché par ces mots, je ne pus m’empêcher cependant de me sentir coupable. Détournant le regard, mal à l’aise sous l’intensité du regard qu’il posait sur moi, je déclarais timidement :
- Je… Tu n’as pas à faire tous ces efforts pour moi Hayden… C’est moi qui me suis imposé à toi, alors c’est à moi de m’adapter… Et je… Je voudrais que tu me dises si ma présence t’ennuie…
A ces mots, Hayden prit mon menton entre ses doigts et m’obligea à le regarder, avec des gestes emplis de douceur.
- Tu ne me dérange pas le moins du monde, Gwendal, déclara-t-il.
- Tu es sincère ? Demandais-je, ancrant mon regard au sien.
- Je n’ai jamais été aussi sincère, déclara-t-il gravement.
Dans son regard, je pus constater tout le trouble qu’il ressentait à la vue de l’anomalie de mes yeux, comme s’il ne savait pas lequel regarder. Atrocement gêné, ayant toujours détesté mon regard pour ce genre de réaction qu’il entraînait, je tentais de me libérer de la poigne d’Hayden. Lorsqu’il s’en rendit compte, il libéra mon menton pour poser sa main sur ma joue, alors que je baissais les yeux, reportant mon attention sur l’herbe qui dansait au gré du vent.
- Pourquoi détournes-tu le regard ? Demanda-t-il, sa main posée sur ma joue la caressant doucement. Tu as des yeux magnifiques… N’ai pas peur de les montrer…
- Mes yeux ne sont pas beau, Hayden, soupirais-je sans pour autant relever la tête. Tu n’imagines pas ce que c’est d’avoir à assumer le regard des autres, d’avoir à accepter que les grand-mères se signent en me traitant de sorcière dès qu’elles croisent mon regard…
- En quoi leurs réactions t’importent-elles tant, Gwendal ? Demanda-t-il. En quoi leur avis te tient-il tant à coeur ? Qui sont-ils ? Qu’as-tu à leur prouver ?
- Je… Commençais-je, hésitant.
- Ignore les, Gwen… Tu ne leur dois rien ! Tes yeux sont une partie de toi, de ce que tu es… Ils sont juste, fascinant… Souffla-t-il alors que son regard accrochait le mien.
Le regard ancré à celui d’Hayden, je me laissais hypnotisé par l’intensité de la flamme qui illuminait ses yeux, les faisant briller d’une force que je n’avais encore jamais remarquée. Ensorcelé, je ne me rendis pas compte que la distance qui séparait nos lèvres s’amenuisait dangereusement. Et alors que sa bouche chaude et humide effleurait la mienne en une caresse éthérée, je sursautais violemment sans parvenir à retenir un cri de frayeur lorsqu’un coup de tonnerre retentit bruyamment au dessus de nos têtes.
L’instant suivant, une pluie diluvienne s’abattit sur nous. Nous relevant d’un bon, nous rassemblâmes précipitamment nos affaires avant de partir en courant vers la cabane. Les quelques dizaines de mètres que nous avions à parcourir suffirent pour que nous arrivions complètement trempés. Alors que nous courions pour nous mettre à l’abri, je m’arrêtais subitement et me mis à rire. Surpris, Hayden se tourna vers moi, m’adressant un regard étonné. Et moi, je ne pouvais m’empêcher de rire. En cet instant, trempé jusqu’aux os sous cette pluie torrentielle, j’étais tout simplement heureux…
- Gwen ? M’appela Hayden, déconcerté.
Lâchant alors mes affaires, je me mis à tournoyer sur moi-même, les bras écartés, le visage levé au ciel, offert à la pluie qui tombait, ignorant les grondements du ciel. Les yeux fermés, vacillant face à mon manque d’équilibre, je sursautais en sentant deux bras puissant se refermer autour de mes hanches alors qu’un torse chaud et athlétique se collait à moi dans mon dos. Reconnaissant Hayden à son odeur et à la façon si particulière qu’il avait de coller son corps au mien, je me détendis, me laissant aller à son étreinte. Emporté par notre élan, je me laissais aller à laisser mes mains rejoindre les siennes et d’un geste d’une tendresse qui me fit tressaillir, il noua mes doigts aux siens posés sur mon ventre.
Là, entre les bras rassurant d’Hayden, je n’avais plus peur… Je me sentais protégé et en sécurité, avec l’agréable impression que rien ne pourrait m’atteindre ni me blesser tant qu’il resterait près de moi. Et si tout mon être cherchait à dissimuler ses sentiments qui m’habitaient, mon coeur lui, le criait haut et fort : j’étais amoureux d’Hayden…
Mon coeur était prit d’une frénésie inquiétante lorsque je sentais son regard posé sur moi et la façon dont il me fixait parfois avait le don de me mettre mal à l’aise. Comme s’il cherchait à lire à travers moi… Je craignais qu’à force de m’observer, il finisse pas se rendre compte des sentiments trop tendres que je nourrissais à son égard. Comment réagirait-il alors ? Se rirait-il de moi ? C’était fort probable, Hayden ayant le don de tout tourner en dérision… Et je ne pouvais l’en blâmer… Quoi de plus comique que et improbable qu’un fils de noble famille qui s’entiche d’un vagabond ? Aussi gentil soit-il qu’Hayden…
Ce fut la voix d’Hayden au creux de mon oreille qui me ramena à la réalité :
- Ne restons pas sous la pluie… Viens….
Ce ne fut que lorsque son corps se détacha du mien que je réalisais qu’il n’avait cessé de m’enlacer depuis tout à l’heure. Délicatement, ses doigts enlacèrent les miens et malgré moi, je ne pouvais détacher mon regard de ce spectacle. Puis, quittant nos doigts enlacés du regard, je reportais mon attention sur Hayden. Légèrement éloigné de moi, il me souriait avec cette expression si particulière que je ne parvenais pas à déchiffrer. Et là, mon regard ancré à celui d’Hayden, j’eus l’intime conviction que ma vit avait prit un tout autre chemin, passant de statut de “infernale” à “véritable conte de fées”.
Rougissant, honteux des pensées qui étaient les miennes en cet instant, je me laissais docilement guider par Hayden qui, lentement, m’entraîna vers la cabane. Une fois à l’intérieur, il referma vivement la porte derrière lui afin d’éviter que la pluie nous suive à l’intérieur. Puis, se dirigeant vers le petit poêle qui trônait dans un coin de la pièce, il l’alluma. Lorsque le feu eu prit, il se tourna vers moi. Plongé dans mon observation, je n’avais même pas réalisé que je tremblais de froid. Ce fut Hayden qui me ramena à la réalité, lorsque ses mains se mirent à frotter mes bras en une vaine tentative pour me réchauffer :
- Tu ne devrais pas rester avec tes vêtements mouillés, Gwen… Change-toi avant que tu n’attrapes froid…
Honteux, je détournais le regard et jetais un coup d’oeil à l’unique pièce, cherchant un endroit discret où je pourrais me changer. Cependant, à mon plus grand malheur, il n’y avait absolument aucun recoin où j’aurai pu me dissimuler. Semblant comprendre mon désarrois, Hayden déclara en souriant :
- Promis je ne te regarderais pas ! Allez change-toi !
Et comme pour me prouver sa bonne volonté, il alla se poster devant l’unique fenêtre, me tournant le dos. Sortant de ma torpeur, je me dirigeais vers mon sac de voyage et en sortis des affaires propres et tournant moi aussi le dos à Hayden, j’entrepris de me dévêtir. Attrapant mon t-shirt par le bas, j’entrepris de le passer au dessus de ma tête. Cependant, ce que je n’avais pas prévu, c’était qu’il reste coincé. Affreusement gêné, ne pouvant plus bouger, j’appelais Hayden d’une petite voix, affreusement mal à l’aise :
- Hayden…
- Il y a un problème Gwen ? Demanda-t-il sans se retourner.
- Je… Je suis coincé… J’ai… Besoin de ton aide… Soufflais-je, tentant de ne pas rougir.
- Tu es conscient qu’en me demandant mon aide, cela me force à me retourner ? Demanda-t-il avec ce que je décelais être une pointe d’humour dans la voix.
- Dépêches-toi ! Marmonnais-je. J’ai froid…
Il n’en fallut pas plus pour décider Hayden. L’instant d’après, je le sentis s’arrêter juste derrière moi et je me félicitais alors de lui tourner le dos afin qu’il ne soit pas témoin de la brusque rougeur de mes joues. Et lorsque ses mains vinrent se poser sur les miennes, je dus me faire violence pour réprimer un frisson. Avec douceur, il entrepris de m’aider à retirer mon t-shirt, et terriblement gêné, je ne pus m’empêcher de me sentir mal à l’aise. J’étais sans doute en train de vivre l’un des instants les plus intimes de ma vie et malgré moi, mon coeur tambourinait dans ma poitrine qui semblait être sur le point d’exploser.
Alors que je baissais les bras, enfin libéré de ma prison de toile, je sursautais violemment en sentant les mains d’Hayden se poser sur mes hanches nues, juste au dessus de mon pantalon. Le coeur battant, je n’osais plus esquisser le moindre geste tandis que ma respiration se bloquait et que mon coeur loupait un battement. Puis, avec une douceur extrême, il déposa ses lèvres sur mon omoplate. Au contact de ses lèvres brûlantes sur ma peau glacée et de ses cheveux qui effleurèrent timidement ma nuque, je ne pus retenir un violent frisson, fermant les yeux sous l’effet du soudain bien-être qui s’emparait de moi. A présent, je n’avais plus froid, c’était comme si la brûlure des lèvres d’Hayden se répandait dans mes veines, réchauffant tout mon corps.
Puis, bien trop brusquement, Hayden s’éloigna de moi et le froid m’envahit de nouveau. D’une voix étrangement rauque, il déclara :
- Finis de te changer, Gwen… Tu es glacé…
Puis, sans plus de cérémonie, il retourna près de la fenêtre, ses pas résonnant lugubrement dans le silence seulement briser par les grondements du tonnerre et la pluie qui tombait toujours. Le coeur battant et la tête emplie de questions, j’achevais de me changer retirant mon boxer et mon pantalon trempés pour les remplacer par ses secs. Puis, attrapant ma serviette, je défis ma queue de cheval et me séchais les cheveux. Une fois fait, j’attrapais ma brosse et me dirigeant vers Hayden, je déclarais simplement :
- La place est libre…
Sans un regard pour moi, il s’empressa de s’éloigner, et j’eus l’horrible impression qu’il me fuyait. Cette sensation fut renforcée lorsque, au lieu d’aller se changer, Hayden ouvrit la porte de la cabane et la referma en claquant la porte derrière lui. Sans que je ne puisse les retenir, des larmes s’échappèrent subitement de mes yeux, cascadant en silence le long de mes joues. Blessé, je ne pouvais détourner mon regard de la porte, espérant qu’Hayden revienne et s’excuse d’être partit ainsi.
Pourquoi un tel comportement de sa part ? Avais-je malgré moi, sans m’en rendre compte, fait quelque chose qui lui a déplut ? Pourquoi m’avait-il embrassé ainsi si c’est pour me fuir par la suite ? Des questions pleins la tête, je me détournais alors de la fenêtre et allais m’asseoir en tailleur devant le poêle, tournant délibérément le dos à la pièce. Là, j’entrepris de dénouer mes cheveux, ignorant les larmes qui coulaient sur mes joues, ne pouvant m’empêcher de me sentir coupable.
Je ne saurais dire combien de temps s’était écoulé lorsqu’Hayden poussa à nouveau la porte de la cabane. Sentant les larmes revenir au galop, je m’efforçais de les retenir. Allongé sur le ventre, mon livre posé devant moi, je demandais d’une voix que j’espérais pas trop tremblante :
- Tu étais où ?
- Je… J’ai cru avoir oublié quelque chose à la rivière…
- Tu mens ! Déclarais-je simplement, sans relever les yeux de mon livre.
Il n’y avait ni reproches, ni accusation dans ma voix, seulement une constatation. A ces mots, Hayden poussa un profond soupir et se dirigeant vers son sac de voyage, il déclara :
- Ecoute Gwen, je ne suis pas certain que tu ais réellement envie de connaître la raison pour laquelle je suis sortis…
Alors qu’il se changeait, je déclarais simplement :
- Fais bien ce que tu veux. Après tout, tu n’as pas besoin de moi.
Hayden ne répondit rien et lorsqu’il fut changé, il vint s’asseoir en face de moi. Gardant obstinément les yeux fixés sur mon livre, je tentais d’ignorer sa présence. Ce n’était pas sans compter sur la coopération d’Hayden qui referma brusquement mon livre :
- Hey ! M’exclamais-je, furieux.
- Ecoute-moi quand je te parles ! Déclara Hayden.
- Parce que tu m’as écouté toi peut-être ? Sifflais-je en me redressant pour m’éloigner de lui.
Comme s’il avait compris mes intentions, Hayden m’attrapa le poignet. Je restais un instant immobile avant de reprendre brusquement mon poignet, m’arrachant furieusement à sa poigne.
- Me touche pas !
Sur ses mots, je me redressais. Et avant que je ne comprenne ce qui se passe, je me retrouvais coincé entre le mur et le corps d’Hayden, les poignets maintenus fermement au dessus de ma tête. Furieux, j’adressais un regard assassin à Hayden en m’exclamant :
- Lâche-moi ! Tu n’as pas le droit !
- Je ne te lâcherais pas avant que tu m’ais écouté ! Déclara-t-il en ancrant son regard dans le mien. Et arrête de gesticuler, ça ne sert à rien !
- Je n’ai pas envie de t’écouter ! M’exclamais-je. Je n’ai que faire de tes excuses, m’entêtais-je.
Il m’avait blessé et je tentais de me protéger comme je le pouvais.
- Ecoute-moi ! S’exclama Hayden en haussant le ton, me faisant sursauter. Je suis désolé si je t’ai blessé d’une quelconque façon, reprit-il plus doucement. Ca n’était aucunement mon intention…
- Je ne suis pas blessé ! Répliquais-je cinglant.
- Ah oui ? Pourquoi est-ce que tu me fuis ainsi alors ? Renchérit-il, un sourire en coin étirant ses lèvres.
Pour toute réponse, je tentais une nouvelle fois que me soustraire à sa poigne de fer.
- Tu me fais mal ! Sifflais-je furieux, alors que ses doigts me broyaient les poignets.
- Excuses-moi, souffla-t-il en desserrant sa prise.
- Je t’excuses ! A présent, lâche-moi ! Ordonnais-je.
- Pas avant que tu ne m’ai écouté ! Répéta-t-il.
A contrecoeur, je finis par céder, cessant de me débattre. J’adressais à Hayden un regard assassin qui le fit sourire. Je décidais alors de l’ignorer et reportais mon attention sur la fenêtre, ne cillant pas lorsque je l’entendis soupirer bruyamment avant de déclarer :
- Si je suis partis comme un sauvage c’est que… Commença-t-il, hésitant, comme s’il cherchait ses mots. Je ne suis qu’un homme, Gwen… Avec mes désirs et mes faiblesses… Et tu es loin de me laisser indifférent…
A ces mots, je ne pus m’empêcher de sursauter, surpris, alors que mon coeur battait dans ma poitrine.
- Je te désire Gwen, ajouta-il gravement. Et si je suis partis, c’est pour éviter de faire une bêtise…
Je ne pus m’empêcher de m’empourprer violemment en réalisant ce qu’il venait d’avouer. Il me désirait ? Etait-il sérieux où bien cherchait-il simplement à se moquer de moi ? Presque malgré moi, je détournais mon attention de la fenêtre pour la reporter sur Hayden et l’intensité du regard qu’il posait sur moi me coupa le souffle. Jamais personne ne m’avait regardé ainsi, posant sur moi un regard si brûlant et empli de désir…
Terriblement gêné, je détournais de nouveau les yeux, sous le sourire attendrit d’Hayden. Je n’osais pas prononcer le moindre mot et subitement, l’ambiguïté de notre position acheva de colorer mes joues d’un joli rouge carmin. Semblant se rendre compte de mon malaise, Hayden me libéra les poignets et s’éloigna sensiblement de moi afin que nos deux corps ne soient plus en contact.
Pour ma part, je restais immobile, encore entrain d’assimiler les révélations d’Hayden. Jamais je n’aurai pu croire une chose pareille… Lorsque je repris mes esprits, je m’approchais lentement de lui. Et alors que j’allais poser une main sur son épaule, il esquissa un pas de recul, un pauvre sourire dépeint sur les lèvres :
- Ca ne serait pas prudent… Déclara-t-il simplement. Je… Je crois qu’il vaudrait mieux que tu dormes dans ton duvet ce soir…
Les joues brûlantes sous l’insinuation d’Hayden, j’esquissais à mon tour un pas de recul, terriblement gêné.
La soirée se déroula lentement et dans un silence gêné. Alors que j’étais couché depuis plusieurs heures, le sommeil me fuyait toujours. J’avais pris l’habitude de m’endormir entre les bras d’Hayden et à présent, sa présence et sa chaleur me manquait… Il me manquait ce sentiment de sécurité et de bien-être qui s’emparait de moi lorsque je me retrouvais entre les bras d’Hayden.
Après un énième soupir de lassitude, lassé de me tourner et me retourner sans arrêt dans mon lit de fortune, je quittais mon lit sans bruit et sortis. Je profitais que la pluie avait cessée pour m’installer dehors, m’asseyant sur un coin d’herbe sec. Bientôt, les bruits de la nuit m’apaisèrent et bien que le ciel était encore couvert, me voilant les étoiles, je me sentais bien, apaisé. Plongé dans mes pensées, je n’entendis pas Hayden me rejoindre et ne me rendis compte de sa présence que lorsqu’il vint s’asseoir à mes côtés.
Je lui adressais un simple sourire auquel il répondit, puis nous reportâmes notre attention sur les bois. Je ne saurais dire combien de temps nous restâmes ainsi, silencieux, aucun de nous n’osant briser le calme de la nuit. Finalement, je fus le premier à me jeter à l’eau :
- Comment tu l’as découvert ? Demandais-je.
- Découvert quoi ? Répéta Hayden, surpris.
- Ton homosexualité, répondis-je en me tournant vers lui.
- Oh ça… Souffla-t-il amusé. Et bien… Au fond de moi, je crois que je l’ai toujours su… Peut-être est-ce à cause de ma mère… A la voir se faire passer dessus par tous ces mecs… A voir dans l’état dans lequel elle était chaque jour, à la voir en redemander encore, à faire la salope pour quelques euros… Peut-être est-ce cela qui m’a dégoûter des femmes, je ne saurais le dire… Quoi qu’il en soit, dès le collège, je n’ai jamais porté la moindre attention sur les filles… Au contraire, voir ses pré-adolescentes se trémousser avec des vêtements vulgaires pour attirer l’attention des garçons… Tout cela me répugnais ça me rappelais bien trop ma mère, ce qu’elle était devenu… Instinctivement, je sais pas, je me suis surpris à observer les garçons et je ne m’en suis pas retrouvé dégoûté, comme avec les filles…
- Comment l’a prit ta famille quand ils l’ont appris ?
- Je ne connais pas mes grands-parents, ceux-ci ayant renié ma mère lorsqu’elle a commencé à se vendre… Quant à ma mère, elle s’est mise à hurler, me criant que j’étais un monstre, que je la dégoûtais…
Je ne fis aucun commentaire, gardant pour moi mes impressions. Après un long silence, je finis par prendre la parole :
- Père et mère ont toujours eut une vision plus que négative sur l’homosexualité, ne cessant de se plaindre d’eux et les dénigrant comme des moins que rien, commençais-je. Pour eux, le SIDA est de leur faute… Ils disent qu’ils l’ont bien mérité, qu’à force de forniquer à tout va, il fallait bien que quelque chose les punissent… Ils disent que c’est contre-nature… J’avais un cousin… Lorsqu’il a décidé d’assumer son homosexualité et qu’il a présenté son ami à ses parents, il s’est fait renié comme un malpropre et mettre à la porte, comme on jetterai une paire de chaussette abîmée à la poubelle… Je ne l’ai jamais revu… Je ne sais pas ce qu’il est devenu… Et pourtant, il était quelqu’un que j’appréciais énormément… Peut-être l’un des seuls d’ailleurs… Mais parce qu’il était différent de ce qu’ils auraient voulu qu’il soit, ils l’ont tous renié, sans chercher à le comprendre, sans se mettre à sa place et essayer d’imaginer ce qu’il a du ressentir… J’ai haïs ma famille plus qu’il n’était possible après ça… Cette famille qui n’en est pas une, avec leurs valeurs préhistoriennes et leurs préjugés… Cette famille qui ne jure que par leur statut social et se fout du bien être de leurs enfants… Pour eux, nous ne sommes qu’un moyen d’assurer la lignée de la famille et, en nous utilisant intelligemment en nous mariant avec des hommes ou des femmes influant, d’assurer leur bien-être et leur place dans la société… Et dès lors qu’un des enfants sort du droit chemin, dès que l’un d’eux se met à montrer des signes d’anomalies ou des tares, comme l’homosexualité, on le renie… On le chasse de cette famille soit disant unie, afin de ne pas salir son nom… Crachais-je, en sentant une fureur sans nom s’emparer de moi.
- Et toi ? Demanda Hayden en se tournant vers moi. Quel est ton point de vue ?
- Je… Je ne sais pas, soufflais-je, gêné. Je ne pense pas avoir de point de vue particulier… Les sentiments ne se contrôlent pas, ce n’est pas nous qui choisissons la personne, c’est notre coeur… Et lui se fout que la personne qu’il aime soit un homme ou une femme…
- Tu as l’air de parler en connaissance de cause… Souffla Hayden, un sourire amusé étirant ses lèvres.
- Moi ? Non… M’empressais-je de répondre, affreusement gêné de m’être ainsi laissé aller à exprimer ce que je ressentais.
- Menteur, sourit Hayden. Tu rougis…
- C’est de ta faute ! L’accusais-je en me tournant vers lui. Tu poses des questions gênantes.
- C’est toi qui a abordé le sujet…
Je ne répondis rien, me contentant de détourner les yeux, mal à l’aise sous le regard insistant qu’il posait sur moi. Finalement, après un long silence gêné, je demandais, changeant délibérément de sujet :
- Hayden ?
- Oui, Gwen… Répondit-il avec une pointe d’amusement dans la voix.
- Jusqu’où tu serais prêt à aller pour ta liberté ? Demandais-je.
- Comment ça ?
- Je veux dire, que sacrifice serais-tu prêt à faire ? Que serais-tu capable d’abandonner derrière toi pour rester tel que tu l’es aujourd’hui ? N’as-tu jamais songé à t’arrêter et t’installer quelque part ? N’y a-t-il jamais eu personne qui t’a donné envie de te poser, d’abandonner la vie que tu menais jusqu’à maintenant, pour elle ?
J’entendis Hayden soupirer et alors que je m’attendais à ne recevoir aucune réponse, il commença, le regard fixé droit devant lui :
- Je ne sais pas, avoua-t-il. Je ne me suis jamais suffisamment attaché à quelqu’un pour avoir envie de tout abandonner pour lui… Je n’ai aucune attache nulle part, Gwen, comme une feuille morte qui s’envole au premier coup de vent… Je me pose au gré de mes envies, mais, un jour ou l’autre, le désir de repartir se fait de plus en plus pressant, jusqu’au jour où, finalement, je finis par lui céder… Je suis comme ça, Gwen, c’est dans ma nature…
Après une courte pause, il reprit :
- Le seul pour qui cela a été beaucoup plus difficile que je ne le pensais, à été Julien… J’étais prêt à tout plaquer pour lui… A arrêter de voyager et m’installer avec lui… Mais finalement, encore une fois, l’appel de la liberté à été le plus fort…
- Il t’arrive de regretter ? Demandais-je, touché malgré moi. Tu ne t’es jamais demandé ce qu’aurait pu être ta vie si tu étais resté près de lui ?
- Tu ne t’arrêtes jamais de poser des questions ? Demanda Hayden en riant.
- Désolé… Soufflais-je en détournant les yeux, honteux.
- C’est bon, je plaisantais, me rassura-t-il. Tant qu’on en est aux confidences, autant parler non ? Et pour répondre à ta question, non, je ne regrettes pas… Je sais que Julien a une meilleure vie que celle qu’il aurait eut avec moi si j’étais resté…
- Comment peux-tu en être certain ? Demandais-je en le regardant.
Tournant la tête vers moi, un sourire amusé faisant pétiller son regard, il déclara :
- Tu as toujours réponse à tout, n’est-ce pas…
De nouveau je sentis le rouge me monter aux joues avant de me mettre à frissonner sous la fraîcheur de la nuit.
- Et toi… Déclara-t-il après un instant de silence en me souriant. Parle-moi un peu de toi ?
- De moi ? Répétais-je, confus.
- Oui, sourit-il, de toi…
- Il n’y a rien à dire, soupirais-je en détournant les yeux. Je m’appelle Gwendal, j’ai vingt et un ans et je me suis enfui avec un inconnu lorsque mon père m’a contraint à un mariage forcé… Tu vois, ma vie n’a rien de bien passionnant…
- Il y a forcément d’autres choses à dire, s’entêta Hayden. Ce que tu aimes, ton enfance, la famille on va éviter, ajouta-t-il, m’arrachant un petit sourire, tes goûts, tes rêves… Tu vois, il y a pleins de choses à dire sur toi…
- Pourquoi est-ce que tu veux savoir tout ça ? Demandais-je, surpris en croisant son regard.
- Ce n’est pas ce que font deux personnes qui voyagent ensembles ? Chercher à se connaître… Demanda-t-il en souriant, reprenant mes propres mots.
A ces mots, je ne pus m’empêcher de sourire, amusé malgré moi.
Reportant alors mon regard devant moi, je commençais à parler après un instant de silence :
- Je n’ai jamais vraiment réfléchis à tout ça, avouais-je. Dès mon plus jeune âge j’ai toujours fait ce que l’on me demandait, parce que c’est comme cela que l’on m’a élevé et c’est ce que l’on attendait de moi… Je suis fils unique et mes parents n’ont jamais été très présents pour moi, mais mon rôle de fils unique me contraignait à me plier à leurs exigences… C’est pourquoi, je n’ai jamais discuté leurs ordres, faisant ce que l’on exigeait de moi…
- Et pourtant, tu t’es enfuis de chez toi lorsqu’ils ont voulu te marier…
- Oui, soufflais-je. Peut-être ais-je été docile trop longtemps, ajoutais-je avec un petit sourire amer. Je n’avais peut-être rien à moi, mes goûts étaient ceux que l’on m’imposaient, mais j’ai toujours eu ce désir au fond de moi… Quand j’étais petit, je rêvais que j’avais des ailes, et que je m’envolais loin de chez moi… Je rêvais de découvrir le monde, de rencontrer les gens que j’aurai aimé rencontrer et non ceux que l’on m’imposait… Je voulais tant être… Normal…
- Et maintenant ? Demanda Hayden en me souriant. Est-ce que la vie que tu mènes à présent te plait davantage ?
- Bien plus, répondis-je sincère avant de me rembrunir. Tellement qu’il m’arrive, parfois, de croire que tout cela n’est qu’un rêve… Que si je ferme les yeux trop longtemps, lorsque je les ouvrirais, je me réveille dans ma chambre et que tout ce que j’ai vécu jusqu’à présent ne soit qu’une douce illusion…
Délicatement, la main d’Hayden vint se poser sur ma joue, et avec une douceur infinie, il m’incita à tourner la tête vers lui. Lorsque nos regards se croisèrent, je sentis mon coeur s’emballer dans ma poitrine et je dus me faire violence pour soutenir le regard brûlant qu’Hayden posait sur moi. Puis, lentement Hayden se pencha vers moi, son regard toujours ancré au mien, alors que, le coeur battant, je ne bougeais pas, parfaitement conscient de ses intentions. Bien trop lentement à mon goût ses lèvres se posèrent enfin sur les miennes et je ne pus retenir un soupir de bien-être et de satisfaction. Tout contre mes lèvres, je pus sentir Hayden esquisser un sourire et bientôt, ses lèvres s’entrouvrirent sur sa langue qui, tendrement, vint caresser mes lèvres, comme pour m’inviter à les entrouvrir. Grisé par la douceur dont il faisait preuve, je me laissais aller à fermer les yeux et m’abandonnant à lui, je cédais à son invitation et entrouvris timidement les lèvres. Il n’en fallut pas plus à Hayden et l’instant suivant, sa langue se faufilait entre les lèvres, partant à la recherche de la mienne.
Lorsque nos langue s’effleurèrent en une tendre caresse, je frissonnais violemment. Délicatement, Hayden posa sa main sur ma joue alors que je n’osais esquisser le moindre mouvement. Très vite, notre échange gagna en intensité. Sa langue entraînait la mienne en un ballet vieux comme le monde et j’eu toutes les peines du monde à retenir le gémissement de plaisir qui menaçait à tout moment de franchir mes lèvres. Soudain, Hayden fut comme prit de frénésie, me guidant dans un baiser fiévreux qui n’avait plus rien à voir avec ceux que nous avions échangé jusqu’à maintenant.
Je sentis mon coeur s’emballer dans ma poitrine et l’espace d’un instant, je pris peur en sentant Hayden presser mon corps contre le sien. Alors que je commençais à prendre peur, il sembla soudainement reprendre ses esprits et s’écarta vivement de moi, rompant brusquement le baiser.
- Excuses-moi, murmura-t-il, sa main caressant doucement ma joue. Je me lui laisser emporter… Ca va ?
- Je… Oui.. Murmurais-je, affreusement embarrassé.
- Alors, demanda-t-il après un court instant, reprenant notre conversation où nous l’avions laissée. Tu crois encore que tout ceci n’est qu’une illusion ? As-tu déjà rêvé d’être embrassé par un homme, même dans tes rêves les plus fou ?
- Jamais… Avouais-je, les joues rouges.
- Alors ceci n’est pas un rêve, Gwen… C’est réel… Déclara-t-il en souriant.
Je ne répondis rien et le silence nous enveloppa de nouveau. Finalement, la fatigue me gagna et alors que j’étouffais un bâillement, Hayden déclara :
- Allez, va dormir… Tu tombes de sommeil…
Après lui avoir souhaité une bonne nuit, je retournais dans mon sac de couchage. Dans les cinq minutes qui suivirent, j’étais endormi.
Finalement, nous ne reprîmes la route que trois jours plus tard, la pluie n’ayant pas cessé avant. Au matin du quatrième jour, profitant d’une éclaircie, nous rangeâmes nos bagages et reprîmes la route. J’avais un pincement au coeur en quittant cet endroit mais bientôt, la joie et l’excitation de découvrir d’autres endroits vint effacer mon amertume.
Nous marchâmes pendant deux jours avant de finalement prendre le bus jusqu’à Birmingham. Là, après une nuit à l’hôtel, nous prîmes le train jusqu’à Edimbourg. Hayden m’avait avoué avoir un ami là bas, et m’avait demandé si j’étais d’accord pour aller lui rendre visite. A ma mine renfrognée, il avait éclaté de rire en m’expliquant que cet ami n’était pas le moins du monde attiré par les hommes et qu’il n’avait jamais eu d’aventures avec lui. Partiellement rassuré, j’avais tout de même accepté.
Et après une petite semaine de marche, nous arrivâmes enfin à Fakland, une petite ville au nord d’Edimbourg. Après avoir demandé son chemin, Hayden nous conduisit jusqu’à une petite villa un peu en retrait de la ville. Là, il passa devant moi et alla frapper à la porte. Ce fut une jeune femme qui vint nous ouvrir et si Hayden parût surpris, il n’en laissa rien paraître. D’un ton poli, il demanda :
- Bonjour, est-ce que Darren MacKay est là, s’il vous plaît ?
- C’est de la part de qui ? Demanda la jeune femme, un peu sceptique.
- Hayden…
- Chéri ! Appela la jeune femme en se tournant vers l’intérieur. Un certain Hayden demande à te voir.
L’instant d’après, un colosse fit irruption dans l’encadrement de la porte et malgré moi, je ne pus m’empêcher d’esquisser un pas en arrière, effrayé par l’immense homme roux qui venait de faire son apparition.
- Par la barbe de Merlin ! S’exclama le dénommé Darren. Hayden ! Qu’est-ce que tu fais là, mon vieux !?
L’instant d’après, Hayden était happé par les deux bras les plus énormes que je n’avais jamais vu et fut soulevé de terre comme s’il ne pesait rien. A tout instant, je m’attendais à entendre ses côtes se briser, mais il était plus solide qu’il ne le laissait croire.
- Salut Darren ! Souffla Hayden en lui rendant son étreinte. Content de te voir vieux !
Leur embrassades s’éternisa avant qu’Hayden ne se souvienne de ma présence. Se tournant vers moi, il fit les présentations et si j’échappais à l’étreinte à laquelle avait eu droit Hayden, je ne pus refuser de lui serrer la main sans paraître impoli et lorsque ses doigts se refermèrent autour de ma main, je retins tant bien que mal un gémissement de douleur alors que mes os se broyaient sous sa poigne de fer.
C’est avec entrain que Darren nous invita à entrer chez lui et après nous avoir présenter sa compagne, Blair, il nous offrit à boire. Très vite, la discussion s’engagea entre Hayden et Darren tandis que j’allais rejoindre Blair à la cuisine, profitant d’une échappatoire pour m’échapper d’une conversation qui ne me concernait pas. Timidement je proposais à Blair de l’aider et très vite, la nous engageâmes la conversation sur tout et rien. Bientôt, j’appris qu’elle et Darren étaient sur le point de se marier. Plus qu’heureux pour eux, je la félicitais, lui souhaitant tous mes voeux de bonheur.
Le soir, nous fûmes conviés à rester dormir et lors du dessert, Darren, après avoir probablement reçu l’accord de sa future épouse, nous proposa de rester pour leur union, chose qu’Hayden s’empressa d’accepter avec une joie non feinte.
La soirée se traîna en longueur et épuisé, je ne tardais pas à m’endormir la tête calée contre l’épaule d’Hayden.
Le dimanche matin, nous nous préparâmes tous pour la cérémonies qui devait avoir lieu en fin de matinée. Alors que je m’habillais dans la salle de bain, Hayden fit subitement irruption, me faisant sursauter. Me tendant une chemise blanche et un pantalon noir, il déclara :
- Tien, met ça ! Et fait quelque chose pour tes cheveux ! Ajouta-t-il en avisant mes cheveux soigneusement peignés. Comme le matin quand tu te réveilles par exemple ! Ajouta-t-il, un sourire en coin étirant ses lèvres.
- Tu veux que j’ai l’air de sortir de mon lit ? M’exclamais-je, surpris.
- Ou du mien, de préférence ! Répondit-il avant de quitter la pièce comme il était venu, me laissant complètement stupéfait.
Alors que je réalisais la portée de ses paroles, je ne pus m’empêcher de rougir. Puis, reportant mon attention sur mon reflet je tentais de suivre son conseil avant d’enfiler les vêtements qu’il m’avait apporté. Et bien qu’ils soient des plus simples, je ne pus m’empêcher de contempler mon reflet.
Puis, après m’être assuré que tout était en ordre, je quittais la salle de bain et allais rejoindre tout le monde au salon. Lorsque j’arrivais, Hayden s’arrêta en plein milieu de sa phrase, m’observant avec une intensité qui me mit mal à l’aise. Je détournais alors les yeux en rougissant alors que Blair s’approchait de moi tout sourire.
- Tu es ravissant, Gwendal ! Déclara-t-elle.
Je lui adressais un petit sourire de remerciement puis nous nous mîmes en route.
C’était le premier mariage auquel j’assistais et malgré moi, je ne pus m’empêcher de me sentir ému lorsque les mariés se passèrent la bague au doigt avant de s’embrasser passionnément. Durant la fête qui suivit, je passais ma soirée à danser avec Blair ou Darren, ceux-ci m’ayant visiblement très vite adopté. Puis, lorsque vint le moment des slow, je regagnais ma place, laissant les jeunes mariés se retrouvaient. Le menton calé dans ma main, je les regardais danser avec une certaine envie, les images de mon premier et unique slow avec Hayden me revenant sournoisement à l’esprit.
Alors que je m’apprêtais à aller faire un tour dehors, je vis Hayden s’approcher de moi et je ne pus détourner mon regard de sa silhouette féline. Habillé d’un costume noir qui lui allait à merveilles, il était magnifique et son regard pétillait d’une lueur que je n’arrivais pas à définir. S’approchant de moi, il me tendit la main et, me regardant dans les yeux, un tendre sourire étirant ses lèvres, il demanda :
- Tu viens danser ?
Comme pour m’assurer que c’était bien à moi qu’il parlait, je regardais autour de moi et m’aperçus que j’étais seul à ce coin de la table. Rougissant, j’attrapais timidement sa main et il m’entraîna à sa suite sur la piste de danse, au milieu des couples tendrement enlacés. Puis, avec une tendresse qui ne cessait de m’étonner, il passa son bras autour de ma taille, m’attirant délicatement à lui. Timidement, j’enlaçais mes doigts aux sien tentant de ne pas rougir alors qu’il m’observait en souriant. Bientôt, guidé par Hayden, nous commençâmes à danser au rythme lent de la musique. Lentement, je finis par me détendre, me laissant complètement aller entre ses bras. La tête calée contre son torse puissant, les yeux fermés, je savourais les caresses aériennes des doigts d’Hayden qui passaient et repassaient dans mon dos, m’effleurant à travers ma chemise.
Je dus me faire violence pour ne pas frissonner sous ses caresses et, de bien être, je soupirais longuement.
- Ca va ? Me demanda Hayden.
- Oui, répondis-je dans un murmure.
Pour toute réponse, Hayden m’embrassa sur les cheveux.