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déc

Once in a lifetime - chapitre 09

   Ecrit par : admin   in Once in a life time

Chapitre 09 par Lybertys

 

Nous quittâmes le village sans un regard en arrière, reprenant notre route, le coeur lourd. Je ne parviendrais pas à oublier Linda et je me fis la promesse de revenir sur sa tombe, lui apporter un cadeau d’anniversaire chaque année…
Nous marchâmes pendant plusieurs heures en silence et ce ne fut que lorsque le soleil fut à son zénith et que la température se fit trop chaude que je déclarais qu’il était temps de faire une pause. Nous nous installâmes au bord d’une rivière, appréciant la fraîcheur qu’elle nous accordait. C’était étrange d’avoir continuellement quelqu’un à côté de soit. Et finalement, je commençais à m’y habituer. La présence de Gwendal était loin de me déranger. Brisant finalement le silence, il me demanda doucement :

- Hayden ? Où allons-nous aller maintenant ?

- Où le vent nous mène, répondis-je en souriant. Qu’en dis-tu ?
Je n’aimais pas vraiment planifier mon chemin. J’étais toujours allé là où me portaient mes pas. Gwen opina de la tête, me rendant mon sourire. Après une seconde de silence, je poursuivis :

- Même si, je me doute que tu as déjà du visiter tous ces endroits…

- Moi ? Demanda-t-il surpris.

- Qui d’autre ? Répondis-je en riant.

- Et bien… Commença-t-il, hésitant. Pas vraiment…

- Comment ça ? Lui demandais-je plus que surpris. Tu n’as jamais voyagé ?

Avaler cette information était pour moi inconcevable. Pourtant, pour toute réponse, Gwen secoua négativement la tête avant de m’expliquer :

- Mon père n’a jamais jugé utile de voyager… Pour lui, ce n’était qu’une perte de temps et d’argent…

- Mais, qu’as-tu fait durant toutes tes vacances scolaires ? M’exclamais-je, effaré, incapable de réaliser ce qu’il me disait.

Ce n’était que maintenant que je saisissais combien ce voyage et la vie que je menais pouvait être déroutante.

- Je n’avais pas de vacance, répondit-il, esquissant un petit sourire sans joie. Je n’allais pas à l’école. Père n’a jamais voulu…

- Mais tu as bien appris à lire et à écrire… Commençais-je, perdu.

- J’avais un précepteur…

- Oh… Alors tu n’as jamais rien fait dans ta vie ? Lui demandais-je, choqué.

- Si, souffla-t-il en m’adressant un petit sourire. J’ai étudié…

- Quelle joie ! Grimaçais-je face à sa réponse.

Si j’avais été surpris jusqu’à maintenant, ce fut au tour de Gwen qui me demanda :

- Tu n’aimes pas étudier ?

- Disons que… Je n’ai jamais été un grand fan de l’enseignement public… Je suis allé à l’école, mais dès qu’il m’a été possible de ne plus y aller, je n’y suis pas retourné…

L’école avait toujours était pour moi me confronter à la normalité des autres face à ma vie que personne ne pouvait envier…

- J’aime étudier, répondit-il. C’est ma manière à moi de voyager…

Je mis un temps avant de répondre, plongé dans mes souvenirs et dans l’incapacité d’envisager une vie sans avoir mis le nez dehors, une vie normale…

- Je n’arrive pas à y croire, soufflais-je après un temps. S’il y a bien une chose pour laquelle j’appréciais ma mère, c’est qu’elle se souciait tellement peu de moi que même si je partais pendant quinze jours, c’est à peine si elle s’en rendait compte… La drogue avait toujours occupé son esprit. Si elle en avait suffisamment en réserve et était en état de se préparer sa propre dose, je n’existais plus à ses yeux.

- C’est de là que tu tiens ta liberté ? Demanda-t-il.

- Oui, répondis-je, laissant mon regard se poser sur la rivière. Elle m’a au moins offert ça…

Mais combien cela m’avait-il couté. Avait-il seulement conscience de ce que cette liberté avait provoqué dans ma vie. J’aurais aimé, qu’au moins une fois, ma mère pose ses yeux sur moi comme l’aurait fait Linda et m’offre un semblant d’existence et d’importance à ses côtés. Chassant ces pensées trop sombres pour être envahies par celle-ci, je me levais et déclarais avec enthousiasme, investi d’une nouvelle mission :

- Et bien, je te propose qu’à partir d’aujourd’hui nous fassions tout ce qu’une personne normalement constituée se doit de vivre au moins une fois dans sa vie et que tu n’as jamais eu l’occasion de découvrir !

- Hein ? S’exclama-t-il, surpris.

- A commencer par se baigner  tout nu dans une rivière ! M’exclamais-je, enchanté par cette idée d’un peu plus de fraîcheur sous cette fournaise.

Sur ces mots, sans lui laisser le temps de réaliser vraiment ce que je venais de dire, je me dévêtis et une fois entièrement nu, je plongeais dans la rivière. L’eau était glacée et vivifiante. Je me sentais vivre alors que je remontais à la surface :

- Allez viens ! M’exclamais-je. Qu’est ce que tu attends ?

- Je ne suis pas sûr que…

M’attendant à une telle réaction, je ne lui laissais pas le temps de finir. Il se tut subitement en me voyant sortir de l’eau. Terriblement gêné par ma nudité, il détourna le regard. Sans prêter attention à sa gêne, je lui attrapais le poignet et en souriant je déclarais :

- Il est grand temps que tu apprennes à t’amuser ! Allez viens !

Sans attendre de réponse, je le mis debout en entrepris de l’entraîner à ma suite, malgré ses protestations.

- Quoi ? M’exclamais-je. Tu ne sais pas nager.

- Bien sur que si ! S’offusqua-t-il.

- Bon alors, où est le problème ?

Et sans lui laisser le temps de répliquer quoi que ce soit, je le poussais vivement. Il ne put retenir un cri de surprise avant d’atterrir dans l’eau tout habillé. Après s’être débattu un moment, Gwendal retrouva son équilibre et se redressa. Repoussant les cheveux de son visage, il me lança un regard stupéfié alors que je ne pouvais m’empêcher d’éclater de rire face à sa mine déconfite.

- Mais tu es fou ! Elle est… Elle est glacée ! S’exclama-t-il comme frigorifié.

- Petite nature ! Souris-je en le rejoignant. Alors, que penses-tu d’être enfin un garçon presque comme les autres ?

- Je ne me sens pas différent, répondit-il, ne comprenant apparemment pas ma question.

- Ah ! Et maintenant ? Lui demandais-je en commençant à l’éclabousser.

- Tu veux jouer ? Demanda-t-il en se protégeant au mieux. Alors jouons !

Sur ces mots, il me sauta dessus. Pris au dépourvu, je coulais comme une pierre. A son tour, il éclata de rire ravissant mes oreilles. Il n’en fallut pas plus pour que s’engage une bataille d’eau des plus animées. Lancé dans la bataille, Gwendal sembla presque oublier ma nudité et la gêne occasionnée. Après une longue bataille qui ne fit aucun vainqueur, je m’approchais de lui, remarquant seulement maintenant son état. Soucieux, je déclarais :

- Tu as les lèvres violettes Gwen. Tu ferais mieux de sortir de l’eau avant d’attraper froid…

Sans lui laisser le temps de répondre, je l’attrapais par le poignet et le guidais hors de l’eau. Là, je fouillais mon sac à la recherche d’une serviette que je posais sur sa tête avant de lui frotter vigoureusement les cheveux, ignorant ses protestations. Il finit cependant par attraper mes poignets, m’obligeant à arrêter ce que j’étais en train de faire.

Surpris, j’ancrais alors mon regard au sien. Ce ne fut qu’à cet instant précis que je le regardais véritablement. Pour la première fois, je réalisais combien Gwendal était un bel homme. Dans son regard, je ne voyais plus quelqu’un d’enfantin, mais bien un jeune homme en train de s’ouvrir au monde. Cet instant dans l’eau… Jamais je n’aurais cru qu’il se lâche ainsi et prenne plaisir à s’amuser. Son rire franc raisonnait encore dans mes oreilles… Je n’aurais sur dire combien de temps nous restâmes ainsi à nous fixer. J’avais l’impression d’entrapercevoir qui il était vraiment pour la première fois.
Au bout d’un moment, Gwen finit par détourner les yeux, me ramenant brusquement à la réalité. Me libérant de sa prise, je repris ma serviette avant de déclarer simplement :

- Tu ferais bien de ne pas garder tes vêtements trempés, tu claques des dents ! Change-toi avant de tomber à nouveau malade !

Puis, sans un mot de plus, réalisant que je venais de ressentir du désir pour lui, je me détournais brusquement de lui et m’éloignais rapidement. Il fallait que je me calme et il ne fallait surtout pas qu’il se rende compte de mon état physique. Lorsque je reportais mon attention sur lui, je vis qu’il s’éloignait, certainement à la recherche d’un coin à l’abri des regards pour se changer.

- Ne t’éloigne pas trop ! Déclarais-je simplement.

Gwendal finit par aller se cacher dernière un arbre. Me séchant à mon tour en réprimant un frisson, je fus bientôt vêtu à nouveau. Je m’assis simplement dans l’herbe, attendant son retour et profitant de la chaleur du soleil. Je ne pus m’empêcher de repenser à ce que je venais juste de ressentir. Jamais je n’aurais pensé ressentir ce genre de chose pour Gwendal.

Mais il était pourtant un homme… Et loin d’être désagréable à regarder. Chassant ces idées de ma tête, je vis Gwen me dépasser avant d’aller s’asseoir au bord de la rivière. Je laissais mon regard naviguer sur sa silhouette. Il semblait si fragile… Je ne voyais en lui qu’un être brimé à qui l’on avait tout interdit. Son passé était-il plus enviable que le mien. Je saisissais mieux sa profondeur…

Je ne tardais pas à aller le rejoindre, m’asseyant à ses côtés. Apaisé par le calme de l’endroit, il ne semblait pas remarquer ma présence et il ne sursauta même pas lorsque je pris la parole. Il n’était pas habituel qu’il reste ainsi silencieux et renfermé.

- Ca va ?

- Mmhmm, répondit-il distraitement.

- A quoi tu pense ? Demandais-je d’une voix qui ne pouvait cacher mon amusement de le voir aussi détendu.

- Oh… Pardon, je rêvais… Je ne pensais à rien de particulier, répondit-il en se tournant vers moi, m’adressant un petit sourire.

Pour toute réponse, je lui rendis simplement son sourire. De nouveau, le silence apaisant nous enveloppe durant de longue minute avant qu’il ne reprenne la parole.

- Hayden ? Souffla-t-il.

- Oui ?

- Merci, murmura-t-il en se tournant vers moi, plongeant son regard dans le mien.

Comme précédemment, je me retrouvais envouté, incapable de répondre quoi que ce soit, lui rendant simplement son sourire, mon regard ancré au sien.

Les même sensations et émotions que j’avais ressentis précédemment revinrent aussitôt. Comme la première fois, Gwendal finit par détourner les yeux, mal à l’aise, les joues rougissantes. J’esquissais un petit rire amusé avant que le silence ne revienne nous envelopper. Nous restâmes encore de longues minutes, immobiles, contemplant l’eau qui scintillait sous les rayons de soleil.

- Et si nous repartions ? Déclarais-je après un temps.

- D’accord, répondit-il en se levant.

Après avoir rangé nos affaires nous nous remîmes en marche.

Durant les 15 jours qui suivirent, nous marchâmes sans nous arrêter, dormant à l’extérieur. Et chaque soir, lorsque nous nous arrêtions, Gwendal semblait plus qu’épuisé. Nous avancions à bon pas et si Gwen faisait de gros progrès il avait toujours du mal à tenir le rythme. Je lui avais acheté une paire de basket, mais cela ne semblait pas encore être tout à fait ça. Alors qu’il traînait la patte, je me tournais vers lui, et m’arrêtait pour l’attendre. 

- Est-ce que tu te sens de marcher encore une petite demi-heure ? Il y a une petite ville pas loin où nous pourrons trouver un hôtel. Tu l’as bien mérité ! Ajoutais-je, en lui adressant un petit sourire.

Sourire auquel il répondit avant de dire :

- Au point où j’en suis, je ne suis plus à ça près…

- Demain tu pourras dormir si tu veux, déclarais-je en reprenant la route alors qu’il arrivait à mon niveau. Je pensais que nous pourrions nous poser un moment pour trouver un travail, qu’en dis-tu ? Cela permettrait que tu te reposes un peu…

- C’est vrai ? Demanda-t-il, plein d’espoir.

- Oui, c’est vrai, souris-je. Tu as été très courageux ces deux dernières semaines… Je ne t’ai presque pas entendu te plaindre…

- Hey ! Pourquoi on dirait que ça t’étonne ? S’offusqua-t-il.

- Disons que tu es quelqu’un d’assez caractériel et que tu m’avais habitué à une autre facette de ta personnalité, répondis-je simplement de plus en plus amusé.

- Mais je peux être tout à fait charmant quand je veux, marmonna-t-il.

- Je vois ça, répondis-je en lui adressant un sourire énigmatique.

Le reste du trajet se déroula dans la bonne humeur. Comme à chaque fois, j’allais réserver une chambre d’hôtel mais je n’avais pas une très bonne nouvelle à lui annoncer alors que je revenais vers lui, affichant une mine contrite.

- Qu’est ce qui se passe ? Me demanda Gwendal, anxieux.

- Ils n’ont plus de chambre double disponible, j’ai du prendre une chambre avec un lit simple…

- Oh, tu sais, soupira-t-il, je suis tellement épuisé que rien de ce que tu diras ne pourra affecter mon enthousiasme de dormir dans un vrai lit… Dit-il en me surprenant. Et c’est pas comme si c’était la première fois que nous partagions le même lit, ajouta-t-il en attrapant son sac.

Je ne pus m’empêcher de lui adresser un regard soulagé et je partis à sa suite, lui indiquant l’étage et le numéro de la chambre. La chambre était modeste mais l’atmosphère qui s’en dégageait était très agréable. Réservant son côté du lit sans me demander mon avis, il retira ses chaussures et s’assis sur le lit. Il soupira de bien être sous mon regard amusé. Alors que je m’occupais de mon propre sac, je vis Gwendal en faire de même. Puis, ayant trouvé ce qu’il cherchait, il partit s’enfermer sous la douche.

Profitant du confort et du calme, je laissais mes vêtements propres sur le lit et m’allongeais. Gwendal faisait nettement changer mes habitudes. Il était rare que j’utilise une chambre d’hôtel aussi souvent. Fermant les yeux, je soupirais de bien être. Gwendal sortit qu’une demi-heure plus tard. Tournant la tête vers lui, je déclarais en souriant :

- Tu n’as pas utilisé toute l’eau chaude j’espère !

- J’aurais du ? Demanda-t-il innocemment en se séchant les cheveux avec sa serviette.

- Essaye, et la prochaine fois, je me douche avec toi !

- Je te garderais de l’eau chaude ! S’empressa-t-il de répondre, les joues rouges.

Il me savait donc capable de le faire… Cela ne me dérangerait surement pas.

Durant la semaine qui suivit, je nous trouvais un petit boulot dans le village voisin, qui consistait à vendre des légumes dans un petit marché. Il n’avait pas été évident de trouver quelque chose qui permette à Gwendal d’avoir la force physique pour le faire. Cependant, je me retenais de lui en faire part, ne voulant pas le vexer.

A ma plus grande surprise, après seulement quelques erreurs, Gwend s’adapta à son travail et s’en sortit plutôt bien. Je le sortis plus d’une fois de quelques ennuis avec de vieilles dames caractérielles mais il se débrouilla la plupart du temps sans moi.

Cela faisait maintenant quinze jours que l’on travaillait sur ce petit marché. Nous avions abandonné l’hôtel au bout de deux jours, car je craignais qu’au bout d’un temps son visage ne soit finalement reconnu. Nous l’avions échappé belle une fois, lorsqu’un matin, une femme d’une trentaine d’années avait failli reconnaître mon compagnon, prétextant avoir vu son visage dans un avis de recherche télévisé.

Après cet incident, j’avais insisté pour qu’il se coupe et teigne les cheveux, chose qu’il avait à mon plus grand désespoir catégoriquement refusée. Par contre, il n’avait pas pu échapper aux lentilles de contact marron pour dissimuler ses yeux vairons trop particuliers. Je ne le lui disais pas mais j’aimais ce regard qu’il avait si particulier lorsqu’il me fixait. Ce petit quelque chose lui donnait toute sa profondeur…

Nous nous étions installés dans une vieille grande. Grace à ma chance, l’homme qui nous employait, un sexagénaire aussi sec que grand, nous avait permis de nous installer là le temps que l’on travaillerait pour lui. Cela nous permis ainsi d’avoir un minimum de confort qui plu à Gwendal. Le soir, nous dormions en général à l’extérieur lorsque le temps nous le permettait. Gwen découvrit le plaisir de contempler les étoiles, ne se lassant jamais de les observer. Le voyant aussi intéressé par la voute céleste, j’en profitais pour lui donner le nom de certains constellations. Ravi, chaque soir, allongés côtes à côtes, Gwendal me demandait de lui apprendre une nouvelle constellation, lui apprenant par la même occasion comment se repérer et trouver son chemin grâce aux étoiles.

J’attendais patiemment Gwen à l’extérieur de la grange, tandis qu’il achevait de se préparer. Ce soir, il y avait une fête au village et nous y avions été conviés. Du coup, après le travail, nous étions revenus à la grange histoire de faire un brin de toilette et nous changer avant de nous y rendre.

Quelle ne fut pas ma surprise de le voir arriver, les cheveux attaché en demi-queue et de beaux vêtements simples mais que je ne l’avais jamais vu porter. Ils semblaient taillés spécialement pour lui, le mettant en valeur. Je ne pus m’empêcher de le dévisager, chaque jour Gwendal m’apparaissait encore plus beau. Il semblait être inaténiable, beauté fragile qui ne faisait pas partit du même monde que moi.

- Quoi ? Me demanda-t-il, mal à l’aise sous mon regard inquisiteur.

- Tu es beau ! Répondis-je simplement en lui souriant tendrement.

Gwendal rougit presque aussitôt, face à la sincérité de ces simples mots.

- Nous y allons ? Demandais-je, lui tendant le bras, ignorant volontairement sa gêne.

Se prenant au jeu, il attrapa mon bras, marchant tout contre moi. S’il ne le faisait pas exprès, Gwendal était sérieusement en train de me charmer. Le trajet se fit en silence, les échos de la fête et les cris des enfants nous parvenant de loin dans la nuit qui tombait. Il nous fallut moins de cinq minutes pour arriver sur la petite place centrale du village. Un immense feu brûlait déjà, les enfants dansant autour en riant, au son d’une musique bruyante.

Le début de la soirée se passa tranquillement, cependant, Gwendal resta un peu dans son coin. Alors que je riais et discutais avec des personnes dont j’avais fait la connaissance un peu après notre arrivée, je pouvais voir Gwendal avoir du mal à lier des relations avec les autres. Me laissant emporter par l’ambiance, je gardais tout de même un regard sur lui. C’est pourquoi je ne tardais pas à remarquer un homme saoul s’asseyant à côté de Gwendal. Sentant mon compagnon mal à l’aise, je finis par écouter la conversation et allais à sa rescousse.

- Moi c’est Thomas ! Mais tu peux m’appeler Tom… Et tu es ? Demanda l’homme à Gwendal sans vouloir le lâcher.

- Pas intéressé ! Répliqua Gwendal, cinglant alors que j’arrivais dans son dos.

- Allez mon mignon ! Minauda le pervers. Sois pas si farouche… Je suis certain que tu es beaucoup plus docile avec ton ami… Susurra-t-il, sa main se posant sur sa cuisse.

Il ne m’en fallut pas plus. Apparaissant brusquement entre Gwendal et son prétendant indésiré, j’attrapais celui-ci par le col et l’éloignais prestement de Gwen, déclarant d’une voix sourde et menaçante :

- Il t’a dit “non”, il me semble ! Alors tu n’insistes pas et tu dégages !

Voyant qu’il allait répliquer quelque chose, je le devançais, perdant patience :

- Dégage je t’ai dis ! A moins que tu ne tiennes vraiment à m’énerver…

Avisant mon regard hostile, il me toisa une dernière fois comme pour me jauger avant de finalement partir sans demander son reste. En venir aux mains ne m’aurait pas dérangé. J’avais l’habitude des gars comme lui et ils ne me faisaient pas peur. Me tournant aussitôt vers Gwendal, je lui demandais, inquiet malgré moi :

- Est ce que ça va ? Il ne t’a pas touché ?

- Ca va ! Merci ! Me rassura-t-il. Dis, Hayden… Reprit-t-il, un instant plus tard, hésitant.

- Tu veux danser avec moi ? Le coupais-je vivement, comme pour ne pas changer d’avis entre temps.

Ne semblant pas s’attendre à une telle demande, il resta muet de surprise l’espace d’un instant. Puis, se reprenant, il m’adressa un sourire radieux, et me tendit la main. Trop heureux de sa réponse positive, je ne pus m’empêcher de l’exprimer par un sourire. Attrapant sa main, je l’aidais à descendre de la table sur laquelle il était assis et avec une courbette élégante, je déposais mes lèvres sur la paume de sa main.

Fier de l’effet produit, je lui souris avant de le guider sur la piste de danse. Mais alors que nous arrivions, la musique changea subitement, et un slow s’éleva dans les airs. Un meilleur timing n’aurait pas pu être plus parfait. Avec une certaine timidité qui me faisait craquer malgré moi, il plaça sa main dans la mienne, tandis que je passais mon autre main au creux de ses hanches. Gêné, Gwendal détourna les yeux, avant de se laisser entraîner par la danse. Jamais nous n’avions partager un moment aussi intime…

- Tu es bien ? Murmurais-je, après un temps indéterminé.

- Oui, souffla-t-il en me regardant dans les yeux. Je suis bien…

Il reporta aussitôt son attention autour de lui. Pour ma part, je ne pouvais détacher mon regard de son visage. Là, éclairé par les flammes, innocent, il était un simple appel à la luxure. Sans trop m’en rendre compte, guidé par l’instant, j’approchais mon visage du sien, comme envouté. Ce fut à ce moment là que Gwendal tourna la tête dans ma direction.

Mes lèvres se posèrent sur les siennes. Surpris, il esquissa un geste pour se reculer. Ouvrant légèrement la bouche, il me donna l’occasion d’aller plus loin. Laissant ma langue se faufiler entre ses lèvres entrouvertes, j’allais à la rechercher de sa jumelle. Ses lèvres étaient si fraîches, si douces, si pures…

Avec toute la tendresse dont j’étais capable, je laissais ma langue rencontrer la sienne, sentant Gwendal se détendre dans mes bras peu à peu. Je laissais ma main se poser au creux de ses reins, et fus pris d’un violent frisson alors que sa langue se mit à répondre à mes caresses délicates et sensuelles.

Grisé par l’instant, j’oubliais qui était entre mes bras, me laissant simplement porter par l’émotion et par ce qu’il provoquait chez moi. La timidité de Gwendal faisait tout son charme. C’était comme emporter un être perdu dans une danse vieille comme le monde. Jamais je n’aurais pensé qu’un baiser échangé avec lui serait si intense et particulier… Ce n’était normalement pas le type d’homme qui finissait dans mon lit…

Ce ne fut que lorsque l’air vint à nous manquer que je consentis à rompre notre échange. M’éloignant de lui, je vis Gwendal ouvrir les yeux. Plongeant son regard dans le mien, je lui souris tendrement, heureux de ce qu’il m’avait offert. Mon vis à vis s’empourpra violemment. A cette vision, mon sourire s’élargit tandis qu’il détournait le regard.

Amusé par son comportement, je ne fis cependant aucun commentaire. Encore envouté par l’instant, j’effleurais doucement, du bout des doigts sa joue avant de remettre une mèche de cheveux derrière son oreille. Gwendal me fit alors de nouveau face et demanda dans un souffle :

- Je… Je voudrais rentrer…

Pour toute réponse, je le pris par la main et en silence, nous quittâmes la place où se déroulait la fête. Alors que le bruit de la musique s’éloignait, aucun de nous ne prononça le moindre mot. Je ne pouvais m’enlever de la tête ce baiser qui venait indéniablement d’éveiller un désir que j’avais jusque là renfloué. Je ne savais même pas vraiment pourquoi je l’avais embrassé, ou ce qui nous avait véritablement amené jusque là. Semblant plonger dans les mêmes questionnements que moi, Gwendal me demanda, brisant le silence apaisant de la nuit :

- Pourquoi est-ce que tu m’as embrassé.

- Je… Commençais-je, pris au dépourvu par cette question. J’en avais envie… Pourquoi ? Repris-je après un court instant. Tu n’as pas aimé ?

A ces mots, Gwendal s’empourpra une fois de plus, ne s’attendant certainement pas à cette question :

- Je… Si, je… Euh…

- Tu veux réessayer ? Proposais-je, amusé et enchanté à l’idée d’une réponse positive, laissant couler regard désireux sur lui. 

- Non ! Répondit-il précipitamment.

Je ne pus m’empêcher de rire.

- Ne t’inquiète pas ! M’exclamais-je entre deux éclats de rire. Je ne le referais pas si tu n’en a pas envie. Je suis désolée de t’avoir volé ce baiser, repris-je en retrouvant enfin mon sérieux. Je sais que je n’aurais peut être pas du, mais…

- Mais ? Répéta-t-il, m’encourageant à poursuivre.

- Je me suis laissé emporter, je crois… Je ne te cacherais pas que je te trouve beau, Gwendal ! Je n’ai pas résisté à l’envie de goûter tes lèvres… Ajoutais-je sincère.

Troublé, Gwendal s’empourpra violement. Sans oser me regarder, les yeux rivés au sol, il finit par déclarer dans un souffle :

- C’était… C’était agréable…

- C’est le but rechercher lorsque tu embrasse quelqu’un, souris-je.

Posant mon regard sur lui, j’ajoutais alors :

- C’était ton premier baiser, n’est-ce pas ? Déclarais-je en une phrase qui sonnait plus comme une affirmation que comme une interrogation.

- Oui, murmura-t-il écarlate. C’était le premier…

Touché d’avoir été son premier baiser, je déclarais tout simplement :

- Alors tu m’en vois ravis ! Et si tu as aimé, alors c’est encore mieux…

Au clin d’oeil entendu que je lui lançais, Gwendal rougit d’avantage. Puis, devinant son malaise, je mis un terme à la conversation et ce fut silence que nous arrivâmes à la grange. Une fois à l’intérieur, j’allumais la petite lampe à huile que notre employeur nous avait prêtée, illuminant la couchette de fortune que nous nous étions fait dans la paille d’une faible lueur.

Alors que je mettais rapidement de l’ordre dans mes affaires et installait mieux le lit, Gwendal alla se changer derrière le paravent improviser. Notre lit de fortune consistait en un duvet qui faisait office de matelas sur la paille, et un autre servait de couverture. Alors que Gwendal allait se coucher, je ne pris pas la peine d’aller me cacher.

Loin d’être pudique, je me changeais devant lui. Je ne tardais pas à aller le rejoindre. Alors qu’il me tournait le dos, je ne résistais pas et tentais le diable. Je vins me coller tout contre lui, le prenant dans mes bras, mon corps épousant parfaitement ses formes. A ma plus grande surprise, Gwendal ne chercha pas à se défaire allant même jusqu’à pousser un soupir de contentement. Ne pouvant me contrôler, je raffermis mon étreinte autour de lui, collant d’avantage nos deux corps. Peut-être n’aurais-je pas du…

Le souvenir du baiser me revint en mémoire, et mon corps ne tarda pas à donner une réponse physique face à cette proximité. Restant ainsi enlacés, je priais pour qu’il ne le remarque pas. Mais ce ne fut malheureusement pas le cas. Bientôt, se tortillant, Gwendal souffla :

- Hayden, tu as quelque chose dans la poche qui me gêne…

- Arrête de bouger ! Grondais-je d’une voix rauque et incontrôlable, alors qu’il m’excitait encore plus.

- Mais… Protesta-t-il.

- Ce n’est pas ma poche ! M’exclamais-je d’une voix sourde. Maintenant, arrête de bouger.

Heureusement, il ne tarda pas à comprendre et cessa de se déhancher. Pourquoi cette réaction arrivait maintenant ? J’avais pourtant dormi plus d’une fois collé contre lui. Etait-ce à cause du baiser ? Etais-ce car depuis peu, je commençais à le voir différemment ? Il m’était maintenant impossible de nier que je le désirais. Mon corps parlait pour moi.

- Hayden… Appela-t-il doucement.

- Dors, Gwen, soupirais-je en me collant plus fermement contre lui. Ca va passer…

Heureusement, il n’insista pas, et alors que je le sentais s’endormir, je parvins peu à peu à me calmer et à penser à autre chose. Fermant les yeux, je ne tardais pas à m’endormir à mon tour, soucieux de la nouvelle direction que prenait notre relation.

Comme à notre habitude, je me réveillais toujours à l’aube, bien avant Gwendal. Mais quelle ne fut pas ma surprise de voir William, notre employeur devant la porte de la grange.

- Hayden, s’exclama-t-il. Il faut que vous partiez. Magaret vient d’appeler la police, elle a reconnu Gwendal.

- Je… Merci William. Dis-je abasourdi. Tu savais qui il était ? Ajoutais-je, encore plus surpris.

- Il suffit de regarder un tant soit peu la télévision Hayden.

- Alors pourquoi n’as tu pas…

- Pourquoi je n’ai pas prévenu la police, me coupa-t-il. Parce que tout cela ne me regarde pas. Je dois y aller, Hayden.

Il me tendis une enveloppe avant d’ajouter :

- J’ai été heureux de faire ta connaissance. N’hésite pas à revenir quand tu veux, il y aura toujours du travail pour vous.

- Je… Merci William, dis-je sincèrement.

Sans un mot de plus, William me tourna le dos et partit. Sans perdre un instant, je rangeais et rassemblais toute nos affaires. Heureusement, j’avais toujours tenu le tout bien ordonné. Une fois fait, je courus jusqu’à Gwendal et le secouais violemment pour le réveiller.

- Gwen ! Réveille-toi ! Dépêche-toi, nous devons partir !

Ouvrant les yeux avec difficulté alors que j’étais penché au dessus de lui, il marmonna en étouffant un bâillement :

- Hmm…

- Allez, lève-toi, Gwen, nous devons partir…

- Partir ? Répéta-t-il, surpris, la voix enrouée par le sommeil.

- William vient de repartir… Selon lui, Margaret t’aurai reconnu… Elle a appelé la police…

- Oh non, souffla-t-il, soudain effrayé. Je… Je ne veux pas y retourner Hayden…

- Je sais, déclarais-je en lui souriant. Allez, habille-toi, on s’en va ! J’ai déjà rassemblé toutes nos affaires.

D’un bond, il se redressa et attrapant, les affaires que je lui tendais, il courut se changer. Pour ma part, j’allais plierais les duvets. Cinq minutes plus tard, il était prêt. Vérifiant que nous n’avions rien oublié et que nous avions effacé toutes traces de notre passage, nous finîmes par partir. L’instant d’après, nous étions en route, coupant à travers la forêt. Au bout de cinq minutes de silence, Gwendal se tourna vers moi et comme gêné, il me dit :

- Je… Je suis désolé, Hayden…

- Désolé ? Répétais-je, surpris. Mais de quoi ?

- Je… C’est à cause de moi que nous sommes obligés de partir précipitamment… Et je… Je n’ai même pas eu le temps de dire au revoir à William.

- Ne t’en fais pas pour ça, Gwen, tentais-je de le rassurer en posant une main sur son épaule. Si ça peut te rassurer, je commençais à me languir de reprendre la route… Quant à William, ne t’inquiète pas, tu le reverras…

- Je l’espère… Murmura-t-il, avant de s’enfermer à nouveau dans le silence.

C’est ainsi que nous reprîmes la route, le coeur étrangement lourd, et pourtant j’étais plus qu’heureux d’enfin reprendre mon chemin. Je n’étais pas fait pour une vie de sédentaire. Un sourire qui rendait Gwendal étonnamment beau à mes yeux étira ses lèvres avant qu’il ne m’emboite le pas. Nous prenions des risques à rester dans cette région. Je craignais même que nous soyons en danger dans tout le pays… Nous serions certains plus tranquille en France, mais l’idée de retourner dans ce pays me glaça à l’intérieur. Je préférais mille fois une vie de fuite que de retourner là bas. Non, jamais je ne remettrais les pieds en France.

Durant la semaine qui suivit, nous nous éloignâmes comme si nous fuyons la peste. Si Gwendal avait jusqu’à maintenant des difficultés à suivre mon rythme, il semblait dès à présent habité par la crainte et l’envie d’aller toujours plus loin. Voilà plusieurs jours qu’il restait souvent songeur, et étonnamment silencieux. Ne tenant plus face à la pesanteur qu’il faisait régnait, j’allais le rejoindre alors qu’il était assis contre un arbre avec l’un de mes livres. Quand il avait réalisé que j’en transportais dans mon sac, il m’avait aussitôt demandé l’autorisation de m’en emprunter un. Il m’adressa un petit sourire lorsque j’allais le rejoindre avant de se replonger dans sa lecture. Je m’assis à côté de lui, l’arbre étant assez large pour nous servir de dossier à tous les deux. Poussant un soupir de bien être, je réfléchissais à comment aborder le sujet avec lui.

Posant mon regard sur lui, je vis qu’il ne lisait pas vraiment. Ses yeux étaient posés sur les mots mais il semblait perdu dans le vide. Finalement, je décidais d’être franc avec lui et je lui demandais alors :

- Qu’est ce qui ne va pas Gwen ?

- Hein ? Sursauta-t-il presque comme si je le sortais de ses pensées.

- Qu’est ce qui ne va pas ? Insistais-je, en répétant la même question.

- Rien, je vais très bien, répondit-il en détournant le regard.

- Arrête, on ne me la fait pas… Pas à moi. Qu’est ce qui te tracasse ? Tu peux peut-être m’en parler…

Se tournant vers moi, il me regarda droit dans les yeux un bref instant, comme s’il cherchait à discerner si je me moquais de lui ou non. Il me regarda d’une manière si étrange que j’en fus mal à l’aise. Fermant son livre, il soupira et posa sa tête sur le tronc avant d’enfin se décider à répondre.

- Je suis en train de prendre goût à cette vie… Murmura-t-il.

- Alors pourquoi ça ne va pas ? M’inquiétais-je.

- Parce que j’ai peur que ça ne dure pas…

- Pourquoi cela s’arrêterais ? Demandais-je en tentant de lui sourire.

- Mon père ne baissera pas les bras Hayden… Nous serons toujours en fuite jusqu’à ce qu’il réussisse à me rattraper.

Ne supportant de le voir vivre dans la peur, je l’attrapais délicatement par le menton pour l’obliger à me regarder. Ce ne fut qu’une fois que j’eus toute son attention que je déclarais le plus sérieux et le plus sincère du monde :

- Ton père ne te possède pas Gwen. Tu es libre de choisir ta vie. Quoi qu’il arrive, quelque soit le choix que tu fais je serais là pour t’aider et te protéger. Ajoutais-je alors que ce dernier mot sonnait étrangement à mes oreilles. Je te le promets !

Aussitôt Gwendal se mit à rougir. Le regard fuyant, il murmura un “merci”. Mais je ne lâchais pas pour autant la prise que j’avais sur lui. Comme envouté par son visage, je ne pouvais le quitter des yeux. Jamais je ne m’étais senti aussi protecteur envers quelqu’un. Jamais je n’aurais pensé m’investir autant dans une relation humaine. Sans trop savoir ce qui me prenait, je m’approchais lentement de lui, jusqu’à être à quelques millimètre de ses lèvres. J’avais encore en mémoire leur goût sucré et la timidité de notre échange. Ce fut à cet instant que Gwendal sembla reprendre ses esprits et se dégagea de mon emprise en détournant la tête, gêné.

- Pardon, soupirais-je. Je n’aurais pas du.

Gwen se tourna vers moi et me sourit timidement comme pour m’excuser. La seconde d’après, il se leva, comme pour cacher un trouble qu’il ne désirait pas me montrer.

- Où va-t-on ce soir ? A l’hôtel ? Me demanda-t-il plein d’espoir, changeant volontairement de sujet de discussion.

- Non, dis-je avec un sourire. J’ai une connaissance à quelques heures de marches d’ici. On devrait y être ce soir. Il nous hébergera contre quelques jours de travail pour lui.

- Ah… Répondit Gwendal, peu enchanté à cette idée.

- Et si ça devait arriver, ajoutais-je malicieux, je serais discret promis… Finis-je en riant.

Cela ne fit pas rire Gwendal. Il s’éloigna de moi sans un regard, et retourna prendre son sac. Après avoir rassemblé ses affaires, ce fut en silence que nous reprîmes la route.

Comme je l’avais prédit, nous arrivâmes en fin de journée dans une immense ferme. Thomas y vivait depuis tout petit. Il avait repris l’affaire familiale et vivait comme un vieux loup solitaire. Nous n’avions pas beaucoup en commun mais il était une personne agréable à vivre. Je n’y restais jamais plus de quelques jours. Traversant sa grande propriété, je pouvais voir que Gwendal était à la traîne, ne semblant pas avoir la moindre envie d’y aller. Ignorant sa démotivation, je poursuivis mon chemin et l’attendis à la porte de Thomas. Une fois qu’il fut à côté de moi, il poussa un soupir alors que je frappais à la porte. Celle-ci ne mit pas beaucoup de temps à s’ouvrir et un gros chien en bondit et pris comme cible Gwen qui se colla aussitôt à moi.

- Hayden ! S’exclama Thomas. Quelle bonne surprise ! Tu tombes à pic. Mes moutons se sont échappés et si tu pouvais me donner un coup de main, ça me simplifierait les choses.

Brusquement, il s’arrêta et remarqua la présence de Gwendal, toujours accroché à moi craignant le chien. Il le regarda un instant en se taisant les sourcils froncés.

- Tiens, c’est bien la première fois que tu viens accompagné. A qui ai-je l’honneur demanda-t-il en attrapant son chien par le collier.

- Je m’appelle Gwendal, dit-il en s’écartant de moi.

- Moi c’est Thomas, dit-il avec un sourire. Bon, on ne serra pas trop de trois, allons-y.

Puis, sans plus de manières, il sortit et nous partîmes à sa suite.

Après une longue course pour ramener tous les moutons dans leur enclos, Thomas nous proposa d’aller boire une limonade pendant qu’il nous préparerait quelque chose à manger. Transpirant et fatigués, nous acceptâmes avec plaisir. Assis sur sa terrasse, nous sirotâmes avec plaisir cette boisson. Thomas ne tarda pas à nous rejoindre. Il s’assit à côté de moi en tirant sa chaise.

- Combien de temps comptez-vous rester ? Me demanda Thomas en posant un regard étrange sur Gwen.

- Quelques jours, si ça ne te dérange pas.

- Bien sur que non ! Vous tombez à pique, j’ai une montage de chose à faire et un employé qui m’a fait faux bond.

- Marché conclut ! Répondis-je alors avec un sourire.

Le reste de la soirée se déroula tranquillement. Après une bonne douche, nous mangeâmes un repas copieux avant de finir avec le dessert dans le salon. Gwendal ne décrocha presque pas un mot, et lorsqu’il eut terminé de manger, il s’excuse et partit se coucher. Ce ne fut que lorsqu’il fut partit que Thomas vint s’asseoir sur le canapé, particulièrement près de moi.

- Tu m’as manqué, souffla-t-il, d’une voix rauque, laissant glisser sa main sur ma cuisse.

Malheureusement, je n’étais pas d’humeur ce soir et surtout bien trop fatigué. Et surtout, Gwendal m’inquiétait. J’aurais finalement préféré le suivre et discuter un peu avec lui. Même si je savais maintenant ce qui le rongeait depuis plusieurs jours, je savais que ses craintes n’avaient toujours pas disparues.

Repoussant gentiment sa main, je lui dis avec un sourire qui se voulait détendu :

- Pas ce soir Thomas, je suis fatigué.

- Et moi, j’ai envie de toi, insista-t-il en reposant sa main sur ma cuisse de manière plus franche et plus osée.

Le repoussant plus fermement, je répondis froidement :

- Pas ce soir !

Souriant, Thomas se redressa et me dit d’un air malsain :

- Voyons Hayden, tu ne souhaiterais pas que j’appelle les flics pour qu’il passe chercher ton petit copain.

Je restais interdit d’effroi. Que venait-il de dire ?

- Qu’est ce qui t’arrive ? Lui demandais-je, choqué.

- Tu m’as très bien compris, répliqua-t-il.

- Je ne te reconnais plus Thomas ! M’exclamais-je en le levant.

Nous ne pouvions rester une seconde de plus ici. Il fallait que nous partions. Alors que je réfléchissais à comment aller chercher Gwen, rassembler nos affaires et s’enfuir, Thomas se leva, me  faisant face et répliqua, son petit sourire pervers toujours accroché au visage :

- Je peux aller voir Gwendal si tu veux, il sera sans doute plus docile que toi…

Il ne m’en fallut pas plus. Mon poing partit tout seul. Mais Thomas fut plus rapide que moi et saisit mon poignet au vol. Face à sa poigne, je réalisais que je n’avais aucune chance contre lui. Il était bien plus musclé que moi et me dépassais d’une tête. Comment diable avais-je pu me mettre dans un tel guêpier.

- Laisse Gwendal en dehors de ça ! Criais-je en tentant de libérer ma main.

- Ce n’est pas moi qui ait changé, répliqua-t-il en me serrant d’avantage et en se collant à moi. C’est toi qui a changé Hayden… Depuis quand ouvrir tes cuisses est un problème, je ne te demande pas grand chose pourtant…

Profitant d’un court instant d’inattention de sa part, je parvins à me défaire de sa prise. Tentant de fuir, je fus brusquement arrêté par Thomas, se dressant devant moi avec un couteau. Ce fameux couteau offert par son père qu’il ne quittait jamais. Ce n’était qu’à cet instant que je réalisais combien Thomas était dangereux. Le regard qu’il posait sur moi me rendait malade.

- Tu pourrais rendre tout beaucoup plus simple, me dit-il. Je n’appelle pas les flics et on prend du bon temps… Ajouta-t-il menaçant.

Comprenant qu’il était capable de tout, je choisis la docilité, loin de moi l’envie de vivre une telle expérience sous la violence. Résigné, je m’agenouillais devant lui. Je n’avais pas le choix.

Si cet acte ne m’avait jamais répugné, ce fut la première fois de ma vie qu’offrir une fellation me noua les entrailles. Je ne pleurais pas, je n’arrivais pas à définir ce que je ressentais en particulier. J’aurais voulu être sourd pour ne pas entendre ses gémissements graves, j’aurais voulu l’espace d’un instant être privé de chacun de mes sens. Je faisais ce que je m’étais toujours refusé, je me vendais.

Je ne pris aucun plaisir à sentir ses mains me rapprocher plus près de son sexe lorsque la jouissance vint bien trop lentement. Un haut le coeur me saisit alors qu’il se libérait dans ma bouche en poussant un râle. Pourtant, lorsqu’il me demanda de me déshabiller et de m’installer sur le canapé, je sentis mon coeur se mettre à battre dangereusement vite, comme un sursaut de vitalité. C’était ma liberté qu’il était en train de bafouer, c’était la seule chose que je possédais qu’il était en train de me voler. Je me mis à penser très vite. Sans trop réalisé ce que j’étais en train de faire, je déboutonnais mon jean alors que j’avançais vers le canapé.

Là, posée sur la table, une statuette en pierre. Me ruant brusquement dessus, je me retournais vers Thomas. N’ayant rien vu venir, le pantalon toujours baissé à mi-cheville, il n’eut pas le temps de réagir alors que la statuette frappait lourdement son crâne. Il tomba aussitôt, inconscient à mes pieds. Je ne voulais pas perdre de temps, je n’en avais pas le luxe et pourtant, à peine eus-je fais trois pas, que je me retrouvais plié en deux par terre rendant le contenu de mon estomac.

Tentant de calmer les crampes qui me saisissait, ne me fis violence pour me relever. D’un pas hagard, je marchais jusqu’à la salle de bain, tentant d’effacer toute trace et tout souvenir de cet instant. Ayant retrouvé assez de forces, je me ruais dans la chambre où devait être Gwendal. Je le trouvais endormis, recroquevillé dans le lit. Sans perdre un instant, je le secouais peut être un peu trop brusquement.

- Gwen, réveille-toi, nous devons partir !

Gwen sursauta avant de se redresser.

- Qu’est ce qui se passe, demanda-t-il d’une voix ensommeillée.

- Il faut qu’on parte, maintenant.

- Pourquoi ? Quelle heure est-il ? Demanda-t-il.

- Ne pose pas de question, habille-toi, et dépêche-toi. Nous ne sommes plus en sécurité ici.

Face à mon air grave et empressé, Gwendal fronça les sourcils et finit par me prendre au sérieux. En un temps record, alors que je surveillais à la porte, il fut prêt. Attrapant nos deux sac, je l’entraînais dans une course folle jusqu’à l’extérieur de la ferme. Là encore, je continuais à courir, le tenant toujours fermement par la main.

Ce fut à peine si j’entendis Gwendal protester, le forçant toujours à continuer notre course. A bout de souffle, je finis par nous autoriser une marche rapide, sans pour autant lâcher Gwen. Brusquement, je quittais la route et m’enfonçais dans la forêt. Ce ne fut qu’après un temps indéterminé, que je consentis enfin à ce que nous nous arrêtions. Lâchant nos sacs qui tombèrent sur le sol, je me précipitais vers Gwendal et le serrait dans mes bras, comme pour m’assurer qu’il allait bien.

Il en avait fallut de peu pour que tout vire à la catastrophe. Et pourtant, j’avais commis l’irréparable. La phrase que Gwendal m’avait lancé des semaines plus tôt me revint en mémoire. Non, je ne valais pas mieux que ma mère. Je repoussais Gwendal, comme si son contact me brûlait. J’étais perdu. Ce fut à cet instant que Gwendal éclata :

- Non mais je peux savoir ce qui te prend ? Pourquoi est-ce que l’on s’enfuit comme des voleurs au milieu de la nuit ? Qu’est ce qui s’est passé ? S’exclama-t-il, criant presque. Tu m’as fait une peur bleue !!
M’adossant contre un arbre, je me laissais tomber, me retrouvant assis sur le sol. Mon coeur ne parvenait pas à se calmer. Je ne réalisais pas encore tout ce qui venait de se passer. Face à mon silence, je sentis poindre de l’inquiétude dans la voix de Gwendal qui s’agenouilla près de moi et me demanda :

- Qu’est ce qui s’est passé Hayden ?

Une boule vint nouer ma gorge, aucun son ne sortait, aucune larme ne venait.

-  Hayden… M’appela Gwendal en posant sa main sur mon bras. Qu’est ce qui s’est passé chez Thomas. Tu es pâle, est-ce que ça va ?

- Je l’ai tellement haïs Gwen… Lâchais-je alors que je sentais les larmes proches, mais je les ravalais presque aussitôt.

- Qui ? Me demanda-t-il de plus en plus perdu.

- Je lui en ai toujours voulu de m’avoir mis au monde… Continuais-je sans répondre directement à question.

Me prenant la tête entre les mains, j’ajoutais :

- J’ai l’impression de ne pas avoir ma place ici… Je ne suis qu’un accident indésiré avec l’un de ses clients… Et finalement, je lui ressemble… Je suis même pire…  Dis-je perdu dans un mélange de pensées diverses et décousues.

- De quoi est- ce que tu parles, finit par me demander Gwendal. Pourquoi est-ce que tu me dis tout ça ? Quel est le rapport avec le fait que l’on parte de chez Thomas au milieu de la nuit ?

Me refusant à lui avouer ce qui c’était passé, n’arrivant pas encore à mettre un mot dessus, je gémis, comme une plainte à peine audible :

- J’ai fait pire que ma mère, j’ai fait prire que de la prostitution…

Redressant la tête, je croisais le regard plus qu’inquiet de Gwendal. J’avais besoin d’être seul. Je devais me ressaisir. Echappant à sa main posée sur mon bras, je lui dis, la voix dénuée de toute émotion :

- Je vais marcher un peu, je te laisse t’installer ici… Je… Je reviens… J’ai besoin d’être seul.

Alors que je me détournais de lui, j’entamais ma marche, les jambes tremblantes. Avais-je seulement la force de faire un pas de plus… Je sentis alors une main se poser sur mon épaule, me forçant à me retourner. Ce ne fut qu’une fois que je lui fis face que Gwendal me demanda :

- Je te le demande une dernière fois Hayden, qu’est ce qui s’est passé chez Thomas, c’est quelque chose qu’il t’a dit sur ta mère ?

-  N’insiste pas Gwen, soufflais-je.

- J’ai le droit de savoir ! Déclara-t-il déterminé. Je veux t’aider…

- Je…  Commençais-je.

Je ne su jamais ce qui me fit céder, ce qui me fit me confier alors à lui. Peut-être était-ce face à la sincérité de son regard, à quelque chose qui s’en dégageait. Ou alors, était-ce du à la chaleur bienfaisante de sa main posée sur mon épaule que je ne vivais pas comme une agression.

- Thomas savait qui tu es Gwendal. Il a voulu te dénoncer. Dis-je avant de me taire à nouveau.

- Ce n’est pas ça qui te met dans cet état. Qu’est ce qui s’est passé ?

- Il a menacé de s’en prendre à toi et…

Ma voix s’arrêta un instant. Je ne pouvais pas le lui dire. Même si mon silence me trahissait, je finis par dire simplement :

- Je l’ai assommé, et nous nous sommes enfuis.

Gwen me fixa avec un regard peiné, comme s’il avait compris ce que je n’avais pu dire par des mots. Par égard pour moi, cependant, il n’insista plus. Sans que je ne comprenne son geste, il m’attira à lui avec douceur. La tête posée sur son épaule, je pouvais sentir sa main passer lentement dans mon dos. Face à tant de tendresse de sa part, ce fut trop pour moi. Je m’effondrais en larmes comme je m’étais refusé de le faire depuis mes 16 ans.

Thomas ne fut pas l’unique raison. Je repensais à Linda, à ce que j’étais devenu et ce que j’avais été. A aucun moment, Gwendal ne me repoussa. Au contraire, il raffermit son étreinte autour de moi et me consola sans un seul mot, comme s’il n’était pas possible d’en prononcer un seul. Je ne sus combien de temps je restais à pleurer silencieusement dans ses bras, là, au milieu de nulle part, dans une forêt, éclairé par les rayons de la pleine lune.

Pour la première fois depuis que nous voyagions ensemble, ce fut Gwendal qui prépara notre lit. Aucun mot ne fut échangé et ce fut réfugié au creux de ses bras que le sommeil finit par me délivrer.

Lorsque je me réveillais le lendemain matin, j’espérais que tout avait été un simple cauchemar. Pourtant l’étreinte de Gwendal me prouvait le contraire. Comme s’il avait sentit mon éveil, il me serra encore plus prêt de lui. Répondant à son étreinte, je le serais à mon tour dans mes bras. Sans lui, sans sa présence à mes côtés, j’aurais certainement perdu l’esprit cette nuit là.

- Je suis désolé, l’entendis-je alors, murmurer. Tout est de ma faute.

Ne pouvant le laisser penser cela, je m’écartais à contre-coeur de sa chaleur et le regardais droit dans les yeux :

- Jamais, tu m’entends ! Ne pense jamais que ce qui est arrivé hier était de ta faute.

- Bien sur que si rétorqua-t-il, les larmes aux yeux. Si je n’avais pas choisis de venir avec toi, jamais rien de tout cela ne serait arrivé. C’est moi qui t’ai mis dans cette situation. Je te mets en danger… Je pense qu’il vaut mieux que je rentre chez moi Hayden… Ajouta-t-il en détournant le regard.

Ne supportant pas ses larmes, je le serrais aussitôt contre moi, comme par peur qu’il ne m’échappe.

- Tu restes avec moi Gwendal, tu ne repartiras pas là-bas. Je t’en es fait la promesse.

- Ta promesse te coûte trop cher, répliqua Gwendal, sans pour autant tenter de s’échapper de mon étreinte. Tu en a déjà assez fait pour moi. Je ne peux pas t’en demander plus.

M’écartant de lui, je me redressais et le regardais droit dans les yeux, mon visage à quelques centimètres du sien.

- Ce qui est arrivé n’est pas de ta faute, mais uniquement de la mienne. Je ne me méfie pas assez des gens Gwen. Et puis c’est trop tard. Nous avons fait notre choix en connaissance de cause. On savait que nous serions en fuite et que ton père ne te laisserait pas en paix. Ce qui vient de se passé est un accident. Ne rend pas cet accident comme étant la cause de ton départ où alors, tout ce que nous avons fait jusqu’à maintenant n’aura servi à rien. Je veux que tu restes à mes côtés, que tu t’épanouisses. Que tu découvres tous les bons côtés de la vie que je mène. Je veux que tu découvres la liberté Gwen… Tu as encore tellement à découvrir… Et lorsque ce sera fait… A ce moment seulement, alors, tu pourras envisager à nouveau la question de rentrer chez toi.

- Mais je ne veux pas rentrer chez moi, gémit-il. Hayden, je me sens tellement coupable de…

Il n’eut pas le temps d’en dire davantage. Pour lui faire cesser de dire une imbécilité de plus, je recouvris ses lèvres d’un baiser.

Ses lèvres étaient d’une fraicheur que j’avais rarement connue. Délicatement, pour ne surtout pas le brusquer, je laissais glisser ma langue sur celles-ci, y goûtant avec délectation.  Une de mes mains passa derrière sa nuque pour l’approcher d’avantage, tandis que l’autre passait lentement dans son dos, sans jamais se faire insistante.

Timidement, Gwendal finit par entrouvrir les lèvres, m’autorisant à approfondir notre échange. Sans me précipiter, j’allais avec un désir non fin, rejoindre sa jumelle. Le contact de nos langues fut électrique. Un violent frisson irradia ma colonne vertébrale alors qu’il répondait timidement à l’échange dont j’étais au commande.

Jamais je n’avais connu un baiser aussi pur et innocent. Sa langue finit par caresser la mienne avec douceur. Je fis preuve d’une patience d’or, sans jamais chercher à le forcer. Son odeur m’enivrait, je ne désirais jamais plus, juste un baiser de sa part… Je sentis ses mains se serrer dans mon dos, comme s’il y prenait lui aussi du plaisir.

Nous nous séparâmes à contre coeur, lorsque l’air vint à manquer. Pantelant, le souffle court, l’image que me renvoya Gwen, les lèvres rougies par le baiser et les joues rouges avait tout d’une invitation à la luxure. Mais je n’allais pas plus loin. Passant lentement une main sur son visage, je remis une de ses mèches en place. Allongé côte à côtes, nous restâmes silencieux un moment… J’effaçais volontairement de ma mémoire, les souvenirs de la veille, les remplaçant par cet échange et la nuit passée dans ses bras.

D’un commun accord, nous décidâmes qu’il était temps de se lever. Après un petit déjeuner frugal partagé dans le silence, nous fîmes nos sacs et reprîmes la route. Nous allions définitivement quitter la région. Plus nous serrions loin et plus facilement nous trouverions la paix. J’envisageais même de prendre un bus ou un train pour nous éloigner plus vite.

Alors que nous marchions depuis une petite heure, Gwendal restant à ma hauteur, je l’entendis me dire d’une petite voix hésitante :

- Hayden…

- Hn ? Dis-je en tournant la tête vers lui.

- Même si je t’ai promis de ne plus te questionner sur ton passé… Je… Je voulais que tu saches que je suis toujours là pour t’écouter. Et… Si tu veux un jour me raconter, je ne te jugerais jamais.

Je ne pus m’empêcher de sourire, touché plus que je ne l’aurais cru. L’attirant brusquement à moi en passant mon bras autour de son cou, je répondis :

- Je suis content de t’avoir comme compagnon de voyage Gwen !

Puis dans un rire qui contrastait avec mes paroles, j’ajoutais :

- Si tu me connaissais vraiment Gwen, tu serais déjà en train de courir chez ton père.

- Je suis sur que tu n’es pas aussi horrible que tu penses l’être. Tu es quelqu’un de bien !

Je ne pus m’empêcher de lui sourire, plus touché que je ne l’aurais pensé par ses paroles. Le libérant de mon étreinte, je le laissais libre et nous reprîmes la route sur un ton plus léger. Je me rendis rapidement compte de l’état de fatigue dans lequel était Gwen. Il avait beau tenté de tenir mon rythme, ses pauses incessantes et ses cernes parlaient pour lui. Ne pouvant lui imposer ce rythme plus longtemps je lui proposais de s’arrêter dans un refuge abandonné pour passer les prochaines nuits et se reposer. L’idée de me couper un peu du monde après ce que nous avions vécu m’enchantait plus que je ne voulais le laisser paraître. Gwendal fut enchanté par l’idée et accéléra le pas.

Il faisait nuit lorsque nous arrivâmes au refuge. Comment je l’avais pensé, il était tellement isolé que tout le monde avait oublié jusqu’à son existence. Installé près d’une rivière en sous bois, nous serions tranquille ici.

Je proposais à Gwendal de faire un feu au vu de la fraîcheur de la nuit et de dormir dehors pour regarder les étoiles. Il accepta avec plaisir. Il installa le lit et je ne fis aucun commentaire en le voyant en préparer un seul pour nous accueillir tous les deux et non deux séparés. Pour ma part, j’allais ramasser assez de bois pour nous tenir chaud une partie de la nuit et préparais à manger après avoir allumé le feu. Après s’être rempli le ventre d’un bon repas chaud, nous nous installâmes tout près du feu le plus confortablement possible.

Si Gwendal avait préparé un lit unique, il ne vint cependant pas de lui même contre moi, gardant une distance respectable. Ce fut moi-même qui me surpris. A la recherche d’un contact, je passais mon bras autour de son corps frêle et l’attirais tout contre moi. Gwendal resta tendu mais ne me repoussa pas. Et lorsqu’il fut enfin détendu, il s’installa confortablement, la tête posée sur mon bras pour admirer la voûte céleste.

Après avoir repéré celles qu’ils connaissaient déjà, il me demanda de lui en apprendre une nouvelle, chose que je fis avec plaisir. Peu à peu, le silence vient s’installer entre nous. Me redressant, m’attirant un gémissement de mécontentement, j’alimentais le feu qui commençait à mourir avant de reprendre ma place près de lui.

- Gwen, finis-je par demander en brisant le silence.

- Hn ? Répondit-il faiblement.

- Qu’est ce que tu aimerais faire ?

- Comment ça ? Me demanda-t-il, sans cacher son incompréhension.

- C’est toujours moi qui choisi ou l’on va et ce qu’on fait, mais j’aimerais savoir ce que toi tu veux faire ou bien où tu veux aller.

- Je… J’aurais bien aimé aller en France, se risqua-t-il, hésitant.

Me tendant presque aussitôt, ma réaction ne passa pas inaperçue. Gwendal ajouta alors :

- Mais je sais que c’est loin d’être une destination rêvée pour toi alors, pourquoi pas l’Ecosse ?

- Va pour l’Ecosse, répondis-je soulagé, éludant le sujet que nous avions failli aborder.

Le silence revint à nouveau jusqu’à ce que Gwendal, à nouveau titillé par les questions à mon sujet, me demanda :

- Est ce que j’ai le droit de te poser une question ?  Une seule…

- Vas-y soupirais-je. Mais je ne te promets pas de te répondre.

- Tu n’as jamais cherché à savoir qui était ton père ?

Je ne pus m’empêcher de rire face à sa question, avant de répondre :

- Gwen, ma mère était une prostituée. Elle couchait avec des tas de mecs chaque soir alors partir à la recherche de mon père, c’est une mission impossible. Et puis, même si j’en avais la possibilité, je ne voudrais pas savoir.

- Pourquoi ? Répliqua-t-il aussitôt. Tu n’es pas curieux ? Ca ne te manque pas de ne pas avoir de père ?

- Je ne sais pas ce que c’est, alors comment ça pourrait me manquer. Gwen, je crois qu’il vaut mieux que tu considères que je n’ai pas eu de parents. Ma mère ne s’est jamais occupée de moi et la plupart du temps les rôles étaient inversés…

- Comment ça ? Demanda-t-il aussitôt.

- J’étais d’accord pour répondre à une question Gwen, pas dix. Pourquoi tu es aussi intéressé par le fait de connaître mon passé ? Dis-je en m’étonnant de la patience dont je faisais preuve avec lui.

Plus d’une personne s’était attiré mes foudres pour m’avoir demandé moins que ça. D’ailleurs, Gwendal semblait être la seule personne qui en savait autant sur moi.

- Chercher à se connaître, c’est ce que font les gens normaux, répliqua-t-il.

- Nous ne sommes pas normaux, dis-je en riant.

- Qu’est ce que tu sous-entends par là ? Demanda-t-il perdu.

- Un fils de prostituée et un garçon de noble famille qui parcourent les routes ensemble, Gwen, c’est pas vraiment commun. Lui expliquais-je.

Gwendal ne répondit pas tout de suite et alors que je pensais que c’était la fin de la discussion. Mais j’eus tort. La petite voix de mon compagnon résonna à nouveau :

- Je suis sur que ta mère était plus qu’une prostituée, tu as l’air de tout le temps la dénigrée. Elle n’a juste jamais su te montrer qu’elle t’aimait.

- Elle ne m’aimait pas Gwendal ! Une droguée n’aime personne… Juste la drogue.

Sentant ma gorge se nouer et de sombres souvenirs me revenir en tête, je me tendis sans pouvoir me contrôler alors que je rajoutais :

- Maintenant j’aimerais vraiment qu’on change de sujet, d’accord ?

- Désolé, murmura-t-il, gêné et il me sembla, presque peiné.

Sans que je ne comprenne pourquoi, étonné de sa réaction; Gwendal se tourna vers moi, et passa son bras fin sur mon torse avant de poser sa tête sur mon épaule. Touché par son geste, je l’entourais de mon bras, passant lentement ma main sur son dos.

- Bonne nuit, murmurais-je.

- Bonne nuit, Hayden, souffla-t-il.

S’il trouva le sommeil peu de temps après, ce ne fut pas mon cas. Je fus saisi de l’angoisse des rêves que je pouvais faire. Mal à l’aise, j’aurais voulu me lever et aller marcher seul dans la forêt, pour me changer les idées, mais la silhouette de Gwen accroché à la mienne m’en empêchait. Je restais une bonne partie de la nuit plongé dans mes souvenirs, le regard fixé sur le feu qui s’éteignait peu à peu. Puis, sans prévenir, le sommeil vint me faucher, m’emportant dans un monde étrange, sans le moindre songe.

Lorsque je me réveillais le lendemain, j’eus la surprise de ne pas retrouver Gwendal près de moi. C’était étrange, il était normalement celui qu’il fallait tirer du sommeil chaque matin. Cependant, m’avisant de la position du soleil je compris qu’il n’était pas loin de midi. Intrigué de ne pas le voir dans les parages, je rangeais les duvets et décidais d’allait me laver à la rivière. Attrapant des vêtements propres et mon nécessaire de toilette, je me dirigeais vers la rivière.

Quelle ne fut pas ma surprise de voir Gwendal de dos, complètement nu en train de se nettoyer. Ses vêtements ne le dissimulant plus, je pouvais voir à quel point il était fin, mais je n’aurais pas pensé que cela soit à ce point. Laissant mes yeux glisser sur sa peau blanche qui semblait si douce au toucher, je ne réalisais pas que je m’étais arrêté.

Hypnotisé je n’arrivais pas à décrocher mon regard. Si j’avais déjà éprouvé du désir pour lui, ce sentiment fut décuplé. J’avais envie de m’approcher de lui, d’embrasser délicatement sa nuque après avoir effleuré sa peau frêle encore et encore… Je ne sus ce qui l’avertit de ma présence. Surement mon regard insistant. Il était vrai que je le dévorais du regard. Se tournant, remarquant ma présence, il s’abaissa aussitôt, plongeant dans le peu d’eau glacé de la rivière qui ne cacha presque rien.

- Tu aurais pu me dire que tu étais là ! Pervers ! Cria-t-il. Dégage !

Amusé par sa réaction, je me déshabillais lentement, alors que Gwendal restait immobile et interdit. Une fois dévêtu, non sans un dernier regard vers lui, j’allais à mon tour dans la rivière. Puis, sans me préoccuper plus de lui, j’entrepris de me laver. L’eau était gelée, mais il n’y avait rien de mieux et de plus vivifiant.

Voyant qu’il n’avait pas bouger d’un poil, je me tournais vers lui et déclarais amusé :

- Tu sais Gwen, tu n’as vraiment rien à cacher… Tu ne devrais pas avoir honte de ton corps. Tu es beau.

Rougissant d’avantage, il se recroquevilla plus qu’il n’était possible dans l’eau, sans décrocher un mot.

- Et en plus, nous sommes fait pareil alors…

Puis sans plus de cérémonie, je continuais de me laver tandis que Gwen ne bougeait pas d’un pouce. Une fois les cheveux propres, je retournais à mes affaires et me séchais vigoureusement. Tournant brusquement la tête, je vis Gwen détourner aussitôt le regard comme pris en faute, devenant plus écarlate qu’il n’était possible.

- Et après tu dis que c’est moi le pervers, dis-je en riant. Tu devrais sortir de l’eau Gwendal. Tu vas attraper la mort à rester sans bouger, l’eau est glacée.

Niant mes paroles, Gwendal se recroquevilla encore plus sur lui même. Comment pouvait-on être aussi têtu. Une fois habillé, je lui dis :

- Je vais préparer le déjeuner, je t’attends pour manger.

Gwendal ne répondit rien et ne bougea pas jusqu’à ce que je sois parti. Arrivant près de nos sacs, j’étendais ma serviette et allais voir le refuge. Attrapant un vieux balai, j’entrepris de faire un brun de ménage. L’endroit était clairement abandonné et quelque peu délabré, mais je savais que ce n’était qu’une façade. Son constructeur était doué et avait rendu les murs résistants.

Après avoir tout débarrassé, je repoussais le nettoyage aux grandes eaux à plus tard et préparais le déjeuner, Gwendal ne tarderait pas.

Il arriva, la mine renfrognée, me lançant un regard noir. Il ne décrocha pas un mot durant tout le repas et partit avec le livre que je lui avais prêté pour aller lire dans un coin. Ignorant son mauvais caractère, j’allais prendre un vieux saut en bois que j’avais vu dans la cabane, et allais le remplir à la rivière. Une fois fait, j’entrepris de récurer la cabane.

La mettre en ordre me pris plus de temps que je ne l’aurais voulu et lorsque j’eus enfin terminé, l’heure du dîner était déjà entamée. J’allais vers Gwendal qui n’avait pas bougé d’un pouce. Plongé dans sa lecture, c’est à peine s’il leva la tête vers moi. Cependant, ne voyant pas les pages tourner, je compris qu’il m’ignorait simplement. Agacé, je lui demandais alors :

- Qu’est ce qui passe ? Pourquoi est ce que tu boudes Gwen…

Face à l’absence de réponse de sa part, je soupirais.

- Je vais préparer à manger…

Me dirigeant vers nos sacs, j’entrepris de ranger ce qui était possible dans la cabane. Autant s’installer confortablement. Je fus surpris de la différence de la cabane. J’avais fait du bon boulot, elle était tout simplement méconnaissable. Utilisant le bois ramassé la veille, je réussis à allumer le vieux poêle et bientôt de la fumée s’échappait de la cheminée en métal noir. Attrapant des assiettes propres, j’allais dehors à la recherche d’herbes comestibles. Avec les quelques légumes que nous possédions, je fis une petite soupe.

Avec le pain sec, je tentais de faire des croutons. J’agrémentais le tout de viande séchée et du peu de fromage qu’il nous restait, vidant le restant de pâte à cuire dans la soupe. Jamais je ne m’étais préparé un plat aussi consistant et élaboré lorsque j’étais tout seul, mais le physique de Gwendal me rappelait qu’il avait besoin de se nourrir. Je ne m’inquiétais pas plus que cela. Il avait juste besoin d’habituer son corps à un tel rythme de vie.

Une fois le repas près j’appelais Gwendal qui vint en traînant les pieds. Son regard changeant lorsqu’il vit la table mise et maugréât un rapide merci avant d’attaquer son repas avec appétit, sans décrocher un mot de plus.

- Que dirais-tu de rester ici quelques temps ?

- Pourquoi pas. Dit-il comme si décrochait ces deux mots lui demandait un effort considérable.

- J’irais faire quelques cours demain pour que l’on soit tranquille pour quelques temps. Nos provisions sont à sec. Tu resteras ici pour garder nos sacs et surtout te reposer. Ca te convient.

- Oui. Souffla-t-il.

Me redressant brusquement je craquais. Il avait réussit à me couper l’appétit.

- Qu’est ce que tu peux être pénible quand tu t’y mets Gwen.

Et sans plus de cérémonie, j’allais vers le foyer du feu et entrepris de l’allumer. La nuit était en train de tomber et la fraîcheur aussi. Sans m’adresser un seul mot, Gwendal ne tarda pas à me rejoindre, s’installant dans le lit que je venais de préparer. Il avait rangé le repas et mis la vaisselle à tremper dans le saut en bois. Fatigué par la journée, je décidais d’aller le rejoindre. Espérant qu’il abandonne enfin, je tentais de m’approcher de lui, et de le prendre dans mes bras. Gwen se tourna aussitôt de l’autre côté et m’ignora. Soupirant, je ne fis aucun commentaire, me promettant de crever l’abcès le lendemain, lorsque je reviendrais de la ville. Elle était à une bonne demi-journée de marche.

Le lendemain, je me réveillais à l’aube. Sortant silencieusement du lit, j’allais prendre une douche matinale. Avalant un rapide petit déjeuner, j’enfournais dans mon sac vide de quoi manger à midi. Attrapant un papier je laissais une petite note à Gwendal lui expliquant que je rentrerais tard ce soir. Je pris soin de la poser à côté de son petit déjeuner et pris le chemin de la ville.

Pour la première fois durant toute mon existence, je me sentis étrangement solitaire durant mon trajet. Je réalisais que j’étais en train de prendre gout à l’idée d’avoir un compagnon de voyage et l’idée me déplaisait malgré moi. Je ne voulais surtout pas être dépendant de quelqu’un où éprouver une attache pour qui que ce soit.

Et pourtant, Gwen ne quitta pas mes pensées de toute la journée. Est-ce qu’il allait bien ? Il m’était impossible de cacher mon inquiétude pour lui. Arrivé en ville plus tard que je ne l’aurais cru, j’achetais le nécessaire pour manger et pris le luxe d’acheter quelques vêtements de voyage plus confortables pour Gwen et de nouveaux pour moi. Ayant une mémoire visuelle, je ne pensais pas m’être trompé dans les tailles de vêtements. Je passais aussi chez un bouquiniste revendant mes livres pour en avoir de nouveaux. Une fois toutes mes courses finies je m’offris même le luxe de boire une bière au soleil dans un bar avant de prendre le chemin du retour.

Je n’arrivais que tard le soir, le soleil s’était déjà couché. Gwen était en train d’essayer pitoyablement d’allumer le feu et au vu de sa posture et de son énervement, je devinais qu’il était en train d’essayer depuis un moment. Posant mon sac, j’allais vers lui, décidé à lui apprendre quelque chose qui pourrait lui être utile.

- Est-ce que tu aurais besoin d’aide ? Lui demandais-je en m’approchant de lui.

Se tournant vers moi, il jeta rageusement son bâton dans le foyer du feu.

- Je n’y arriverais jamais ! Ca fait deux heures que je m’acharne sur ce maudit feu et je n’y arrive pas ! Et toi ! Cria-t-il. Qu’est-ce que tu faisais ! J’étais mort d’inquiétude de ne pas te voir revenir.

- Calme-toi Gwen… Ca a juste pris plus de temps que prévu… Tu sais bien que je ne t’aurais jamais abandonné, dis-je d’une voix posée.

- Mais il aurait pu t’arriver quelque chose. Peut-être que Thomas aurait pu te retrouver ou, je ne sais pas…

- Je vis seul depuis des années Gwendal et même si il y a des risques, il ne m’est jamais rien arrivé. Tentais-je de le rassurer.

- Menteur ! Quand on s’est rencontré, on venait de te poignarder…

- Et je suis toujours vivant Gwen… Je suis là…

Il n’en fallut pas plus à Gwendal pour s’effondrer brusquement en sanglots. Son petit corps fut secoué de spasmes et mon coeur se serra. Espérant qu’il ne me repousserait pas, je m’approchais lentement de lui et l’attirais dans mes bras.

 - Il ne m’arrivera rien Gwendal… Soufflais-je en passant mes bras autour de son corps.

Gwendal ne me repoussa pas et pleura encore plus fort avant d’ajouter entre deux sanglots.

- Tu ne peux pas dire ça… Tu ne sais pas…

Le serrant plus fort, je le consolais du mieux que je pouvais passant ma main dans son dos en une caresse réconfortante. Gwendal mit un temps fou avant de se calmer enfin. Cependant, il ne s’écarta pas lorsqu’il eut terminé de pleurer. Il resta là blotti tout contre moi. Ce fut son ventre qui gargouilla qui me fit le repousser gentiment avec un sourire :

- Et si je t’apprenais à allumer un feu et que l’on préparait à manger ?

Gwen acquiesça silencieusement. Patiemment, je lui appris à faire un feu et il s’avéra une fois de plus très bon élève. Cependant, il semblait toujours distant et rancunier. Alors que je sortais les provisions de mon sac et lui laissais choisir ce qu’il voulait manger, je finis par lui demander une fois de plus :

- Et si tu me disais maintenant, ce qui ne va pas ?

- Je voulais te punir, marmonna-t-il.

- Me punir ? Demandais-je, sans cacher ma surprise. Mais de quoi ?

- Parce que je t’en veux de t’être moqué de moi.

Je ne pus m’empêcher de dire en répondant :

- A cause de la rivière ?

Gwendal acquiesça et je ne pus m’empêcher de continuer à rire en repensant à ce moment là et à la tête qu’il faisait.

- Tu vois ! S’exclama-t-il. Tu le fais encore ! Tu te moques de moi. Ajouta-t-il boudeur.

Parvenant à arrêter mon fou rire, je le regardais alors avec tendresse avant de tenter de reprendre mon sérieux.

- Tu sais, Gwen, il faut que tu apprennes à avoir de l’humour sur toi-même et ne pas être susceptible comme ça. Je ne l’ai vraiment pas fait méchamment. Mais je m’excuse si ça t’a blessé… S’il te plait à l’avenir, dis-moi quand tu trouves que je vais trop loin. D’accord ?

Gwendal me sourit, enfin détendu, oubliant sa rancune. Nous finîmes de préparer à manger et je le laissais un instant pour aller me laver rapidement dans la rivière. Après cette journée de marche et la chaleur qu’il avait fait, je voulais me débarrasser de la crasse et de la sueur. Je fis pourtant très vite au vue de la fraicheur du soir et de l’eau glacée. Je reviens en courant jusqu’au feu, pour tenter de me réchauffer, m’asseyant tout près de celui-ci. Gwen me tendis mon assiette et nous mangeâmes en parlant de tout et de rien.

Lorsque nous en étions au dessert, je demandais à Gwen de me passer mon sac. Il s’exécuta et je me mis à fouiller dedans. Trouvant ce que je voulais, je tendis un sachet plastique à Gwendal. Il contenait un pull en laine qui lui tiendrait chaud lorsque l’été prendrait fin et que les nuits deviendrait de plus en plus fraiche, deux jeans, et quelques tee-shirts. Gwendal déballa le tout sous mon oeil attendri.

- Je… Merci Hayden… Mais il ne fallait pas, j’ai pleins de vêtements…

- Ceux-ci seront plus adaptés pour la vie que nous menons, dis-je avec un petit sourire.

- Merci, souffla-t-il à nouveau.

- Tu n’as pas à me dire merci, soufflais-je.

Nous entreprîmes ensuite de tout ranger et je ne rechignais pas à aller me coucher une fois que tout fut terminé. A ma plus grande surprise, j’eus à peine le temps de me mettre dans le duvet que Gwendal vint se coller à moi. Loin de le repousser, je le pris tout contre moi, soupirant de bien-être. Nous n’admirâmes pas les étoiles cette nuit là, fermant les yeux aussitôt, fatigués de notre journée. Ce fut blotti l’un contre l’autre que nous partîmes rejoindre le royaume des cieux.

A suivre… 

 

 

 

 

 

Cet article a été publié le Mardi 25 décembre 2012 à 19:27 et est classé dans Once in a life time. Vous pouvez suivre les commentaires sur cet article en vous abonnant au flux RSS 2.0 des commentaires. Vous pouvez faire un commentaire, ou un trackback depuis votre propre site.

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