17
oct

Mourir pour revivre - Chapitre 26

   Ecrit par : admin   in Mourir pour revivre

Chapitre 26 écrit par Lybertys

Lorsqu’il effleura les lèvres de Raphaël, le contact fut presque électrique. Daevlyn ne comptait pas faire plus, il avait bien trop peur de faire du mal à Raphaël. Et bien qu’il ne veuille pas se le révéler pleinement, il était encore sous le choc d’avoir rencontré Asiel, et il avait du mal à faire place nette dans ses sentiments.

Tout était tellement confus, qu’il ne souhaitait pas aller trop loin et heurter une fois de plus la sensibilité de l’adolescent. Il souffrait tout autant, voire plus, lorsque Raphaël allait mal.

Cependant, à peine eut-il posé ses lèvres sur celles de Raphaël que celui-ci réagit immédiatement. Il se jeta dans ses bras, nouant ses bras autour de sa nuque afin de se rapprocher de lui. Secoué et troublé par un tel comportement qui était loin d’être habituel chez Raphaël, il eut un court instant d’hésitation. Était-ce vraiment lui ? Ou était-ce encore un coup d’Asiel ? Mais la manière dont Raphaël l’embrassa, la manière si particulière qu’il avait de s’introduire dans sa bouche, de s’immiscer et d’effleurer sa langue, ne laissa aucune place au doute.

Il sentait Raphaël se coller contre lui, se coller toujours plus prêt semblant en vouloir toujours plus. Leurs langues s’entremêlèrent d’une toute autre manière. C’était complètement différent du tout premier baiser timide qu’il avaient échangés. La douceur était toujours fortement présente, mais une certaine ardeur, et une passion folle du corps de l’autre y était mêlés.

N’y tenant plus, et se laissant enfin aller, Daevlyn pose sa main sur sa peau nue, se glissant furtivement sous son t-shirt. Il avait envie de sentir cette peau se consumer sous la caresse de ses mains ; c’était comme si Raphaël était une fleur en train d’éclore sous la chaleur qu’il lui procurait. Ce simple baiser symbolisait parfaitement les efforts et les progrès accompli par Raphaël.

Jamais il ne l’avait sentit aussi entreprenant, et cela donnait une toute autre dimension pour le futur. Lorsqu’il sentit les mains de Raphaël commencer à s’aventurer à leur tour, et son baiser devenir de plus en plus brûlant de passion et de désir, il préféra s’écarter, étant subitement effrayé de ce qu’il aurait pu faire s’ils avait continué.

Pourtant une question lui effleura l’esprit : Raphaël n’était pas prêt, ou étais-ce lui qui ne l’était plus ? Mais il l’ignora aussitôt, et mit fin au baiser. Raphaël s’éloigna à contre cœur de l’adulte, lui offrant une vue imprenable sur sa beauté donnant presque envie à Daevlyn de recommencer.

Ses cheveux longs encadrant son visage fin, les joues roses et les lèvres gonflées par le baiser qu’ils venaient d’échanger, le souffle court, Raphaël renvoyait à l’adulte une image plus qu’érotique. Il ne put se retenir de frémir, et du faire un effort surhumain pour se maîtriser ; le bonheur et le cœur de Raphaël, en dépendait.

Celui-ci, troublé, détourna le regard et entreprit de soigner les blessures de son jeune protéger. La vue du bras de Raphaël le fit une nouvelle fois brusquement retomber sur terre, le ramenant à de sombres réflexions. Il ne voulait pas gâcher cet instant, mais certaines questions sans réponses devaient être posées pour leur bien être commun.

Une question en particulier, le tiraillait, et bien qu’ils venaient de vivre quelque chose de si particulier, il se décida tout de même à la poser, quitte à briser la magie de l’instant qu’il venait de vivre. Il n’avait pas le choix, il devait savoir, où cette question le hanterait éternellement.

- Raphaël… je peux te poser une question assez… indiscrète  Tu n’es pas obligé de répondre, mais j’aimerai savoir.

Il eut un pincement au cœur et un regret de se lancer maintenant, car Raphaël sembla totalement déstabilisé.

- Euh… je… d’accord…

Maintenant qu’il avait commencé, il ne pouvait que poursuivre. Pourtant, il avait maintenant presque peur d’apprendre la vérité, peur d’avoir enfin une réponse à cette question, peur de ce que cela ferait à Raphaël de lui révéler. Il souffla un grand coup avant de poser cette question. Il devait le faire, et pourtant à l’instant précis, tout son être le poussait à ne pas le faire.

- Voilà, je… j’aimerai que tu me racontes comment est apparut Asiel…

Raphaël sursauta violemment à cette demande, et Daevlyn se maudit intérieurement. Sa question venait d’avoir l’effet auquel il ne voulait pas être confronté. Mais en même temps, quelle autre réaction aurait-il pu avoir ? Daevlyn lui demandait quelque chose de bien trop personnel. Il lui demander de se mettre totalement à nu. Prit de court à sa question, l’adolescent se mit à bégayer, comme un enfant prit en faute.

- Je… euh… enfin c’est que…

Voyant qu’il s’embrouillait de plus en plus dans ses tentatives d’explication, et surtout apercevant les larmes emplir de nouveau les yeux de améthyste reflétant une profonde détresse, Daevlyn culpabilisa immédiatement. Que venait-il de lui demander ? Pourquoi lui avait-il posé cette question ?

Encore une fois, il lui faisait mal. Une fois de plus, il le mettait dans un  état dans lequel il aurait aimé ne jamais le revoir. Ne pouvait-il pas une fois seulement ne pas le blesser par ses actes et ses paroles ? Etait-il condamné à faire souffrir ceux qu’il aimait ? Comment faisait-il pour lui faire chaque fois un peu plus mal ?

C’est pourquoi il intervint et tenta de le rassurer tout autant que lui-même :

- Raphaël ! Je ne pensais pas que cette question te mettrais dans un état pareil, je suis désolé. Je ne t’en voudrais pas si tu ne réponds pas.

A l’entente de la réponse sanglotante de Raphaël, Daevlyn sentit son cœur se serrer.

- Non je… c’est juste que.. je… j’ai tellement honte Daevlyn. Je… je veux pas que tu me vois tel que je me vois… je…

- Comment est-ce que tu te vois ? demanda Daevlyn en attirant de nouveau l’adolescent à lui et en lui caressant tendrement les cheveux.

- Comme un monstre … je suis un monstre Daevlyn…

Cette révélation fut un véritable choc pour le moniteur. Un Monstre ? C’était ainsi qu’il se voyait ? Et il avait peur qu’il le voit ainsi. Il eut soudainement très peur de savoir un jour dans les moindres détails ce que Raphaël avait du vivre. Ce n’était pas lui le monstre, mais cet homme qui l’avait rendu ainsi.

Qu’avait-il de si horrible à lui révéler pour qu’il se décrive et se ressente ainsi ? Quoi de plus horrible que de penser cela de soi ?

C’est d’une voix profondément troublée que Daevlyn demanda :

- Pourquoi es-tu aussi dur avec toi-même ? Tu n’as rien d’un monstre Raphaël, bien au contraire. Tu es un jeune garçon tout ce qui a de plus adorable et je le pense sincèrement.

- Je… Je veux te dire… je veux plus mentir… c’est juste que… je… j’ai peur de comment tu vas réagir…

Daevlyn prit sur lui même, et décida de lui parler franchement, après tout il devait assumer ses erreurs et c’était lui qui, une fois de plus venait de déclencher tout cela.

- Qu’est ce que je t’ai dis tout à l’heure Raphaël ? On a tous un passé, aussi sombre soit-il. Tu ne pourras pas changer ce que tu as vécu mais tu peux faire en sorte d’exorciser les fantômes qui te hantent. Je ne suis pas un modèle de conduite, j’en ai pleinement conscience, mais ce que je t’ai révélé sur moi, personne d’autre que toi ne le sais. J’ai choisi de te faire confiance et j’ai eu raison. Maintenant à toi de voir si tu me fais suffisamment confiance ou non…

- Oui, je… j’ai confiance en toi Daevlyn… tu es la seule personne en qui j’ai confiance… seulement, je ne peux m’empêcher d’appréhender… c’est plus fort que moi… je… tu me promets de pas m’interrompre ?

- Tu as ma parole Raphaël.

L’adolescent inspira longuement avant de commencer son récit, confortablement installé dans les bras de Daevlyn, ses bras noués autour de sa taille, la tête calée contre sa clavicule. L’adulte souhaitait que celui-ci se sente en sécurité alors qu’il s’apprêtait à lui révéler une part sombre de lui-même. Raphaël commença alors son récit d’une voix mal assurée.

Malgré de nombreuses hésitations et quelques pause, il lui révéla tout. Plus il progressait dans son récit, plus Daevlyn se sentait mal. Il avait mal, tellement mal de ce qu’avait du subir Raphaël, et surtout mal de n’avoir pu être là pour lui. Cette impuissance face à la douleur de Raphaël l’anéantissait. Il se sentait se noyer face à tant de souffrance et de mal être. Comment avait-il pu supporter tout cela ? Comment parvenait-il à lui raconter tout cela ? N’était-ce pas là une preuve de l’amour qu’il lui portait ? Mais Daevlyn ne s’y sentait soudain plus à la hauteur. Méritait-il une telle confiance ?

Au fur et à mesure du récit, Daevlyn regrettait amèrement ce qu’il venait de lui demander. Il ne parvenait plus vraiment à avoir une pensée claire. Il ne savait plus vraiment ce qu’il avait fait, ce qui faisait et ce qu’il ferait. Totalement dévasté par cette révélation, il n’arrivait pas à réagir et restait silencieux. Savoir que la personne que l’on aimait avait autant souffert dépassait amplement la limite du supportable. Il ne parvenait même pas à pleurer, stupéfait par tant d’horreur.

Lorsque Raphaël eut fini sont récit, Daevlyn resta comme paralysé. La voix de Raphaël s’étranglait dans sa gorge nouée par la peur et l’humiliation. Lui aussi ne bougeait pas. Ils restaient tous deux parfaitement immobiles. Daevlyn savait qu’il devait le rassurer, il savait qu’il ne devait pas le laisser ainsi. Il avait parfaitement conscience de l’état de détresse dans lequel devait être Raphaël après ce qu’il venait de lui dire. Pourtant, il lui était impossible de faire quoi que ce soit. Il n’osait pas le toucher, par peur de lui faire encore plus mal. Il n’était pas dégoûté par Raphaël, il était horrifié par ce qu’il avait subit. Il s’horrifia lui même à penser qu’il aurait agit comme Asiel depuis bien longtemps et une fois de plus en le remerciant de l’avoir en quelque sorte sauvé. Comment après avoir vécu tout cela, pouvaient-ils avoir confiance en qui que ce soit ?

Daevlyn se sentait très mal, son cœur se serrait tellement qu’il avait l’impression qu’il allait cesser de battre et une boule dans sa gorge de larmes retenues l’empêchait de dire quoi que ce soit. C’est à peine s’il parvenait à respirer. Mais alors qu’il allait craquer, Raphaël se leva précipitamment, s’arrachant à l’étreinte de l’adulte et sauta hors du lit. Daevlyn réagit alors immédiatement, il ne le laisserait pas s’enfuir une fois de plus, il ne le laisserait pas dans un tel état. Il ne sut comment il réussi à se lever et à le retenir par la main avec beaucoup de délicatesse. Même par ce simple contact, il avait peur de le blesser outre mesure.

L’adolescent se retourna et lui lança un regard empli de détresse, de peur, de honte, mais aussi de supplications muettes. Il vit alors son moniteur ouvrir la bouche, mais aucun son n’en sortit. Il ne parvenait pas, il ne trouvait rien à dire. Il était totalement perdu, et ne savait plus quoi faire ni quoi dire. Puis, que dire dans une telle situation ? Daevlyn réitéra son action, tandis que l’appréhension de l’adolescent augmentait de secondes en secondes.

- Je…

La voix de Daevlyn s’étrangla dans sa gorge. Il craqua. Des larmes s’échappèrent de ses yeux verts, des larmes silencieuses. C’était dont tout ce qu’il pouvait faire, verser de simples larmes pour ce qu’avait subit Raphaël  Quel bien maigre réconfort il lui offrait. Etait-il vraiment digne de l’aimer ?

Encore une fois, il ne faisait que lui montrer sa faiblesse.

Jurant contre lui-même, il prit une inspiration et il déclara, malgré les sanglots qui ne le quittait pas :

- Je… Je suis désolée de t’avoir demandé ça, je… je t’ai fait replongé dans des souvenirs atroces… Pardonnes moi Raphaël… Je m’en veux tellement… Comment à t-on put te faire subir toutes ces horreurs ? J’aurais tellement aimé être là… à tes côté… j’aurais aimé te protéger… j’aurais voulu te sauver… je…

Raphaël trouvait ses paroles si ridicules… C’était avec cela qu’il était censé rassurer la personne qu’il aimait. Mais il n’avait trouvé que cela à lui dire, et avait parlé avec son cœur. Et cela sembla toucher profondément Raphaël.

Devant le trouble et l’hésitation de Daevlyn, Raphaël murmura :

- Prends moi dans tes bras… j’ai besoin de sentir ta chaleur…

Daevlyn ne se le fit pas dire deux  fois, il attira si violemment l’adolescent à lui, que Raphaël le percuta de plein fouet et ils tombèrent tous deux allongés sur le lit. Raphaël allongé de tout son long sur Daevlyn en une position plus que suggestive. Cependant, ni l’un ni l’autre ne réalisa vraiment leur position, Daevlyn serrait l’adolescent dans ses bras aussi fort qu’il le pouvait, tandis que Raphaël s’accrochait désespérément à la chemise de Daevlyn, comme il s’agripperait à une bouée de sauvetage.

Daevlyn ne voulait pas le perdre. La demande suppliante de Raphaël lui avait fait un bien fou. Il lui avait fait comprendre que Raphaël avait encore besoin de lui. Le prendre dans bras, en réalité c’est ce qu’il avait voulu faire dès le début.

Sanglotant dans le cou de son moniteur, Raphaël gémissait sans cesse les mêmes paroles, dans une litanie de supplications :

- Serre moi fort… Ne me lâche pas Daevlyn… ne me lâche pas… serre moi…

Oui, il le serrait fort, aussi fort qu’il pouvait. Jamais il ne le lâcherait, jamais il ne l’abandonnerait. L’avoir tout contre lui, lui faisait un bien fou. Sentir ce petit corps chaud tout contre lui, l’entourer de ses bras et se prouver qu’il pouvait le protéger de toute ses forces, lui offrir la protection qu’il demandait, il était capable de tout cela grâce à l’amour qu’il lui portait. Lui pourtant si fragile. En cet instant précis, ils avaient tous deux besoin de cela comme pour se  prouver qu’ils ne rêvaient pas, que tout ceci était bien réel…

Daevlyn lui dit alors :

- Je suis là Raphaël, je ne te lâcherais pas… je te tiens…  ne pars pas, reste avec moi Raphaël…

Après une longue étreinte d’une intensité déconcertante, Raphaël prit possession de la bouche de son moniteur. Encore une fois surprit par l’audace dont il faisait preuve, Daevlyn se laissa finalement faire.

Il voulait sentir sa langue se mêler si particulièrement avec la sienne, caresser ses lèvres si douces et délicates. Étant tous deux dans un état second, il frissonnèrent violemment lorsque leur langue se rencontrèrent. Ce baiser était encore une fois totalement différent. Raphaël allongé sur Daevlyn prenait les devants. Jamais il ne l’avait vu aussi audacieux. Cela ne faisait qu’augmenter l’excitation de l’adulte. Il passa alors sa main sur la nuque rasée de l’adolescent et la fit lentement glisser sur son dos, voulant toucher ce corps si parfait. Finissant sa course sur sa hanche, Daevlyn entendit l’adolescent gémir de plaisir. Daevlyn sourit intérieurement et se perdit un fois de plus dans ce baiser sentant chaleur ardente l’envahir, sensation dont seul Raphaël avait le don si particulier de lui faire ressentir. Cette fois, tout était différent, toute honte semblait avoir quitté Raphaël, il demandait de la tendresse, et en offrait, mais il la subissait plus. Mais lorsqu’il sentit Raphaël se tortiller et onduler inconsciemment du bassin à la recherche de la main de son moniteur sur sa peau nue, Daevlyn sentit que s’ils continuaient, il ne pourrait plus faire marche arrière. Il sentait une toute autre forme de désir monter en lui, un désir qu’il ne voulait pas encore assouvir. Il mit alors fin au baiser tendrement, afin que Raphaël n’apparente pas ce soudain recul à un rejet.

Raphaël sembla alors se rendre compte de la position indécente dans laquelle il se trouvait, car il se mit à rougir violemment et s’écarta précipitamment :

- Je… pardon…

Daevlyn lui adressa un petit sourire tendre mais était tout autant gêné. Sourire qui disparut rapidement lorsqu’il avisa le bras de Raphaël : il avait compétemment oublié de lui refaire son pansement. Il lui attrapa délicatement le bras et le désinfecta de nouveau avant de le bander proprement.

Une fois le bras de l’adolescent convenablement bander, ils allèrent rendre visite à Amaranth. Daevlyn eut cette idée afin de sortir un peu Raphaël qui était que trop heureux de lui rendre visite. Après un dîner, où Daevlyn encouragea Raphaël à manger, il le laissa aller prendre sa douche tout en allant prendre la sienne.

Lorsqu’il eut fini, il entendit la porte de Raphaël se refermer, signifiant qu’il allait se coucher. Daevlyn, alla directement dans sa chambre. Raphaël était déjà couché, et ne semblait pas vraiment comprendre la raison de la présence de l’adulte.

- J’ai l’interdiction formelle de te laisser seul…

Raphaël le regarda, un air de totale incompréhension plaqué sur le visage, puis soudain il sembla réaliser la signification des paroles de son moniteur car il se mit à rougir. Puis, sous le regard étonné, de l’adulte, il se décala contre le bord de son lit, l’invitant à prendre place à ses côtés.

Daevlyn était tout aussi gêné de ce qu’il devait faire. Alors qu’il s’allongé à ses côtés, il eut l’agréable surprise de sentir le corps chaud et délicat de l’adolescent venir se coller tout contre lui. A son tour, il passa un bras possessif autour de sa taille et l’attira à lui.

- Je t’aime Raphaël, murmura-t-il en l’embrassant tendrement sur le front.

Raphaël se redressa sur ses coudes et plongeant son regard améthystes dans les émeraudes de son vis-à-vis, il demanda d’une petite voix :

- Je sais pas… je sais pas ce qu’est l’amour… ce que c’est d’aimer… tu… tu veux bien m’apprendre ?

Daevlyn aurait put voir cela comme une demande enfantine, pourtant il trouva que celle-ci faisait preuve d’une maturité qu’il le surprit à avoir acquis. Il ne disait pas cela à la légère. Et Daevlyn le savait. Il lui sourit, tout en passant une main derrière sa tête et l’attira tout contre lui afin de déposer un doux baiser sur ses lèvres en guise de réponse.

Raphaël se lova contre Daevlyn, posant sa tête sur son bras, et Daevlyn le ramena sur lui caressant plusieurs fois tendrement sa joue. Tous deux épuisés de cette journée, sombrèrent dans un sommeil apaisé par la présence de l’autre.

Le réveil fut tout aussi tendre. Raphaël avait ouvert les yeux avant Daevlyn et semblait l’observer depuis un moment. Lorsque les paupières jusqu’alors closes de Daevlyn s’entrouvrirent, il vit le visage fin de Raphaël s’empourprer. Penché juste au dessus de lui, il allait s’écarter, mais Daevlyn le retint en lui passant un main derrière la nuque et en l’attirant tout contre lui, déposant délicatement ses lèvres sur les siennes. Après quoi Raphaël s’écarta de quelques centimètres encore un peu gêné de ce qu’il avait fait précédemment.

- Bonjour, déclara Daevlyn en souriant.

- Bonjour, répondit Raphaël toujours un peu honteux.

Après quoi, ils se préparèrent tous deux séparément. Daevlyn alla réveiller tout les adolescents et Raphaël alla nourrir le poulain, avant de se rendre côte à côte au réfectoire. Daevlyn eut mal pour Raphaël en voyant les regards que les autres enfants lui lançaient. Mais de cela, il ne pouvait le protéger. Il pouvait juste l’accompagner.

Se souvenant de ce qu’il devait faire aujourd’hui sa bonne humeur retomba immédiatement. Cependant, il ne pouvait revenir en arrière.

- Raphaël, je dois me rendre quelque part aujourd’hui. Si tu souhaites rester ici à te reposer, je demanderais à Sébastien de veiller sur toi.

Il vit alors le regard de l’adolescent changer immédiatement. Il semblait terrifié à cette idée.

Mais Daevlyn, se sentit obligé de préciser le lieu où il allait se rendre.

- Raphaël, je vais quand même te dire où je dois aller. Je vais au cimetière, voir mon frère. Tu veux toujours venir  même en sachant cela ?

L’adolescent sembla prendre un temps de réflexion avant de répondre. Daevlyn aurait-il du lui mentir, et lui cacher ce qu’il allait faire ? Il prit réellement conscience de ce qu’il venait de lui demander. Lui qui craignait qu’il l’aime pour le frère qu’il voyait en lui, il lui demandait s’il voulait l’accompagner pour voir son ancien amant.

Il tenta vainement de se rattraper :

- Je pense qu’il vaut mieux que tu restes là. Je suis désolé de t’avoir proposé cela, c’était égoïste de ma part.

Il baissa les yeux, ne voulant pas voir le regard blessé de Raphaël, une fois de plus par sa faute. Mais il entendit alors une petite voix lui dire :

- Non, je veux venir avec toi.

Daevlyn redressa la tête et se replongea dans les yeux améthystes de l’adolescent, celui-ci tentait d’afficher un sourire qui sonnait faux.

- Je ne veux pas que tu te forces.

- Je viens avec toi, insista-il avec plus de conviction.

Surprit une fois de plus par la prise d’assurance de l’adolescent, Daevlyn ne put que lui répondre :

- Merci.

Cette fois-ci, un tout autre sourire s’afficha sur son visage angélique. Daevlyn ne voulait pas se l’avouer, mais il avait cette fois-ci besoin de quelqu’un pour y aller. S’y rendre seul aurait était insoutenable, et le fait que ce soit Raphaël qui l’accompagne le réconfortait et le rassurait. Après tout ce qui venait de se passer, il avait maintenant peur de s’y rendre.

Lorsque le petit déjeuner fut terminé, voyant Raphaël attendre ses instructions, Daevlyn lui dit :

- Je vais voir avec Sébastien, pour lui dire que je t’emmène avec moi. Tu peux aller voir Amaranth et on se rejoint à l’entrée de l’établissement.

Daevlyn se rendit directement à la table de Sébastien, qui finissait son repas.

- Sébastien, je voudrais aller lui rendre visite aujourd’hui. Pour ne pas gêner, j’emmène Raphaël avec moi.

- Bonjour peut-être

-  Oui, désolé. Bonjour, ça va ?

- On ne peut mieux. Dis moi, tu ne veux pas qu’il reste là, je garderais un œil sur lui.

- N’est-ce pas toi qui m’a dit, que je devais le surveiller 24h/24h…

- Bon ok, mais fait attention.

- Merci, ne t’inquiète pas.

Alors qu’il s’apprêtait à partir, Sébastien le rappela :

- Daevlyn !

-  Oui ?

- N’oublies pas, si tu as besoin de parler, si tu as besoin de moi, je suis là. Je sais que tout cela est difficile pour toi. Si tu as besoin de repos, ou de te confier…

- Merci…

Daevlyn n’ajouta rien, et s’en alla, après avoir lancé un dernier sourire emplie de mélancolie à Sébastien.

Après un rapide tour dans sa chambre pour prendre ses papiers de voitures et ses clefs, il se rendit directement à l’entrée de l’établissement où Raphaël l’attendait déjà.

Ce fut dans un silence gêné que tout le trajet se fit. Plus ils s’approchaient du cimetière et plus les mains de Daevlyn se crispaient sur le volant.  Cela faisait un an qu’il n’y avait pas mis et les pieds, et comme chaque année, il redoutait un peu plus cet instant. Voir son nom gravé sur la tombe, voir sa date de naissance et de mort, et cette photo montrant éternellement le même visage qui ne vieillissait jamais.

Ils se garèrent sur le parking du cimetière et Daevlyn se décida enfin à prononcer quelques mots :

- Je… Est ce que tu veux bien m’attendre là, j’ai besoin d’être seul pour…

- Je comprends. Je t’attends là. Je te promets, je serais là à ton retour.

Daevlyn lui lança un sourire mi triste, mi angoissé. Il aurait aimé qu’il vienne avec lui jusqu’au bout, mais la vérité était qu’il ne voulait pas qu’il le voit dans l’état de faiblesse dans lequel il serait devant la tombe de son frère jumeau.

Il ne voulait pas lui infliger cette vision. Il avait bien trop peur de ce que Raphaël penserait de lui à cet instant.

A contrecœur, il sortit de la voiture, et se rendit machinalement à l’endroit désiré. Alors qu’il passait les différentes allées, posant distraitement ses yeux sur les différents noms d’hommes et de femmes n’étant plus de ce monde, il se heurta au détour d’une allée à un homme et une femme en pleurs. Il releva immédiatement les yeux, et crut défaillir en voyant ceux qu’il n’avait pas vu depuis des années : ses parents.

Lui qui avait réussit à éviter pendant toutes ses années leurs regards accusateurs. L’accusé, oui mais de quoi ?

D’avoir poussé son frère au suicide et de n’avoir pu le sauver. D’avoir le même visage que lui et de leur renvoyer cette même image de leur fils disparut. C’était comme s’ils regrettaient qu’il ne soit pas mort avec lui, ou encore pire, à sa place.

Son cœur se mit à battre si fort qu’il avait l’impression qu’il allait exploser. Lui qui, depuis ce jour, avait toujours attendu un geste tendre de leur part, un geste de réconfort d’avoir perdu son frère. Il s’attendait en croisant leurs yeux, à recevoir toujours ce même regard pleins de haine, de rancœur, mais cette fois-ci, tout était différent. Les années avaient passées, et il ne reçut qu’un regard froid plein d’inférence qui lui glaça le sang. Il serra ses poings qui commençaient à trembler sous la peine que cela lui infligeait. L’indifférence était pire que tout. Oh comme il aurait aimé revoir cette haine, se sentir vivre encore de quelque manière que ce soit dans leur cœur. Non… Ce n’était que de l’indifférence. Ils étaient donc allé, jusqu’à nier son existence.

Au lieu de dire quoi que ce soit, poursuivant sans le voir, ses parents le contournèrent et continuèrent leur chemin, laissant Daevlyn dans une solitude maintenant insoutenable. Tout cela était même pire que l’abandon. Son passé lui revenait telle une vague, inondant et noyant son cœur d’amertume et d’isolement. Il mit énormément de temps avant de reprendre son chemin jusqu’à la tombe de son jumeau, ayant presque oublié la raison de sa venu ici.

Arrivé devant celle-ci, il se laissa tomber à genoux. Pour la première fois depuis qu’il venait ici, il ne versa aucunes larmes… Il en été incapable. Pas parce qu’il n’était pas triste, mais ce qu’il venait de vivre à l’instant, lui provoquait une souffrance telle, qu’il avait l’impression de ne plus rien ressentir. Il passa lentement sa main sur les lettres gravées. Longtemps il resta ainsi, ne sachant plus vraiment à quoi il pensait, ni ce qu’il faisait, ni où il était, ni pourquoi. Il était totalement dévasté. La moindre étincelle d’envie de poursuivre sa route, de se relever, de se redresser venait d’être soufflée. Il n’avait plus la force de se relever… Plus la force de vivre. A quoi bon ? Pour qui ? C’est en se posant cette dernière question qu’une image lui vient immédiatement à l’esprit : Raphaël.

Comment avait-il pu l’oublier ? Mais n’était-ce pas dangereux, d’avoir pour unique raison de vivre celui que l’on aime ? N’est ce pas se mettre dans une situation précaire ? Mettre sa vie entre les mains de l’autre et dépendre totalement de lui ? N’était-ce pas un bien trop lourd fardeau qu’il lui imposait ? Mais avait-il le choix ? Oui, il l’avait.

S’il continuait à vivre piégé dans son passé, jamais il ne pourrait aller de l’avant.

Ses yeux se posèrent sur sa main toujours sur la tombe de son frère. Il regarda un dernière fois son visage. Depuis trop longtemps, il vivait prisonnier de son passé, depuis trop longtemps, il n’avait pas levé la tête, ne s’était battu pour continuer à vivre.

Ses parents, cette tombe, il n’avait plus rien à y mettre son espoir. Son espoir, sa vie, appartenait maintenant au futur et non au passé. Pourquoi ressasser quelque chose qui ne dépend dès lors plus de nous. Jamais son frère ne reviendra à la vie, et jamais plus, ses parents ne le regarderaient avec l’amour parental. Raphaël avait besoin de lui, tout comme il avait besoin de lui. Raphaël appartenait à son présent et à son futur et c’est vers là qu’il devait se tourner. Cela ne se ferrait pas à l’instant, il lui faudrait un minimum de temps, mais il venait déjà de faire une bonne partie du chemin.

Pour la première fois de sa vie, il se releva et partit sans un dernier regard, s’éloignant de son passé. Maintenant son frère continuerait à vivre dans son cœur. Il n’avait plus besoin de tout cela. Il devait vivre.

Arrivant au parking, il vit que Raphaël n’avait pas bougé. Il n’était pas sortit de la voiture et l’attendait toujours à la même place. Il contourna la voiture et entra directement après avoir prit une bonne bouffée d’air, et s’assis à la place du conducteur. Il tourna directement sa tête vers l’adolescent qui lui lança un regard interrogatif et inquiet. Daevlyn, possédé par une toute nouvelle force, illuminant son visage d’un sourire, attrapa son t-shirt, l’attirant tout contre lui, et prit immédiatement possession de ses lèvres et de sa bouche. Raphaël y répondit immédiatement se laissant envahir par le nouveau Daevlyn, plus fort et étrangement différent. L’adulte passa sa main dernière le cou de Raphaël, l’attirant tout contre lui, toujours plus prêt. Raphaël était plus que nécessaire dans sa vie. Sans lui, jamais il n’en serait arrivé là, jamais il n’aurait pu se relever et s’accrocher au bord du gouffre pour s’y hisser. Aucun des deux ne vit un homme et une femme ressemblant sensiblement à Daevlyn, passer devant leur voiture avec une expression de haine et de dégoût. Non, tous deux était déjà dans un autre monde, un monde que eux seul pouvait atteindre : leur monde à eux.

Cet article a été publié le Mercredi 17 octobre 2012 à 18:48 et est classé dans Mourir pour revivre. Vous pouvez suivre les commentaires sur cet article en vous abonnant au flux RSS 2.0 des commentaires. Vous pouvez faire un commentaire, ou un trackback depuis votre propre site.

Laisser une réponse

Vous devez être identifié pour écrire un commentaire.